« Nous sommes en guerre », a déclaré Emmanuel Macron, le 16 mars 2020, avant d’égrener les premières mesures qu’il comptait faire adopter pour lutter contre la pandémie Covid-19. Il enfourchait ainsi le cheval de son prédécesseur qui, le 16 novembre 2015, après des attentats sanglants, dont celui du Bataclan, affirmait « La France est en guerre ».
Quel rapport me direz-vous entre des terroristes et un virus ? Aucun, si ce n’est la peur qu’ils nous inspirent.
C’est le propre des faibles de régenter par la peur. Et cela à tous les niveaux. Ce besoin d’emprise sur l’autre, chacun d’entre nous l’a ressenti au quotidien, lorsqu’il a fallu demander l’autorisation pour sortir de chez soi. M’sieur, M’sieur, j’peux sortir ? Et les abus dans les contrôles ont été un marqueur quotidien de ces deux mois de résidence forcée : trop de boîtes de Coca-Cola dans le caddy, paf ! Une seule baguette, repaf ! Dépassement de quelques minutes ou de quelques dizaines de mètres et rerepaf ! Etc. Ou encore ce préfet, en Seine-et-Marne, qui réquisitionne les chasseurs (donc des civils en arme) pour contrôler les habitants de son département. Ou le maire de Perpignan qui chaque soir déclenche la sirène d’alarme comme au temps des bombardements. Tout cela n’a qu’un seul but, plus ou moins conscient : créer l’angoisse qui conduit à la soumission – donc à l’obéissance. On n’est pas très éloigné du syndrome de Stockholm.
Il faut bien le dire, la politique de la peur a marché au nom de la lutte antiterroriste. Devant l’avalanche de lois liberticides, dans la crainte d’un nouvel attentat, nous avons baissé la tête. À force d’entendre, comme une pub, que la sécurité est la première des libertés, cette crainte soigneusement instrumentalisée nous a fait admettre que nous pouvions abandonner une partie de ces libertés individuelles, chèrement payées par nos anciens.
Nous avons mis le doigt dans un engrenage, en comprenant un peu tard que nous nous sommes fait gruger : ces mesures, ces lois, ces montagnes de fric investies dans la sécurité, font tourner la boutique, mais elles ne nous protègent pas. Continue reading
8 réponses à “La peur de l’autre”
Ça fait du bien de lire ce billet.
Régenter par la peur c’est une façon d’obtenir que la demande de restriction de liberté émane de la majorité de la population, c’est bien plus malin que de l’imposer. Au passage, on en profite pour ajouter subrepticement des privations de liberté qui dépassent le domaine de l’épouvantail agité sous notre nez.
Le Monde vient de sortir la tribune d’une économiste sur la « La crainte d’une transmission du virus via l’argent liquide » qui serait largement partagée à travers le monde».
Ça fait maintenant plusieurs années que des articles répandent l’idée que l’utilisation de pièces et billets n’a que des inconvénients. Peu pratiques, font perdre du temps, permettent les tricheries ; sans jamais aborder la question de la privation de liberté qui résulterait de la disparition du liquide.
Pas mal de gens oublient qu’il n’y a pas de liberté sans risques.
Pauvre de nous.
« La civilisation est une lutte contre la peur »: voilà une fort belle citation. A titre personnel je n’ai pas eu à me plaindre de contrôle intempestif, et ai plutôt vécu ces quasi deux mois comme une pause (une respiration).
Au plaisir sans cesse renouvelé de vous lire!
Félicitations, vous avez pu respirer… et manger, lire, claveter, acheter par correpondance -ou même, découvrir que Springer a mis en ligne 500 livres gratuits cf https : // www . statsandr.com / blog / a-package-to-download-free-springer-books-during-covid-19-quarantine/.)
Vous avez été épargné -ce n’st pas le cas des cités doroirs où vit la racaille- par le zèle des garde barrières républicains, qui n’hesitaient pas à verbaliser le personnel soignant allant travailler, souvent pour un salaire -et une retraite- bien inférieur à celui des vrais héros, les policiers.
Vous êtes prêt à acheter au prix fort, tres fort, des masques,qualifiés il y a un mois d’inutiles par le « ministre » de la Santé, mais devenus obligatoires dans les transports en commun
(mais où va l’argent de cette vente forcée?).
En passant, je ne peux que m’étonner de l’absence d’hommage (on ne paye pas, autrement qu’en belles paroles, les personnels -soignants, livreurs ou caissières- qui ont permis aux confinés de manger et de se maintenir en assez bonne santé… A la différence des heroîques gardes barrriére republicains, ce sont des gens de peu, au sens de notre humoriste Jupyter).
A ce propos, il serait de mauvais goût de rappeler le triste sort de Monsieur Chouviat, mort étouffé (les autopsies l’ont confirmé; la police avait lancé le bruit qu’il était mort d’un arret cardiaque, mais le coeur est assez loin du larynx… même si avoir 3 policers republicains pesant sur le cou pour punir le fait de photographier ces heros peut aider à arrêtre un coeur par asphyxie) le 2 janver 2020, rue de Suffren -Paris-
La difference entre le cas de Floyd est assez flagrante:
à Minneapolis, les etrangleurs ont été licenciés dans la journée. Celui qui a étranglé à mort Floyd a été inculpé dans la foulée, et son nom, D. Chauvin, est connu (les autres on été inculpés tardivement de complicité).
Les heroiques policiers republicains bien de chez nous ont gardé leur emploi; modestes, ils restent anonymes …. Une instance corporatiste d’autoblanchiement -l’IGPN, je crois- a pris son temps pour ne pas decouvrir de chef d’inculpation, les laissant disponibles pour veiller à leur façon au respect des gestes barrières.
Quel contraste avec le police_structurellement_raciste et prompte à la bavure de Minneapolis ….
A vous lire, fort de votre expérience et de votre capacité à garder votre calme, on se sent moins seul dans nos réflexions qui, par des chemin différents aboutissent à des conclusions proches.
Merci Monsieur
Quelles sont les « lois liberticides » dont vous parlez ? Quelle est la représentativité des piteux exemples de contraventions dans le contexte du confinement ?
Lorsqu’on met en avant une brillante carrière de policier, ce n’est pas malvenu d’argumenter avec rigueur. A moins qu’il s’agit de nous annoncer que vous militez désormais à la LFI
En tant que citoyen (et pas âne), il n’est pas malvenu de se tenir un peu au courant des lois qui sont votées dans son pays.
C’est même un DEVOIR.
Bien dit Charles. Je ne vous connais pas, mais bien dit. L’autre postman est sans doute un gars à qui l’on a toujours tout mâché. Faut chercher un peu
Merci à l’homme du billet de toujours éveiller nos conscience sur la nécessité de liberté pour pouvoir penser.
L’incorporation des dispositions de l’état d’urgence au corpus législatif du quotidien ? Et ce n’est qu’un exemple de l’accumulation des dispositions légales « sécuritaires » depuis 1995. L’auteur du blog les a déjà longuement présentées, il suffit de le lire plutôt que ce commentaire plein de morgue et de préjugés.