LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Actualité (Page 62 of 71)

Le clown devant les juges

Le 31 octobre, la justice doit trancher dans une affaire délicate, mais cette fois pas de morts, pas de violences : c’est du cinéma… En effet, il appartient aux magistrats de la 3e chambre du TGI de Paris de nous dire si demain nous pourrons revoir Yoyo, Le Soupirant…, ces films des années 60 signés Pierre Étaix.

affiche-le-soupirant-1962.jpgQui est Pierre Étaix ? se demandent peut-être les plus jeunes. C’est le clown blanc de L’école du cirque, qu’il créa avec son épouse, Annie Fratellini. Mais c’est aussi un cinéaste, un scénariste, un dessinateur, un magicien… en un mot, un artiste. Un vrai.

Tellement artiste qu’à la différence de tant d’autres qui se contentent de faire du business, lui, il a conservé sa pureté, on pourrait dire sa naïveté. Et un beau jour, il a signé un bout de papier qui lui a fait perdre tous ses droits sur ses films.

Ses films, ce sont des chefs-d’œuvre du cinéma français… Cinq longs-métrages en tout, dont quatre écrits en collaboration avec son complice, Jean-Claude Carrière.

Comment ces deux hommes ont-ils pu commettre pareille boulette ? De la façon la plus simple. La pellicule a souffert des ans, et, pour assurer de nouvelles diffusions, une restauration s’avère indispensable. Mais pour cela, il faut de l’argent. Les artistes sont rarement fortunés. Alors, ils font confiance à un « chevalier blanc ». Mais à l’usage, celui-ci n’est pas aussi blanc qu’il n’y paraît, et malgré les promesses, l’argent n’arrive pas. Et le temps passe. Un an, deux, trois… Alors Étaix et Carrière trouvent un mécène, la fondation Groupama Gan pour le cinéma.

Ouais mais voilà ! Ils n’avaient pas lu les petites lignes du contrat, les annie-fratellini-et-pierre-etaix-_cl-prest-explorer.jpgdeux artistes. Et illico, ce fameux chevalier blanc les traîne devant les juges, ils sont condamnés.

Trop tard pour Yoyo. Le film a eu le temps d’être restauré et il est projeté en ouverture du festival de Cannes, en 2007, et à la cinémathèque de Paris. Un triomphe !

L’affaire ne s’arrête pas là. C’est très compliqué, nous explique Laurent Delpit sur son blog (que je vous invite à consulter en cliquant ici) : La société Gavroche productions (le faux chevalier blanc) qui s’estime être seule propriétaire des droits sur lesdits films, poursuit Pierre Étaix, Jean-Claude Carrière et la fondation Groupama Gan. Elle affirme en effet que le fait d’avoir restauré et présenté Yoyo à Cannes et à Paris, nuit à la redistribution du film, ainsi qu’aux quatre autres : Le Soupirant, Tant qu’on a la santé, Le Grand Amour et Pays de Cocagne. Elle demande 1.400.000 euros de dommages et intérêts. Raison pour laquelle, vendredi prochain, nos deux scénaristes vont se retrouver devant les juges, où ils seront d’ailleurs assistés par la SACD (société des auteurs et compositeurs dramatiques).

logo-films-etaix.jpgOn n’a pas entendu beaucoup d’artistes français soutenir Pierre Étaix, mais Jerry Lewis, malgré sa maladie, lui a manifesté son appui et son amitié. Il a eu cette jolie formule : « Deux fois dans ma vie, j’ai compris ce qu’était le génie : La première fois en regardant la définition dans le dictionnaire et la seconde fois en rencontrant Pierre Étaix. »

Mais tous deux sont des clowns, comment les prendre au sérieux ?

En tout cas, de ce combat juridique va déboucher une décision qui nous concerne : A-t-on une chance de revoir, sur le grand ou le petit écran, ces petits bijoux du cinéma français ?

Espérons que les magistrats sont cinéphiles…

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Une pétition circule sur Internet (cliquez ici). On dit qu’elle a réuni déjà plus de 20.000 signatures.

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P.S. Conformément à la déontologie de ce blog (voir dans « A propos »), j’ai supprimé le message que m’avait adressé Laurent Delpit.

Marre de Mesrine !

L’autre jour, en attendant le RER, dans ma petite gare de banlieue, des gosses discutaillaient sur Mesrine. La conversation roulait autour du film « L’instinct de mort ». Et j’ai tendu l’oreille, curieux de savoir comment des enfants pouvaient percevoir ce personnage.

la-gare_jacquesmullerbe.jpgJe dois avouer (j’ai honte) qu’ils utilisaient parfois des mots que je ne comprenais pas. Je suis donc resté sur ma faim.

Hier matin, en buvant mon café, j’écoutais les infos sur France-inter. Et paf ! On nous ressort un petit coup de Mesrinou. Cette fois ce n’est ni Broussard ni Aimé-Blanc qui parlent, c’est Michel Ardouin, alias « Le porte-avions », à l’époque fiché au grand banditisme.

Je résume de mémoire :

« Ouais, j’ai connu le Grand-Jacques. On a dû faire plus de 70 braquages ensemble… Mais c’était pas un vrai truand. Y faisait pas partie du milieu. Nous, on avait un code d’honneur…

« Il a jamais tué personne… »

Dans le RER, je feuillette le journal (ce qui n’est pas facile) : une pleine page sur Mesrine avec des photos du vrai et du faux. Mais qui est qui ?

Le soir, même radio même sujet, mais cette fois les auditeurs peuvent intervenir. L’un demande : « Combien de gens Mesrine a-t-il tué ? »  Réponse : « Il n’a tué personne. »

Et voilà comment on écrit la petite histoire. À force de nous parler du bonhomme, les médias finissent par l’ennoblir. On en fait ce qu’on voudrait qu’il soit. Bientôt ça sera Mesrine le voleur de grand chemin, qui n’a jamais fait de mal à une mouche et qui a pris aux riches pour distribuer aux pauvres.

Soyons sérieux. Même s’il n’a jamais commis la trentaine de meurtres dont il parle dans son livre, Mesrine a tué une vieille dame au Canada, (ce crime, il ne l’a jamais revendiqué) ; avec son complice Jean-Paul Mercier, il a abattu deux gardes-forestiers lors de sa cavale tillier_lemonde2.1224731588.jpgdans ce même pays ; il a grièvement blessé un gardien de la paix en banlieue parisienne ; et il a laissé pour mort Tillier, le journaliste de Minute…

Et j’en oublie sans doute.

On a vu défiler dans les médias tous les flics de PJ et tous les truands de l’époque. Un seul me semble-t-il est resté à distance. Il s’agit de François Besse. En 1978, les deux hommes parviennent à s’évader de  la Santé. Ils font plusieurs coups spectaculaires avant que Besse ne s’éloigne de son complice qu’il ne trouve pas suffisamment fiable. À sa sortie de prison, en 2005, il se retire en province avec la ferme intention de faire une croix sur son passé. Un modèle de réinsertion, dit son avocat. Ces temps-ci, ça n’a pas dû être facile pour lui de résister à la pression des journalistes. Chapeau, Monsieur Besse !

Pour en revenir aux gosses sur le quai de la petite gare de banlieue, je me demande comment ils arrivent à se faire une opinion entre l’information de la presse et la promo d’un film… À tout mélanger, je crois qu’il n’y a pas de gagnant : la presse perd du crédit et le cinéma perd de la crédibilité. Ou le contraire.

Je ne sais pas vous, mais Mesrine : ras-le-bol !

Le Taser et les chiffres qui tuent

La ministre de l’Intérieur monte au créneau pour défendre le Taser. Et elle annonce crânement devant les sénateurs que son utilisation se traduit par une diminution de 30 % de l’usage des armes à feu… C’est ce qui s’appelle se prendre les pieds dans le pas de tir.

les-dupond_bakchichinfo.1224581395.jpgDans une étude sur « la gestion du stress lié à l’usage des armes dans la police », le capitaine Pierre-Frédérick Bertaux a étudié les dossiers de policiers qui ont fait usage de leur arme entre 1989 et 1996 sur le ressort de la préfecture de police. (Il s’agit non pas d’une sortie d’arme mais d’un tir réel). Sur cette période, il a comptabilisé 218 cas, ce qui s’est traduit par 160 procédures (administratives et/ou judiciaires). On peut estimer qu’une projection au plan national nous donnerait au maximum un chiffre double.

Une soixantaine de policiers se trouvent donc chaque année dans une situation où le danger (pour soi-même ou pour autrui) nécessite l’usage de l’arme à feu.

60 cas par an c’est beaucoup, mais c’est quand même trop peu pour nous brandir sous le nez des pourcentages en trompe-l’œil.

Il appartient donc à Madame Alliot-Marie de parler « sérieusement » de choses sérieuses.

Nous dire que le Taser a réduit de 30 % l’utilisation des armes à feu dans la police, c’est nous prendre pour des benêts. D’autant que le pistolet Sig-Sauer et le pistolet électrique n’ont pas du tout la même utilité. Dans un cas, on parle de légitime défense et dans l’autre de neutraliser un individu avec un minimum de risques.  ane.1224581771.gif

La question me semble-t-il n’est pas de savoir si aux États-Unis le Taser est directement ou indirectement responsable de la mort de cent ou deux personnes, car je crains fort que l’on se perde dans des combats d’experts… Non, renversons le problème : Cette arme électrique a-t-elle sauvé des vies ?


Antoine, l'enfant oublié

L’ancien patron des RG a rédigé un carnet noir sur Sarkozy qui a lui-même envoyé ses enquêteurs pour enquêter sur les enquêteurs qui enquêtaient sur Besancenot. La bourse joue au yoyo, les traders s’emmêlent les pinceaux, on siffle la Marseillaise… Ah oui ! On est sans nouvelle du petit Antoine.

Antoine_photo publiée à la demande de sa maman.jpgDeux poids, deux mesures : Un soir de mai 2007, le directeur central de la PJ reçoit un appel sur son téléphone portable : « Un enfant a disparu… » Dès le lendemain, des personnalités du monde politique et judiciaire sont sur place, suivies par une meute de journalistes de tous les pays. L’affaire fait la Une de la presse, en Europe, aux États-Unis… Devant les caméras, la mère adresse une supplique « à ceux qui ont fait ça ». Des spécialistes de Scotland Yard viennent aider les enquêteurs locaux. Au total, c’est 150 policiers qui sont mobilisés. Deux jours plus tard, le directeur de la PJ annonce officiellement aux médias : « Il s’agit d’un enlèvement. » Un fond de soutien se met en place sur Internet et de richissimes hommes d’affaires volent au secours de la famille.

C’était au Portugal. Madeleine McCann, la petite Maddie, a disparu le jeudi 3 mai 2007, vers 22 heures, tandis que ses parents dînaient avec des amis.

Pratiquement à la même heure, ce jeudi 11 septembre 2008, Antoine_photo publiée à la demande de sa mam.jpgAlexandrine Brugerolle de Fraissinette est allée sonner à la porte de la gendarmerie. « Mon fils a disparu », leur a-t-elle dit. Mais voilà ! Alexandrine a 23 ans, elle n’a pas beaucoup d’éducation, elle est mère célibataire et elle travaille comme serveuse dans un restaurant d’Issoire, une ville de 13.000 habitants dans le Puy-de-Dôme. J’ai bien peur que le téléphone du directeur central de la PJ soit resté muet ce soir-là. Le lendemain en fin de journée, à défaut du moindre élu, du moindre représentant du gouvernement, 80 militaires de la gendarmerie (cf. La Montagne) ont débarqué pour aider leurs collègues dans leurs recherches.

Les faits : Alexandrine et Sébastien, son amoureux, ont décidé d’aller dîner au restaurant. On ne sait pas trop si c’est Antoine qui le demande (Il n’a que 6 ans 1/2, mais il montre déjà un certain caractère) ou s’il s’agit d’une punition, mais l’enfant reste à la maison, avec les deux chiens. L’appartement où il vit avec sa maman est situé dans le centre-ville d’Issoire, au n°1 de la rue des Fours. Le restaurant Le Saïgon, où dînent Alexandrine et Sébastien, se trouve au 45 rue du Palais, à 3 minutes à pied.

plan-issoire.1224400828.jpgLorsque sa mère revient, vers 21 heures 30, Antoine n’est plus là. Aucun désordre, aucune trace d’effraction.

Les enquêteurs pensent à une fugue. On dit alors que l’enfant aurait quitté le domicile en emportant un sac à dos et un paquet de biscuits. Et le procureur de la République de Clermont-Ferrand, Jean-Yves Coquillat, ne déclenche pas le plan Alerte-enlèvement.

Il y a une constante dans les disparitions d’enfants ou d’adultes, c’est qu’au début, on refuse toujours d’envisager le pire. C’est vrai pour la famille et c’est vrai pour les enquêteurs. Les recherches démarrent donc lentement et ce n’est qu’au petit jour que les choses sérieuses commencent. Les gendarmes coordonnent leurs efforts. Ils sillonnent la ville, d’autres fouillent les environs d’Issoire… Il est fait appel à des chiens qui « marquent » une zone d’étangs. On fait venir une équipe de plongeurs. On fait même venir un hélicoptère équipé d’une caméra thermique, mais vu la météo, il ne sera opérationnel que le dimanche après-midi. Pendant ce temps, des hommes descendent dans les égouts d’Issoire. Parallèlement, une autre équipe se livre à une enquête criminelle classique : recherche de traces au domicile, audition de témoins, perquisitions…

On peut dire que tout est mis en œuvre pour retrouver Antoine, du moins sur le plan local. Mais qu’en est-il ailleurs…

L’enquête : Finalement, trois jours après la disparition de l’enfant, leAntoine_photo publiée à la demande de sa maman.jpg procureur décide l’ouverture d’une information judiciaire pour enlèvement et séquestration d’un mineur de 15 ans. Il déclare : « Plus le temps passe, plus l’hypothèse de la fugue perd de la consistance et je ne suis pas très optimiste. » Bientôt, la presse se fait l’écho de soupçons qui pèsent sur la maman d’Antoine, et en rajoute : « la femme aux cheveux rouges…, l’aguicheuse…, la mère célibataire…, elle a fait de la prison… » Les qualificatifs sont du même acabit pour Sébastien : «  drogué…, violent…, il bat Antoine… » Autant de ragots amplifiés par les sous-entendus du procureur.

Le mercredi 24 septembre, Alexandrine, son compagnon et six personnes de leur entourage sont placés en garde à vue. L’appartement est de nouveau investi par les techniciens de l’identité judiciaire. Les murs sont sondés, des lamelles de parquet soulevées, les lieux passés à la lumière fluorescente. La seule chose qu’on découvre, c’est deux petites gouttes de sang, minuscules, d’un millimètre de circonférence, près de l’interrupteur, dans la chambre d’Antoine.

Finalement, tout le monde est relâché, sauf Sébastien qui est emprisonné pour autre chose. L’un des responsables de l’enquête avoue : « Il faut tout reprendre à zéro… »

La reconstitution (sous toutes réserves) : Un mois avant le drame, Alexandrine travaillait comme serveuse au restaurant Au bon croûton, tenu par Stéphane Bourcelin. Tous deux avaient eu une aventure, lorsqu’elle avait été embauchée, en 2006. C’est elle qui avait rompu et contrairement aux cancans, on ne lui connaissait pas d’autres liaisons, jusqu’à sa rencontre avec Sébastien, en juillet 2008, époque où Antoine est en vacances chez son arrière-grand-mère. Dans la restauration, on ne connaît pas les 35-heures. Elle travaille beaucoup. De longues journées, parfois sans repos hebdomadaire. Vers la mi-août, elle craque et son médecin lui prescrit un arrêt de travail. Stéphane n’apprécie pas. D’autant qu’il ne peut plus voir Antoine. Car il semble bien qu’il se soit pris d’affection pour ce petit bambin. Souvent, il jouait avec lui, ou tous deux regardaient des vidéos. Il lui avait même offert une Playstation. Et d’un coup, il se voit privé d’Antoine et de sa… serveuse. Car Alexandrine et Sébastien ont d’autres projets. Ils veulent se marier, fonder une vraie famille. Sébastien envisage même de « reconnaître » Antoine.

alexandrine_fr3.1224398057.jpgLes choses semblent s’arranger pour Alexandrine et son fils. Peut-être la fin de la galère… Jusqu’à ce fameux soir…

Aujourd’hui, on peut reconstituer les événements avec beaucoup moins de risque d’erreur qu’au tout début. D’abord, les rumeurs selon lesquelles personne n’aurait vu le gamin depuis une dizaine de jours étaient sans fondements. En effet, deux jours après la disparition d’Antoine, les gendarmes ont enregistré la déposition d’un témoin qui a déclaré l’avoir vu, chez lui, alors qu’il sortait de la salle de bain.

Ce 11 septembre, une voisine a entendu l’enfant qui jouait dans l’appartement, vers 19 heures 15. La lumière de sa chambre était allumée. Plus tard, dans la soirée, son attention a été attirée par une voiture qui s’arrêtait en bas de l’immeuble. Puis il y eu des pas dans l’escalier. Un peu plus tard, la voiture est repartie dans un craquement de boîte de vitesses.

Antoine n’est pas sorti avec un petit sac et un paquet de biscuits, comme on l’a dit, mais avec un grand sac qui appartient à Sébastien. Un sac noir (ou bleu foncé) presque aussi haut que lui, dans lequel devaient être entassés des vêtements, vêtements qu’on n’a pas retrouvés dans son armoire. Sa peluche, un petit chat, qu’il trimballait toujours avec lui, a également disparu.

Alors, que s’est-il passé le soir du jeudi 11 septembre ? La maman d’Antoine a-t-elle découpé son enfant en petits morceaux qu’elle a ensuite enfournés dans des sacs-poubelles, comme l’a laissé entendre un journal que je ne nommerai même pas ?

Ou profitant que l’enfant était seul, quelqu’un est-il venu le chercher ? Et avec quelles intentions ?

La présidente d’Esperanzassociation, Madame Lydie Fontenil, veutavis-recherche-antoine.1224399418.jpg croire à cette possibilité. « Il n’y a rien de vraiment nouveau, m’a-t-elle dit au téléphone, mais de petits indices nous permettent de garder l’espoir… » Il faut écouter ce qu’elle raconte, car c’est une femme d’expérience. Depuis des années elle se consacre à la recherche des enfants disparus. Et elle sait que parfois, cela se finit bien. Dès la disparition d’Antoine, avec l’accord de la maman, elle a ouvert un blog qui lui est entièrement consacré. Elle répond aux nombreux appels téléphoniques, elle pressure « ses » bénévoles (elle en recherche de nouveaux), elle agite son réseau d’information, elle soutient Alexandrine (voir la vidéo), etc. « J’ai perdu 6 kilos » m’a-t-elle avoué en souriant.

Il y a quelques jours, dans la petite gare de la banlieue parisienne où je prends le RER, il y avait un avis de recherche. Cela concernait un ado d’une quinzaine d’années qui demeure à Nantes. Je ne sais pas vous, mais moi, en région parisienne, je n’ai jamais vu une affichette concernant Antoine.

C’est pour ça que j’ai voulu écrire ces lignes. Je sais, ce n’est qu’un blog…

On dit que les femmes sont plus sensibles que les bonhommes, surtout dès qu’on parle d’un enfant… Les deux ministres directement responsables de cette enquête sont des femmes. Sont-elles seulement au courant ? En tout cas, on ne les a pas entendues.

Lorsqu’un couple de touristes s’est fait enlever par des pirates, du côté de Djibouti, le président de la république a pris les choses en main.  Ce même président, lorsqu’il était ministre de l’Intérieur avait remué ciel et terre pour retrouver la petite Estelle Mouzin*.

Cela fait 38 jours qu’un petit garçon de 6 ans 1/2 a disparu – et le silence de ces gens-là, ceux qui détiennent le pouvoir, est assourdissant.

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* La jeune Estelle Mouzin, âgée de 9 ans, a disparu le 2 janvier 2003. Le lendemain, le procureur de Meaux ouvrait une information judiciaire et saisissait le SRPJ de Versailles. Le village a été bouclé par 700 policiers. 400 perquisitions ont été effectuées simultanément. Toutes les communications téléphoniques (15.000) au moment des faits ont été « remontées ». Via Interpol, on a sollicité tous les pays qui exploitent des satellites. Le plan Alerte-enlèvement n’existait pas à l’époque, pourtant la photo de la petite fille en rouge a été placardée dans toute la France, et bien au-delà. Hélas en vain. Estelle n’a jamais été retrouvée, mais au moins, on s’est donné tous les moyens.

Les détectives privés

Les surveillances exercées sur Olivier Besancenot mettent de nouveau sous les feux de l’actualité une profession mystérieuse, au statut toujours incertain : détective privé – ou plus exactement agent de recherches privées (ARP).

On dit que la « police privée » voit le jour en 1825, sous la houlette de detective_peinture_barryblend.jpgGuy Delavau, préfet de police de la Restauration. Mais c’est Eugène-François Vidocq qui lance la profession. En 1833, il crée le « Bureau de renseignements pour le commerce » qui fournit aux commerçants renseignements et surveillances moyennant finance. C’est le premier cabinet de détectives privés. Le succès est au rendez-vous et il est rapidement copié, notamment par des policiers à la retraite. La machine est lancée.

À la même époque, outre-Atlantique, un immigrant écossais du nom d’Allan Pinkerton crée l’officine d’investigations privées qui deviendra la plus célèbre au monde, la « Pinkerton’s national detective agency ». Il a notamment fait échouer, en 1861, un complot contre le président Abraham Lincoln.

En France, pendant longtemps, cette activité n’a obéi à aucune règle. Une simple déclaration en préfecture suffisait, une rapide enquête des RG, et c’était tout. N’importe qui pouvait se dire détective privé. La profession a donc tenté de s’organiser vaille que vaille. Au fil des ans, divers textes ont été promulgués, pas vraiment pour lui donner un statut mais plutôt pour l’encadrer, la contrôler. Puis il y a eu plusieurs décrets visant toutes les professions qui touchent à la sécurité privée (1983, 1985, 2005…) Pour exercer cette activité, il faut dorénavant un certificat professionnel. Celui-ci peut prendre différentes formes, et les anciens policiers et gendarmes en sont dispensés.

la-verite-de-jack-palmer-par-petillon.jpgJ’ai personnellement exercé ce job durant un court délai. Je n’en garde pas un très bon souvenir. Entre les affaires sordides de garde d’enfants, d’adultère ou de pensions alimentaires, ou, pour les entreprises, la surveillance de salariés soupçonnés de malhonnêteté, les informations sur les concurrents, ou le flicage de délégués syndicaux (ce qui est interdit par la loi). Non, pas de bons souvenirs.

Certains détectives privés cherchent à sortir du traintrain. Ils se sont spécialisés dans la contre-enquête judiciaire (au grand dam des enquêteurs officiels) mais parfois avec quelques réussites – réelles ou médiatiques (affaires Omar Raddad, Dany Leprince…).

Il faut savoir que de fait, les détectives privés n’ont aucun pouvoir particulier. Ils n’ont droit ni à la carte de réquisition ni au port d’armes. En l’absence de moyens d’investigations, ils sont obligés de « se débrouiller ». Si par exemple, ils veulent identifier un véhicule, connaître les antécédents d’un individu, etc., ils sont obligés de faire appel à des policiers en exercice. (Il existe certains passe-droits pour les assureurs.) Du coup, ils se mettent hors la loi et il en est de même des fonctionnaires qui les assistent. L’avantage des recherches informatisées, c’est la traçabilité. Chaque policier doit entrer son code personnel pour consulter un fichier. Aussi, en général, cela se termine par une enquête de l’Inspection générale. Les bœuf-carottes s’interrogent alors sur la motivation de leurs collègues : le fric, l’amitié ou l’espoir d’obtenir un bon tuyau en retour ? (Vidocq était un indic de la police.) Tous les amis avec qui j’ai partagé ce boulot ont eu un jour ou l’autre des soucis : écoutes, filatures, perquisitions, garde à vue. Et pour certains, au bout du compte, la mise en examen.

Si l’on en revient aux surveillances effectuées sur Besancenot, il est facteur_franskacnorddk.1224055434.jpgvraisemblable que des policiers aient aidé les enquêteurs privés. La question est donc de savoir pour quelle raison… Et la deuxième question est de connaître le nom du commanditaire. Je ne pense pas que le secret professionnel puisse s’appliquer aux ARP. C’est à vérifier. Ici, le directeur de SMP Technologies est sur la sellette. Cette entreprise a un contrat important (et exclusif) avec le ministère de l’intérieur, notamment pour la fourniture des pistolets à impulsions électriques. À dire vrai, on ne voit pas très bien quel pourrait être l’intérêt du patron de Taser-France à faire surveiller le petit facteur… Certainement pas pour cette histoire de plainte en diffamation… Une broutille. À moins qu’il ne roule pour quelqu’un d’autre… ou que lui-même ne soit manipulé… Le monde du renseignement est un monde parano.

À noter qu’on ne peut reprocher aux privés d’effectuer des surveillances (c’est leur métier), mais – légalement – celles-ci ne doivent pas aller jusqu’à violer l’intimité des gens. À notre époque où les mouchards électroniques sont légion, où diable commence notre intimité ?

N’empêche que dans certains cas, les ARP peuvent rendre de sacrés services, surtout dans les litiges civils. Car dans ces affaires le préjudice n’est que… matériel. Et puisqu’il s’agit d’argent, il n’est pas anormal de payer pour faire une enquête. D’ailleurs, lorsqu’on se porte partie civile devant un juge d’instruction, ce dernier demande le versement d’une caution et une partie de cet argent est utilisé pour couvrir les frais des policiers ou des gendarmes.

Pour conclure, on peut dire que les privés ne sont populaires qu’au cinéma ou à la télé. Les flics ne peuvent pas les sentir, les journalistes ont du mal à les prendre au sérieux, et on leur a même refusé l’étiquette de « détective privé », qu’on trouvait sans doute trop valorisante, trop polar, pour leur coller le titre d’agent de recherches privées.

inspector-gadget-0.1224055564.gifPourtant, si l’on réfléchit bien, dans notre système judiciaire qui devient de plus en plus à charge, au point que parfois il est demandé aux suspects de prouver leur innocence, il y a un sacré vide. Les avocats n’ont ni la formation ni le temps pour effectuer des contre-enquêtes. Le détective privé pourrait rétablir l’équilibre de la balance de la justice, comme c’est le cas aux USA. Mais il faudrait pour cela leur donner le statut d’auxiliaires de justice, statut qu’ils revendiquent à cor et à cri.

Cela donnerait aux détectives privés une véritable place dans l’institution judiciaire, sans qu’il n’en coûte un cent aux contribuables.

Point final dans l'affaire Agnelet ?

La chambre criminelle de la Cour de cassation doit rendre son verdict dans l’affaire c/ Agnelet. Quelle que soit sa décision, dans cette histoire invraisemblable et vieille maintenant de plus de 30 ans, à coup sûr la justice en sortira flétrie. 

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On refait l’historique :

– Agnès Le Roux, cohéritière du casino Le Palais de la Méditerranée, à Nice, disparaît entre le 26 octobre et le 2 novembre 1977.

– Cinq mois s’écoulent avant que le procureur de la république n’ouvre une information judiciaire pour séquestration arbitraire.

– Il faut attendre deux ans avant que la justice estime qu’il y a homicide volontaire.

– Six ans ou presque après les faits, au mois d’août 1983, Maurice Agnelet est inculpé.

– Deux ans plus tard, il bénéficie d’un non-lieu, confirmé l’année suivante devant la Cour d’appel d’Aix-en-Provence. (En droit, sauf charges nouvelles, ce non-lieu interdit de nouvelles poursuites.)

– Affaire réglée ? Non ! Vingt-deux ans après la disparition de mademoiselle Le Roux, et plus de dix ans après le non-lieu (délai de prescription en matière criminelle), la même Cour d’appel, ordonne la réouverture de l’information judiciaire contre Maurice Agnelet. Nous sommes à la fin de l’an 2000.

– Au bout de six ans, en 2006, la Cour d’assises des Alpes-Maritimes acquitte Maurice Agnelet. Le procureur fait appel.

– Le 11 octobre 2007, rejugé devant la Cour d’assises des Bouches-du-Rhône, Agnelet est condamné à 20 ans de réclusion criminelle.

En se situant uniquement sur le plan technique, il me semble que l’affaire pose trois questions de fond :

– Le délai légal de prescription peut-il être interrompu par des arguties juridiques ?

– La loi sur les libertés individuelles a été prise en 2000 pour donner la possibilité aux accusés de faire appel d’une condamnation devant la Cour d’assises. En y ajoutant 2 ans plus tard, le même droit pour l’accusation, n’a-t-on pas transformé radicalement l’esprit de la loi ?

– N’y a-t-il pas acharnement judiciaire ?

Les avocats de Maurice Agnelet dans un mémoire de plus de 50 pages (cliquez ici) estiment pour leur part que par sept fois « la cassation est acquise ». 

agnelet_daylife.jpgEn conclusion, grosso modo, ils demandent à la Cour de déclarer l’appel du parquet  illégal, de casser le jugement rendu et de ne pas renvoyer l’affaire devant une nouvelle Cour d’assises.

Le parquet général a un avis contraire, mais si les avocats obtiennent gain de cause sur ces 3 points, Maurice Agnelet sera libéré séance tenante. Et 31 ans plus tard on ne saura jamais ce qu’il est advenu d’Agnès Le Roux. Car à ce jour, personne n’a pu démontrer qu’elle avait été assassinée.

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Ils doivent s’arracher les cheveux à la Cour de cass’ ! D’autant qu’un rejet du recours, sauf erreur de ma part (y a-t-il un juriste dans la salle ?) pourrait voir le dossier porté devant la Cour Européenne des droits de l’Homme.

A moins que ces hauts magistrats ne ménagent la chèvre et le chou et renvoient l’affaire devant une troisième Cour d’assises…

A voir : « Affaires criminelles », le samedi 18 octobre 2008, à 22h25, sur NT1. Docu réalisé par Frédéric Gilbert et présenté par Yves Rénier.

Coup de grâce dans l'affaire Mesrine

Un film, des émissions télé… la mort du gangster des années 70 pose toujours question. Le dispositif mis en place par la brigade antigang de Paris était-il destiné à l’arrêter ou à l’éliminer ? Y a-t-il eu des sommations avant le tir ? Coup de grâce ?

bouvier.1223802369.jpgQuelques jours avant le 2 novembre 1979, lors d’un BDL (bureau de liaison) auquel je participais, les instructions étaient sans ambigüités. Ni le procureur ni le directeur PJ, Maurice Bouvier, n’ont dit « Il faut l’abattre », mais ils le pensaient tellement fort qu’on l’a entendu de l’Élysée au quai des Orfèvres.

De là à envisager qu’on ait chargé spécialement un ou plusieurs hommes de l’achever, de lui donner le coup de grâce, il y a un pas que personne ne doit franchir. Même si, après le tir des trois policiers dissimulés dans le camion bâché, un quatrième a fait feu sur Mesrine. C’était un poil trop tard. Il était déjà mort.

Durant ces années à lutter contre le grand banditisme, j’ai constaté à plusieurs reprises que lors d’opérations dangereuses, la montée d’adrénaline est telle qu’il est parfois difficile de s’arrêter. Un peu comme si l’on était emporté par son élan… J’ai même vu un flic passer les menottes à un cadavre.

Le comportement humain est parfois… déroutant.

Cependant, à la suite d’un texte publié sur ce blog, il y a juste deux ans, un lecteur a tout récemment laissé un commentaire qui m’a laissé dubitatif. En voici des extraits (on peut le retrouver en entier en cliquant ici) :broussard.1223802643.jpg

 « À l’époque j’étais gardien de la paix et je suis intervenu en renfort, après la mort de Mesrine, pour juguler la foule…

 «  […] Autour de Mesrine des gens (qui) s’étreignent en s’embrassant comme du bon pain, j’ai compris ce jour-là que (je) ne ferais pas carrière dans la police et (j’ai) remis ma démission 5 ans après. Ayant toujours cette vision grotesque et indécente qui me ne me quittait pas, moi qui avais vu pourtant des scènes de meurtres et des assassinats : le cadavre exposé sur le macadam et les flashs des photographes…

 mesrine-4.1223802606.jpg« […] Oui, il a bien reçu une balle dans la tempe, pour le finir, de la part d’un policier en Mobylette habillé en coursier – mais inutile car on peut dire qu’après les 20 balles haute vélocité des tireurs d’élites du camion, Mesrine était déjà mort. Tout le monde avait peur de Mesrine, même dans la police il impressionnait sur la façon dont il arrivait toujours à s’en sortir. On parlait même entre nous qu’il avait surement des complicités dans la police. »

Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais ces propos ont un réel accent de vérité… J’ai cherché à joindre son auteur, mais il ne m’a pas répondu.

Personnellement, je n’étais pas Porte de Clignancourt, mais je suivais le dispositif à la radio. Je savais que le flic en planque au plus près du domicile de Mesrine était recroquevillé dans un triporteur – mais c’est la première fois que j’entends parler d’un policier monté sur une Mobylette…

Il y a quelques jours, M6 a consacré une émission à l’ennemi public n°1. Au début, Vincent Cassel fait la promo de son film. « J’ai mis 7 ans à me décider… », dit-il. À l’écouter, on a un peu l’impression qu’il hésite encore… Dans le documentaire qui suit, très bien fait au demeurant, entre chaque séquence d’archives, on voit apparaître alternativement la bobinette de Broussard, Aimé-Blanc, Devos, Querry… À l’exception du dernier nommé qui fait montre de réserves, les autres ont l’air d’anciens combattants qui racontent leurs exploits en parlant d’un vieux copain mort au front… Tout juste s’ils n’ont pas la charles-pellegrini_france5.1223802956.jpglarme à l’œil. La question cruciale arrive en fin de film, avant le débat (que je n’ai pas suivi, il était tard) : Y a-t-il eu des sommations avant d’ouvrir le feu ? Broussard l’affirme énergiquement, Aimé-Blanc tergiverse, etc. (Entre nous, tous les deux étaient assez éloignés de la BMW) Et c’est alors que se pointe Charles Pellegrini. À l’époque, il était l’adjoint d’Aimé-Blanc, et à ce titre il avait la charge des opérations de terrain. Et, tandis que les autres venaient de nous dire tout le contraire, avec son visage poupin et ses yeux malicieux, tranquillement, Pellegrini nous dit : « Mais non, évidemment, qu’il n’y a pas eu de sommations… »

Charles, tu leur as donné le coup de grâce.

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P.S. L’usage des sommations avant le tir est réservé aux gendarmes et aux douaniers pour stopper un individu qui s’enfuit, ou pour immobiliser un véhicule. Les policiers ne peuvent faire usage de leur arme dans ces cas-là, mais uniquement en état de légitime défense. Donc ici, la question fondamentale n’est pas de savoir s’il y a eu sommations ou pas, mais de déterminer si les policiers étaient en situation de légitime défense. Après différents recours menés par la famille, la justice a répondu oui.

EDVIGE pas mort

Le décret instituant la mise en place du fichier EDVIGE n’a pas été annulé. Pire, le nouveau décret qui prévoit la création d’EDVIGE II (ou plus exactement EDVIRSP) n’envisage pas l’abrogation du premier. En l’état, le décret d’origine est donc applicable – et appliqué.

Voyeurisme_blogmonlegionnaire.jpgC’est du moins l’avis de Corinne Lepage, la présidente du mouvement écologique Cap 21. Elle a déposé il y a quelques jours, un recours devant le Conseil d’État. Grosso modo, elle affirme que le Gouvernement utilise le laps de temps nécessaire pour la validation du nouveau décret pour mettre l’ancien en pratique.

Pour elle, il y a donc urgence à suspendre ce texte litigieux dont l’application permet de ficher des gens qui dans quelques semaines ne seront plus « fichables ».

En effet EDVIGE II rectifie le tir. Ainsi les personnalités, notamment politiques, ne seront plus mentionnées, ni les citoyens lambdas, sauf à troubler l’ordre public – alors qu’auparavant il suffisait d’une simple menace à l’ordre public.

Dans son recours, Madame Lepage ajoute même que si le Gouvernement s’opposait à la demande de suspension, ce serait avec l’arrière-pensée de  « créer un fichier dont l’objectif avoué serait de rester totalement secret… »

Alors, tandis que l’on palabre, EDVIGE est-il opérationnel ? La réponse est probablement oui, car les structures sont en place et un fichier de police, tout comme la nature, a horreur du vide.

Mais si EDVIGE est un fichier neuf, un fichier qui part de zéro, il n’y a pas le feu au lac. En revanche, s’il est alimenté par d’autres fichiers, RG et tutti quanti, il sera rempli avant d’être remplacé par son petit frère.

Et c’est là où le bât blesse, car dans la police on ne détruit pas des archives. Au mieux on les met en sommeil.

Je me souviens de ce vieux flic un peu alcoolo, auquel son patron avait demandé de classer des documents… « Bien chef ! » qu’il avait dit. Et un à un, il avait glissé les précieux feuillets dans des bouteilles (vides,le suicidaire_blog-danielriot.jpg évidemment) avant d’y mettre le feu.

Puis il avait soigneusement aligné les bouteilles remplies de cendres, une étiquette de scellé accrochée au goulot, sur laquelle étaient inscrites toutes les références des dossiers.

Un autre temps où dans les services de police on buvait, on clopait et l’on tapait le carton – et où on ne mettait pas les archives en sommeil, mais… en bouteilles.

Taser pour dames

Aux États-Unis, il est couleur peau de léopard et il fait MP3. Chez nous, il est rose, mais il ne joue pas de musique. Non mesdames, ce n’est pas le dernier sextoy à la mode, mais le petit frère du Taser.

On l’appelle le Stoper C2. Il est deux fois moins puissant que son grand frère, et il a une portée de 4 mètres.le-stoper-c2.1223536953.jpg

Pour l’heure, cette arme d’auto-défense est « probablement » classée en 6° catégorie (si quelqu’un en sait plus…). Elle est donc en vente libre. L’importateur, SMP Technologies, la propose pour moins de 500 €, et à ce prix-là, nous dit-il, il assure la formation de ses clientes…

Parmi celles-ci, on ne doit pas compter Martine Aubry. D’autant qu’elle vient d’être victime d’un tir – non létal – du fameux pistolet électrique. Elle a déclaré que cette arme avait fait 290 victimes en Amérique du Nord… Aussi sec, l’importateur pour la France a envoyé sans sommation une sommation par voie d’huissier à ladite dame. Interrogée par un journaliste de La voix du Nord, elle a répondu : « Je n’ai pas l’habitude de dire des choses dont je ne suis pas sûre. » Pour appuyer ses dires, elle a fait référence à un rapport d’Amnesty International ainsi qu’a un rapport de l’ONU qui classe ce bidule électrique parmi les instruments de tortures.

La question de fond est la suivante : le Taser, présenté comme une arme non létale, peut-il entraîner la mort ?

Indubitablement, la réponse est oui. La démonstration la plus frappante est le décès – quasi instantané – d’un immigrant polonais, à l’aéroport de Vancouver, au Canada. Sur les images prises par un témoin, on voit un homme très agité, visiblement « désorienté », mais tout aussi visiblement non menaçant. Les policiers s’approchent et ils le tasérisent, alors qu’à l’évidence il aurait pu être maîtrisé d’une manière plus… conventionnelle.

Mais pour être objectif, le Taser peut se révéler efficace pour neutraliser un individu dangereux avec un minimum de risques pour lui et pour les intervenants. Ainsi, le 3 octobre 2008, un homme retranché dans son appartement, en état de démence, menace d’attenter à ses jours à l’aide d’un couteau de boucher. Situation rouge. On parlemente. Mais l’homme ne se calme pas. C’est alors qu’un policier parvient à s’approcher suffisamment près pour utiliser son Taser. Résultat : aucune victime.

les-2-sondes-du-taser.1223537223.jpgLorsque j’ai parlé sur ce blog de l’arme individuelle des policiers, le Sig Sauer, l’un d’eux a laissé un commentaire : « Ce n’est pas l’arme qui est dangereuse mais celui qui la tient… »

La police et la gendarmerie sont équipées du pistolet électrique depuis 2004. Il y en aurait environ 4.000 en dotation, mais on ignore combien de fois il a été utilisé. Il y a eu plusieurs accidents. A ma connaissance – aucun mortel. Le dernier au mois d’août 2008. Lors d’un contrôle d’identité, à Vernon, dans l’Eure, un policier a tiré sur un homme de 26 ans. Les fléchettes se sont plantées dans son crâne. L’enquête est en cours, comme on dit.operation-tranquillite_prefecture_hautrhin.1223537383.png

Depuis peu, le Taser fait partie de la panoplie de la police municipale. À la diligence du maire. Jusqu’à ce jour, ils ne sont pas chauds, nos élus. Et je crois qu’ils ont raison, car une utilisation malencontreuse pourrait bien en faire un boomerang électoral.

En France, les autorités ont classé cette arme – non dangereuse – en 4° catégorie, au même rang qu’un revolver 357 magnum, ce qui est curieux. Et ce qui interdit son achat par un particulier.

Heureusement qu’il nous reste le pistolet de ces dames.

Les 30 ans de l'antigang de Nice

La guerre des casinos, l’appétit de la mafia italienne et une série de règlements de comptes entre truands… autant d’événements qui faisaient désordre dans la capitale azuréenne, à la fin des années 70.

bri-nice.1223382594.jpgOn dit qu’un jour, le Président de l’époque, un certain Giscard d’Estaing, a tapé du poing sur la table : « Keskevoukontéfer? » a-t-il demandé au ministre de l’Intérieur, un certain Christian Bonnet. Le Bonnet s’est gratouillé la tête (sous son chapeau) pour faire jaillir une idée. Puis finalement, il s’est retourné vers le directeur central de la police judiciaire, un certain Maurice Bouvier : « Keskevousalléfer ? », lui a-t-il demandé. Bouvier n’avait pas plus d’idée sur la question que son ministre. Mais c’était un vieux routier de l’administration. Au débotté, il a répondu n’importe quoi. Du genre : Faut créer une BRI à Nice.

C’est souvent comme ça que s’écrit l’Histoire. Ou pour le moins la petite histoire de la PJ.

C’est ainsi qu’il y a 30 ans, Bouvier m’a chargé de mettre sur pied la brigade antigang *. Et qu’une petite trentaine de policiers se sont retrouvés assis par terre, en cercle, dans la salle vide d’un bâtiment délabré abandonné par l’Armée de Terre, dans le quartier Saint-Roch, à Nice. Car on avait désigné les gens, mais rien n’était prévu pour les accueillir. Il a fallu se battre pour le moindre crayon. Mais le jeu en valait la chandelle, car non seulement on peut dire qu’on a obtenu des résultats, mais en plus… on s’est bien amusés.

C’est ce que me rappelait la dizaine de vétérans qui avaient fait le déplacement, il y a quelques jours, jusqu’à ce restaurant de Carros, dans l’arrière-pays niçois. Là où était organisé ce repas d’anniversaire.

Les souvenirs fusaient…

Tu te souviens Lorsqu’on a serré X. On peut dire qu’il nous avait fait ch… Surtout qu’avec sa Ferrari, on n’arrivait pas le filocher. C’est C. qu’a ramené sa caisse à la brigade. On se demandait pourquoi il n’avançait pas… 70 avec uanniversaire_forumdoctissimo.1223367129.jpgne Ferrari, c’est pas la peine. À l’arrivée, le moteur était nase et innocemment il nous dit : « Je roulais en première… J’ai pas réussi à trouver la seconde… »

Et la fois où le Chinois a coincé le soum (sous-marin : fourgon de planque) dans le souterrain… Et la fois où l’on attendait un braqueur pour le serrer à la descente d’avion et qu’on s’est gouré de bonhomme. C’était un haut fonctionnaire. Il a fallu s’excuser, mais, beau mec, il n’a pas porté plainte – malgré ses ecchymoses.

Au dessert, c’était plus nostalgique. Les pépins, les bavures, les drames… On a eu une pensée pour ceux qui n’étaient plus là. Non sans émotion, Chico nous a rappelé comment le terroriste Carlos a froidement abattu ses copains de la DST. Le lascar est sorti de la salle de bain, tout nu, juste une serviette à la main. Et une arme. Une balle dans la tète pour chacun, et le coup de grâce, au sol. Un projectile a même traversé le plancher pour aller transpercer le journal que lisait un pépé, à l’étage en-dessous. Aucun de ses collègues de la DST n’était armé. Ils venaient juste pour notifier un arrêté d’expulsion.

Il y avait peut-être deux cents personnes à ce repas d’anniversaire. Avec des policiers de Nice, bien sûr, mais aussi de Marseille, Montpellier, Bordeaux… Autant de villes où à présent il existe une brigade antigang.

Et à les voir ainsi festoyer, je me disais que s’il y a une chose que les flics savent bien faire, c’est la bamboula.

bri.1223367240.jpegAvant le repas, malicieusement, mon complice de l’époque, le commissaire Pierre Guiziou, m’avait poussé à prendre la parole. Ils étaient là, tous ces flics, debout devant moi, en demi-cercle, à s’interroger : Qui c’est ce vieux con qui s’agrippe au micro ?

Et je vais vous faire une confidence… Alors, j’ai compris quelque chose : Dans la police les moyens ont changé, les techniques ont changé, les grades ont changé, mais les hommes, ce sont les mêmes. Les mêmes qu’il y a 30 ans.

Et je voulais leur dire combien j’aurais souhaité me retrouver à leurs côtés. Au lieu de ça, j’ai bafouillé quelques banalités. J’avais trop peur de craquer.

Un flic, la larme à l’œil, cela n’aurait pas fait pas sérieux.

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* Voir sur ce blog dans  » La PJ sous Giscard (3)  » :  […] C’est ainsi que s’est tenue la première réunion de la brigade antigang de Nice. Alors que nous discutions, j’observais ces hommes (et cette femme) qui allaient constituer cette brigade de choc… Cliquer pour lire la suite.

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