LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Armement (Page 3 of 4)

Le canon à eau dans les manifs

David Cameron a déclaré qu’il était prêt à mettre les canons à eau en action – si nécessaire. Une véritable renversée pour les Britanniques, jusqu’à présent peu enclins à utiliser la force dans les manifestations. Ces engins ont une mauvaise image, et pourtant, il s’agit d’un moyen efficace et peu dangereux pour disperser une émeute. En France, pour l’instant, tout est calme, mais les CRS viennent de toucher de magnifiques camions « lanceurs d’eau ». Une première, car, à ce jour, seule la préfecture de police de Paris utilisait ce type de matériel.

Lorsqu’un commissaire de police donne l’ordre de charger des manifestants, c’est que tout a échoué. L’affrontement direct est la dernière des solutions. Or les moyens préliminaires sont peu nombreux : gaz lacrymogènes, obstacles de rue pour limiter les déplacements ou barrages humains, qui nécessitent de nombreux effectifs et mettent souvent à vif les nerfs des policiers ou gendarmes, obligés de rester statiques sous les injures ou les projectiles. Or, deux hommes dans un camion lanceur d’eau peuvent vider un périmètre de ses occupants. Et cela sans risque. Car, à ma connaissance, personne n’a jamais été sérieusement blessé par un jet d’eau, même puissant.

Extrait de l'article de Dominique Noël dans Police Pro (mai-juin 2011)

Lors d’une interview donnée au magazine Police Pro, en février dernier, Hubert Weigel, alors directeur des CRS, expliquait les raisons de ce choix, notamment lié à la diminution des effectifs, à une augmentation des interventions et à l’évolution des techniques de maintien de l’ordre. « Moins il y a de confrontations physiques, mieux on se porte ! » expliquait-il. Il faut dire qu’Internet a changé la donne. De nos jours, les photos ou les vidéos amateurs d’une manif font le tour de la planète en quelques minutes. Avec, souvent, un objectif amplificateur ou déformant. Et les États se trouvent confrontés à un dilemme, un problème d’image : celle d’un pays où la rue a pris le pouvoir ou celle d’une police exagérément répressive. Entre les événements de Grande-Bretagne et ceux de Syrie, on a les deux extrêmes.

C’est sans doute cette réflexion qui a amené la Direction centrale des CRS à s’intéresser aux camions lanceurs d’eau, en étudiant notamment les dispositions prises en Allemagne. Elle dispose depuis quelques mois de neuf véhicules de ce type et en attend encore une douzaine. Deux sont tout neufs, les autres sont des camions-citernes des Eaux et Forêts, relookés par les techniciens du service auto. J’espère qu’on n’a pas dépouillé les pompiers et qu’il leur reste de quoi lutter contre les incendies !

En Allemagne, l’utilisation des lanceurs d’eau fait partie de la routine, alors que de l’autre côté de la Manche, on est quasi au bout de la chaîne répressive. Presque un aveu d’échec. Surtout quand le Premier ministre parle d’une « riposte »… Quant à la France, elle fait ses premiers pas dans ce domaine (sauf à Paris).

Iveco Magirus, le spécialiste des véhicules de lutte contre l’incendie, est bien placé dans la construction de ces engins particuliers. Toutefois, même si on n’en voit pas au salon de l’auto, Mercedes en fabrique également. Le 4000 Renault M210 (photo du haut), de taille relativement petite (6 m.15) possède une citerne de 4.000 litres. Le débit de son canon est de 500 litres à la minute avec une portée d’environ 30 mètres. Ce qui lui donne une autonomie d’action théorique de huit minutes. Mais quel que soit le modèle, il s’agit dans la pratique d’expédier des « rafales » en pointillés, et il est possible de graduer la force du jet suivant le but recherché : dissuader ou refouler. L’objectif n’est pas de viser les gens, mais de les faire déguerpir, comme on le voit sur cette capture d’écran. Toutefois, dans le passé, des petits malins avaient imaginé de colorer l’eau pour mieux repérer les groupes les plus virulents.

Comme tout matériel de police, ces engins ne sont pas vraiment sympathiques. On peut imaginer un monde sans agressivité, sans casseurs, où les canons à eau deviendraient des objets de collection. Hélas, on n’en est pas là. Et pas besoin d’être prophète dans son pays pour savoir que les difficultés qui nous attendent n’iront pas sans une recrudescence des manifestations, plus ou moins violentes – pas seulement en Grande-Bretagne et en Grèce.

Il paraît que ce tour de vis social, dont les premiers signes se font déjà sentir, serait le prix à payer pour rétablir l’équilibre financier mondial…

Les policiers doivent-ils être armés ?

Les Norvégiens se posent la question, après le massacre sur l’île Utøya. Cette interrogation, certains avaient osé la formuler en France, il y a quelques dizaines d’années. J’étais de ceux-là. Enfin, il ne s’agissait pas de désarmer les policiers, mais d’adapter leur armement en fonction de leurs missions. L’évolution de la société nous a donné tort. L’armement des policiers n’a jamais été si conséquent. La course en avant a même pris un tel élan, que, lorsqu’une une arme non létale est mise au point, comme le lanceur de balles de défense (le Flash-Ball), on cherche immédiatement à la rendre plus puissante, donc plus dangereuse. Et pourtant, les policiers sont des « gardiens de la paix ». Ils ne sont pas là pour combattre qui que ce soit, mais pour assurer l’ordre. La paix civile. C’est tellement vrai que s’il y avait une menace d’insurrection, les pouvoirs de police seraient transférés à l’autorité militaire. Une règle qui, au passage, aurait dû être prise en compte avant de rattacher les gendarmes au ministère de l’Intérieur.

Trond Berntsen, le policier norvégien qui assurait la surveillance du camp d’Utøya, aurait-il pu neutraliser Anders Behring Breivik, s’il avait été armé ? Rien n’est moins sûr. On imagine un garde-champêtre face à un dément en croisade ! Mais dans ce cas précis, la véritable question était ailleurs. Ce n’était même pas le temps de l’intervention. La police est tombée dans le piège tendu par ABB. Et, tandis qu’elle se démenait pour faire face à un attentat à l’explosif, il appliquait froidement le deuxième volet de son plan. Non, ce qui nous paraît incompréhensible, c’est qu’un meeting politique regroupant 600 jeunes à quelques dizaines de kilomètres de la capitale ait pu être organisé sans qu’il y ait le moindre service d’ordre ! Pour nous, Français, c’est inimaginable. En région parisienne, dès que trois pékins se réunissent, ce sont des dizaines de cars de CRS et de gendarmes mobiles qui sont embusqués à proximité, prêts à foncer, si nécessaire.

Une autre culture – mais quand même…

Ce drame amène les Norvégiens à réfléchir à l’armement de leur police, pourquoi n’en ferions-nous pas autant ? J’ai toujours pensé que, dans son service quotidien, le policier n’avait pas à être transformé en porte-avions. L’arme et les munitions devraient être adaptées aux missions. Le cas d’école : en novembre 2006, à la sortie du Parc des Princes, un policier en légitime défense tire sur un hooligan. La balle le traverse et tue un homme qui se trouvait derrière lui. Une munition bien trop puissante pour un flic chargé de surveiller un parking.

Les anciens policiers ont connu la MAT 49 qui équipait les cars de police secours. Un pistolet-mitrailleur à la culasse mobile… beaucoup trop mobile, qui avait la fâcheuse tendance à partir tout seul. Les anciens d’Algérie en gardent un triste souvenir, au point qu’en patrouille, on n’aimait pas trop en avoir un dans les reins. J’ai vu, à Versailles, un sous-brigadier de police pointer cet engin sur un énergumène qui venait d’assommer deux de ses collègues. À peine armé, la rafale est partie… Une arme bien trop dangereuse pour celui qui n’a pas la formation nécessaire.

Une police suréquipée est-elle plus dissuasive ? Sans doute pas plus que la prison ou que la peine de mort. D’ailleurs, si les truands raisonnaient (mais ça se saurait), avant de prendre une arme, ils penseraient aux circonstances aggravantes. Avec ou sans, la peine prononcée peut aller du simple au double.

Alors, le principal risque d’armer les policiers serait-il de voir les malfaiteurs s’armer plus encore ? comme l’a déclaré un responsable norvégien. La question vaut d’être posée. Effectivement, certains voyous sont passés du pistolet au fusil à pompe, et aujourd’hui à la Kalachnikov. Est-ce pour faire face à un « adversaire » de mieux en mieux équipé ? Je ne le crois pas. Non, c’est la peur, la peur tout court, qui exacerbe le désir d’avoir un « calibre en pogne » pour monter sur un coup. En poussant le raisonnement jusqu’au bout, on pourrait se demander si les malfrats ne seraient pas moins couillus qu’avant…

Contrairement à ce que l’on entend parfois, si les policiers sont armés, ce n’est pas pour se défendre, mais, comme le dit le Code de déontologie, « pour protéger l’individu et la collectivité contre les atteintes aux personnes et aux biens ». C’est sur cette base que doit être pensé l’équipement de la police. Le reste n’est que démagogie.

Armes (factices) à double tranchant

La course-poursuite, près de Lyon, s’est terminée par la mort d’un jeune homme de vingt ans. Lorsqu’il a brandi un pistolet, les CRS ne pouvaient évidemment pas deviner qu’il s’agissait d’une arme factice. Ils ont tiré. À tort ou à raison, c’est un autre débat. Mais si ce jeune homme n’était pas mort, comment aurait-il été jugé ?

lucky-luke.1298720329.jpegCette affaire, après plusieurs autres, remet sur le devant de la scène le problème des armes factices. Faut-il légiférer sur la question ?

L’ennui d’une réglementation sur les armes, qu’elles soient authentiques ou non, c’est qu’elle ne vise que les honnêtes gens. Alors que pour les vrais voyous, il n’a jamais été aussi facile de s’approvisionner en armes et munitions de tous calibres, en raison notamment d’un trafic de fourmis entre la France et certains pays des Balkans.

Il reste les autres. Ceux qui ne sont pas placé suffisamment haut dans la hiérarchie du crime pour envisager de posséder un vrai calibre. C’est souvent le cas des plus jeunes. Ils doivent savoir que le droit ne fait pas de différence entre un vol commis avec une arme réelle ou factice (20 ans de réclusion criminelle). Même si la sentence est modulée en raison de l’absence de dangerosité.

Je me souviens d’une affaire pour laquelle j’avais été appelé à témoigner en Cour d’assises. L’avocat de l’accusé m’avait demandé si la carabine avec laquelle son client nous avait menacés, mes collègues et moi, avait le cran de sûreté verrouillé ou non. J’avais été incapable de répondre. Dans le feu de l’action, je n’avais pas noté ce détail. « Vous lui avez fait gagner cinq ans », m’avait-il soufflé après le verdict.

Mais qu’entend-on par armes factices ?

En première approche, on pense aux jouets en plastique de nos rejetons, mais en fait, il s’agit fréquemment de répliques d’armes réelles, propulsant de petites billes en rafale ou au coup par coup. Elles peuvent être mécaniques (à ressort), parfois électriques, mais le plus souvent, elles fonctionnent à l’air comprimé (avec réarmement) ou à l’aide de petites recharges de gaz. D’où le nom de airsoft gun. On dit que ces copies ont vu le jour au Japon, où une réglementation très stricte sur la détention d’armes avait été imposée par les Américains, à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. À l’origine, elles sont destinées aux collectionneurs ou aux tireurs sur cible. Mais aujourd’hui, de plus en plus, on les utilise dans des jeux de rôle, lors de scénarios basés sur des opérations militaires ou des opérations de police. Et, écolo oblige, les billes sont devenues biodégradables.

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En France, la vente de ces fac-similés, est réglementée. Lorsque l’énergie à la bouche du canon est comprise entre 0.08  joule et 2 joules, elles sont notamment interdites aux mineurs. En deçà, elles sont en vente libre (même aux mineurs), et au-delà, elles entrent dans la 7° catégorie du décret de 1995 (armes non soumises à déclaration).

À noter qu’une circulaire de 1998, donne instruction aux préfets d’interdire le port et le transport d’objets ayant l’apparence d’une arme à feu aux abords des établissements scolaires.

Lors du débat sur la nouvelle législation sur les armes, les parlementaires se sont penchés sur la question. Certains ont rappelé, à juste raison me semble-t-il, que l’on ne pouvait mettre dans le même panier des objets destinés à tuer et des objets ludiques. Et que les armes factices devaient faire l’objet d’un autre débat.

Mais la question se pose de savoir s’il faut les prohiber totalement. Ce qui a été fait en Grande-Bretagne, où, pourtant, le nombre d’agressions commises avec de telles armes n’a pas baissé. Il a même légèrement progressé.

Il semble donc que l’on se tourne plutôt vers une réglementation visant à sanctionner le transport non justifié de ces imitations. Comme c’est le cas pour les tireurs sportifs, qui ne peuvent transporter leurs armes (réelles) que de leur domicile au stand de tir, et encore doivent-elles être provisoirement neutralisées.

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Cela dit, on peut s’interroger : ne faudrait-il pas retoucher le Code pénal pour minimiser les menaces avec une arme fictive, donc non dangereuse, sauf pour le délinquant lui-même, comme le montre l’affaire de Lyon ? Passer de l’infraction criminelle au délit, plutôt que de correctionnaliser. Un bonus, quoi !

Pas d'armes dans la hotte du Père Noël

On ne se fait pas justice soi-même, telle est la règle. Pourtant, lorsqu’un homme tranquille, honnête, se voit traité comme un meurtrier alors qu’il a donné la mort pour défendre sa vie ou ses biens, l’opinion publique a du mal à comprendre. Et de s’interroger : que se serait-il passé si Anne-Lorraine Schmitt, la jeune femme assassinée dans le RER D, avait tué son agresseur ? Lui aurait-on reproché de porter une arme de défense ?

pere-noel-sous-haute-protection.1293272789.jpgPourtant, le procès de son meurtrier a mis en évidence le danger pour une femme de prendre simplement les transports en commun. L’autre soir, un dossier du journal de France 2 était consacré au sujet, micro-trottoir à l’appui. L’appréhension n’était pas feinte chez les personnes interrogées. L’une d’elles, une dame entre deux âges, a eu cette réponse, que je cite de mémoire : « Si j’ai peur, je ne suis pas obligée de le montrer ».

Se contrôler, c’est déjà faire preuve de courage. Mais pas facile de résister à cette angoisse latente, alors que chaque jour la presse se fait l’écho de violences et que nos politiciens en ont fait leur fonds de commerce. Le dernier truc à la mode, c’est de nous montrer des agressions enregistrées par les caméras de vidéosurveillance. Une sorte de reality-show. Conclusion : on serre les fesses en grimpant dans un wagon vide ou en attendant la rame, lorsque le quai est désert.

On souhaiterait presque apercevoir la casquette d’un flic ! Je rigole (jaune). Car même les policiers n’hésitent pas à se plaindre de la violence et des attaques dont ils font l’objet. Faudra-t-il, comme l’avait proposé naïvement Ségolène Royal lors de la campagne pour les Présidentielles, protéger les policières par des policiers !

Et pourtant, eux, ils sont armés. Tandis que nous…

Alors, la question se pose ainsi : si la vie en société est devenue si dangereuse, comme on nous le serine, pourquoi nous interdire le droit de se défendre ?

Je sais, je sais, sujet explosif dont il ne faut pas parler. Et pourtant…

Dans une récente proposition de loi, les parlementaires n’hésitent pas à affirmer que chacun a le droit de posséder une arme pour ses loisirs, comme le tir ou la chasse, ou pour faire face à « toute agression illégale ».

Hou là, on se dit, ça y est ! Sans devenir aussi tolérants que les Ricains, on vient de franchir un pas.

Car en suivant le fil de ce texte, on pouvait comprendre que l’on s’acheminait vers la possibilité pour tout un chacun de porter sur soi, non pas un revolver ni une Kalachnikov, mais une arme non létale. Un petit truc pour ne pas être complètement vulnérable si des méchants s’en prennent à nous. Une révolution. Car aujourd’hui, le moindre canif est considéré comme une arme par intention. Hormis le mini-spray au poivre (et encore, sous certaines conditions), il est interdit d’avoir sous la main le moindre ustensile d’auto-défense. Même la canne de papy est prohibée, si elle est plombée.

Mais dans le rapport final, du mois de novembre 2010, c’est un autre son de cloche. Le port d’une arme de catégorie C, c’est-à-dire les moins dangereuses, sera puni d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

Les parlementaires ont la dent dure, lorsqu’il ne s’agit pas de leur patrimoine.

Donc, les honnêtes gens n’ont pas le droit de défendre leur peau. Pour leur sécurité, ils ne peuvent compter que sur les pouvoirs publics. Mais, peu à peu, pour des raisons de gros sous, et malgré des annonces fracassantes, l’État semble se défaire d’une partie de sa responsabilité au profit des communes et même des entreprises privées. On s’achemine donc vers une sécurité à plusieurs vitesses. Selon que vous habitez dans une commune riche ou pauvre, vous serez plus ou moins bien protégé. Sauf évidemment si vous avez les moyens de vous offrir une protection privée.

Pourtant, parallèlement, tout en se vantant d’une politique hors de « nos » moyens, les grands chefs continuent d’agiter le chiffon rouge. Or, on ne peut pas nous faire peur en permanence et dans le même temps diminuer le nombre de policiers et de gendarmes. Ce n’est pas crédible. Et si les gens n’y croient plus, il n’est pas impossible qu’un jour, dans un réflexe d’auto-défense, ils s’arment à leur tour – avec l’accord du législateur ou non.

Car l’instinct de survie est le plus fort. joyeux-noel.1293272870.jpgC’est lui qui nous souffle cet adage vieux comme le monde et qu’il ne faut surtout pas prononcer à voix haute de crainte de passer pour un « affreux » : Il vaut mieux faire le boucher que le veau.

Je suis d’accord, l’expression n’est pas jolie jolie. Mais l’image est forte.

En attendant, pas d’armes dans la hotte du Père Noël, sauf à chercher des ennuis. Il reste les sports de combat.

Réflexions après l’acquittement du gendarme de Draguignan

« Ce qui me paraît malsain, c’est qu’on autorise les gendarmes à faire usage de leurs armes, et qu’ensuite on leur reproche. On met les gendarmes dans des situations impossibles. Si on ne veut plus que les gendarmes fassent usage de leur arme, il faut avoir le courage politique de modifier le cadre légal et d’aligner leur statut sur celui des policiers. »

Après ces propos, lors de son réquisitoire devant la Cour d’assises, l’avocat général Philippe Guémas a estimé que le maréchal de logis-chef Christophe Monchal avait agi dans « le cadre légal » et « conformément à ce qu’on lui a enseigné ».

Ce qui n’est pas l’avis de son confrère, le procureur Christian Girard, qui estime, lui, que le gendarme ne se trouvait pas dans « la situation d’absolue nécessité d’ouvrir le feu ».

Le jury a tranché, mais les interrogations demeurent.
En 2009, lors du débat qui a précédé le vote de la loi qui redéfinit le statut de la gendarmerie nationale, les élus se sont penchés sur le « droit exorbitant d’usage des armes des gendarmes par rapport aux policiers » : Fallait-il maintenir cette particularité, la supprimer, ou au contraire l’étendre à l’ensemble des forces de l’ordre ? Finalement, les choses sont restées en l’état. Dans l’utilisation des armes, c’est donc toujours l’article L-2338-3 du Code de la défense qui s’applique aux gendarmes, et le Code pénal aux policiers. Cette prérogative militaire a d’ailleurs été jugée conforme à l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme, sous réserve, a dit la Cour de cassation, que l’usage de la force soit absolument nécessaire au regard des circonstances. À noter que cet article prévoit plusieurs hypothèses, dont « l’évasion d’une personne régulièrement détenue ».

Le problème n’a d’ailleurs pas échappé au député Franck Marlin puisqu’il a posé la question au ministre de l’Intérieur – mais dans l’autre sens – en lui demandant s’il entendait aligner l’emploi des armes dans la police sur celui de la gendarmerie.

C’était au mois d’août 2009. La réponse a un peu traîné. Elle date du 13 juillet 2010. Brice Hortefeux rappelle à « l’honorable parlementaire » les cas où les gendarmes peuvent déployer la force armée :

1° Lorsque des violences ou des voies de fait sont exercées contre eux ou lorsqu’ils sont menacés par des individus armés ;
2° Lorsqu’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent, les postes ou les personnes qui leur sont confiés ou, enfin, si la résistance est telle qu’elle ne puisse être vaincue que par la force des armes ;
3° Lorsque les personnes invitées à s’arrêter par des appels répétés de « Halte Gendarmerie » faits à haute voix cherchent à échapper à leur garde ou à leurs investigations et ne peuvent être contraintes de s’arrêter que par l’usage des armes ;
4° Lorsqu’ils ne peuvent immobiliser autrement les véhicules, embarcations ou autres moyens de transport dont les conducteurs n’obtempèrent pas à l’ordre d’arrêt.

Il justifie la différence entre les deux corps par les risques que feraient encourir l’usage des armes en zone police, c’est-à-dire en milieu urbain, et également par le statut militaire de la gendarmerie nationale et la nature des missions susceptibles de lui être confiées. Toutefois, il ajoute qu’un décret est à l’étude pour uniformiser les conditions d’emploi des armes dans le cadre des opérations de maintien de l’ordre, mettant au diapason policiers et gendarmes ; et même les forces armées.

Qu’entend-on par maintien de l’ordre ? Réprimer une manif ? On n’ose imaginer une troupe hétérogène composée de policiers, de gendarmes et de soldats ouvrant le feu place de la République !

Soyons sérieux. Le jugement de Draguignan pose une autre question : la place de la victime dans un procès d’assises.

En effet, la loi du 15 juin 2000 a donné à l’accusé le droit de faire appel d’une décision de condamnation. Puis une nouvelle loi, du 4 mars 2002, a autorisé le procureur général à faire appel d’une décision d’acquittement. En vertu du principe de « l’égalité des armes ». Mais dans un cas comme celui-ci, où l’accusé a agi au nom de la société et où le procureur (qui représente la société) n’a demandé aucune peine contre lui, que peut-il se passer – alors que la victime ne peut faire appel que de ses intérêts civils ?

Ce gouvernement se vante de protéger les victimes, mais quid quand la victime est un gitan multirécidiviste ?

Décidément, dans ce procès, atypique, on a l’impression qu’il y a rupture d’équilibre.

Le gendarme est donc blanchi, mais au plus profond de lui, il doit bien savoir qu’il n’y a aucune gloire à vider la moitié de son chargeur sur un homme qui s’enfuit…

Comme il n’y avait aucune gloire pour l’antigang à fusiller Mesrine au volant de sa voiture, et encore moins à se réjouir de sa mort. Même s’il s’agissait de la pire des crapules.

Dans ma carrière, j’ai vu parfois des policiers se vanter d’avoir « flingué un truand ». Je me souviens d’une affaire de prise d’otages ou la BRI de Paris et l’Office du banditisme se disputaient la mort de deux braqueurs. Il a fallu attendre l’autopsie pour les départager. Parfois, je me demande comment ils vieillissent, ces flics d’un autre âge… Comment on vieillit.

Dans une étude qui date d’une douzaine d’années, le capitaine de police Frédérick Bertaux, auteur d’un mémoire universitaire de criminologie sur le stress et l’usage des armes dans la police, écrit : « Tuer ou blesser quelqu’un est ce qui peut arriver de pire à un policier ». Je dirais que policier ou pas, cela ne change rien. Tuer un homme est la pire des choses, du moins pour un homme normal. Et cela laisse des traces. Même les soldats sont parfois victimes de ce syndrome, comme un flash-back qui revient par intermittence, avec des interrogations sur une décision prise à chaud, en un trait de temps. Et cela, que le tir soit légitime ou pas.

Alors, Christophe Monchal pourra-t-il oublier ?

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Saint-Aignan : le tir du gendarme en question a été lu 28.374 fois et a suscité 181 commentaires.

A-t-on le droit d’être armé ?

56 % des personnes interrogées lors d’un sondage CSA effectué pour Le Parisien sont favorables à l’armement des polices municipales. Une réponse étonnante. Mais un député de la majorité va plus loin, il s’interroge : la possession d’une arme n’est-elle  pas un droit constitutionnel – pour tous les Français ? madalton.1275821048.gif

Et pour étayer son argumentaire, il rappelle que le comité qui planchait sur la Constitution de 1791, avait prévu un article X qui disait : «Tout citoyen a le droit d’avoir des armes chez lui, et de s’en servir…». Article qui n’a pas été formalisé, tant à l’époque il paraissait évident.

Franck Marlin, avec trois de ses collègues, vient donc de déposer un projet de loi pour modifier radicalement la réglementation sur les armes. Dans le préambule de son exposé, il cite Christian Estrosi (qui représentait Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur) qui clôturait ainsi en 2006 un colloque sur les armes et la sécurité : « Notre société ne réserve pas la possession d’armes aux seules autorités investies d’un pouvoir de contrainte, c’est-à-dire à l’État et autres personnes publiques. Au contraire, il s’agit du privilège d’un pays démocratique que de reconnaître à ses citoyens des motifs légitimes de posséder une arme, que ce soit pour la chasse, le sport ou la collection… »

Et dans son projet, le parlementaire regrette que depuis un texte d’exception voté en 1939, ce soit le pouvoir exécutif qui décide de la réglementation sur les armes alors qu’il s’agit, constitutionnellement, du domaine de la loi. En effet, dit-il « les Constituants de 1789 et les rédacteurs de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ont indiqué que le droit pour les citoyens de détenir des armes constituait un droit naturel existant en tout lieu depuis des temps immémoriaux, c’est-à-dire, « un principe supérieur et intangible, qui s’impose non seulement aux autorités d’un État déterminé, mais aux autorités de tous les États » ».

Le Code pénal de 1810 rangeait le droit d’avoir une arme parmi les droits civiques, civils et de famille. Et aujourd’hui encore, il est admis que les citoyens ont le droit de se défendre, et concourent, si besoin, à la défense de la Nation. Rappelez-vous l’appel de Michel Debré dans la nuit du 23 avril 1961 : « Dès que les sirènes retentiront, allez-y, à pied ou en voiture… » Il s’agissait pour les Parisiens de s’opposer aux parachutistes attachés au général Salan. Tandis que dans le même temps, place Beauvau, des centaines de personnes faisaient la queue pour qu’on leur donne des armes – qu’ils n’obtiendront d’ailleurs pas.

L’Union française des amateurs d’armes, qui se bat depuis longtemps pour une modification de la réglementation, cite les six critères établis par « d’éminents politologues », comme Zbigniew Brzezinski (conseiller à la sécurité du président Jimmy Carter) qui définissent l’installation du politologues.1275821157.JPGtotalitarisme dans un pays. Comme on le voit dans l’encadré (même si d’autres considérations peuvent nous troubler), le monopole de l’utilisation des armes à feu y figure en bonne place.

L’arme symbole de la démocratie ! Je ne sais pas si les Français vont suivre ce raisonnement…

Mais pourquoi des députés montent-ils au créneau sur un tel sujet, alors que l’écho des détonations des Kalachnikovs résonne encore aux oreilles des témoins des fusillades de Villiers-sur-Marne et de Marseille !

Allez, cherchez bien ! Qu’est-ce qui peut faire bouger tant soit peu l’ordonnancement de notre vieux pays ? L’Europe, évidemment. Il s’agit de se mettre en conformité  avec les directives européennes. Raison pour laquelle depuis plusieurs mois, un groupe de travail dirigé par le préfet Patrice Molle planche sur le sujet.

Aujourd’hui, les matériels de guerre, armes et munitions sont classés en différentes catégories qui vont, pour le haut de tableau, du char de combat à la lunette de nuit ou au matériel de cryptologie ; et pour le bas du tableau, des armes blanches, aux armes de tir ou de collection. Cette classification, qui ressemble à un inventaire à la Prévert, est tellement alambiquée que personne ne s’y retrouve. Qui peut dire aujourd’hui si la grand-mère qui serre précieusement une bombe aérosol de défense dans son sac est en infraction ou non ?

On irait donc vers une simplification. Certaines armes, comme les armes blanches, les armes de collection, les armes non létales…, pourraient être achetées et détenues librement.

On s’acheminerait également vers un assouplissement concernant l’autorisation de port d’arme, qui en France est quasi impossible à obtenir – sauf à avoir le bras long.

Je ne sais pas si ces propositions vont aboutir… On a tellement pris l’habitude, après chaque drame, d’entendre dire que la réglementation sur les armes allait être durcie, qu’on est presque à contre-courant.

La France est l’un des pays où pratiquement tout est interdit dans ce domaine – et l’on nous dit ces jours-ci, dans la presse, que n’importe qui peut se procurer une Kalachnikov pour moins de mille euros… Alors ?

En Grande-Bretagne, où les règles sont également très dures, un chauffeur de taxi vient de faire un carnage… Alors ?

Cette réglementation coûte un fric fou pour la faire respecter et l’on n’y comprend rien. Faut-il la simplifier ? Sans aucun doute. En tout cas, il faut faire la distinction entre celui qui détient une arme pour d’honnêtes raisons (tir, chasse, collection…) et les autres.

En revanche, on pourrait utilement réfléchir à un fichier (un de plus) qui répertorierait « l’empreinte » de toutes les armes à feu qui circulent en France, même celles des policiers et des gendarmes. shadok_marteau.1275821282.gif

Au moins, cela faciliterait les enquêtes, et peut-être cela mettrait-il un peu de plomb dans la tête de ceux qui en détiennent une…

Je voulais dire que cela les responsabiliserait – moi compris.

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Gendarmerie : Sarkozy enfonce le clou a été lu 3 331 fois et a suscité 7 commentaires.

Moratoire sur le Taser

La police a décidé de retirer temporairement les pistolets à impulsions électriques en raison de l’incertitude sur la fiabilité des appareils fabriqués avant 2005. C’est un lecteur québécois du Monde qui a attiré mon attention, car ces faits se passent au Canada, où le Taser fait la Une des journaux. Et les commentaires ne sont pas tendres.

taser_quebechebdo.1229763288.jpgTout a commencé en octobre 2007, avec la mort de Robert Dziekanski, lors d’une interpellation par les policiers de l’aéroport de Vancouver. La scène est filmée par un témoin et les images chocs diffusées sur Internet font le tour du monde. Devant la commission d’enquête qui suit ces événements, le PD-G de Taser International, Tom Smith, soutient que ces armes ne peuvent pas émettre davantage de courant que la charge pour laquelle elles sont calibrées. Il estime donc inutile de les tester. Et l’affaire aurait pu s’arrêter là. Mais des journalistes de Radio-Canada ont voulu en savoir plus. En collaboration avec ceux de la CBC, ils ont pratiqué des contrôles et des essais sur une quarantaine de Taser X26.

Résultat : quatre de ces pistolets ont émis un courant jusqu’à 50 % plus élevé que prévu (ici la vidéo en français de l’intégralité de l’enquête et des essais). Particularité, les armes défectueuses avaient été fabriquées avant 2005.

Pierre Savard, professeur à l’Institut de génie biomédical de l’École polytechnique de Montréal a déclaré qu’avec de telles armes, les probabilités de mort subite étaient augmentées de 50%.

L’ingénieur en chef de Taser International a contesté ces chiffres en estimant qu’ils n’étaient pas pertinents d’un point de vue médical.

Il faut se souvenir qu’un Taser non défectueux lance deux fléchettes entre lesquelles circule un courant de 50.000 volts pendant cinq secondes. L’ONU assimile l’usage de cette arme à une torture, et il suffit de jeter un œil sur les nombreuses vidéos qui circulent sur Internet, où l’on voit des gens se contorsionner sous la douleur, pour comprendre pourquoi.

D’après Amnesty International, 17 personnes sont mortes au taser-et-gegene_dessin_fred_stripsjournal.1229765259.jpgCanada après avoir été immobilisées à l’aide d’un Taser, et 270 aux États-Unis. La plupart d’entre elles n’étaient pas armées et auraient pu être arrêtées par d’autres moyens. Ces chiffres ne sont pas confirmés. Une analyse (je n’en connais pas l’origine) effectuée aux États-Unis sur 962 cas, entre juin 2005 et juin 2007, révèle que 743 n’ont subi aucune lésion, 216 ont eu des lésions bénignes et 3 des lésions graves. Deux sont mortes sans qu’on puisse établir un lien formel entre leur décès et la commotion électrique.

Au canada, chaque personne qui reçoit une décharge du pistolet Taser doit subir un examen médical. Il y a eu officiellement deux morts.

En France, les Taser poussent comme des champignons (vénéneux) et je ne suis pas sûr qu’on ait effectué des bancs d’essais. On attend la réaction de Que choisir ou de 60 millions de consommateurs.

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Sur ce blog :

– Le Taser et les chiffres qui tuent
– Taser pour dames (à ne pas manquer dans les commentaires la réponse de Taser-France)
– Et Taser !

Halte au feu !

Les policiers vont-ils avoir le droit d’utiliser leur arme en dehors de la légitime défense ? C’est l’une des questions qu’il va falloir résoudre d’ici le 1er janvier 2009, date à laquelle l’intégration de la gendarmerie nationale au sein du ministère de l’intérieur doit devenir effective.

policier.gifEn mai 2008, à Draguignan, un gendarme ouvre le feu sur un individu qui tente de s’enfuir alors qu’il fait l’objet d’une mesure de garde à vue. Sept coups de feu. L’homme meurt, touché par trois balles. Le militaire est poursuivi pour « coups ayant entraînés la mort sans intention de la donner » et remis en liberté au bout de quatre jours. Dans une situation identique, un policier aurait été mis en examen pour homicide volontaire.

Il existe en effet une différence quasi doctrinale entre ces deux corps :

– Les gendarmes peuvent ouvrir le feu pour arrêter un criminel ou un délinquant (la Cour de cassation a tenté de limiter ce droit : le tir doit être «absolument nécessaire» et le gendarme doit porter l’uniforme).

– Les policiers ne peuvent utiliser leur arme qu’en état de légitime défense de soi-même ou d’autrui (la jurisprudence a toutefois admis «l’état de nécessité»).

Or le 16 octobre dernier, les sénateurs ont posé à Michèle Alliot-Marie « la question de l’armement des forces de l’ordre », sous-entendu une fois l’intégration effectuée.

Les sages avaient-ils une idée derrière la tête ?

Si l’on se souvient qu’en novembre 2001 ils s’étaient déjà fortement intéressés à l’utilisation des armes dans la police, on peut le craindre.

À l’époque, ils s’étonnaient que les policiers ne puissent faire usage de leur arme qu’en état de légitime défense. « Il en résulte, disaient-ils, que les policiers sont conduits soit à s’exposer de façon excessive, soit au contraire à ne pas pousser leur action aussi loin que le bon accomplissement de leur mission l’impliquerait… »

Autrement dit, à leurs yeux, les flics ne peuvent être que des cowboys ou des froussards…

À la finale, les sénateurs s’étaient mis d’accord pour donner aux policiers les mêmes droits que les gendarmes – et même un peu plus. Heureusement, le projet est passé à la trappe.

Utililsation armes police_projet loi senat.jpg

En dehors de périodes troubles de notre histoire (1943-45) les policiers n’ont jamais eu le droit d’utiliser leur arme sauf pour sauver leur vie ou celle d’autrui. Policiers et gendarmes vont désormais travailler flic_indecis_lessor.jpgcôte à côte. Dans une situation dangereuse, les uns pourraient tirer et pas les autres. Situation ingérable. Casse-tête pour les magistrats… Le gouvernement va devoir trancher. A votre avis, dans quel sens ?

En ce XXI° siècle qui démarre très sécuritaire va-t-on donner aux policiers un pouvoir qu’a priori ils ne demandent pas ?


Le Taser et les chiffres qui tuent

La ministre de l’Intérieur monte au créneau pour défendre le Taser. Et elle annonce crânement devant les sénateurs que son utilisation se traduit par une diminution de 30 % de l’usage des armes à feu… C’est ce qui s’appelle se prendre les pieds dans le pas de tir.

les-dupond_bakchichinfo.1224581395.jpgDans une étude sur « la gestion du stress lié à l’usage des armes dans la police », le capitaine Pierre-Frédérick Bertaux a étudié les dossiers de policiers qui ont fait usage de leur arme entre 1989 et 1996 sur le ressort de la préfecture de police. (Il s’agit non pas d’une sortie d’arme mais d’un tir réel). Sur cette période, il a comptabilisé 218 cas, ce qui s’est traduit par 160 procédures (administratives et/ou judiciaires). On peut estimer qu’une projection au plan national nous donnerait au maximum un chiffre double.

Une soixantaine de policiers se trouvent donc chaque année dans une situation où le danger (pour soi-même ou pour autrui) nécessite l’usage de l’arme à feu.

60 cas par an c’est beaucoup, mais c’est quand même trop peu pour nous brandir sous le nez des pourcentages en trompe-l’œil.

Il appartient donc à Madame Alliot-Marie de parler « sérieusement » de choses sérieuses.

Nous dire que le Taser a réduit de 30 % l’utilisation des armes à feu dans la police, c’est nous prendre pour des benêts. D’autant que le pistolet Sig-Sauer et le pistolet électrique n’ont pas du tout la même utilité. Dans un cas, on parle de légitime défense et dans l’autre de neutraliser un individu avec un minimum de risques.  ane.1224581771.gif

La question me semble-t-il n’est pas de savoir si aux États-Unis le Taser est directement ou indirectement responsable de la mort de cent ou deux personnes, car je crains fort que l’on se perde dans des combats d’experts… Non, renversons le problème : Cette arme électrique a-t-elle sauvé des vies ?


Taser pour dames

Aux États-Unis, il est couleur peau de léopard et il fait MP3. Chez nous, il est rose, mais il ne joue pas de musique. Non mesdames, ce n’est pas le dernier sextoy à la mode, mais le petit frère du Taser.

On l’appelle le Stoper C2. Il est deux fois moins puissant que son grand frère, et il a une portée de 4 mètres.le-stoper-c2.1223536953.jpg

Pour l’heure, cette arme d’auto-défense est « probablement » classée en 6° catégorie (si quelqu’un en sait plus…). Elle est donc en vente libre. L’importateur, SMP Technologies, la propose pour moins de 500 €, et à ce prix-là, nous dit-il, il assure la formation de ses clientes…

Parmi celles-ci, on ne doit pas compter Martine Aubry. D’autant qu’elle vient d’être victime d’un tir – non létal – du fameux pistolet électrique. Elle a déclaré que cette arme avait fait 290 victimes en Amérique du Nord… Aussi sec, l’importateur pour la France a envoyé sans sommation une sommation par voie d’huissier à ladite dame. Interrogée par un journaliste de La voix du Nord, elle a répondu : « Je n’ai pas l’habitude de dire des choses dont je ne suis pas sûre. » Pour appuyer ses dires, elle a fait référence à un rapport d’Amnesty International ainsi qu’a un rapport de l’ONU qui classe ce bidule électrique parmi les instruments de tortures.

La question de fond est la suivante : le Taser, présenté comme une arme non létale, peut-il entraîner la mort ?

Indubitablement, la réponse est oui. La démonstration la plus frappante est le décès – quasi instantané – d’un immigrant polonais, à l’aéroport de Vancouver, au Canada. Sur les images prises par un témoin, on voit un homme très agité, visiblement « désorienté », mais tout aussi visiblement non menaçant. Les policiers s’approchent et ils le tasérisent, alors qu’à l’évidence il aurait pu être maîtrisé d’une manière plus… conventionnelle.

Mais pour être objectif, le Taser peut se révéler efficace pour neutraliser un individu dangereux avec un minimum de risques pour lui et pour les intervenants. Ainsi, le 3 octobre 2008, un homme retranché dans son appartement, en état de démence, menace d’attenter à ses jours à l’aide d’un couteau de boucher. Situation rouge. On parlemente. Mais l’homme ne se calme pas. C’est alors qu’un policier parvient à s’approcher suffisamment près pour utiliser son Taser. Résultat : aucune victime.

les-2-sondes-du-taser.1223537223.jpgLorsque j’ai parlé sur ce blog de l’arme individuelle des policiers, le Sig Sauer, l’un d’eux a laissé un commentaire : « Ce n’est pas l’arme qui est dangereuse mais celui qui la tient… »

La police et la gendarmerie sont équipées du pistolet électrique depuis 2004. Il y en aurait environ 4.000 en dotation, mais on ignore combien de fois il a été utilisé. Il y a eu plusieurs accidents. A ma connaissance – aucun mortel. Le dernier au mois d’août 2008. Lors d’un contrôle d’identité, à Vernon, dans l’Eure, un policier a tiré sur un homme de 26 ans. Les fléchettes se sont plantées dans son crâne. L’enquête est en cours, comme on dit.operation-tranquillite_prefecture_hautrhin.1223537383.png

Depuis peu, le Taser fait partie de la panoplie de la police municipale. À la diligence du maire. Jusqu’à ce jour, ils ne sont pas chauds, nos élus. Et je crois qu’ils ont raison, car une utilisation malencontreuse pourrait bien en faire un boomerang électoral.

En France, les autorités ont classé cette arme – non dangereuse – en 4° catégorie, au même rang qu’un revolver 357 magnum, ce qui est curieux. Et ce qui interdit son achat par un particulier.

Heureusement qu’il nous reste le pistolet de ces dames.

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