LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Argent et escroqueries (Page 3 of 5)

Sale temps pour les orpailleurs de Guyane

Dans l’Hexagone, les gendarmes veillent sur les câbles de cuivre de la SNCF, mais, à des milliers de kilomètres, en Guyane, leur mission est tout autre : Ils pourchassent les chercheurs d’or. Ils sont environ 250 – et 750 militaires – à patrouiller sur un territoire rempli d’embûches. Le plan Harpie bat son plein. Ou plus exactement Harpie 2, car, après les opérations Anaconda et Harpie 1, l’année dernière, le président de la République a relancé la mobilisation contre l’orpaillage clandestin.  Et cette fois avec de grands moyens. La mission n’est pas sans danger : un soldat y a déjà laissé la vie (voir le blog secretdefense). Dans une vidéo, sur le site de la gendarmerie, on peut se faire une idée de leur job. Rien à voir avec des contrôles de vitesse sur l’autoroute… Les pieds dans les charentaises, on peut rêver d’aventures… Mais là, ce n’est pas du cinoche. Il ne s’agit pas de surprendre un cowboy solitaire accroupi près d’un fleuve, en train de tamiser du sable, mais de dénicher les puits et les galeries creusés par des colonies de clandestins à la recherche des précieuses pépites.

Il faut reconnaître qu’avec la montée fulgurante du cours de métal jaune, malgré les risques, le jeu en vaut la chandelle.

Vous me direz, achercheur-dor_image-clipart.jpgprès tout, ils ne volent personne. Mauvaise pioche. Cela ne se passe plus ainsi dans un monde qui se veut policé. D’autant que l’or fait partie des richesses naturelles de la Guyane. C’est même son premier produit d’exportation. Autour de 2 à 3 tonnes par an. Et ils sont environ 65 opérateurs à se partager le pactole, en exploitant une centaine de sites autorisés. Alors que, d’après les chiffres de 2006, retenus par une commission d’enquête du Sénat, il y aurait environ 350 sites d’orpaillage illégal, employant entre 5 000 et 10 000 personnes. Ce qui représenterait, selon les estimations de la gendarmerie nationale, 10 tonnes d’or natif par an.

Mais le problème majeur est environnemental. Essentiellement en raison de l’utilisation du mercure pour réaliser l’amalgame de l’or, procédé interdit depuis 2006. Avec  des rejets conséquents de ce métal liquide dans les eaux des fleuves. 13 tonnes par an. Et une déforestation sauvage estimée à 500 hectares par an. Les conséquences sont terribles sur la vie des habitants des rives*. Et tout ce petit monde underground génère évidemment une délinquance associée, comme la prostitution, le blanchiment d’argent et les règlements de comptes.

Une loi de 2009 a renforcé les moyens juridiques pour lutter contre l’orpaillage illégal, en donnant, par exemple, la possibilité de faire démarrer la garde à vue non pas au moment de l’arrestation, comme c’est la règle, mais lors de l’arrivée dans les locaux où celle-ci doit se dérouler. Avec un délai qui ne peut excéder vingt heures (art. 141-4 du Code minier).

Pas facile d’être un État de droit dans ces contrées.

Cependant, dans la région, les garimpeiros ne sont pas les seuls soucis des policiers et des gendarmes. Ce territoire, grand comme le Portugal, possède le niveau de vie le plus élevé du continent sud-américain.  Un attrait pour les habitants, bien plus pauvres, des pays d’alentour. Et notamment le Brésil. 60% des étrangers mis en cause dans des crimes ou des délits sont des Brésiliens. Et cela pourrait encore s’aggraver après la mise en service du pont routier sur le fleuve Oyapock, lequel va bientôt relier la Guyane à l’État de l’Amapá. Raison pour laquelle un centre de coopération policière (CCP) entre les deux pays devrait bientôt voir le jour. Cette cellule aura compétence pour tous les problèmes liés à la sécurité (sauf le terrorisme), et notamment la criminalité organisée, le trafic de stupéfiants et l’immigration irrégulière. Ce CCP sera, me semble-t-il, la première coopération transfrontière hors de l’espace Schengen. Avec toutefois une présence française bien modeste : 3 gendarmes et 1 policier.

D’après un article un rien alarmiste du Figaro, pour une population d’environ 230 000 habitants, la Guyane arrive juste derrière la Seine-Saint-Denis (six fois plus peuplée) en matière de délinquance. Mais surtout, il s’agit d’une délinquance souvent violente. Il faut dire que les armes sont partout. Elles proviennent en grande partie du voisin brésilien, le plus important fabricant d’armes de l’Amérique du Sud. Pour le procureur de Cayenne, cité dans cet article, la situation est critique. «  Les magistrats ne veulent plus venir en Guyane, effrayés par la quantité de travail que nous avons, mais aussi parce qu’ils ont peur de se faire attaquer au coin de la rue ». Quant au chef de la BAC, qui a exercé vingt ans en métropole, il soupire : « La différence, c’est qu’ici, tu peux perdre la vie pour 3 euros ».

Rien à voir pourtant avec un pays voisin, et presque homonymique : le Guyana, (l’ancienne Guyane britannique ) où le risque est omniprésent ; ni même avec le Venezuela, qui vient de publier des chiffres alarmants. Mais le taux de criminalité en Guyane est néanmoins deux fois supérieur carte-amerique-latine_site-americas-copie.1298197234.JPGà celui de la métropole. Et il est certain que sans l’arrivée d’effectifs supplémentaires, gendarmes et policiers, les choses ne vont pas s’arranger, car outre une immigration clandestine exponentielle, la Guyane est le département français où le taux de natalité est le plus élevé.

40% des homicides commis sur l’ensemble de la planète ont lieu en Amérique Latine, où, parallèlement au crime organisé, au narcotrafic et au blanchiment d’argent, la délinquance de rue connaît un accroissement qui va de pair avec la pauvreté. Entre ces deux extrêmes, on peut presque parler de l’émergence d’une criminalité moyenne, centrée notamment sur le trafic d’armes, le trafic de personnes et le trafic sexuel. Une activité criminelle qui deviendrait… coutumière.

Avec un contre-coup : l’utilisation de plus en plus fréquente des forces armées pour effectuer des opérations de police. Un véritable risque pour ce monde en recherche d’équilibre.

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* Dans un autre ordre d’idées, des travaux sont en cours en vue d’effectuer des forages pétroliers au large de la Guyane, et cela, malgré les risques écologiques et l’appel à la prudence de la Commission européenne. Plus de détails sur Blada.com. Ou comment l’on passe du métal jaune à l’or noir…

Le coup de baguette magique des FAI

On va payer plus ! Non seulement pour la télévision reçue via l’ADSL ou les offres triple play, mais également pour les téléphones portables. Comment justifier cette augmentation des tarifs aux yeux du public ? Simple, il suffit de lire l’article 11 de la loi de finances pour 2011 :

« Le taux réduit n’est pas applicable lorsque la baguette_magique.1293792043.jpgdistribution de services de télévision est comprise dans une offre unique qui comporte pour un prix forfaitaire l’accès à un réseau de communications électroniques au sens du 2° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques. Néanmoins, lorsque les droits de distribution des services de télévision ont été acquis en tout ou partie contre rémunération par le fournisseur des services, le taux réduit est applicable à la part de l’abonnement correspondante. Cette part est égale, en fonction du choix opéré par le distributeur des services, soit aux sommes payées, par usager, pour l’acquisition des droits susmentionnés, soit au prix auquel les services correspondant aux mêmes droits sont distribués effectivement par ce distributeur dans une offre de services de télévision distincte de l’accès à un réseau de communications électroniques. »

C’est l’explication que me fournit SFR dans la lettre que je viens de recevoir. Comme je n’y ai rien compris, j’ai cherché à en savoir plus…

À la création de Canal +, en 1982, il avait été décidé d’une TVA à 5.5 %. Par la suite, lorsque d’autres chaînes à péage ont vu le jour, ce taux réduit s’est appliqué tout naturellement aux nouveaux arrivants. Avec l’apparition des offres triple play, logiquement, les FAI auraient donc dû retenir cette TVA light sur le tiers de la facture, c’est-à-dire la partie télé. Mais, avec la bénédiction de l’administration fiscale, ils ont fait moite-moite, et parfois plus. En contrepartie de quoi, les opérateurs étaient invités à verser une « contribution pour le financement de la production audiovisuelle » : la taxe COSIP.

Mais certains de nos voisins n’ont pas trouvé la chose à leur goût. Ils ont saisi la Commission européenne. Laquelle a mis la France en demeure de se mettre aux normes. On pouvait donc s’attendre à une TVA au taux de 5.5 % non plus sur 50 % de la facture, mais sur un tiers.

Sauf que les FAI appliquent cette TVA réduite un peu comme ils l’entendent, même pour les abonnés aux téléphones mobiles qui ne reçoivent pas la télé. Lesquels verront aussi leur facture grimpée de 6.26 % pour un forfait de 24.90 €. C’est l’exemple donné par SFR. Cette histoire représente au passage un sérieux manque à gagner pour l’État.

Lorsqu’on voit la polémique suscitée par le taux à 5.5 % dans la restauration, on est en droit de s’interroger.

Une combine qui laisse craindre « que les opérateurs aient utilisé un dispositif fiscal pour dégager une marge qui n’a jamais été redistribuée aux consommateurs », nous dit l’UFC-Que Choisir. Tandis que d’autres mettent carrément les pieds dans le plat et parlent d’un véritable scandale.

Mais qu’on se rassure, le ministre du numérique a demandé des comptes aux FAI. Chiche qu’il leur impose un rattrapage de TVA !tchin_wwwtchintchinch.1293792165.jpg

Avec mes meilleurs vœux à tous.

Pas d'arête dans le foie gras

Les députés sont entrés en résistance. Mais ils auront beau faire, lorsqu’on lance au bon peuple l’idée audacieuse d’instaurer la transparence financière en  politique, on ne peut pas revenir en arrière. Jean-Luc Warsmann, le président de la arete-poisson_site_frvocabulary.pgcommission des lois, l’a bien compris. Devant ses collègues qui refusaient de voter une loi qui les touche au portefeuille, il leur a dit : « On ne peut pas envoyer le message ce soir que, lorsque quelqu’un fraude délibérément, il ne se passe rien ! »

Pourtant, ce sera (presque) le cas, si le mois prochain le vote de la loi sur la transparence financière de la vie politique est adoptée en l’état. Le texte initial prévoyait une peine de deux ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende pour le député qui aurait fait une fausse déclaration sur son patrimoine ou qui aurait menti sur le montant de ses revenus – autrement dit qui se serait enrichi sur le dos des citoyens qui l’ont élu. Car en fait, tout ce qu’on leur demande, c’est de justifier d’un enrichissement personnel durant leur mandat. Ce texte ne vise donc que les tricheurs…

Or, d’un trait de plume, on vient de gommer les deux ans de prison pour ne conserver que l’amende.
Étonnant, non, alors que sans cesse et cela pour le moindre délit, on augmente le nombre d’années de prison ! Au point que bientôt les peines en correctionnelle seront plus élevées qu’en cour d’assises – d’où l’idée du jury populaire pour les délits.

Je me demande comment nos députés vont réagir, alors qu’ils doivent voter – aujourd’hui – la LOPPSI 2. Vont-ils par exemple adopter ce nouvel article du code pénal (226-4-1) sur la lutte contre la cybercriminalité, qui prévoit une peine de deux ans d’emprisonnement pour toute personne qui usurpe l’identité d’un tiers en vue de troubler sa tranquillité ou de porter atteinte à son honneur ? Ou cet article 332-16-1 du code du sport qui menace de six mois de prison le supporteur d’un club qui serait passé outre à l’interdiction de se rendre à un match…

Sûr qu’ils vont faire machine arrière. L’arête est trop grosse. Mais si ce n’était pas le cas, si nos députés préféraient s’autoamnistier tout en sanctionnant durement « les autres », s’ils n’hésitaient pas à prévoir de lourdes peines de prison pour leurs concitoyens tout en refusant de châtier leurs collègues indélicats, voire malhonnêtes, on serait en droit de s’interroger. On serait en droit de s’interroger sur leur légitimité. famille-oie.1292923426.gif

Allez, je leur souhaite malgré tout un joyeux Noël. Après tout, ça ne mange pas de pain. Et comme disait Marguerite, ma grand-mère d’adoption : « Pour déguster le foie gras, il faut d’abord gaver les oies. »

Le FBI déglingue les pyramides de Ponzi

C’est l’opération Confiance brisée (Broken trust), une vaste enquête policière qui a abouti à la mise à jour de 231 affaires d’escroqueries, avec un préjudice estimé à plus de 8 milliards de dollars*. 120 000 victimes répertoriées à ce jour. La plus pyramide-de-ponzi_site-helene-bouchard.1291803533.jpggrande opération contre la fraude jamais réalisée. Un coup de balai sous les projecteurs des médias, avec un double objectif : éradiquer les escroqueries aux placements financiers bidons et sensibiliser le public. C’est une opération, dit-on, voulue par le président Obama, peut-être pour montrer que le monde de la finance n’est pas au-dessus des lois…

Parmi les fraudes retenues, bon nombre sont calquées sur le principe de Ponzi, appelé aussi escroquerie à la boule de neige, mais il y en a d’autres. Comme le système (pump-and-dump) qui consiste à faire croire à une opportunité d’achat sur une action qui ne vaut pas un clou, pour faire monter la cote et empocher une confortable plus-value sur le dos des gobe-mouches ; ou encore la fraude immobilière, au marché des changes, etc. Celle qui marcherait le mieux serait la fraude par affinité, la technique de Madoff, si je ne m’abuse : on fait jouer la corde sensible de l’attachement à une même communauté.

Pour obtenir ce résultat, le FBI a utilisé toutes les techniques d’enquêtes, de l’infiltration du milieu aux surveillances électroniques les plus sophistiquées. Parallèlement, ce service a ouvert un bureau réservé aux victimes pour les aider tant sur le plan matériel que psychologique, surtout les personnes les plus faibles, notamment les personnes âgées.

Le message de l’administration Obama est clair : la chasse à la fraude à l’investissement est ouverte. Et pour cela, les autorités du pays souhaitent la collaboration du secteur privé : « Ensemble, nous continuerons à pourchasser ceux qui cherchent à s’enrichir au détriment du travail des hommes et des femmes des États-unis d’Amérique », a déclaré le directeur exécutif adjoint de la Cour pénal.

Dans le même temps, mais dans un autre domaine, trois laboratoires pharmaceutiques (dont un allemand) ont accepté de payer une amende de 421 millions de dollars pour éviter un procès. L’administration leur reprochait d’avoir arnaqué l’assurance-maladie en gonflant le prix des médicaments. Ils facturaient un montant plus élevé que celui réellement déboursé par le client, ce qui permettait à ce dernier d’empocher la différence. Une rétrocommission en quelque sorte.

De l’autre côté de la frontière, pareil. Les fraudeurs de haut vol sont dans la ligne de mire des autorités canadiennes. Ainsi, un homme accusé d’exercice illégal du métier de courtier et de conseiller en valeurs financières fait actuellement l’objet de poursuites de la part de l’Autorité des marchés qui lui réclame une amende de 237 000 $. Et un homme d’affaires proche de Vito Rizzuto, le parrain québécois récemment assassiné (une fortune considérable), doit répondre à des accusations criminelles pour fraude fiscale.

Ces opérations ont un but essentiel : rétablir la confiance. Car la crise financière a laissé un goût amer chez nombre de gens – et pas seulement outre-atlantique. Avec l’impression que les fautifs, les requins de la finance, ont été blanchis de leurs tripatouillages, et qu’ils sont prêts à recommencer.

Et en France ?

En 2010, il s’est passé plein de choses. Ainsi, on sait à présent que la femme la plus riche du pays gruge le fisc depuis des années. Ou qu’un ancien Premier ministre a encaissé sans sourcillier 1.5 million d’euros en espèces pour sa campagne électorale. Ou que Bernard Arnaud (dont la fortune, d’après Challenge , a augmenté de 57 % en 2010) tente de faire main basse sur le groupe Hermès par des procédés… inhabituels.

Et ?

Et le président de l’AMF de s’étonner : « On est le seul pays d’Europe où quelque chose comme cela peut se passer », a-t-il déclaré.

Et Jérôme Kerviel a été lourdement condamné.

Et voilà !

Alors, en cette fin d’année, je rêve tout haut. Je me dis, puisque les caisses de l’État sont vides, nos limiers de Bercy, de la police financière, voire de la DCRI, qu’on nous a présenté comme un « FBI à la française », pourraient peut être oublier un peu les banlieues et coller le train à d’autres voyous, ceux qui fréquentent les salons dorés des beaux quartiers. Et gratter requin_decorations-creations.1291803626.jpgpour voir ce qui se cache sous les paillettes.

Je ne sais pas si cela rapporterait des sous, mais ce serait un bon moyen de rétablir la confiance. De nous donner l’impression qu’on est tous dans la même bateau et qu’on rame bien dans le même sens.

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*Le journal Les Echos parle de 532 personnes morales ou physiques, accusées d’avoir causé un préjudice de 10.4 milliards de dollars.

Kerviel et le prix du blé

La Société Générale aurait récupéré 1,7 milliard sur le montant des pertes de Jérôme Kerviel, nous dit la presse. Et du coup, on a l’impression que l’État lui aurait remboursé une partie de l’argent perdu par son trader… Ce qui n’est pas le cas, évidemment. En revanche, ce qui peut choquer, c’est la différence de traitement fiscal entre une société et un particulier. Si vous ou moi perdons de l’argent en bourse, cela ne modifiera en rien le montant de notre impôt sur le revenu. Tout au plus pourra-t-on reporter cette perte sur des gains éventuels, dans les dix années qui suivent. Tandis que si l’on gagne, l’imposition pour une entreprise et un particulier est quasi identique.

Mais, dès qu’on parle d’argent, surtout s’il s’agit de fortes sommes, on est tous un peu perdus. Moi le premier. Si ça se trouve, je viens d’écrire une grosse boulette.

Bon, je vais essayer de me refaire…

Ce procècoup-de-pied_picsou.1286787654.jpgs SG contre JK, c’était un peu le pot de fer contre le pot terre, et le résultat n’a pas manqué, le pot de terre a été réduit en miettes. Et l’on a beau nous tenir un discours modérateur, nous expliquer en long en large que les juges se sont prononcés sur les faits, rien que sur les faits, cette  condamnation laisse quand même planer comme un sentiment d’insatisfaction.

Et même d’incompréhension.

Alors, pour mieux comprendre, j’ai cherché des réponses – jusqu’à l’absurde.  Ce billet s’éloigne de l’objet de ce blog, mais si l’on veut me suivre dans ce cafouillis de zéros…

Le travail de Jérôme Kerviel consistait à spéculer sur les contrats Futures, lesquels se situent dans la catégorie des contrats à terme. Lorsqu’on cherche la définition de ces produits, dits « dérivés », on se retrouve, de façon quasi systématique devant une métaphore bien terre-à-terre : le prix du blé. Quel rapport me direz-vous ? Je pense que les boursicoteurs donnent cet exemple pour montrer qu’ils ne sont pas tout à fait coupés de la réalité. Alors qu’ils évoluent souvent dans un monde virtuel. Donc, le blé pousse et le paysan se demande à combien il pourra le vendre. Alors, pour mettre fin à ses angoisses, quelqu’un lui propose de lui acheter sur pied, au cours du jour, quel que soit son prix le jour de la récolte. Si le jour J le cours a chuté, le paysan se frotte les mains, il a fait une bonne affaire ; et s’il a monté, il se dit qu’on ne l’y reprendra plus.

Dans cette histoire, sans rien connaître à la bourse, l’agriculteur et son acheteur ont conclu un contrat à terme. L’un l’a vendu, l’autre l’a acheté. Eh bien, Jérôme Kerviel jonglait avec les contrats à terme qui portaient non sur du blé, mais sur des indices boursiers, et notamment celui de Francfort, le DAX, pour lequel il semblait avoir une petite préférence.

Comment ça fonctionne ?

Ces jours-ci, le DAX cote environ 6300 points. Chaque point vaut 25 €. La valeur d’un contrat sur le DAX est donc de 157 500 €. Mais pour l’acheter, nul besoin de disposer de cette somme, une caution (le déposit) d’environ 6000 € est suffisante.

Ce qui réduit considérablement la facture.

Mais cette somme n’est même pas utilisée. On se contente de faire les comptes en fin de journée (l’appel de marge). Soit la position est gagnante, et l’on encaisse un gain, soit elle est perdante, et il faut payer sa dette. À défaut, la position est clôturée d’office le matin suivant.

Par exemple, si le DAX a gagné 1% dans journée, soit 63 points, l’heureux détenteur d’un Future (on parle d’un lot) va encaisser la somme de 63 X 25 € = 1575 €. Soit un gain de plus de 26% sur une somme qui est restée bloquée sur son compte. Si l’indice a baissé, évidemment, c’est l’inverse.

Lorsque Kerviel a été suspendu de ses fonctions, il possédait environ 10 000 lots sur le DAX (et d’autres sur d’autres indices). Ce qui représente une somme « virtuelle » de 1,575 milliard d’euros, et une somme réelle de 60 millions d’euros.

Pour résumé, et si je ne me trompe pas dans les zéros, si le trader était engagé pour un montant de 50 milliards, comme on l’a dit, il s’agissait en fait d’un montant réel de moins de deux milliards. Un argent qui n’avait pas vocation à être utilisé, puisque seule la compensation gains-pertes est comptabilisée.

Alors, comment a-t-il pu perdre près de cinq milliards ? Après avoir connu le succès, il se trouvait alors dans une spirale de pertes, et, chaque jour, il fallait remettre de l’argent au pot pour continuer de jouer. C’est le plus vieux système à la roulette : doubler sa mise à chaque coup perdant. On est sûr d’y laisser sa chemise.

Mais d’ailleurs, ce n’est pas lui qui a perdu cette somme ! Ses comptes s’arrêtent au 20 janvier 2008. À cette date, d’après un rapport de l’Autorité des marchés financiers, ses pertes potentielles avoisinaient 2,7 milliards. Mais la vente en catastrophe ordonnée par le PDG de la Société Générale aurait généré une perte supplémentaire de 3,6 milliards. Soit une perte totale de 6,3 milliards.

Alors, d’où vient ce chiffre de 4,9 milliards ? Eh bien, la banque a pris en compte la somme gagnée par Kerviel en 2007 (nous sommes en janvier 2008), soit 1,4 milliard (6,3 – 1,4 = 4,9).

Si on refait les calculs en tenant compte de ces chiffres, et si l’on admet le principe que Kerviel ne peut être tenu pour responsable d’opérations effectuées sans son accord, on obtient le décompte suivant :

6,3 (perte totale) – 3,6 (perte lors de la revente par la direction de la SG) + 1,4 (gain de Kerviel en 2007) = 1,3 milliard (montant de la perte de Kerviel)

Et pour poursuivre le raisonnement par l’absurde, comme la Société générale a récupéré une moins-value fiscale de 1flic_attitudes_lessor.1286790326.jpg,7 milliard d’euros. La banque doit des réparations à son salarié pour un montant de 400 millions d’euros.

CQFD.

Une pénalité qui viendrait à bon droit sanctionner le fait de spéculer sur ses fonds propres, autrement dit de prendre des risques inconsidérés avec l’argent destiné en principe à couvrir les risques d’une activité bancaire.

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Déchéance de nationalité : pour qui et pour quoi ? a été lu 1156 fois et a suscité 16 commentaires.

Le trust, niche fiscale des milliardaires

Tout est bon pour grappiller quelques petits millions d’euros sur le dos du fisc, comme nous le montre l’affaire Bettencourt. Mais dans le catalogue des combines et entourloupes (paradis fiscaux, placements offshore, fondations…) on n’a pas mentionné la martingale à la mode : le trust.

niche-fiscale_site_partenaire-europeen.jpgLe trust n’est ni une personne physique ni une société ni quoi que ce soit. C’est une entité, une réalité abstraite. Un acte par lequel une personne confie ses biens à une autre personne, afin que celle-ci les gère au profit d’une troisième personne, avant de les remettre à une quatrième personne – celle qui, à l’expiration du trust, empoche la mise. Tout cela sous le contrôle éventuel d’un  cinquième larron appelé le « protector ».

Je sais je sais, on n’y comprend rien. Mais c’est exprès. D’autant que cela peut encore se compliquer lorsqu’il y a réunion de plusieurs candidats trusteurs.

Quel avantage, me direz-vous. Eh bien, le principal avantage, c’est que les biens mis en trust n’apparaissent plus dans le patrimoine de leur propriétaire. Puisque juridiquement, il s’en est défait au profit du trust – jusqu’au jour où il les récupérera, lui ou ses héritiers.

Un bon truc le trust, non !

Vous pensez bien que l’administration fiscale s’est intéressée depuis longtemps à ce petit bijou du droit anglo-saxon. Mais elle s’y est plus ou moins cassé les dents. Ainsi, le Tribunal de grande instance de Nanterre a jugé qu’un résident français ne pouvait pas être assujetti à l’ISF pour des revenus provenant d’un trust créé aux USA. Et, en 2007, la Cour de cassation a enfoncé le clou dans un arrêt qui souligne l’intérêt fiscal d’un trust ouvert à l’étranger.

« Il peut donc être utilisé pour planifier une succession, préparer sa retraite, financer une association caritative… ou simplement organiser une séparation temporaire. Ainsi, Sylvio Berlusconi a mis dans un trust ses participations dans des chaînes de télévision italiennes pendant son mandat de Premier ministre », lit-on, dans Money Week. Et de citer l’exemple d’un résident américain, de nationalité française, décédé en France en 1995, dont les héritiers (français) ont encaissé la succession sans verser le moindre centime au fisc. Car le défunt n’étant plus légalement propriétaire des biens, il s’agissait non d’un héritage mais d’une mutation à titre gratuit.

Pour ne pas être en reste, en 2007, la France a créé son propre trust, mais réservé uniquement aux entreprises : la fiducie.

L’article 2011 du Code civil nous en donne cette définition, alambiquée à plaisir : «La fiducie est l’opération par laquelle un ou plusieurs constituants transfèrent des biens, des droits ou des sûretés, ou un ensemble de biens, de droits ou de sûretés, présents ou futurs, à un ou plusieurs fiduciaires qui, les tenant séparés de leur patrimoine propre, agissent dans un but déterminé au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires.»

Bon !

Il s’agissait, a-t-on dit à l’époque, de freiner les délocalisations. Pourtant, l’année dernière, la fiducie s’est ouverte aux personnes physiques.

Pour faire simple, aujourd’hui, beep-beep_site_allo-cine.jpgpour un droit fixe de 125€, chacun peut créer sa fiducie. Encore faut-il avoir quelque chose à mettre dedans. On imagine les avantages sur l’ISF ou les droits de succession… Mais je suis peut-être mauvaise langue : la loi est trop récente pour avoir la moindre idée de ses imbrications fiscales.

En attendant, si Mme Bettencourt avait glissé son île dans un trust de droit anglo-saxon, qui lui est aussi vieux que le monde, les as de la brigade financière auraient pu chercher longtemps à qui elle appartenait, car elle n’aurait appartenu à personne.

Alors pourquoi ses gestionnaires de fortune n’ont-ils pas utilisé ce stratagème ? Je me garderai bien de répéter l’opinion de l’avocat fiscaliste qui a fait l’effort de m’initier à ces techniques…

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Un flic qui se mouille a été lu 56 181 fois et a suscité 62 réactions. Comme le commentaire d’Olivier P., qui se trouvait près du lac Daumesnil, a été malencontreusement effacé, on peut le retrouver ici. Sa vision des événements est moins lyrique que la mienne.

Préliminaires dans l’enquête Bettencourt

Enquêtes préliminaires tous azimuts. La justice est en marche, disent certains, tandis que d’autres affirment qu’il ne s’agit que poudre aux yeux, le procureur n’étant pas un magistrat indépendant. Mais c’est quoi, « une préli » ?

juge_intimeconviction.1278747173.jpgC’est une enquête effectuée à la demande du parquet ou sur l’initiative des policiers ou des gendarmes, qu’ils soient officiers ou agents de police judiciaire. Dénommée autrefois « enquête officieuse », elle a été encadrée par le Code de procédure pénale et longtemps présentée comme un cadre juridique qui ne permet pas l’utilisation de la coercition. Une enquête à la bonne franquette, quoi !

Au fil des ans, les choses ont un peu évolué, mais pas tellement. Ainsi, les perquisitions au domicile de M. de Maistre et à son bureau de la société Clymène, n’ont pu être effectuées qu’avec le consentement écrit de l’intéressé.

Que se serait-il passé s’il avait refusé ?

Ah, ah ! Tous les vieux poulets se souviennent avoir poireauté des heures devant la porte d’un suspect en attendant la précieuse commission rogatoire qui les autoriserait enfin à pénétrer dans les lieux. Car, en cas de refus de l’intéressé, pas d’autres choix que de saisir un juge d’instruction.

Aujourd’hui, toutefois, le procureur a une autre possibilité : se retourner vers le juge des libertés et de la détention (loi du 9 mars 2004), lequel peut autoriser la perquisition pour les nécessités d’une enquête préliminaire concernant des faits punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement.

Ce qui ne semble pas le cas ici.

Enfin, je dis ça… Comme je suis l’un des rares Français à ne pas avoir accès au dossier, je ne connais pas la qualification juridique retenue par le procureur Courroye. On parle de financement illégal de la campagne présidentielle…

Donc, si le gestionnaire de la fortune de Mme Bettencourt avait refusé la perquisition, le procureur aurait dû saisir un juge d’instruction.

Ce qui, vous en conviendrez, n’aurait pas nécessairement arrangé les affaires – ni de l’un ni de l’autre.

D’ailleurs, dans cette même enquête préliminaire, on apprend que les policiers seraient allés chercher la comptable, Mme Thibout, quelque part dans le Gard. Je suppose qu’ils lui ont juste demandé l’heure… Ou tout au plus de bien vouloir se présenter à leur service. Une simple convocation verbale. Car en préli, pas d’arrestation, pas de garde à vue. « La condition préalable au placement en garde à vue est que l’intéressé accepte de se mettre à la disposition de l’officier de police judiciaire », nous précise le commissaire principal Hervé Vlamynck*. Si cette dame avait refusé de suivre les policiers, il aurait fallu que le procureur délivre un mandat de recherche, mandat que les enquêteurs parisiens n’auraient d’ailleurs pu signifier eux-mêmes, pour cause de non-compétence territoriale.

En fait, et pour la petite histoire, deux fourgons de gendarmes et trois voitures de police ont planqué devant le domicile des parents de la comptable, dans le village de Fourques. Informé de cette présence insolite, raconte Midi Libre, le maire envoie son garde champêtre aux nouvelles. Chou blanc. Celui-ci est prié de passer son chemin. Ensuite, lorsque Mme Thibout est sortie, les policiers l’ont gentiment « escortée » jusqu’à Nîmes.

Je vais vous dire, le Code de procédure pénale, c’est un truc qui emmouscaille les flics comme le Code fiscal complique la vie des honnêtes gens fortunés.

Dans cette affaire qui tournicote autour de Mme l’Oréal, le proc a ouvert trois enquêtes préliminaires distinctes, ce qui limite un chouïa le pouvoir des policiers dans l’accomplissement de certains actes, comme une réquisition à une banque suisse, par exemple. Ce facho (sic) de Plenel a donc beau jeu de mettre en doute l’impartialité des enquêteurs, puisque le procureur est aux ordres du ministre de la justice, et que les policiers sont à la fois aux ordres du procureur et du ministre de l’Intérieur…

Aussi, pour nous rassurer sur la justice de notre pays, pour nous ôter l’idée que certains se placeraient au-dessus des lois, et pour faire bourricot-bourricotcome.1278745266.jpgcesser les ricanements venus de l’étranger, il faut évidemment ouvrir une information judiciaire. Et comme en haut de la pyramide du parquet se trouve la garde des Sceaux, la décision lui appartient…

MAM doit se dire que si on avait avancé plus vite dans la réforme pénale, on n’en serait pas là, puisqu’il n’y aurait plus de juges d’instruction.

* Droit de la police (édition 2010), de Hervé Vlamynck, chez Vuibert.
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Aff. Bettencourt : les policiers peuvent-ils enquêter librement ?

À la brigade financière de Paris, l’air doit être irrespirable. Dans ce service habitué à traiter des « affaires chaudes », la culture du secret est constante, mais ces jours-ci, on doit frôler la parano. Car si les fameux enregistrements du majordome de Liliane Bettencourt masque-a-gaz_comboutique.jpgsont une véritable bombe pour le parti au pouvoir, les policiers doivent se méfier des dégâts collatéraux. Les plus anciens se souviennent sans doute du limogeage de deux commissaires, Yves Lucet et Patrick Riou, à la suite de la mise en examen du ministre de la Coopération Michel Roussin, justement pour  des affaires concernant le financement du RPR. Affaires qui se soldèrent, si j’ai bonne mémoire, par des non-lieux.

Autrement dit, nos flicounets, ils sont en équilibre sur une planche à roulettes.

Mais la question que chacun se pose est la suivante : Vont-ils pouvoir aller jusqu’au bout de leurs investigations ?

La première chose était de confirmer les identités de chacune des voix – ce qui est fait. Ensuite, les choses se compliquent, car en épluchant les conversations des uns et des autres, on peut envisager l’existence de plusieurs délits : fraude fiscale, blanchiment, escroquerie… On a l’impression que la riche et vieille héritière s’est trouvée prise dans un tourbillon de personnages, des comédiens, qui à tour de rôle lui passaient une main dans le dos tandis que de l’autre ils farfouillaient dans ses poches. Et machin qui cherche à lui revendre l’île qu’elle lui a donnée, et trucmuche qui fait venir des valises de billets de Suisse pour qu’elle lui offre le bateau de ses rêves. Tous font semblant de croire qu’elle est en possession de toutes ses cellules grises, et dans le même temps – à tout hasard – ils la placent sous « mandat de protection future ».

mandat-protection_legifrance.1278491713.JPG

(extrait Légifrance)

On aurait presque envie de dire : la pauvre !

Pour en revenir au travail des policiers, à la différence d’une information judiciaire, où leur action tient à la volonté du juge, en enquête préliminaire, il n’y a pas de limites. Et le procureur, me direz-vous… On imagine assez mal M. Philippe Courroye mettre un frein à l’enquête qu’il a lui-même ordonnée. Du moins tant qu’on touche au commun des mortels. Car s’il s’agit d’aller titiller un ministre, les choses ne sont plus les mêmes. Certes, en droit, un ministre ne bénéficie d’aucune immunité particulière, mais uniquement d’un privilège de juridiction (Cour de justice) pour les actes commis dans l’exercice de ses fonctions. Mais dans les faits, on comprend bien que cette procédure compliquée agit peu ou prou comme une protection contre les poursuites (art. 68-1 et 2 de la Constitution). Et si l’on se souvient que dans l’affaire citée plus haut, le juge Halphen avait convoqué le président Chirac comme un quelconque pékin (d’ailleurs sans résultat), on ne voit guère un procureur convoquer un ministre. Et encore moins un OPJ.

Ou alors un OPJ suicidaire.

Quant aux déclarations de l’ancienne comptable de Mme Bettencourt, il est assez simple de confirmer ses propos, puisqu’elle fait allusion à de l’argent retiré aux guichets de banques situées en France. On peut être sûr que c’est déjà fait. Pour les enregistrements clandestins, c’est différent. Il faut wanted_dalton.1278491944.jpgse méfier de ce qui est trop apparent. Le majordome les aurait effectués entre mai 2009 et mai 2010, et cela avec un appareil d’une capacité de 200 heures. Pourquoi « seulement » 21 heures ont été retenues ? Qui a fait le tri ? Sur quels critères ? Qui a décidé ? Qu’y avait-il sur les enregistrements que l’on ne connaît pas ? Que sont-ils devenus ? N’y a-t-il pas eu montage ? Etc. Car s’il est tentant de régler son compte à un ministre un rien arrogant, il ne s’agit pas d’une chasse à l’homme. Il faut rester neutre, impartial.

Pas facile dans le climat actuel.

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Pour le dessin du haut voir le blog de Sanrankune.
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Liliane et les quarante voleurs a été lu 21 886 fois et a suscité 38 commentaires.

Liliane et les quarante voleurs

L’année dernière, Tracfin a reçu 18 104 informations, dont 17 310  « déclarations de soupçon » transmises par les établissements financiers. Y avait-il dans le nombre une note concernant les liasses fernandel-dans-ali-baba-et-les-40-voleurs.jpgde billets retirées chaque semaine du compte bancaire de Mme Bettencourt ?

Si ce n’est pas le cas, son banquier devrait se faire taper sur les doigts, car il a l’obligation de déclarer les déplacements d’argent liquide (de mémoire, à partir de 8.000€).

Mais si c’est le cas…

Pour comprendre le processus, il suffit de se souvenir des mésaventures de Julien Dray. La banque attire l’attention de Tracfin sur des mouvements de fonds suspects. Rien à voir avec Bettencourt. Le député socialiste ne joue pas dans la cour des grands : seulement 300 000 euros étalés sur trois ans.

Après une enquête poussée, la cellule antiblanchiment pond un rapport de 37 pages (qu’on retrouve dans la presse) qui est transmis au procureur de la République. Lequel, derechef, ouvre une enquête préliminaire.

Il semble que l’interprétation du droit soit différente dans l’affaire Bettencourt. Si l’on comprend bien, le procureur de Nanterre était au courant de possibles fraudes fiscales de la milliardaire (avait-il été informé par Tracfin ?), et il n’a pas ouvert d’enquête, se contentant d’en aviser le fisc. Le parquet ne pouvant, d’après ses dires, « décider seul de se saisir d’un fait de fraude fiscale ».

Puis, finalement, on apprend par le JDD, qu’il vient de transmettre « une analyse juridique » à son supérieur hiérarchique, le procureur général de Versailles. Autrement dit, on attend à présent le feu vert de la chancellerie.

Et un petit mot de MAM ?

Je ne sais pas vous, mais moi, je m’y perds un peu. La fraude fiscale est un délit puni de cinq ans de prison. Et le procureur ne serait pas compétent pour engager des poursuites ? Oui, oui, me dit-on, il faut que l’administration fiscale dépose plainte. Mais ici, s’agit-il vraiment de fraude fiscale ? Ne peut-on pas imaginer qu’il se cache autre chose derrière ces mouvements considérables d’argent liquide ? Un autre délit, peut-être.

Ah, les arcanes de la justice…

50 000 € d’argent de poche par semaine ! Pour nous, 50 000 €, c’est un, deux, trois… cinq ans de salaire ou de retraite… Forcément, on s’indigne, et l’on s’interroge : Que pouvait bien faire Liliane Bettencourt de ces espèces sonnantes et trébuchantes ?

Des emplettes ? Impossible au-delà de 3000 € en espèces.

Arroser les partis politiques ? Interdiction de dons en espèces supérieurs à 150 €.

Alors ? Alors, il nous vient un doute. Et si cette vieille dame n’avait jamais vu la couleur de ces billets ? Et si elle était entourée d’une bande d’aigrefins en train de consciencieusement  piller sa fortune ?

Et si la fifille n’avait pas tout à fait tort ?

vautour_lucky-luke.1278235337.jpgIl y a comme un parfum nauséabond autour de l’héritage de l’Oréal. Les milliards de Bettencourt, c’est un peu la caverne d’Ali Baba, il ne reste plus qu’à identifier les quarante voleurs.

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En raison de problèmes techniques récurrents, impossible de donner des chiffres sur le dernier billet.

Liliane, fais les valises !

Je ne sais pas si Liliane Bettencourt se souvient de cette phrase de Georges Marchais lorsqu’il apprit que « Mit’rand » s’apprêtait à écorner le programme commun de la gauche ; mais à force de lui chercher valises_flodelirespaceslive.gifdes poux dans la tête, elle aussi, elle pourrait bien les faire, ses valises.

Dans cette histoire à épisodes, qui va finir par devenir le feuilleton de l’été, on retrouve tous les ingrédients de Dallas, l’argent, la politique, le mensonge… (ah non, y a pas de pétrole !), et chacun de se perdre en conjectures. Y a-t-il eu malversation, malhonnêteté, prévarication… ?

Eric Woerth, s’explique, se défend : c’est simple, il n’est jamais intervenu. Quant à sa femme, elle n’était pas au courant des comptes off shore de sa « patronne », ce qui dans une minuscule structure de quelques salariés peut paraître pour le moins surprenant… Mais bon, admettons !

La question que nous, les petites gens, on se pose, est bien plus simple…

Comment un ministre qui gère le budget de la France peut-il trouver normal que son épouse se mette au service de l’une des plus grosses fortunes du monde ? En effet, quelle que soit son intégrité, une telle situation ne peut entraîner que des interrogations, voire de la défiance.
N’a-t-il donc jamais entendu parler de la théorie de l’apparence ? Ce principe rabâché par la Cour européenne des droits de l’homme qui, appliqué au cas présent, donnerait : il ne suffit pas de se savoir honnête, il faut aussi montrer qu’on l’est.

Car les choses de la vie publique ne doivent pas seulement exister, elles doivent être visibles de tous et compréhensibles pour tous. Un gouvernement qui prêche l’exemplarité de la peine en matière pénale doit facilement comprendre ça, non !

Il suffit juste d’un peu de jugeote.

Les gens qui nous dirigent auraient-ils perdu à ce point la notion des réalités pour que cela ne leur saute pas aux yeux ?

Et puis, d’un coup, une autre question nous taraude : a-t-on fait des concessions pour éviter que Mme Bettencourt ne quitte le pays ? Existe-t-il des règles fiscales à géométrie variable selon qu’on s’adresserait à une riche héritière, à un joueur de foot ou à Madame Michu ?

Le fameux bouclier fiscal ne serait-il pas suffisant pour retenir les grosses fortunes ?

En tout cas, cette histoire fait naître le doute…

Liliane Bettencourt a déclaré qu’elle allait régulariser sa situation. Sous prétexte qu’elle a acheté une île, comme d’autres s’achètent une Breitling, ou qu’elle s’est offert un « artiste », comme autrefois, les vieux messieurs s’offraient une danseuse, on veut nous faire croire qu’elle est gaga. Mais en fait, c’est la seule à parler net dans cette affaire. Alors, attention ! À force de la titiller, elle pourrait bien décider de bazarder l’Oréal et de faire ses valises…

Le géant suisse de l’alimentaire, cocotiers_lespac.jpgNestlé, qui détient déjà 30% du capital de l’Oréal, est à l’affût. Ce groupe rêve depuis des années de récupérer les 30% de la famille Bettencourt. Pas de mon vivant, aurait dit Liliane.

Ma pauvre dame (?), je crains bien que vous ne soyez plongée dans « un monde impitoyable ».

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Les incidents techniques à répétition qui perturbent ce blog m’empêchent de donner les statistiques du billet précédent.
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