Julien Dray a été jugé coupable par l’opinion publique à la suite d’un procès médiatique où les rôles de l’accusation et de la défense ont été tenus par des journalistes. Pour nombre de juristes, cette affaire stigmatise le nœud de la réforme de la procédure pénale voulue par le président de la République : la disparition du juge d’instruction.
Qu’on ne s’y trompe pas, il ne s’agit pas d’un combat d’initiés. Cette réforme nous concerne tous – et je crois qu’elle est nécessaire. Toutefois, si l’on n’y prend garde, elle pourrait marquer une rupture dans l’équilibre entre la sécurité que doit l’État à chacun d’entre nous et la garantie de nos libertés individuelles.
Le procureur de la République de Paris, Jean-Claude Marin, est un chaud partisan (on s’en serait douté) de cette réforme. Depuis plus de 4 ans qu’il est aux manettes, au parquet de Paris, le nombre d’affaires qui ont fait l’objet d’une information judiciaire a diminué comme peau de chagrin, notamment dans le domaine financier (sa spécialité). Les juges d’instruction ne pointent pas encore au chômage, mais certains se posent des questions pour la suite de leur carrière…
Il y a quelques jours, dans une interview réalisée pour Mediapart, Fabrice Lhomme demandait à M. Marin s’il ne regrettait pas d’avoir choisi la procédure de l’enquête préliminaire dans l’affaire Julien Dray. On n’imaginait pas qu’il allait dire si. « L’enquête préliminaire […] permet d’explorer ce qui semble devoir l’être afin d’avoir, dans des délais raisonnables, une proposition de suite à donner à cette affaire : classement, poursuite par voie de citation directe ou alternative aux poursuites. »
Après une affaire qui a déglingué un homme, que le procureur envisage sérieusement qu’il pourrait à sa seule initiative classer le dossier Dray comme si de rien n’était, cela paraît un rien surréaliste.
Mais comme disait Dali : « La différence entre les surréalistes et moi, c’est que je suis surréaliste ! »
Ensuite, toujours dans Mediapart, les responsables des deux principaux syndicats de magistrats ont répondu aux questions d’Erich Inciyan.
« En cas de réquisitoire contre une personne dénommée (ouverture d’une information judiciaire), nous dit Christophe Régnard (USM), Julien Dray en l’occurrence, ses avocats auraient pu demander aussitôt à être entendus par le juge d’instruction. Notamment sous le régime du témoin assisté, qui est de plus en plus utilisé dans ce genre d’affaires. Ses avocats auraient accédé au dossier et fait valoir leurs arguments de défense. Comme cette voie n’a pas été choisie par le parquet, on se retrouve dans une situation invraisemblable où Julien Dray en est amené à demander un jury d’honneur. Où est la présomption d’innocence ? »
Il s’agit d’ « une violation flagrante des droits à la défense, affirme Emmanuelle Perreux (SM). Julien Dray n’a pas accès au dossier judiciaire, alors même que les pièces à charge ont été mises sur la place publique. Il est dans l’incapacité totale de se défendre, tandis que l’enquête de Tracfin (le service spécialisé du ministère des finances) le visant est sortie dans la presse… On est dans un déséquilibre… »
Jean-Claude Marin est favorable à un système dans lequel le parquet serait responsable des investigations et à la disparition du juge d’instruction. Mais en contrepartie, l’avocat de la défense pourrait intervenir plus rapidement, voire dès le début de la garde à vue. Mais pour lui, si je comprends bien ses propos, l’indépendance des procureurs n’a pas besoin d’être… institutionnelle. C’est juste une question de personnalité.
La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme garantit un État de droit et pose le principe d’une « impartialité objective ». On ne peut donc se satisfaire d’une impartialité dû à la personnalité plus ou moins forte d’un magistrat.
C’est grosso modo ce qu’affirment les deux responsables syndicaux. Ils sont, on l’a deviné, contre la suppression du juge d’instruction. Mais si cela devait se faire, ils demandent l’indépendance du parquet. Ce qui pour eux n’est pas le cas aujourd’hui. Ils rappellent d’ailleurs que Mme Dati s’est autoproclamée « chef des procureurs ».
« Elle assure, nous dit Christophe Régnard, que les magistrats sont là pour dire la justice au nom de la légitimité du président de la République nouvellement élu. Or, les procureurs sont des procureurs de la République, et non du président de la République. La différence est celle qui distingue la démocratie de la dictature… »
« Nicolas Sarkozy (…), renchérit Emmanuelle Perreux, a inclus la justice dans une « chaîne pénale ». Comme si la justice et la police travaillaient dans le même sens, en gommant totalement le fait que, en démocratie, les juges sont les gardiens des libertés individuelles. Monsieur Sarkozy a cette vision très policière de l’action judiciaire… »
Une commission de réflexion sur la réforme de la procédure pénale a été installée en octobre 2008. Elle est menée par un ancien avocat général à la Cour de justice des communautés européennes, M. Philippe Léger. Ces jours-ci, sur l’initiative de deux professeurs de droit, Bernard de Lamy et Valérie Malabat (Le Monde du 20 février 2008), une quarantaine de juristes ont mis sur pied une commission non officielle pour réfléchir à une « réforme d’ensemble du droit répressif ».
La procédure pénale n’est ni de droite ni de gauche. Et si on la réforme, c’est pour des années, des dizaines d’années. Ne serait-il pas « intelligent » de réunir autour d’une même table, et pour en discuter sereinement, des professionnels de tous les horizons : magistrats, avocats, policiers, gendarmes, enseignants…, et pourquoi pas des représentants de la société civile ?
Alors, à quand les états généraux de la réforme pénale ?
En 1992, l’établissement pénitentiaire est secoué par des émeutes extrêmement graves : pas moins de 3 ans seront nécessaires pour remettre les locaux en état. Avec un esprit nouveau semble-t-il. Au point d’autoriser la création d’une association culturelle – et la construction d’un voilier dans la cour principale. Avec un résultat positif, avait alors estimé Gabi, l’un des détenus : « Elle (l’association) a permis de calmer les tensions et de nous donner des occupations. En dehors des cours de navigation, nous avons des cours d’arabe, d’espagnol, de musique, etc. Nous avons également créé un journal, La Presse de Moulins, qui en est à son troisième numéro. La culture, c’est important dans l’équilibre des individus. Sinon, on vivrait comme des fauves en cage. »
Le commissaire Vinolas n’est pas ce qu’on appelle un flic de terrain. Au début de sa carrière, après deux années à la direction de la PJ où il s’occupe des vols de voitures, il est nommé « chargé de mission » au cabinet du directeur général de la police nationale, peu après l’arrivée de Pierre Joxe à la place Beauvau. À l’époque, il pouvait d’ailleurs côtoyer le père d’Yvan Colonna, le député socialiste des Alpes-Maritimes, Jean-Hugues Colonna, qui avait un bureau voisin au sien. Plus tard, en 1991, le député deviendra le conseiller technique de Philippe Marchand, le nouveau ministre de l’Intérieur,.
La semi-liberté constitue un aménagement dans la détention qui donne la possibilité à une personne condamnée de s’extraire du milieu carcéral. Par exemple pour exercer une activité professionnelle, recevoir une formation, des soins médicaux, etc.
La semaine dernière, sept parlementaires ont eu la surprise de recevoir par la poste un képi de gendarme. Un cadeau de l’association Gendarmes et citoyens, afin de se rappeler à leur bon souvenir.
