LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Actualité (Page 45 of 71)

Récidive : la rétention de sûreté est appliquée en douce

Alors que la Garde des Sceaux promet une nouvelle loi sur la récidive des criminels dangereux, presqu’en catimini, une première décision a été prise par une « juridiction régionale de la rétention de sûreté » à l’encontre d’un condamné en fin de peine. Impossible, me direz-vous : la que-les-armes-le-cedent-a-la-toge.jpgloi de 2008 n’est pas rétroactive… C’est sans compter sur l’habileté de nos députés. Voici le scénario :

Acte I : En septembre 2005, le garde des Sceaux, Pascal Clément, présente sa loi destinée à lutter contre la récidive. Devant les députés il s’emballe et déclare qu’il est prêt à prendre « le risque d’une inconstitutionnalité » pour que ce texte s’applique aux personnes déjà condamnées. Tollé à l’Assemblée, puis le président du Conseil constitutionnel le tacle sérieusement en lui rappelant que le respect de la Constitution est un « devoir » et non un « risque ».

Acte II : Notre ministre change alors son fusil d’épaule : le placement sous surveillance judiciaire (PSJ) voit le jour sous la forme d’une mesure de sûreté prononcée par le juge d’application des peines (JAP). Il s’agit d’un ensemble d’obligations et d’interdictions imposé à l’issue de leur peine d’emprisonnement à des personnes condamnées pour crime ou délit et considérées comme potentiellement dangereuses (loi du 12 décembre 2005, dont on peut trouver un résumé sur le site Ban Public).

Comme il ne s’agit pas d’une condamnation mais d’une mesure « d’accompagnement » pour éviter une libération trop « sèche », elle peut s’appliquer aux détenus condamnés antérieurement à la loi. Et elle prend fin à l’expiration définitive de la peine, toutes réductions confondues.

Acte III : En 2008, une nouvelle loi créée la rétention de sûreté qui elle est destinée à retenir dans des centres fermés (distinction subtile avec un condamné, qui lui est emprisonné) certains criminels dangereux qui ont éclusé leur peine et qui sont considérés comme susceptibles de récidiver. Mais pour respecter le principe de non-rétroactivité de la loi, cette mesure n’est applicable que si la Cour d’assises l’a envisagée lors de la sentence – ce qui exclut de facto son application avant plusieurs années.

Elle a également prévu l’application d’une mesure de surveillance de sûreté qui correspond à la surveillance judiciaire (suivi médical, bracelet électronique, etc.) mais qui à la différence de son ainée s’applique à des condamnés qui ont entièrement purgé leur peine.

Prenons deux exemples :

X a été condamné à 20 ans de réclusion pour viol aggravé. Au bout de 17 ans, il est libéré, mais il peut faire faire l’objet d’un placement sous surveillance judiciaire pendant 3 ans, c’est-à-dire jusqu’à la fin de la peine qui a été prononcée contre lui.

Ce qui s’est passé pour Manuel C., l’homme soupçonné d’avoir tué Marie-Christine Hodeau, à Milly-la Forêt : condamné à une peine de 11 ans, le jour de sa libération conditionnelle, il s’est vu contraint de se soigner et il a eu l’interdiction de rencontrer sa victime et de se rendre dans la commune où elle demeure. Mesures qui ont pris fin en novembre 2008, à l’échéance de sa peine.

Y, lui, est condamné aujourd’hui à 20 ans de réclusion pour les mêmes faits. Si dans son jugement la Cour d’assises le prévoit, lorsqu’il aura purgé sa peine (donc dans 20 ans), il pourra faire l’objet soit d’une mesure de rétention de sûreté (et dans ce cas il se retrouvera dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté, autrement dit et au mieux dans un quartier de la prison de Fresnes spécialement aménagé), soit d’une libération sous surveillance de sûreté. Avec des contraintes :

– l’obligation de soins ;

– le placement sous surveillance électronique ;

– des mesures de contrôle par un délégué social ;

– l’interdiction de paraître en certains lieux.

À ce moment, on se dit que MAM peut faire l’économie d’une nouvelle loi, puisque les deux mesures qu’elle veut faire adopter sont déjà prévues dans celle de l’année dernière…

Tout le monde suit bien ? Car ça se complique, et c’est maintenant que cela devient intéressant. Subrepticement, le législateur a prévu qu’une mesure de surveillance de sûreté pouvait se substituer à une mesure de surveillance judiciaire (Art. 723-37).

Donc X, à l’issue de sa période de surveillance judiciaire, pourrait se retrouver sous le coup d’une surveillance de sûreté. Laquelle comme chacun sait est renouvelable chaque année sans limitation dans le temps.

Mais ce n’est pas fini.

Le moindre manquement aux obligations de la surveillance de sûreté (ne pas prendre un médicament, par exemple) entraîne immédiatement la rétention de sûreté. Et ainsi X risque de se retrouver à Fresnes avec Y.

Acte IV : On passe de la théorie à la pratique. Et c’est Martine Herzog-Evans, professeur de droit à Reims, qui nous raconte, dans le Recueil Dalloz (2009 p.2146), l’histoire de M. X, un malade mental condamné à 20 ans de réclusion pour viol aggravé. Au bout de 17 ans, légalement, il est libérable. On s’inquiète : l’individu est toujours considéré comme dangereux et capable de récidiver. Le préfet prend alors une mesure d’hospitalisation d’office et, bien qu’il soit interné, le JAP le place sous surveillance judiciaire. Mais X peut être remis dans la nature sur une simple décision médicale… Que faire ? Finalement, le parquet saisit la juridiction régionale de la rétention de sûreté de Créteil, laquelle décide d’un placement sous surveillance de sûreté.

Et si X sort de l’hôpital psychiatrique, au moindre manquement à ses obligations, cette surveillance se transformera illico en rétention.

X devient donc le premier « bénéficiaire rétroactif » d’une loi non-rétroactive.

Mme Herzog-Evans appelle ça une « entourloupe juridique ».

Qu’elle se rassure, tout va rentrer dans l’ordre. Le porte-parole de l’Élysée (qui avait dégainé avant MAM) a annoncé qu’un projet de loi prévoit que « le placement sous surveillance de sûreté est possible, non seulement à l’issue d’une surveillance judiciaire ayant elle-même accompagné une libération anticipée mais aussi directement à la sortie de prison de la personne dangereuse ».

Ce qui revient, comme dirait Pascal Clément (voir acte I), à prendre « le risque d’une inconstitutionnalité »…

les-parapluies.jpg

Je sais bien que la société a le devoir de se protéger de certains criminels particulièrement dangereux, et notamment des criminels sexuels, mais pourquoi utiliser un tel stratagème ? Même si la motivation est compréhensible, nos élus ont-ils le droit de « manipuler » l’esprit de la Constitution* ?

Et pourquoi nous promet-on un projet de loi pour la fin du mois alors que celle de l’année dernière vient juste d’être appliquée pour la première fois !

Cette gesticulation juridique n’abuse personne, car chaque loi nouvelle prise sous le coup de l’émotion populaire démontre l’inefficacité de la loi précédente. Et à chaque fois, le Gouvernement émousse son crédit et les élus du peuple leur prestige.

Politique de la mère Gigogne ou génération parapluie ?

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* Dont le préambule renvoie à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui énonce dans son art. 8 : La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée.
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Le billet précédent, La police est-elle trop centralisée ? a été lu 1.954 fois en 3 jours et a suscité 4 commentaires.

La police est-elle trop centralisée ?

Les Black Blocs frappent à Poitiers, là où personne ne les attendait. Il faut dire que depuis le regroupement des RG et de la DST dans un service parisien, en province, l’information arrive au compte-gouttes. D’une manière générale, la police est de plus en plus centralisée, à blackbloc_lapin_ladistro.jpgl’image de la réforme du Grand Paris. Et dans nos campagnes, les gendarmeries ferment à la cadence des bureaux de poste ou des maternités. Est-ce un nouveau management pour la police ? Déjà en 2003, devant les commissaires réunis en congrès, Nicolas Sarkozy avait annoncé clairement qu’il comptait gérer la police avec des méthodes dignes du secteur privé. Aujourd’hui, avec près de 46.000 personnes sous ses ordres, le préfet de police de Paris (qui cumule les fonctions de préfet de la Zone de défense de l’Ile-de France) n’a plus rien à envier au PDG d’une entreprise du CAC 40.

Pour faire une comparaison, le plus important service de police des États-Unis, celui de New-York (plus de 8 millions d’habitants), le fameux NYPD, compte 36.227 agents (source Wikipédia).

Mais en France, la sécurité est devenue un enjeu politique. Et par ricochet, la concentration des pouvoirs de police en région parisienne était quasi inévitable. On assiste donc, en cette année 2009, à un retour en force de la toute puissante Préfecture de police, la PP pour les intimes.

S’agit-il d’un plus pour les millions de parisiens et de banlieusards ? Il faut l’espérer, mais pour l’instant, dans les rangs des policiers, tout le monde n’y trouve pas son compte.

On peut même dire qu’on constate un certain cafouillage.

Ainsi, en ce qui concerne la brigade anti-criminalité, le syndicat Alliance déplore des missions qui n’ont « rien à voir avec la spécificité du service ». Et constate une accumulation de petits manquements : pas de plans précis de banlieue, pas de GPS, pas de listes des commissariats ni des liaisons radio, etc. Autant de petites choses qui peuvent avoir de sérieuses conséquences, dans l’urgence ou dans une situation critique. 

Quant aux fonctionnaires de PJ, ils renâclent. Au lieu d’être saisis par le procureur, comme le prévoit le Code de procédure pénale, ils se voient à présent chargés d’enquêtes par l’intermédiaire d’un commissariat. Avec le risque à plus ou moins court terme d’être inondés de petites affaires locales au détriment de dossiers plus importants.

Il semble également que les policiers de la direction du renseignement n’aient pas encore trouvé leur voie. Seule la mission de la sous-direction de la lutte contre l’immigration paraît nettement affirmée. Pour le reste, il est à craindre des frottements avec la DCRI (direction centrale du renseignement intérieur), service en prise directe avec l’Élysée. Et qui, entre parenthèses, n’a pas vu venir la manifestation de casseurs dans l’une des grandes villes de la région dirigée par Mme Royal… Bon, ils avaient peut-être autre chose à faire… Après tout, les Régionales sont dans quelques mois.

Mais je m’égare…

grand_paris_police.jpg En fait, cette réforme s’appuie en grande partie sur la DSPAP (direction de sécurité de proximité de l’agglomération parisienne), qui compte 26.000 fonctionnaires ; et pour le maintien de l’ordre sur la DOPC (direction de l’ordre public et de la circulation), forte de 5.000. Et face à ces deux mastodontes, les autres services se sentent bien petits…

Je n’ai pas d’info sur la gendarmerie, mais un lecteur (Hirondelle, le 8 octobre 2009 à 09:31) dans un commentaire sur le billet Grand Paris : 1 policier pour 200 habitants, nous explique que les effectifs parisiens vont fondre sérieusement et que les unités de recherches (chargées des enquêtes judiciaires) risquent fort de limiter leur action à l’assistance de leurs collègues de province, lorsque ceux-ci viennent enquêter dans l’agglomération parisienne. S’achemine-t-on vers un retour police des villes et gendarmerie des campagnes ?

Et pour répondre à certaines interrogations, il me semble que l’on s’éloigne de la création d’une police municipale à Paris. Elle aurait, me semble-t-il, bien du mal à s’insérer dans la structure d’ensemble. À noter qu’à ce jour, aucun des trois maires de Paris n’en a exprimé le souhait. Trop de responsabilités ?

Quant aux magistrats, ils sont les grands perdants. Il est bien loin le temps où ils réclamaient de pouvoir désigner le service, voire l’OPJ, de leur choix sans passer par l’état-major de la PP !

Tout cela est en rodage, me direz-vous. Je suis bien d’accord et je me contente ici de livrer quelques sentiments (ressentiments ?) exprimés à voix basse. Et rien n’est écrit dans le marbre. Il faudra attendre un an ou deux pour voir si cette réforme porte ses fruits, mais une chose est prévisible : les policiers vont se voir pressurés comme jamais avec une feuille de route simplissime : des résultats, du chiffre.

Et il est à craindre que l’ambiance se détériore sérieusement.

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Le billet précédent, Vidéosurveillance en entreprise : la CNIL juge et condamne, a été lu 6.700 fois en 2 jours et a suscité 15 commentaires.

Vidéosurveillance en entreprise : la CNIL juge et condamne

Le dirigeant d’une entreprise s’est vu infliger une amende de 10.000 euros par la CNIL pour avoir mis en place un système de vidéosurveillance qui, sous couvert de lutter contre les vols, filmait les salariés en continu sur leur poste de le-chien-et-le-reverbere_projetbobfree.giftravail. Et comme son directeur général s’était opposé au contrôle des agents de la CNIL, la société s’est vue en plus condamner par le TGI à une amende de 5.000 € pour délit d’entrave.

Dans ses délibérations, la Commission a considéré que le fonctionnement du système de vidéosurveillance constituait une collecte illicite de données disproportionnée au regard de la finalité. Et elle a relevé plusieurs manquements :

•    le système de vidéosurveillance n’avait pas été déclaré à la CNIL ;
•    le personnel n’avait pas été informé de l’existence de ce dispositif ;
•    aucun affichage ne rappelait les droits des salariés ;
•    l’accès aux images enregistrées s’effectuait à partir de postes informatiques non protégés par un mot de passe.

Il est bon de savoir que depuis la réforme de la loi informatique et libertés, en 2004, la CNIL dispose d’un réel pouvoir de sanction, notamment pécuniaire, puisque le montant de l’amende peut atteindre 300.000 €. Ce qui n’exclut pas la possibilité de poursuites pénales. Mais son action « répressive » ne se limite pas à la vidéosurveillance. Ainsi, en 2006, elle a sanctionné plusieurs banques pour l’absence de mise à jour de leur « liste noire », c’est-à-dire le fichier des clients qui ont connu un incident de paiement. Violant ainsi le principe du « droit à l’oubli » consacré par l’article 6-5° de la loi du 6 janvier 1978.

La vidéosurveillance s’installe partout. Sur la voie publique, dans les transports en commun, sur les lieux de travail… Insidieusement, elle est en train de modifier notre comportement. videosurveillance_parenthesesatelier.1255167471.jpgVous rêvassez sur l’escalier mécanique du métro, et patatras ! vous levez la tête et vous vous retrouvez face à l’œil inquisiteur d’une caméra. Fin du rêve ! Vous poussez la porte de votre entreprise en programmant votre prochaine RTT et re-patatras ! le patron vous épie de son œil électronique. Idem dans la rue, les magasins… Et qui peut dire aujourd’hui si les répercussions de la vidéosurveillance sur nos attitudes ne seront pas pires que les avantages attendus !

videosurveillance_beaute-et-bien-etre.jpgCar insidieusement, c’est un véritable chamboulement qui se manifeste dans notre vie de tous les jours. Nous prenons l’habitude d’être surveillé en permanence, instinctivement nous modifions notre comportement et d’une certaine manière nos pensées changent elles aussi. Un nouvel automatisme apparaît. Un peu comme on prend l’habitude de se méfier du téléphone portable ou de freiner à la vue d’un radar même si l’on n’est pas en excès de vitesse.

À force d’être surveillé, on se sent coupable.
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Si vous êtes intéressé par la vidéosurveillance, écoutez donc ce dimanche 11 octobre, sur France Inter, de 9 heures à 10 heures, l’émission Interception consacrée à ce thème.

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Remerciement à Gilles Bertrand pour ce sujet.
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Le billet précédent, Peut-on faire l’apologie du tourisme sexuel ?, a été lu 1.900 fois en 2 jours. Il a suscité 56 réactions, dont beaucoup, il faut le dire, ne sont pas en faveur du ministre de la Culture. Il m’a valu également quelques mails disons… désobligeants. Bof !

Peut-on faire l’apologie du tourisme sexuel ?

Les dévergondages littéraires de M. Mitterrand nous interpellent : Peut-on impunément se vanter de pratiquer le tourisme sexuel ? En février 2009, le Parlement européen a demandé la criminalisation de toute forme d’abus sexuel sur mineur, y compris le « grooming » (l’action de manipuler sur le Net point-dinterrogation_canafe-fintracgcjpg des enfants à des fins sexuelles). Et à l’époque, en réponse à un parlementaire, le garde des Sceaux a affirmé que la lutte contre le tourisme sexuel est une politique pénale prioritaire du Gouvernement. Rappelant que les personnes qui ont recours à la prostitution de mineurs à l’étranger sont, par dérogation au droit commun, susceptibles d’être poursuivies en France, même s’il n’existe aucune plainte de la part du pays concerné ou de la victime.

Autrement dit le simple fait pour le procureur d’avoir connaissance de tels agissements devrait suffire à déclencher l’action publique… Et, d’après notre Code, le délit est constitué lorsqu’un individu sollicite, accepte ou obtient des relations sexuelles avec un mineur (donc de moins de 18 ans) qui se livre à la prostitution. La peine encourue est de 3 ans d’emprisonnement, mais si le mineur à moins de 15 ans, elle est portée à 7 ans.

Peut-on parler d’apologie lorsqu’un homme se vante de tels actes ? Le Code pénal envisagerait plutôt la provocation (art. 24 de la loi sur la presse). Mais à ce jour l’application de ce texte vise essentiellement le terrorisme, le racisme ou le négationnisme – même si les agressions sexuelles y sont expressément mentionnées. Le Dalloz donne cette définition de la provocation : « une manoeuvre consciente qui a pour but de surexciter les esprits… » En tout cas, je n’ai trouvé ni exemple ni jurisprudence pour ce type de délit.

La France est signataire, depuis le 25 octobre 2007, de la Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels.

Le Code pénal (art. 227-22 et suivants) protège également le mineur face aux nouvelles technologies de communication en sanctionnant par exemple les propositions sexuelles, l’enregistrement d’une image pornographique en vue de sa diffusion, la diffusion sur un réseau d’images pédopornographiques, et même la simple détention d’une image de ce type (2 ans d’emprisonnement et 30.000 € d’amende).

Je n’ai pas lu le livre de M. Mitterrand, et je n’ai pas l’intention de le lire. Il y parle, dit-on, de « jeunes garçons ».

De moins de 18 ans ?
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Le billet précédent, Grand Paris : 1 policier pour 200 habitants, a été lu 700 fois en une journée. En tenant compte des remarques de certains lecteurs, je compte revenir sur le sujet dans les prochains jours.

Grand Paris : 1 policier pour 200 habitants

La préfecture de police compte sur un effectif de 45.860 fonctionnaires, dont 30.200 policiers, pour assurer la sécurité de Paris et de la petite couronne. Mais ils ne sont pas les seuls à œuvrer dans ces quatre départements. Il convient d’y ajouter, les policiers degrand_paris_effectifs.jpgs services centraux du ministère de l’Intérieur (à compétence nationale), les policiers municipaux, et les militaires de la gendarmerie. D’où cette estimation à la louche pour une population estimée à 6.4 millions de… « Grands Parisiens ».

Le Grand Paris de la police existe officiellement depuis bientôt un mois. Son origine remonte, dit-on, aux émeutes de 2005. En fait, l’idée a fait son chemin après une réforme de 2003 qui a consisté à fusionner deux services pour en créer un nouveau, compétent sur les 7 départements de la région parisienne et placé sous le commandement opérationnel du seul préfet de police : le service régional de la police des transports (SRPT). Ce changement a été considéré comme un succès sur le plan de l’efficacité. service-regional-police-transports.jpg

Le décret du 24 juillet 2009 dit en son article 1er : « La direction de la préfecture de police chargée des missions de sécurité et de paix publiques est compétente à Paris et dans les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. »

Petite tentative pour y voir clair…

Sécurité publique
La direction de la police urbaine de proximité (en gros, les commissariats) était limitée à Paris intra-muros. Elle est remplacée par la direction de sécurité de proximité de l’agglomération parisienne (DSPAP). Avec la création d’un centre d’information et de commandement unique (radio, téléphone, messagerie et images de vidéosurveillance). Ses missions essentielles demeurent la lutte contre la petite et moyenne délinquance. Elle peut intervenir à tout moment, et dans les quatre départements, grâce à deux unités : une compagnie de sécurisation de jour et une brigade anti-criminalité de nuit.

Ordre public
La direction de l’ordre public et de la circulation (DOPC), était à ce jour cantonnée à Paris intra-muros. Dorénavant, elle peut envoyer des renforts dans les trois autres départements pour le maintien de l’ordre public. Et elle est directement compétente sur certains sites (Stade de France, salon du Bourget…), ou à l’occasion d’événements d’une ampleur exceptionnelle.
De plus, il est créé une police de la circulation et de la sécurité routières pour les principaux axes de l’agglomération francilienne.

Police judiciaire
La police judiciaire était déjà compétente à Paris et en petite couronne. Aussi, peu de changements. Toutefois, le plan parisien de lutte contre la drogue (plan stup) fait désormais l’objet d’une coordination pour les quatre départements. Quant au groupe d’enquêtes spécialisé (dit groupe Cités) dans la délinquance enracinée dans les quartiers difficiles de Seine-Saint-Denis, il est étendu aux Hauts-de-Seine et au Val-de-Marne. Cela concerne les vols à main armée, le trafic de stups, l’économie souterraine…

Le logiciel de diffusion de l’information opérationnelle CORAIL (fichier sériel qui permet d’effectuer des recoupements et des rapprochements) est partagé entre tous les services chargés de la sécurité au sens large.
La répartition des enquêtes de police judiciaire doit néanmoins continuer à se faire sous l’autorité du procureur de la République.

Renseignement

La direction du renseignement a trois missions essentielles:
– établir des prévisions en matière d’ordre public (manifs, menaces, violences urbaines…) ;
– prévenir la menace terroriste ;
– lutter contre l’immigration irrégulière.

Elle peut intervenir dans l’ensemble de la région et notamment en petite couronne (surtout les sections chargées de lutter contre l’immigration irrégulière ou l’islamisme radical). Elle assure à la fois des missions de renseignement intérieur, pour lesquelles elle concourt à l’activité de la DCRI (direction centrale du renseignement intérieur), et des missions d’information générale. Elle a désormais une vocation interdépartementale, grâce au rattachement direct des services de petite couronne, qui deviennent des antennes de la direction du renseignement.
Elle assure également la coordination du renseignement intérieur en liaison avec la DCRI.

Technique et logistique
La direction opérationnelle des services techniques et logistiques intervient en tant que gestionnaire des systèmes d’information et prestataire de soutien logistique pour Paris et la petite couronne (véhicules de police, habillement, équipement et armement des policiers). La brigade fluviale, qui fait partie de la logistique, peut se déplacer dans toute l’Ile de France.

Les quatre départements sont donc désormais placés sous un commandement unifié. Le préfet de police devient la seule autorité compétente en matière de sécurité intérieure. Il dirige l’action des services de police et de gendarmerie, « sous réserve des prérogatives de l’autorité judiciaire ». Les préfets et sous-préfets de département peuvent intervenir grâce au mécanisme de délégation de signature. De fait, ils sont désormais les assistants du préfet de police.

Quant aux policiers, ils verront leur compétence territoriale étendue aux quatre départements, ce qui nécessite, me semble-t-il, une modification du Code de procédure pénale.

Au total, il est attendu de cette réforme une meilleure répartition des effectifs de sécurité publique et une meilleure occupation de la voie publique.
La main courante informatisée et centralisée permettra de visionner les résultats et (je suppose) de corriger le tir si besoin est.

Cette réorganisation de la police parisienne s’inscrit, je cite, « en cohérence avec les projets de réorganisation de la présence de la gendarmerie nationale au cœur de l’Île-de-France, autour d’un groupement de gendarmerie interdépartemental compétent pour Paris et les trois départements de la petite couronne, et de la réduction du format des services d’investigation présents dans ce ressort au niveau suffisant pour servir d’appui et de relais aux enquêtes des services territoriaux de gendarmerie de la zone de compétence de la gendarmerie nationale ».
flic_indecis_lessor.jpgC’est un extrait de la plaquette Un projet de service public pour la sécurité du Grand Paris. La phrase est tellement emberlificotée que, franchement, je n’ai pas tout compris.

On va y réfléchir. Je propose, dans un prochain billet, de tenter de décortiquer tout ça, cette longue phrase et le reste.
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On peut également lire sur ce blog, La sécurité dans Paris : qui fait quoi ?
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Bide complet pour le billet précédent, La Poste et le référendum, qui a été lu 404 fois en 2 jours et a suscité (néanmoins) 13 réactions. Mais comme il est dit dans un commentaire : Quel rapport avec l’objet de ce blog ?…

La Poste et le référendum populaire

En banlieue parisienne aussi, on ferme les bureaux de poste. Ainsi dans ma petite commune, il faut désormais se rendre au bar-tabac-pmu pour poster son courrier. Un endroit où l’on boit de l’alcool, où l’on vend du tabac, et où l’on se livre aux jeux d’argent…

bureau-de-poste-a-louer.1254729090.jpgEnfin, les jeunes en ont vu d’autres et les vieux, du moins ceux qui veulent retirer quatre sous de leur livret de caisse d’épargne, ils vont à la poste centrale, à 4 ou 5 km de là, puisque le tenancier du café, pour des raisons de sécurité, a renoncé à manipuler des fonds.

On se dit que le service public de la poste prend l’eau de toute part et que cette initiative du Gouvernement de « ne pas privatiser la poste à tout prix », est une véritable opportunité pour l’opposition.

Avec la possibilité d’organiser ce que la Constitution prévoit depuis juillet 2008 : un référendum d’initiative parlementaire et populaire.

Il faut pour cela qu’au moins un cinquième des parlementaires en prennent l’initiative et qu’ils obtiennent le soutien de 10 % des électeurs inscrits sur les listes électorales.

À part que ce n’est pas possible. Car avant tout, il est nécessaire que les élus votent une loi organique (et non pas un décret d’application comme on le lit ici ou là) pour fixer les modalités d’organisation de ce référendum, ainsi qu’il est dit dans la Constitution (art. 11).

Ce qui n’a pas été fait à ce jour.

Il y a pourtant un député qui a eu le nez creux. Début septembre, Jean-Marc Ayrault a présenté une proposition de résolution sur l’extension du référendum, au nom du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Cela dit, tous les commentateurs estiment qu’il est quasi impossible pour un parti politique de recueillir l’approbation de 10 % des électeurs – ce qui représente environ 4.5 millions de personnes. Pour se comparer à un pays à la population sensiblement identique, il en faut 500.000 en Italie, où d’ailleurs il y a eu 50 référendums populaires ces 30 dernières années.

Mais supposons que les socialistes enfourchent ce cheval de bataille. Et qu’ils parviennent à surmonter toutes les difficultés de ce parcours du combattant : ils font voter une loi organique, ils obtiennent 4.5 millions de signatures, alors… Alors, rien ! Ils doivent maintenant déposer une proposition de loi pour organiser le référendum. Et si la majorité gouvernementale la rejette, la procédure est définitivement arrêtée – et il n’y a pas de référendum.tournesol.png

Pour résumer, il semble bien que cette possibilité d’une démocratie populaire n’est que poudre aux yeux et en l’état, on n’est pas prêt de nous demander notre avis ni sur la réforme de la Poste ni sur rien d’autre.

Comme d’ailleurs personne ne m’a demandé mon avis sur ce sujet.

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Le billet précédent, Indépendance de la justice : depuis Ben Barka, rien n’a changé, a été lu 13.600 fois en 2 jours, et a suscité 23 commentaires.

Indépendance de la justice : depuis Ben Barka, rien n’a changé

44 Ans après l’enlèvement de Ben Barka, le parquet bloque les mandats d’arrêts internationaux délivrés par le juge d’instruction. Quelques jours après les déclarations théâtrales du ministre de l’Intérieur sur la responsabilité brasserie_lipp_janhansonphoto.jpgdes magistrats dans la mort de la joggeuse de Milly-la Forêt, ceux-ci demandent à MAM de réaffirmer une fois pour toute l’indépendance de la justice. Or, le 30 septembre 2009, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) n’a pas dit autre chose. Elle a proclamé, dans une résolution adoptée à l’unanimité, la nécessité d’une justice indépendante du pouvoir politique. Et elle fustige la France sur la réforme de sa procédure pénale, notamment la suppression du juge d’instruction.

Dans cette résolution les parlementaires n’y vont pas par quatre chemins. Voici l’article 1 : « L’Assemblée parlementaire souligne l’importance fondamentale, pour l’État de droit et la protection de la liberté individuelle, de protéger à travers l’Europe les systèmes de justice pénale de toute ingérence motivée par des considérations politiques. »

Et les petites phrases s’accumulent : l’indépendance des juges doit être inscrite dans la Constitution des États… Elle doit être effective en veillant au recrutement, au système disciplinaire, aux possibilités de dessaisissement, et à de bonnes conditions matérielles ou de rémunérations…

L’allemande Sabine Leutheusser-Schnarrenberger a examiné la procédure de plusieurs pays représentatifs de la justice pénale en Europe. Dans son rapport, elle estime qu’en France et en Allemagne, où les procureurs sont liés à leur hiérarchie, les juges et les avocats de la défense doivent pouvoir jouer un rôle plus actif au cours de l’instruction. En revanche, au Royaume-Uni et en Italie, où ils jouissent d’une grande indépendance et où la défense a accès au dossier dès le début de la procédure, le rôle des juges peut être plus limité.

independance-juge-APCE.jpg

Le communiqué de presse résume la résolution de l’Assemblée, qui invite notamment…

•    le Royaume-Uni, à finaliser sans plus tarder la réforme du rôle du Procureur Général (Attorney General) visant à renforcer la responsabilité de celui-ci devant le Parlement, et à stopper la réduction des ressources affectées à l’aide juridique.

•    la France, à revoir le projet de suppression des juges d’instruction, et si celui-ci est confirmé (et que leurs compétences sont transférées au ministère public), à renforcer l’indépendance des procureurs.

•    l’Allemagne, à créer un système d’autonomie de la justice en s’inspirant des conseils de la magistrature existant dans la plupart des États européens, ainsi qu’à abolir la possibilité pour les ministres de la justice de donner des instructions au parquet sur des cas individuels.

•    la Fédération de Russie, à adopter une série de réformes visant à réduire les pressions politiques et hiérarchiques exercées sur les juges et à mettre fin au harcèlement des avocats de la défense afin de combattre le « nihilisme juridique » dans le pays.

Il est intéressant de noter que cette résolution de l’APCE encourage trois pays à faire quelque chose pour améliorer l’indépendance de leur justice et tente de décourager la France de faire quelque chose qui risque d’empirer la situation – en l’occurrence la réforme de la procédure pénale telle qu’elle est envisagée dans le rapport Léger.

On sait bien que cette assemblée n’a qu’un pouvoir de recommandation… Mais lorsque les représentants de 47 pays, c’est-à-dire de 800 millions d’Européens, s’expriment d’une seule voix pour réclamer une justice plus indépendante, notre devoir n’est-il pas d’écouter et de réfléchir !

On dit que l’intelligence n’a pas de certitude, alors on peut s’interroger… Certes, on peut l’améliorer cette justice tant décriée, mais finalement, malgré ses couacs, elle n’est peut-être shadok.pngpas si mauvaise puisqu’en dépit des pressions politiques, des raisons d’Etat, le dossier Ben Barka n’est toujours pas refermé…, grâce à l’acharnement des juges d’instruction. Et d’ailleurs, sans eux, le procureur aurait-il délivré des mandats d’arrêts internationaux ?

Cette réforme qui doit marquer le quinquennat présidentiel, notamment par cette mesure phare qui consiste à supprimer le juge d’instruction tout en laissant les procureurs sous la houlette de l’autorité politique, va-t-elle vraiment améliorer les choses ? A-t-elle été réfléchie ? En a-t-on mesuré toutes les conséquences ? Et d’ailleurs sera-t-elle pérenne, par exemple en cas d’alternance politique ?

Lisez donc cette résolution de l’APCE, et peut-être, comme moi, vous vous direz qu’on rame à contre-courant.

Qu’on est en train de nous mouliner une réforme rétrograde.

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Un résumé de quelques lignes de l’affaire Ben Barka, sur ce blog dans La PJ de papa.

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Le dernier billet, Du marchandage au plaider-coupable, n’a été lu que 675 fois en 2 jours, avec 5 commentaires. Sujet sans intérêt ou mauvaise analyse de ma part…

Du marchandage au plaider-coupable

En revenant sur le devant de la scène, l’affaire Polanski nous interpelle sur les « arrangements » judiciaires. Il avait passé, nous dit-on, un deal avec le juge, que celui-ci aurait eu l’intention de casser pour un procès robes-avocat_site-scp-henri-leclerc.jpgplus traditionnel. Cela nous rappelle le jugement en catimini de Madoff. En France, on n’en est pas là, mais, peu à peu, on s’engage dans cette voie. S’agit-il d’un progrès, d’une justice moderne, comme on nous le claironne, ou au contraire d’une sorte de résignation?

Le comité Léger propose d’instaurer le plaider-coupable dans les affaires criminelles. Pour une bonne justice ? Non, pour « lutter contre l’engorgement des Cours d’assises », a déclaré l’un de ses membres. Il faut reconnaître que l’instauration de la procédure d’appel n’a pas arrangé les choses. Ainsi, en 2006, les Cours d’assises ont siégé environ 2.500 fois, prononçant près de 3.500 condamnations et 250 acquittements. Et 456 affaires sont allées en appel, d’après les chiffres du ministère de la Justice (521 personnes condamnées et 47 acquittées).

Mais cette nouvelle procédure n’aurait rien à voir avec le système du plead guilty en vigueur aux États-Unis. Il s’agirait ici non pas d’un marchandage, mais d’un arrangement à un seul degré : Si vous reconnaissez votre culpabilité, votre peine sera automatiquement allégée d’un cran. Donc, si la peine maximale encourue est de 20 ans de réclusion, elle serait ramenée à 15 ans. Et les jurés n’auraient plus à se prononcer sur la culpabilité de l’accusé, mais uniquement sur les circonstances du crime, atténuantes ou aggravantes, pour déterminer la peine. Cela pourrait se faire lors d’une audience simplifiée où le rôle de l’accusation et de la défense serait quasi symbolique. Ici, un petit doute subsiste : l’arrangement consisterait-il uniquement à diminuer la peine maximale encourue ou à rétrograder automatiquement d’un cran la peine prononcée ? Je n’ai pas la réponse.

En l’état de cette réflexion, on se dit qu’il s’agit d’un changement en demi-teinte destiné avant tout à faire des économies. Et que c’est peut-être le premier pas vers une sorte de marchandising de la justice. Certains magistrats ne voient d’ailleurs pas poindre d’un bon œil ce système anglo-saxon, qui entraîne parfois des dérives : certains coupables obtiennent des peines au rabais alors que certains innocents préfèrent ne pas prendre de risques et « assurer une peine faible ».

Comme on le sait, la procédure du plaider-coupable existe déjà en France  (loi Perben II du 9 mars 2004) pour les délits qui entraînent une peine inférieure à 5 ans d’emprisonnement.  Cela s’appelle la « procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité » ou CRPC. En 2007, les tribunaux ont enregistré plus de 45.000 CRPC.
La procédure est simplifiée à l’extrême et la décision est prise en petit comité : le procureur, le justiciable et son avocat. Dans la plupart des cas, c’est réglé en quelques minutes, et il ne reste plus au « tribunal » qu’à entériner l’accord. Souvent, ce sont les enquêteurs qui préparent le terrain. Ils marchandent les aveux. Si tu avoues, tu vas prendre deux fois moins… À se demander si les écoles de police ne vont pas se transformer en écoles de commerce… Je blague, mais on comprend bien que ce système défavorise les plus faibles, psychologiquement ou financièrement. Pourtant, le rapport du professeur Serge Guinchard va plus loin et propose (art. 62) de l’étendre à tous les délits…

Si j’ai bien compris l’idée générale de ce rapport, on accentue la spécialisation des juges, avec la création de pôles intégrés dans trois blocs au sein du Tribunal de grande instance : bloc familial, bloc pénal et bloc des affaires civiles. Et la suppression du juge de proximité. croisee-chemins_libuwoca.gif

Et du moins en matière civile ou de famille, M. Guinchard préconise même une nouvelle procédure calquée sur le collaborative law américain, système qui fait des émules : Grande-Bretagne, Autriche, Nouvelle-Zélande…. Chez nous cela s’appellerait « la procédure participative de négociation assistée par avocats ». Et comme on aime bien les sigles, cela pourrait donner la PPNAA. Cette idée a fait son chemin, et une proposition de loi a déjà été adoptée par le Sénat. Le texte devrait être discuté à l’Assemblée nationale d’ici à la fin de l’année. Pour faire simple, il s’agit de régler les litiges à l’amiable, entre avocats, et de saisir ensuite la juridiction compétente sur la base de l’accord passé entre les parties.

En fait, ce n’est plus un concept : la médiation est déjà entrée dans les mœurs. D’ailleurs, les 16 et 17 octobre, les premières assises internationales de la médiation judiciaire doivent se tenir au Palais du Luxembourg, à Paris, sous le patronnage de Mme Alliot-Marie.

Comme on le voit, la justice est en marche. Il faut juste se demander si elle marche dans le bon sens.

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Le billet précédent, Polanski, les Suisses sont chocolat, a été lu 2.175 fois en 2 jours et a suscité 48 commentaires.

Polanski : Les Suisses sont chocolat

Après l’arrestation du fils Kadhafi pour violences, les Suisses ont cédé aux « sanctions économiques » de la Libye. Pour leur fameux secret bancaire, ils ont fait le dos rond couteau_suisse_en_chocolat.jpglorsque les Américains ont tapé du poing sur la table. Vont-ils aujourd’hui plier devant le tollé provoqué par l’arrestation de Roman Polanski ?

C’est une affaire judiciaire, diront les sages qui lisent ce blog. Pas tout à fait. Car malgré les apparences, l’extradition est une décision politique. D’ailleurs, en France, c’est le Premier ministre qui prend un décret pour entériner une telle mesure.

Si l’on devait définir l’extradition, on dirait que c’est la décision d’un état souverain de livrer à un autre état, dit requérant, un individu afin qu’il soit jugé ou, s’il a déjà été condamné, pour qu’il purge sa peine.

En France, c’est réglé par les articles 696 et suivants du Code de procédure pénale et régi par une multitude de conventions internationales. Le principe étant que la France, comme d’ailleurs de nombreux pays, n’extrade pas ses nationaux.  Raison pour laquelle, c’est probable, les États-Unis ont préféré s’adresser à la Suisse.

Ce qui permet à quelques ministres trop bavards de notre République de crier à l’injustice, au scandale, et de s’époumoner contre cette Amérique « qui fait peur », comme nous dit Mitterrand II.

Voyons, voyons… Que se serait-il passé si les États-Unis s’étaient adressés à nous ?… Pas question d’extrader Polanski, il est français. On doit donc, c’est la loi (art. 113-6 du C. pén.), l’arrêter et le juger en France. De quoi est-il soupçonné ? De viol sur mineur de 15 ans. Alors, M. Kouchner feuillette le Code pénal, et il découvre qu’il encourt une peine entre 5 et 20 ans d’emprisonnement, en fonction des circonstances. Il est vrai qu’il n’y a pas si longtemps, aux E-U, il aurait risqué la mort. Car ce n’est que l’année dernière que la Cour suprême a décidé que la peine de mort ne pouvait être appliquée qu’aux meurtriers. C’est ainsi qu’un certain Patrick Kennedy, qui avait violé une fillette de 8 ans, a sauvé sa peau. À noter au passage qu’à l’époque, le candidat Obama s’était montré défavorable à une telle mansuétude. Mais quid de la prescription ? Problème d’école, mais il semble bien qu’en droit français le réalisateur aurait pu en bénéficier.

C’est vrai qu’il s’agit d’une affaire vieille de plus de 30 ans…
Pourtant, il y a quelques semaines, certains se plaignaient de l’amnistie (de fait) dont bénéficiait cet homme qui venait de s’accuser d’avoir tué une épicière en 1975… 

Oui mais puisque la victime a pardonné ! Cela ne change rien, l’action civile est éteinte, mais pas l’action publique.

Alors ? M. Polanski s’est rendu coupable d’une infraction criminelle, et plutôt que de faire face, il a préféré se mettre en cavale. Aujourd’hui les-excuses_myspace_film.jpgla justice lui réclame des comptes, et finalement, ce n’est que… justice. Son talent, sa personnalité, n’ont rien à voir dans cette affaire. Une seule question : Pourquoi avoir attendu si longtemps…

Et du coup, ce sont les Suisses qui sont dans la panade. Et il y a fort à parier qu’ils vont de nouveau baisser culotte et mettre tout ça sur le dos des policiers, comme cela a été le cas pour l’arrestation d’Hannibal Kadhafi, après que les autorités se soient platement excusées auprès du papa.

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Le billet précédent, Ami, entends-tu…, a été lu 1.400 fois en 2 jours et a donné lieu à 14 commentaires.

Ami, entends-tu…

La France est-elle ruinée ? C’est la question qu’on peut se poser devant les réflexions de Nicolas Sarkozy sur l’utilisation des forces de police et de gendarmerie. « Trois policiers par voiture, ce n’est pas normal », a-t-il extrait-couverture-du-livre-la-fleur-au-fusil-de-boissiere-copie.1254046953.jpgaffirmé. « Je ne veux plus de CRS et de gendarmes mobiles à attendre des heures dans les cars sans rien faire », a-t-il renchéri devant les parlementaires de la majorité. Et l’« on ne me fera pas le coup des effectifs ». Pour que le Président, chantre de la sécurité, envisage des économies dans ce domaine, je me suis dit qu’il devait y avoir anguille sous roche. D’autant que pour l’instant, la règle des 2 pour 1 n’est guère respectée dans la police. Alors, les choses vont-elles aussi mal ? Est-il fini l’heureux temps de la partie de poker dans le car de CRS ou du « tour d’arrière » dans la voiture de patrouille, à l’heure de la sieste ?

En feuilletant la presse, et surtout la presse économique, à la recherche d’informations, je me suis retrouvé face à une évidence : La réponse est oui. Il semble bien, comme disait Marguerite, la mamie qui s’est penchée sur ma jeunesse turbulente, qu’on ait mangé notre pain blanc en premier.

La France serait le 19° pays du monde le plus endetté. Toutes les minutes, c’est 120.000 € de plus. Bien loin le temps (de la campagne électorale) où l’ambition était de revenir aux normes européennes : 3 % du PIB, et pas un kopeck de plus. En fait, sans le savoir, on est cousu de dettes : près de 22.000 € par tête de pipe. Ce bébé qui pousse son premier cri a bien raison de rouspéter, car il est né avec une ardoise. À peine en est-il sorti qu’il est déjà dans les choux… La sécurité sociale, dont on nous rabâche qu’elle est la meilleure du monde, est à deux doigts du dépôt de bilan. Pour faire face, elle a besoin d’un découvert de 60 milliards d’euros. Un chiffre sans précédent. Sollicitée, la Caisse des dépôts déclare forfait. Elle ne peut couvrir que pour la moitié. Notre Sécu va donc émettre des obligations à court terme, ce qu’on appelle des billets de trésorerie. Sauf qu’il y en a déjà pour une bagatelle de 42 milliards et des poussières qui se baladent dans la nature, et que cette nouvelle arrivée de papiers sur le marché risque de faire effondrer les cours.

Citée dans Les Échos, la députée UMP Marie-Anne Montchamp nous dit : « Dans tous les cas, on fait de la cavalerie. On couvre des besoins de financements structurels, de long terme, avec de la trésorerie de court terme. Ce n’est pas vertueux, c’est surtout risqué. »

Simone Wapler, la rédactrice en chef de MoneyWeek, prend moins de précautions oratoires : « La « madoffisation » étatique, l’arnaque finale de la Grande Apocalypse Financière (GAF) est en cours », nous assène-t-elle comme un coup de grâce.

Et de nous dérouler le mode d’emploi, que je me permets de résumer avec mes mots de néophyte :
1 – On met d’abord en place des plans de relance et de renflouement qui sont financés par l’émission d’obligations.
2 – Le chômage continue sa progression, ce qui est le constat irréfutable d’un échec de ces mesures. Aujourd’hui, on en est là.
3 – C’est le début du processus de l’affaiblissement de la monnaie.
4 – Pour compenser l’alourdissement de la dette, on l’augmente. C’est la fuite en avant. Du coup la monnaie s’affaiblit encore plus et par ricochet les taux d’intérêt grimpent.
5 – Ce qui entraîne un effondrement du cours des obligations plus anciennes (à un taux plus bas) : les bas de laine fondent, les retraités diminuent leurs rations alimentaires et ceux qui ont quatre sous les glissent sous le matelas. La consommation s’effondre.
6 – Pour éviter le krach, les banques centrales se voient contraintes de racheter les vieilles obligations, celles dont plus personne ne veut. La planche à billets tourne…

Et c’est la phase finale. Le financement de la dette par la dette. Le cercle « dé-vertueux » est bouclé. La monnaie s’effondre et l’or atteint des pinacles.

Qu’on se rassure, tout cela n’arrivera pas. D’ailleurs le G20 y a mis bon ordre. Car ses participants, surtout du côté européen, ont tout de suite compris d’où venait le problème : le bonus des traders. On allait donc légiférer là-dessus, et tout reviendrait comme avant… Sauf que même pour ça, à la finale, on est resté sur notre faim. Des déclarations de bonnes intentions, et pis voilà !

Pas tout à fait, car la semaine passée, on a peut-être planté le décor d’une pièce qui se jouait en deux actes :

Acte I – Le Conseil de sécurité, où Obama nous convainc de la nécessité d’un monde sans armement nucléaire et tend la main à l’Iran, tandis que le méchant trublion français lui donne la réplique et passe pour le va-t-en-guerre de service. Vous savez, la scène classique du bon flic et du méchant.

Acte II – À Pittsburg, un triumvirat du « club nucléaire » se livre à un pathos d’où il résulte que l’ennemi atomique désigné est l’Iran.

Il est certain qu’on ne fera jamais une guerre pour défendre l’économie mondiale, cela ne serait… guère populaire. Mais faire une guerre en prévention d’une guerre encore plus grave, même si elle n’est qu’hypothétique, c’est un peu se positionner en défenseur de la paix… L’avantage, on l’a bien compris, c’est qu’un conflit armé justifie toutes les privations, les lois martiales, et autres petits plaisirs que nos parents ont connu.car-police_dessin-grd.1254047256.jpg

Mais je m’égare, et pour en revenir aux choses sérieuses, assavoir : les policiers doivent-ils être trois dans les voitures de patrouille, ou bien seuls, comme aux États-Unis ? J’ai posé la question à un expert, du genre de ceux qu’on voit à la télé et qui savent tout sur tout (aïe!). En résumé, il m’a dit : « Entre 3 et 1, y’a forcément une marge de négociation ».

Comme 2 et 2 font 4, quoi !

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Le compteur de dette provient du site Générateur-Langue de bois.

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Le billet précédent, Quand les députés s’auto-blanchissent, a été lu 2.010 fois en 2 jours et a donné lieu à 9 commentaires.
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