L’autre jour, j’ai vu Véronique Genest (Julie Lescaut) interviewée à la télé sur le racisme et les violences policières. Moi, je ne suis pas comédien, aussi personne ne m’a demandé mon avis, mais je vais quand même le donner. Juste histoire de souffler sur les braises.
D’abord on est heureux d’apprendre que ce sont des choses que l’on n’enseigne pas dans les écoles de police, du moins en ce qui concerne le racisme, car pour ce qui est des violences, ben si, ça fait partie de l’entraînement de base – il s’agit de violences légitimes, et maîtrisées.
Mais à partir de quel moment les violences policières deviennent-elles illégitimes ? La réponse n’est pas simple et la plupart du temps lors d’une intervention mouvementée, fi de la théorie, chacun fait ce qu’il peut. Mais il y a pourtant une ligne à ne pas franchir : une personne menottée est intouchable. Mieux, pour la Cour européenne des droits de l’homme, c’est une personne vulnérable placée sous la responsabilité de l’État, représenté en l’occurrence par les agents qui en ont la garde. Toute violence supplémentaire est donc illégitime et devrait faire l’objet de sanctions administratives et éventuellement de poursuites judiciaires, même si l’individu concerné est la pire des crapules. Et même si cette crapule a injurié, craché ou frappé les policiers ou les gendarmes avant son arrestation.
Personne n’a dit que c’était simple.
C’est d’ailleurs ce qui justifie le plaquage ventral, technique destinée uniquement à neutraliser un suspect le temps de lui passer les menottes dans le dos, avant de le relever ou du moins de l’installer dans une position moins inconfortable.
C’est bien ce qui cloche dans l’affaire Traoré.
Le 19 juillet 2016, opérant dans le cadre d’une enquête judiciaire, les gendarmes interpellent sans coup férir Bagui Traoré. Mais son frère Adama, qui l’accompagnait, prend la fuite. Par son comportement, il devient donc un suspect et les gendarmes lui courent après : une action légitimée par un « délit d’apparence », c’est-à-dire une situation qui laisse penser qu’un délit a été commis. Repéré chez un riverain où Traoré a trouvé refuge, trois gendarmes lui tombent dessus, l’immobilisent face contre terre et lui passent les menottes avant de l’embarquer dans leur véhicule. Durant le trajet, Adama Traoré se plaint de difficultés respiratoires, puis il perd connaissance. Lorsque les pompiers arrivent à la gendarmerie, x-temps plus tard, ils trouvent le jeune homme allongé sur le ventre, les menottes dans le dos, sans vie.
Une information judiciaire est en cours, il faut donc être prudent dans ses propos, mais si les événements se sont déroulés de la sorte, autant l’action des gendarmes était justifiée, autant ils ont failli ensuite, alors qu’ils étaient responsables de leur prisonnier.
Depuis la mort de George Floyd, le 25 mai 2020, à Minneapolis, les manifestations contre le racisme et les violences policières se succèdent dans de nombreux pays. Comme une aspiration à un Nouveau Monde après des semaines de confinement. En France, même si les proches de Traoré ont su faire prendre la mayonnaise en critiquant l’action des gendarmes, le principal malaise est en aval, dans l’enquête et le traitement judiciaire. Dans les affaires de ce type, souvent un sentiment d’injustice demeure – comme une mèche lente – et ça, c’est inacceptable.
Les jeunes sont plus que quiconque révoltés par cette impression d’injustice, deux poids deux mesures, et, alors qu’ils sont restés plutôt éloignés du mouvement des gilets jaunes, on les trouve en grand nombre dans les manifestations de ces derniers jours. Ils montrent qu’ils sont encore capables de se battre pour une idée : pas de justice pas de paix.
Et putain que ça fait du bien !
Car la première des injustices, c’est l’inertie de la justice. Cette lenteur est ressentie comme la volonté d’enterrer les dossiers qui dérangent. « Avec le temps, va, tout s’en va… » L’affaire Traoré est de ce point de vue emblématique : quatre ans, et on en est encore à des batailles d’experts. Un bon moyen de noyer le poisson. Et si l’on en parle encore aujourd’hui, au point de rameuter les foules, c’est que sa famille n’a rien lâché. Mais qui se rappelle par exemple de Mehdi FARGHDANI, abattu par un gardien de la paix de la BAC de Cergy de six balles de 9 MM tirées quasiment à longueur de bras, dont une dans le visage ? Et pourtant, c’était quelques mois avant l’affaire Traoré, dans le même département. Peu de gens, si ce n’est la mère du jeune homme (dont je suis l’avocat) et l’auteur de ce tir de panique qui, au passage, a reçu les félicitations du préfet, un avancement et une médaille ; tandis qu’un autre policier, blessé d’une balle perdue tirée par son collègue, n’a eu que les yeux pour pleurer. Un dossier que le procureur de Pontoise a classé sans suite et que le juge d’instruction, saisi par la famille, glisse régulièrement sous la pile : pas d’impact médiatique = pas d’intérêt.
À défaut de supprimer la technique ventrale, le ministre de l’Intérieur a dit vouloir interdire la technique de la « clé d’étranglement », laquelle pourrait être remplacée par le pistolet à impulsion électrique dont les deux ardillons sont branchés sur 50 000 volts. J’espère qu’il s’agit d’une farce, car aucune personne de bon sens n’envisagerait de préconiser l’utilisation d’une arme classée en catégorie B (comme un revolver .357 Magnum ou certains fusils à pompe) comme une méthode normale d’interpellation.
À moins que ça soit ça la « modernisation des techniques d’interpellation et d’intervention » dont a parlé notre Président !
En tant qu’avocat et policier, le maître de ces lieux a toutes les qualités nécessaires pour maintenir son droit à l’hebergement d’un blog excellent..
Je n’arrive pas à trouver la date d’un de ses billets sur l’attitude de policiers face au squat, mais ils peuvent être assez bienveillants (glisser l’adresse de locaux vides à leurs traducteurs, dans le cas de Rromen: on me l’a rapporté dans ma petite ville de province et les journaux l’ont rapporté à Lille)
Quant à la dénomination de violences policières, je suis très mal à l’aise: je suppose que les policiers sont représentatifs des tares françaises, mais dotés de pouvoirs exorbitants (et que la plupart n’en abusent pas, malgré une impunité institutionalisée).
Parmi les tares françaises, l’antitsiganisme (la police **nationale** n’en fait pas preuve plus que la moyenne) a été poussé jusqu’à l’absurde ces 15 dernières années: chauffés par les déclarations de Bismuth, Manuel Iznogoud -a squatté la place Beauveau et Matignon- et de Jupyter le Homardeux, certains individus (qui n’ont pas un système immunitaire de sinistre ou de président ) se livrent à des agressions décomplexées contre ce qui ressemble de près ou de loin, à un tsigane:
hier, deux policiers nationaux ont été pris pour des gens du voyage, tabassés et fusillés avec leurs propres armes de se(r)vice à Herblay (je doute que les Sinte se seraient laissé chiper leurs armes : à l’hopital d’Athenes, des Rroma désarmés ont réussi à se débarrasser de miliciens d’Aube Dorée venus les achever -source la voix des rroms- vers 2016 de mémoire)
Excellente analyse… que viendra corroborer aujourd’hui même la diffusion en salles du film de David Dufresne, « Un pays qui se tient sage » sur les violences policières dont notre bien-aimé Président a toujours nié la dénomination et l’existence.
Petite question annexe : je croyais que les blogs du monde.fr n’existaient plus puisqu’un jour on nous a demandés de déménager ailleurs.
Vous en seriez un squatter méconnu ?
Amitiés.
D.H.
Ce qui me choque dans certaines vidéos d’actes violents disproportionnés commis par des policiers c’est la passivité des collègues du ou des policiers agressifs. D’abord ça rend les choses encore plus insupportables ou insoutenables, ensuite il me semble que des gens qui vous veulent du bien vous arrêtent avant que vous ne fassiez une grosse connerie, non ? À moins d’un sentiment d’impunité…
Ce blog fait du bien dans notre monde brutal en pleine confusion.
Le titre est amusant:
remplacer une technique d’immobilisation potentiellement mortelle par un instrument de torture et d’immobilisation bien plus dangereux qu’un vieux generateur telephonique (50 volts en impulsions… : la gégene est encore utilisée comme cadeau de bienvenue par la police politique syrienne… avant de passer aux choses serieuses) et présenter ça comme un progrès, il faut l’oser (mais Castaner a des capacités d’audace infinies. Peut être a-til acheté des actions dans une société de generateurs d’impulsions, susceptibles … de provoquer une crise cardiaque).
Pour le lien entre le racisme et les violences policières, il est très compliqué:
Cedic Chouviat été froidement étranglé par deux policiers, dont il mettait la vie en danger… en les filmant. JE n’ai pas vu de comportemnet raciste de leur par, seulement deux vouous qui, par leur bêtise, se sont privés d’un treizième mois (les poursuites pour outrage sont potentiellemnt lucratives pour les policiers) et que la hierarchie a couverts juqu’à maintenant (maintien des primes, dans tous les cas; absence de suspension, contrastant avec les autres corps de la fonction publique -ex circulaire Royal en 1997-).
En matiere d’inertie, la justice fait ce qu’elle peut, avec peu de moyens et le record d’inertie et de complaisance est atteint par la hiérachie policière: des policiers condamnés pour avoir trébuché sur un jeune homme sorti faire ses courses…. continuent de toucher leur salaire, 4 ans après avoir reconnu les faits (un assassin, aux Etats Unis, peut être viré dans la journée; un policier soupçonné de viol à NEwYork a du reprendre une carrière sur la côte Ouest, à San Francisco: il a reconnu avoir eu des relations sexuelle -non consenties, la victime étant hors d’état de consentir- avec une femme ivre qu’il vait ramené chez elle. A la difference de deux courageux anonymes français, condamnés, ce preux chevalier n’a pas été condamné -c’était en 2010: la definition de viol n’était pas encore acceptée -, mais tout simplement viré.
Voila pour les violences policières.
Pour le racisme, c’est très compliqué:
il n’existe pas de race Rrom (j’ai montré à des rromen des videos de femmes kurdes, et ils m(ont demandé quelle était leur tribu rrom)…
Leur habillement les désigne souvent comme très pauvres.
Raymond Gureme (circassien par son père) est considéré comme Rrom et campait depuis les années 1970 sur un bout du camp de Linas, où les gendarmes français l’av aient concentré sous l’Occuppation. Pour memoire, les ciracssiens , après avoir eté purifiés ethniquement dans la région de Sotchi vers 1880, se sont dispersés: aux USA, les femmes étaient danseuse caucasiennes dans des cirques, étaient présentés… comme plus blanches que blanches (d’où le « type caucasien » du jargon policier du Possygrabberstan).
Un bulibasa -traducteur ; sous Ceausecu, ils aviaient une carte d’indicateur- m’a raconté que le captiaine B… lui avait demandé il y a dix ans de faire filmer son adjoint, lors de la prochaine évacuation de squat (de quoi donner des boutons à Ciotti): ce jeune homme brillant avait la manie de faire un sourire kabyle audit bulibasa -l’indicateur de son chef-….
Ce fut fait, et le bulibasa n’a jamais revu ce jeune adjoint… (je lui ai expliqué ce qu’était un sourire kabyle, et que, en cas de problème juridique compliqué, il devrait consulter le capitaine/commandant B.)
En contraste, Manuel Iznogoud a été cité devant la cEDH pour propos incitant au racisme (la CEDH, avec la
Turquie et la France, croule sous les dossiers)… et l’affaire est encours.
Et que penser de Jupyter le Homardeux?
après ses propos sur les Comoriens (mais c’était de l’humour presidentiel, auto proclamé, le meilleur, la fine fleur de l’élite française) en juin 2017,
et sa réaction quand il a découvert que Déttinger -yenish, descendant de paysans sans terres depuis la guerre d »e 30 ans et nomadisés; ils ont emprunté très peu de mots aux Sinten/Manushen- savait écrire en français correct » Le type, il n’a pas les mots d’un Gitan. Il n’a pas les mots d’un boxeur gitan. »
-je ne crois pas que l’amour soit fort entre yenishen et manushen-
Alors que les Manusha, les Kalerasha et sans doute les Yenishs , une fois scolarisés, peuvent être parfaitement bilingues.
Il est peu vraisemblable que la Dream Team actuelle soit à même de lutter contre un éventuel racisme policier -sauf à … se suicider-