LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Police (Page 8 of 34)

Qui veut la peau de la PP ?

Bernard Petit, le directeur du 36 quai des Orfèvres, la PJ de la préfecture de police, vient d’être mis en examen. On lui reproche d’avoir violé le secret de l’instruction dans l’affaire Rocancourt et d’avoir fourni des informations au préfet Christian Prouteau.

Plaque Quai des OrfèvresOr, si la violation du secret de l’instruction est un délit banal et rarement poursuivi, le deuxième chef d’inculpation est plus grave. C’est une infraction créée par la loi du 9 mars 2004, dite Perben II. Elle vise toute personne qui, du fait de ses fonctions, a connaissance d’informations issues d’une enquête ou d’une instruction en cours concernant un crime ou un délit, et qui en informerait « sciemment » un suspect dans le dessein d’entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité (art. 434-7-2 du CP).

Je ne crois pas me tromper en disant qu’à l’origine, ce texte visait essentiellement les avocats. Continue reading

Cocaïne, fric et flics

L’arrestation ces derniers jours de policiers de la PAF, mis en cause dans un trafic qu’ils sont censés surveiller ; la disparition d’une cinquantaine de kilos de cocaïne dans la salle des scellés de la brigade des stups du quai des Orfèvres, autant d’affaires récentes qui plombent la police. Une seule raison : le fric. En octobre dernier, c’était un ancien chef d’Interpol qui était mis sous les verrous en Équateur, et l’on se souvient des nombreuses arrestations parmi les autorités de l’aéroport de la station balnéaire de Punta Cana, en République Dominicaine, après la découverte de 682 kg de cette drogue dans un Falcon 50 français, en mars 2014.

NarcopsLe trafic de stupéfiants, et notamment celui de la cocaïne, génère de tels bénéfices que tous les intermédiaires s’enrichissent… en une traînée de poudre – du moins s’ils ne vont pas en prison. Quant aux « cocotrafiquants », le fric les rend omnipuissants. Devant ces kilos de drogue qui défilent sous leur nez et qui disparaissent en fumée dans les incinérateurs, certains flics craquent. Ils passent du côté obscur. Même s’ils ne sont que quelques-uns, ils font mal à la corporation. Mais, comme dit le directeur général Jean-Marc Falcone, « la police nationale fait le ménage dans sa propre institution ». Continue reading

Débriefing grognon

Hier, j’ai essayé de regarder un concert de Nolwenn Leroy à la télé, mais je n’ai pas accroché. Alors, j’ai zappé sur BFM et je suis resté planté devant ces images où, pendant des heures, rien ne se passait. Putain, je m’en veux !

En fait, comme tout le monde, je me suis senti concerné par cette chasse à l’homme – concerné et inutile. Avec l’envie infantile de prendre les armes et de participer. Alors aujourd’hui, le calme presque revenu, je ressasse les événements. Et en récupérant mes années de trop et mon sens critique, je reste devant cette interrogation : La France est-elle en guerre ?

On a entendu beaucoup de fadaises durant ces 48 heures, les spécialistes-sic y sont allés de leur refrain, mais il y a eu quand même quelques voix intelligentes. Les propos de Serge July me sont revenus en mémoire. Interviewé sur une radio, il disait que l’attaque contre Charlie Hebdo n’était pas un attentat, mais une exécution. Autrement dit (ce n’est plus lui qui parle) une sorte de mission commando. Eh oui ! aujourd’hui, on utilise un vocabulaire qui rappelle 39-45. Nous sommes donc en guerre, non pas contre un État, mais contre une idéologie obscure. Il faut bien en être conscient puisque des militaires français sont engagés sur plusieurs fronts.

Et si l’on raisonne froidement, nous sommes bien obligés d’en accepter les risques… Continue reading

Entrez ailleurs… pour trouver le cadeau que l’on ne revend pas

La campagne de communication démarrée le mois dernier pour inciter les gens à pousser la porte d’une librairie est pour le moins équivoque. Du genre, allez voir ailleurs… Heureusement, cela n’a pas dissuadé notre Président, à la veille de Noël, de faire ses emplettes à l’Écume des Pages, lieu chébran parisien de la littérature de Saint-Germain-des-Prés. Et même si l’établissement n’a pas souhaité s’étendre sur les livres qu’il a achetés, il y a fort à parier que les deux bestsellers du moment n’étaient pas dans son panier.

Entrez ailleuursSur ce blog, moins introverti que le grand homme, je vais de ce pas vous donner un aperçu de ma rencontre avec trois auteurs…

L’autre jour, Claude Cancès, ancien directeur du 36, me traîne à la FNAC pour m’offrir son dernier ouvrage, La brigade Mondaine, aux éditions Pygmalion. Manque de chance, il n’y est pas. La jolie libraire est désolée. Tous deux parlent littérature (je tiens la bougie), et, avant de se séparer, elle lui demande de lui dédicacer l’un de ses anciens livres. Je raconte l’anecdote car ce sont ces petites choses de la vie qui font qu’un libraire n’est pas un commerçant comme un autre. Continue reading

Police, justice, etc. : Ce qui va changer en 2015

En début d’année, il est courant de prendre de bonnes résolutions. Pour les policiers, magistrats et gendarmes, c’est une nécessité : 2015 s’annonce chargée. Le changement est en marche, souvent sous la pression européenne. Dès le 1er janvier, plusieurs mesures modifient le déroulement de l’enquête pénale, d’autres l’application des peines. Et certaines égratignent nos libertés individuelles. Sans porter aucun jugement, voici un panorama laconique des principales modifications :

Audition libre dans l’enquête : Dorénavant, toute personne soupçonnée d’avoir participé à un crime ou un délit (puni d’une peine d’emprisonnement) qui fait l’objet d’une audition libre a le droit d’être assistée par un avocat. Celui-ci peut, comme lors d’une garde à vue, recommander à son client de parler ou de se taire ; mais il peut, en plus, lui conseiller soit de rester soit de partir.

Jusqu’alors, le suspect ne pouvait bénéficier que de conseils juridiques obtenus dans une structure d’accès au droit (maisons de justice et du droit, antennes de justice, point d’accès au droit, associations…)

La personne entendue librement (ce qui suppose qu’elle soit là de son plein gré) bénéficie donc des mêmes droits que si elle faisait l’objet d’une garde à vue. Mais il lui appartient de régler les honoraires de son avocat, sauf si ses ressources lui permettent de prétendre à l’aide juridictionnelle. Elle peut également renoncer à l’avocat et se débrouiller toute seule.

Confrontation de la victime avec son agresseur : Si la victime de l’infraction doit être confrontée au suspect, elle aussi, a la possibilité d’être assistée d’un avocat, dans les mêmes conditions tarifaires que ci-dessus.

Contrainte pénale : Cette sanction peut remplacer l’emprisonnement Continue reading

La justice ne parvient plus à gérer les scellés judiciaires

Chaque année, environ 500 000 objets ou éléments sont placés sous main de justice. Du plus microscopique, comme des cellules ADN, au plus imposant, comme des voitures ou des immeubles. Certains n’ont aucune valeur tandis que d’autres attisent les convoitises. Le stock imposant de cocaïne qui a mystérieusement été dérobé dans les locaux du 36 a marqué les esprits. Mais pour une affaire retentissante, combien d’objets ont pu disparaître de ces capharnaüms que sont les salles de scellés ! Larcins qui restent d’ailleurs le plus souvent ignorés.

Au-delà de ces problèmes de sécurité, une gestion scrupuleuse des scellés judiciaires est fondamentale. Elle conditionne en grande partie la qualité même de la justice. Surtout depuis les avancées de la police scientifique. Et cela tout au long de l’enquête pénale, de la découverte de l’objet à saisir à son éventuelle destruction, à l’issue du procès. La toute récente affaire des disparues de la gare de Perpignan en est une bonne démonstration. Il était inenvisageable il y a 17 ans d’analyser l’ADN de « contact », ce qui, à l’époque, n’a pas empêché les enquêteurs de prendre toutes les précautions dans la saisie matérielle des vêtements et des chaussures de la victime, Mokhtaria Chaïb, âgée de 19 ans, afin de se donner la possibilité d’analyses futures, voire futuristes. Que n’en a-t-il été de même dans l’affaire du petit Grégory ! Car, si une partie des traces laissées sur les vêtements de l’enfant ont pu disparaître en raison d’un séjour dans l’eau de la Vologne, ce sont surtout les manipulations successives qui ont contaminé les scellés en superposant sur ceux-ci plusieurs couches d’ADN parasite. Mais c’était il y a 30 ans ! Continue reading

Les forces de l’ordre peuvent-elles tirer sur un fuyard?

La semaine dernière, un jeune homme soupçonné de braquages a été abattu alors qu’il avait été extrait de la maison d’arrêt de Strasbourg pour être présenté à un juge d’instruction. Il semblerait que le chauffeur du véhicule, un gendarme adjoint volontaire (GAV), ait voulu venir en aide à sa collègue aux prises avec le détenu sur la banquette arrière. Il s’est arrêté sur la bande d’arrêt d’urgence de l’A35 et, dans l’altercation qui a suivi, un coup de feu est parti. Hocine Bouras, âgé de 23 ans est mort d’une balle dans la tête.

Les faits ont été qualifiés comme des « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner commises par un dépositaire de l’autorité publique ». Une infraction criminelle passible de 20 ans de réclusion. Pourtant, le juge d’instruction n’a pas mis le gendarme adjoint en examen, comme le réclamait le procureur de la république Bernard Lebeau. Il l’a placé sous le statut de témoin assisté.

Cette différence d’appréciation est un révélateur. Continue reading

39, boulevard de la Chapelle

La « salle de consommation à moindre risque » (SCMR) devait ouvrir près de la gare du Nord, à Paris, à la fin de l’année dernière. Tout était prêt. Même la police. Une brigade spécialisée de terrain (BST) a été créée pour l’occasion. Installée officiellement par le préfet de police Bernard Boucault, elle est composée de 25 policiers en tenue rattachés au commissariat du X° arrondissement. Sa mission est évidemment de lutter contre la délinquance dans le secteur de la gare, mais, peut-on lire sur la plaquette de présentation, elle est aussi « complémentaire de l’action conduite plus en profondeur par les services spécialisés qui sera encore renforcée par l’inclusion du secteur de la gare du nord comme un objectif de plan de lutte contre les stupéfiants de la préfecture de police ».

Ce qui ne veut strictement rien dire.

Capture

Non pas que les plumitifs de la PP aient l’esprit embrouillé, mais il était difficile d’écrire que les policiers devaient « inciter » les toxicomanes porteurs de leur drogue à se rendre à la salle d’injection. Un ordre illégal, puisque la consommation de produits stupéfiants est un délit. Le Conseil d’État ne s’y est pas trompé. Légiférez ! a-t-il dit au gouvernement. Un fâcheux contretemps, mais trop ostensible pour ne pas paraître suspect. D’ailleurs, n’importe quel flic de base aurait eu la même réponse que le Conseil d’État, si on lui avait posé la question. Continue reading

Esquisse d’un portrait-robot à l’ADN

Les traces biologiques laissées par un violeur sont systématiquement comparées à celles qui sont conservées dans le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) – c’est même dans ce but que cette base de données a été créée, il y a une quinzaine d’années. Mais si cette recherche se révèle négative, peut-on aller plus loin et utiliser le code génétique de l’agresseur pour tracer de lui une sorte de portrait-robot ? A priori, la réponse est non, puisque la loi sur la bioéthique punit le fait de procéder à l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne à des fins autres que médicales ou scientifiques, sans avoir recueilli préalablement son consentement.

Capture adnCe n’est pas l’avis de la Cour de cassation. Dans une décision récente (Crim. 25 juin 2014), elle a fait fi de cette interdiction estimant que sur le fondement de l’article 81 du code de procédure pénale, le juge était en droit d’ordonner l’analyse de traces biologiques pour en extraire les caractères morphologiques apparents de l’auteur inconnu d’un crime. Il s’agissait en l’occurrence des prélèvements effectués sur deux victimes d’un viol. Les hauts magistrats ont rejeté le pourvoi en arguant que le matériel biologique nécessaire à cette recherche s’étant « naturellement détaché du corps humain » ni la loi pénale ni la loi civile sur le respect du corps humain n’avait été violée. Continue reading

Tarnac : la filoche s’effiloche

Rarement une simple filature aura fait couler autant d’encre. Ou du moins le procès-verbal qui la retrace, le fameux P-V 104, qui est paraît-il bourré d’invraisemblances. D’après la presse, et notamment les journalistes du Monde et de Mediapart, qui visiblement connaissent le dossier Tarnac sur le bout des doigts, l’élément fort réside dans le compte-rendu des surveillances effectuées sur Julien Coupat et son amie Yildune Lévy. Les policiers ont noté que le véhicule à bord duquel ils se trouvaient a stationné un quart d’heure dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008 à proximité de la ligne TGV où, au petit jour, il a été découvert un crochet métallique posé sur la ligne caténaire.

Sans remettre en cause le travail des journalistes, notamment l’épluchage des procès-verbaux effectué par Laurent Borredon sur son blog, plus d’un policier a dû sourire en lisant les analyses et les reconstitutions d’une filature qui a duré une vingtaine d’heures. Continue reading

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