LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Gendarmerie (Page 4 of 14)

Pour les militaires, une justice presque ordinaire

Ainsi, depuis neuf mois, une enquête préliminaire est en cours pour vérifier si des soldats français ont commis des viols ou des agressions sexuelles contre de jeunes enfants en Centrafrique… On peut dire que cette discrétion est étonnante alors que, dans bien des affaires, notamment lorsqu’elles touchent des hommes politiques, on a pris l’habitude de lire dans la presse des extraits des procès-verbaux, voire des écoutes téléphoniques.

Bangui capture d'écran Francetv infoLa « grande muette » est donc fidèle à sa réputation – et la justice a respecté cette tradition. Du coup, nous, nous avons appris l’information d’un journal britannique. Ce qui la fiche plutôt mal. Et comme il en est de même pour les autorités de Centrafrique, cette affaire s’annonce comme un véritable bide diplomatique.

Devant ce mutisme, il n’est pas anormal de s’interroger : les militaires seraient-ils au-dessus des lois ? Absolument pas, a répondu le porte-parole du ministère chargé de la défense, les militaires sont des citoyens comme les autres. Continue reading

La Cour règle son compte à la PJ

La Cour des comptes a récemment rendu public la synthèse de son contrôle sur « la fonction de police judiciaire dans la police et la gendarmerie nationales » ainsi que ses recommandations.

Impression générale : un bon point pour la préfecture de police de Paris et carton jaune pour les autres services. Si le coût de l’ensemble de l’activité de la police judiciaire est impressionnant (plus de 4 milliards d’euros en 2013), les dix pages du rapport avancent peu de chiffres, mais tentent plutôt une analyse technocratique de sa gestion.

Organigramme police gendamerie au MID’ailleurs, comment traduire en arithmétique binaire une activité tellement diversifiée ! En fait, en mettant l’accent sur la rivalité entre les services, derrière les mots, j’ai eu l’impression d’un lâcher de ballon-sonde sur un sujet brûlant : la fusion de la police et de la gendarmerie.

La police judiciaire est, avec le procureur, le juge et l’avocat, au centre de l’enquête pénale. Mais lorsque l’on parle de police judiciaire, on a tendance à focaliser sur la PJ, voire sur le Quai des Orfèvres. Il s’agit là d’une image de fiction parfois captivante mais bien loin de la réalité. En fait de nombreux fonctionnaires ou militaires effectuent des actes de police judiciaire. Le nombre d’OPJ ou d’APJ spécialisés ne cessant d’ailleurs d’augmenter. On cite le plus souvent les agents des douanes et ceux des services fiscaux, mais ce sont des dizaines d’agents publics ou privés et de militaires qui assurent des fonctions de police judiciaire. Dans des domaines que parfois on ne soupçonne même pas, comme l’environnement, la pollution de l’air, la santé publique ou les infractions commises en Antarctique. Continue reading

Débriefing grognon

Hier, j’ai essayé de regarder un concert de Nolwenn Leroy à la télé, mais je n’ai pas accroché. Alors, j’ai zappé sur BFM et je suis resté planté devant ces images où, pendant des heures, rien ne se passait. Putain, je m’en veux !

En fait, comme tout le monde, je me suis senti concerné par cette chasse à l’homme – concerné et inutile. Avec l’envie infantile de prendre les armes et de participer. Alors aujourd’hui, le calme presque revenu, je ressasse les événements. Et en récupérant mes années de trop et mon sens critique, je reste devant cette interrogation : La France est-elle en guerre ?

On a entendu beaucoup de fadaises durant ces 48 heures, les spécialistes-sic y sont allés de leur refrain, mais il y a eu quand même quelques voix intelligentes. Les propos de Serge July me sont revenus en mémoire. Interviewé sur une radio, il disait que l’attaque contre Charlie Hebdo n’était pas un attentat, mais une exécution. Autrement dit (ce n’est plus lui qui parle) une sorte de mission commando. Eh oui ! aujourd’hui, on utilise un vocabulaire qui rappelle 39-45. Nous sommes donc en guerre, non pas contre un État, mais contre une idéologie obscure. Il faut bien en être conscient puisque des militaires français sont engagés sur plusieurs fronts.

Et si l’on raisonne froidement, nous sommes bien obligés d’en accepter les risques… Continue reading

Police, justice, etc. : Ce qui va changer en 2015

En début d’année, il est courant de prendre de bonnes résolutions. Pour les policiers, magistrats et gendarmes, c’est une nécessité : 2015 s’annonce chargée. Le changement est en marche, souvent sous la pression européenne. Dès le 1er janvier, plusieurs mesures modifient le déroulement de l’enquête pénale, d’autres l’application des peines. Et certaines égratignent nos libertés individuelles. Sans porter aucun jugement, voici un panorama laconique des principales modifications :

Audition libre dans l’enquête : Dorénavant, toute personne soupçonnée d’avoir participé à un crime ou un délit (puni d’une peine d’emprisonnement) qui fait l’objet d’une audition libre a le droit d’être assistée par un avocat. Celui-ci peut, comme lors d’une garde à vue, recommander à son client de parler ou de se taire ; mais il peut, en plus, lui conseiller soit de rester soit de partir.

Jusqu’alors, le suspect ne pouvait bénéficier que de conseils juridiques obtenus dans une structure d’accès au droit (maisons de justice et du droit, antennes de justice, point d’accès au droit, associations…)

La personne entendue librement (ce qui suppose qu’elle soit là de son plein gré) bénéficie donc des mêmes droits que si elle faisait l’objet d’une garde à vue. Mais il lui appartient de régler les honoraires de son avocat, sauf si ses ressources lui permettent de prétendre à l’aide juridictionnelle. Elle peut également renoncer à l’avocat et se débrouiller toute seule.

Confrontation de la victime avec son agresseur : Si la victime de l’infraction doit être confrontée au suspect, elle aussi, a la possibilité d’être assistée d’un avocat, dans les mêmes conditions tarifaires que ci-dessus.

Contrainte pénale : Cette sanction peut remplacer l’emprisonnement Continue reading

Sivens : l’État est-il responsable ?

L’enquête de l’inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) n’a relevé aucune faute professionnelle de la part des gendarmes mobiles dans l’action de maintien de l’ordre qui a conduit à la mort de Rémi Fraisse, dans la nuit du 25 au 26 octobre 2014.

Le maréchal des logis-chef J., qui a lancé la grenade mortelle, a utilisé une arme autorisée par les règlements pour accomplir un acte autorisé par la loi.

Mais alors, personne ne serait responsable de la mort de ce jeune homme !

Pas si vite. Cette enquête permet juste de soutenir qu’aucun gendarme présent sur le terrain n’a commis une faute professionnelle. Il appartient maintenant aux juges de déterminer s’il peut y avoir une ou plusieurs personnes responsables tant sur le plan pénal que civil, voire si la responsabilité de l’État peut être engagée. Car le maintien de l’ordre relève exclusivement du ministre de l’Intérieur (art. D. 211-10 du CSI), donc de son représentant au plan du département, le préfet. Continue reading

La justice ne parvient plus à gérer les scellés judiciaires

Chaque année, environ 500 000 objets ou éléments sont placés sous main de justice. Du plus microscopique, comme des cellules ADN, au plus imposant, comme des voitures ou des immeubles. Certains n’ont aucune valeur tandis que d’autres attisent les convoitises. Le stock imposant de cocaïne qui a mystérieusement été dérobé dans les locaux du 36 a marqué les esprits. Mais pour une affaire retentissante, combien d’objets ont pu disparaître de ces capharnaüms que sont les salles de scellés ! Larcins qui restent d’ailleurs le plus souvent ignorés.

Au-delà de ces problèmes de sécurité, une gestion scrupuleuse des scellés judiciaires est fondamentale. Elle conditionne en grande partie la qualité même de la justice. Surtout depuis les avancées de la police scientifique. Et cela tout au long de l’enquête pénale, de la découverte de l’objet à saisir à son éventuelle destruction, à l’issue du procès. La toute récente affaire des disparues de la gare de Perpignan en est une bonne démonstration. Il était inenvisageable il y a 17 ans d’analyser l’ADN de « contact », ce qui, à l’époque, n’a pas empêché les enquêteurs de prendre toutes les précautions dans la saisie matérielle des vêtements et des chaussures de la victime, Mokhtaria Chaïb, âgée de 19 ans, afin de se donner la possibilité d’analyses futures, voire futuristes. Que n’en a-t-il été de même dans l’affaire du petit Grégory ! Car, si une partie des traces laissées sur les vêtements de l’enfant ont pu disparaître en raison d’un séjour dans l’eau de la Vologne, ce sont surtout les manipulations successives qui ont contaminé les scellés en superposant sur ceux-ci plusieurs couches d’ADN parasite. Mais c’était il y a 30 ans ! Continue reading

Les forces de l’ordre peuvent-elles tirer sur un fuyard?

La semaine dernière, un jeune homme soupçonné de braquages a été abattu alors qu’il avait été extrait de la maison d’arrêt de Strasbourg pour être présenté à un juge d’instruction. Il semblerait que le chauffeur du véhicule, un gendarme adjoint volontaire (GAV), ait voulu venir en aide à sa collègue aux prises avec le détenu sur la banquette arrière. Il s’est arrêté sur la bande d’arrêt d’urgence de l’A35 et, dans l’altercation qui a suivi, un coup de feu est parti. Hocine Bouras, âgé de 23 ans est mort d’une balle dans la tête.

Les faits ont été qualifiés comme des « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner commises par un dépositaire de l’autorité publique ». Une infraction criminelle passible de 20 ans de réclusion. Pourtant, le juge d’instruction n’a pas mis le gendarme adjoint en examen, comme le réclamait le procureur de la république Bernard Lebeau. Il l’a placé sous le statut de témoin assisté.

Cette différence d’appréciation est un révélateur. Continue reading

Esquisse d’un portrait-robot à l’ADN

Les traces biologiques laissées par un violeur sont systématiquement comparées à celles qui sont conservées dans le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) – c’est même dans ce but que cette base de données a été créée, il y a une quinzaine d’années. Mais si cette recherche se révèle négative, peut-on aller plus loin et utiliser le code génétique de l’agresseur pour tracer de lui une sorte de portrait-robot ? A priori, la réponse est non, puisque la loi sur la bioéthique punit le fait de procéder à l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne à des fins autres que médicales ou scientifiques, sans avoir recueilli préalablement son consentement.

Capture adnCe n’est pas l’avis de la Cour de cassation. Dans une décision récente (Crim. 25 juin 2014), elle a fait fi de cette interdiction estimant que sur le fondement de l’article 81 du code de procédure pénale, le juge était en droit d’ordonner l’analyse de traces biologiques pour en extraire les caractères morphologiques apparents de l’auteur inconnu d’un crime. Il s’agissait en l’occurrence des prélèvements effectués sur deux victimes d’un viol. Les hauts magistrats ont rejeté le pourvoi en arguant que le matériel biologique nécessaire à cette recherche s’étant « naturellement détaché du corps humain » ni la loi pénale ni la loi civile sur le respect du corps humain n’avait été violée. Continue reading

La police va re-géolocaliser

Lundi 20 janvier, le Sénat examine en séance publique le projet de loi sur la géolocalisation judiciaire. L’objectif est de redonner aux policiers et aux gendarmes le droit d’utiliser les moyens techniques pour surveiller les déplacements des personnes suspectées d’un crime ou d’un délit. Un procédé utilisé de longue date mais brutalement interrompu le 22 octobre 2013 par une décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation.

Filoche par géolocalisation

Filoche par géolocalisation

La loi qui doit être votée dans les jours prochains (selon la procédure accélérée) viendra inscrire deux articles nouveaux dans le code de procédure pénale, et un dans le code des douanes. Elle ne vise pas la géolocalisation a posteriori – celle qui est la plus indiscrète et qui permet de reconstituer notre passé – mais uniquement la géolocalisation en temps réel. En pratique, deux techniques dominent: la balise (GPS ou radio) et le bornage du téléphone portable.  Continue reading

Affaire Achoui : les indics en question

Au troisième jour du procès des agresseurs de Karim Achoui, le commissaire divisionnaire Stéphane Lapeyre s’est défendu bec et ongles des accusations portées contre lui. Il a nié toute implication dans la tentative d’assassinat dont a été victime l’ancien avocat, en 2007. Par sa carrière, ce commissaire a gagné qu’on l’écoute. Et il faut avouer que l’idée d’un complot fomenté par la police judiciaire pour éliminer un avocat au talent trop dérangeant ne tient guère la route. Même si le scénario ne manque pas d’originalité…

Stéphane Lapeyre a permis l’identification et l’arrestation des accusés qui doivent répondre de tentative d’assassinat ou de complicité, en désignant, comme tireur présumé, l’un de ses anciens indics, Ruddy Terranova. Continue reading

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