LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Actualité (Page 55 of 71)

Petit dossier sur le secret

Depuis quelques jours, Wikipédia affiche l’organigramme de la DCRI (direction centrale du renseignement intérieur) et fournit le nom de certains de ses chefs de service. Des éléments classés « secret-défense ». D’après Le Monde, un internaute nantais serait à l’origine de cette mise à jour de l’encyclopédie participative. Que risque-t-il ?

confidentiel_destructeurscom.1237380271.gifSur le plan juridique, il n’existe qu’une forme de secret : le secret de la défense nationale. Sa violation tombe sous le coup de la loi, et les peines encourues sont de sept ans d’emprisonnement, pour les personnes officiellement dépositaires du secret (personnes habilitées), et de cinq ans pour les autres (art. 413-10 et 11, du Code pénal).

Il existe une classification du secret sur trois niveaux :
– Très Secret-Défense ;
– Secret-Défense ;
– Confidentiel-Défense.

On peut donc imaginer qu’un tribunal qui aurait à se prononcer tiendrait compte de cette classification pour graduer la peine. À noter que dans ce domaine, la négligence peut être coupable. Et le dépositaire d’un secret de la DN doit se plier à une procédure très stricte. Ainsi par exemple, si l’on veut détruire un document Secret-Défense, il doit être broyé en particules de 5 mm2, ce qui représente environ 15.000 particules pour une feuille de format A4 (source Destructeurs).

Pour accéder à un document classifié, il faut réunir deux conditions : posséder une habilitation du Premier ministre pour le Très Secret-Défense ou du ministre concerné dans les autres cas, et avoir une raison valable.

On s’interroge régulièrement sur le bien-fondé de l’utilisation du secret par les responsables politiques, et certaines affaires (écoutes de l’Élysée, frégates de Taiwan…), ont renforcé dans l’opinion publique l’idée d’un secret défense de complaisance. Une façon pour ceux qui détiennent le pouvoir de s’arroger une immunité de fait.

Pour se débarrasser de ce soupçon, Lionel Jospin a institué en 1998 une autorité indépendante, la CCSDN (Commission consultative du secret de la Défense nationale). Elle comprend un membre du Conseil d’État, de la Cour de cassation et de la Cour des comptes, ainsi qu’un député et un sénateur, et doit être saisie dès qu’un juge sollicite d’accéder à une information classifiée. Toutefois, il s’agit d’une simple consultation. Sa décision ne s’impose pas.

Mais, dans le projet de loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014, le législateur a prévu d’encadrer plus sévèrement l’accès aux documents et aux lieux protégés, suivant en cela les recommandations du Conseil d’État. Il s’agit d’établir des règles aux perquisitions effectuées dans certains endroits (notamment les ministères) et à la saisie de documents dits sensibles. Pour ce faire, la loi renforce les prérogatives du président de la SSCDN, lequel doit être informé à l’avance, un peu comme le bâtonnier est avisé avant une perquisition au cabinet d’un avocat.

Inutile de dire que les syndicats de la magistrature sont farouchement opposés à cette restriction du pouvoir des juges. Ils y voient un moyen de limiter le champ des investigations dans les affaires politico-judiciaires.

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Pour revenir à l’internaute nantais, il semble ne pas risquer grand-chose. Les informations fournies sur Wikipédia sont presque toutes du domaine public. On trouve certains éléments sur Internet, dans La documentation française (ici), ou sur Légifrance (ici). Seule la diffusion de la liste des noms peut réellement poser problème. D’ailleurs une nouvelle loi est sous le coude pour assurer une protection spécifique de l’anonymat des « agents secrets ».

La raison d’État justifie la notion de secret de la DN. Mais en y mettant trop de choses, trop de gens, ne prend-on pas le risque de faire naître la suspicion ?

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Voir aussi dans ce blog : Le secret dans la police (ici)

Le juge d'instruction dans 7 pays d'Europe

Les sénateurs se sont penchés sur le projet de réforme pénale en se livrant à une étude comparative de la procédure dans les sept pays d’Europe les plus proches de chez nous. Le résultat est assez surprenant. Ainsi, l’Allemagne et l’Italie ont supprimé le juge d’instruction depuis plus de 20 ans, et l’Espagne demeure le seul pays où un juge dirige l’instruction.

senat_adminet.1237137993.jpgD’une manière générale, on a assisté ces dernières années à une reprise en main du pouvoir exécutif et le ministère public tient un rôle de plus en plus important dans la poursuite des affaires pénales.

Celui-ci n’est indépendant qu’en Italie et au Portugal. Deux pays qui ont subi le joug de la dictature.

En Italie, depuis la réforme de 1989, le juge d’instruction et la phase d’instruction ont été supprimés. À la place, on a une enquête préliminaire menée par le ministère public.
Mais celui-ci est indépendant à l’égard des autres pouvoirs.

Au Portugal, le nouveau code de procédure pénale entré en vigueur en 1987 a transféré au ministère public toute la phase qui précède le jugement. Toutefois, à l’issue de l’enquête, la personne mise en cause, ou la victime, peut demander l’ouverture d’une information judiciaire. (Cela n’a pas été le cas dans l’enlèvement de la petite Maddie, raison pour laquelle l’enquête a été classée.) Depuis 1992, l’autonomie du ministère public est inscrite dans la Constitution.

En Allemagne, le juge d’instruction a été supprimé en 1975 et les procureurs sont des fonctionnaires hiérarchisés, un peu comme en France.

Aux Pays-Bas, le ministère public est au centre de la procédure pénale depuis 1926. Il peut demander l’ouverture d’une information judiciaire. De fait, c’est exceptionnel, car la police possède les moyens d’investigation autrefois réservés au seul juge.
Le ministère public est placé sous l’autorité du ministre de la justice.

Au Royaume-Uni, le fonctionnement de la justice est atypique. L’enquête est réalisée par la police qui jouit d’une grande indépendance (elle ne dépend pas du ministre de l’Intérieur). Avant, c’était elle qui rédigeait l’acte d’accusation. Depuis la réforme de 2003, elle se contente d’établir le dossier et la décision de poursuite est prise par le Crown Prosecution Service (CPS). Ces dernières années, à coup de petites lois, on tente de réduire l’autonomie de la police pour renforcer le pouvoir du ministre de l’Intérieur.

En Suisse, un nouveau code de procédure pénale a été adopté en octobre 2007 afin d’unifier les textes sur l’ensemble du territoire. Son entrée en vigueur est prévue pour 2011. Ce nouveau code instaure un modèle unique de poursuite pénale, dans lequel le juge d’instruction disparaît au profit du ministère public.

La procédure pénale espagnole est inspirée du code français d’instruction criminelle de 1808. Il a été plusieurs fois modifié, mais sans faire l’objet d’aucune réforme fondamentale. Les infractions les plus graves font l’objet d’une instruction judiciaire. Le juge d’instruction jouit d’une grande indépendance.

En France, nous rappellent en préambule les juristes du Sénat (ici), l’instruction des affaires pénales est obligatoire pour les crimes et facultative pour les autres infractions. Le juge dispose de nombreux pouvoirs (perquisitions, saisies, écoutes téléphoniques, auditions des témoins, des parties civiles et des personnes mises en examen, etc.), dont la plupart peuvent être délégués à des officiers de police judiciaire.
Depuis le 1er janvier 2001, le juge d’instruction ne peut plus décider de placer une personne en détention provisoire : c’est le juge des libertés et de la détention qui ordonne une telle mesure à la demande du juge d’instruction.
À l’issue de l’enquête, le juge d’instruction rend une
declaration-droits-homme.1237112755.jpgordonnance de non-lieu, de renvoi devant la juridiction pénale, ou de mise en accusation si l’infraction relève de la compétence de la cour d’assises.
Les décisions du juge d’instruction peuvent faire l’objet d’un appel devant la chambre d’instruction, présente dans chaque cour d’appel.

C’est un peu technique, mais cela éclaire « autrement » la réforme de la procédure pénale voulue par le président de la République. En fait, nous sommes à la traîne par rapport à nos voisins. Et, abstraction faite de toute opinion politique, l’honnêteté intellectuelle oblige à admettre que des changements sont nécessaires (ici), aussi bien dans les textes que dans les mentalités. D’autant que les choses bougent également au niveau de l’Europe.

Mais quel exemple, quel panache, si demain la France inscrivait l’indépendance du ministère public au fronton de sa Constitution !

Migrants de Calais : délit d’assistance ?

bourgeois-de-calais.1237029997.jpgÀ l’occasion du film de Philippe Lioret, on a beaucoup parlé des migrants de Calais. Une lectrice assidue de ce blog me dit qu’elle est bouleversée d’apprendre qu’on ne peut pas porter secours à un clandestin sans tomber sous le coup de la loi. Je vais tenter de répondre à ses questions…

J’ai lu dans le Monde que des policiers de Calais ont mis en garde à vue une femme qui avait rechargé les téléphones portables de migrants. Est-ce qu’ils avaient le droit de faire ça ?

La législation sur les étrangers est fixée dans ce qu’il est convenu d’appeler le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. L’article L 622-1 dit que : « Toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irrégulier, d’un étranger en France sera punie d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30 000 Euros. »

Il est évident qu’il appartient aux juges d’interpréter ce texte en fonction des principes du respect de la dignité humaine. À de nombreuses reprises, les juridictions de l’ordre judiciaire ont affirmé que la loi nationale devait s’effacer devant un « ordre public affectif ». Aussi, ce texte ne peut-il viser « ni les comportements humanitaires ni les attitudes inspirées uniquement par l’amour et l’affection des intéressés » (TGI Toulouse 30 oct. 1998).

Mais les policiers ne sont pas dans l’affectif. Eux doivent se contenter de faire respecter les textes – sans les interpréter. Leur travail doit permettre d’établir si cette femme a agi par respect humanitaire (les migrants voulaient appeler leur famille) ou pour aider à la circulation ou au séjour d’étrangers (par exemple, besoin d’un contact avec leur passeur).

Les policiers n’avaient-ils pas d’autres solutions que la garde à vue ?

Si cette femme avait été retenue dans un local de police contre son gré, sans la procédure de garde à vue, les policiers auraient pu faire l’objet d’une plainte et de poursuites judiciaires. Cette mesure est subie comme une humiliation alors que c’est le seul moyen – actuel – de garantir certains droits de la personne. Dans le projet de réforme de la procédure pénale, on envisage 6 heures de « retenue » sans aucun droit. C’est ça qu’on veut ?

Que risque un policier qui n’obéirait pas à un ordre ?

Si son chef légitime (autorité administrative ou judiciaire) lui donne l’ordre d’intervenir en fonction d’un texte de loi, le fonctionnaire de police ne peut pas refuser. Sinon, c’est le conseil de discipline, avec des sanctions qui peuvent aller jusqu’à la révocation. Mais il y a plusieurs moyens d’obéir à un ordre, avec plus ou moins d’élégance.

Voilà, j’ai répondu aux questions, mais même si cela n’acesar-2009_blog-lexpress.1237030073.jpg rien à voir, on peut noter que Philippe Lioret est l’un des 31 signataires d’une pétition en faveur du projet de loi sur le téléchargement illégal (Le Monde du 9 juillet 2008).

Hier, il appelle à voter une loi exorbitante du droit commun et aujourd’hui il nous donne des leçons de liberté. Cet homme est étonnant.

Allez, on espère que son film fera beaucoup d’entrées.

Le jugement d'un accusé absent

code-penal_francesoir.1236853691.jpgDevant une Cour d’assises, un accusé peut être jugé en son absence dans deux conditions précises : soit il est en fuite, soit il refuse de comparaître. Les conséquences ne sont pas les mêmes. Dans le premier cas, il peut bénéficier d’un nouveau jugement, dans le second, la décision de jugement est reconnue contradictoire. Alors qu’Yvan Colonna a décidé de claquer la porte de son procès, j’ai mis le nez dans les livres pour estimer les conséquences de sa décision. Voici l’avis du Dalloz CPP 49° édition et de la Procédure pénale de François Fourment.

Accusé en fuite :

Autrefois, un individu accusé d’un crime et volontairement absent à son procès était jugé par contumace. Puis la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) est venue mettre son grain de sel dans notre procédure pénale. Statuant dans « l’affaire Krombach contre la France », elle a estimé que lors d’un jugement rendu par contumace, les droits fondamentaux de la défense n’étaient pas respectés : droit à un avocat, droit à un double degré de juridiction.

Pris à contre-pied, le législateur a substitué à la procédure de contumace la procédure de défaut criminel (loi du 9 mars 2004).

Cette procédure concerne les accusés en fuite, ou qui (sauf excuse recevable) ne se présente pas à l’audience. Dans ce cas, la Cour d’assises peut renvoyer l’audience à une session ultérieure ou statuer sur l’affaire – mais sans l’assistance des jurés.

Un individu condamné selon cette procédure sera rejugé s’il est arrêté avant la fin de la durée de la prescription.

Colonna était en fuite lors du premier procès concernant le meurtre du préfet Erignac, en juin 2003. La justice a préféré dissocier son cas de celui des accusés présents à l’audience, de crainte, sans doute, de se retrouver devant la CEDH.

Accusé emprisonné :

Si l’accusé est emprisonné, le principe veut qu’il comparaisse « libre et seulement accompagné de gardes pour l’empêcher de s’évader » (art. 318 du CPP).

Dans l’hypothèse où un accusé refuse de comparaître, sommation lui est faite par voie d’huissier. S’il n’obtempère pas, le président peut soit ordonner qu’il soit amené par la force devant la Cour, soit décider de poursuivre les débats en son absence. Dans ce cas, après chaque audience, le greffier de la Cour d’assises donne lecture des débats à l’accusé. Et le jugement est réputé contradictoire (art. 320 du CPP).

S’il s’agit d’une décision de la Cour d’assises, statuant en appel, comme dans le procès contre Colonna, le jugement rendu sera définitif.

Police et réforme pénale

En parcourant le rapport préparatoire sur la réforme pénale, dont Le Monde a publié l’intégralité, les policiers ont dû pousser un ouf ! de soulagement : la police judiciaire ne sera pas rattachée au ministère de la Justice. Les arguments avancés sont un régal. Il s’agit de garantir la démocratie :
flic_indecis_lesso.1236667433.jpg– en maintenant policiers et gendarmes sous une double hiérarchie (administrative et judiciaire) ;
– en conservant une force de sécurité civile et une force de sécurité militaire (alors que depuis le 1er janvier les gendarmes sont rattachés au ministère de l’Intérieur).

Pourtant, avant de se réjouir, les officiers de police devraient y regarder de plus près et relire avec attention cette petite phrase : « Il a toutefois été jugé qu’il serait opportun que la loi précise que les officiers de police judiciaire agissent toujours sous le contrôle de leurs chefs hiérarchiques ».

On appelle ça une reprise en main.

Donc, exit le juge d’instruction et nous aurons à la place des procureurs universels. Ça renâcle dur du côté des syndicats de magistrats : « Le parquet deviendrait le seul maître des procédures pénales sans aucune modification de son statut », disent-ils dans un communiqué commun.

C’est marrant comment les gens qui n’ont pas les mains dans le cambouis voient les choses… Car actuellement, le procureur est – déjà – le maître de l’enquête (rappelons que c’est lui qui décide de saisir un juge d’instruction), mais tous les flics vous le diront, il s’agit d’une autorité symbolique qui n’intervient réellement que dans un nombre limité de cas. La plupart du temps, les contacts entre l’OPJ et le proc se limitent à un coup de fil au moment du renouvellement de la garde à vue, et un autre coup de fil, pour fixer l’heure de la présentation des suspects. Je schématise, évidemment.

Le véritable patron dans une enquête, c’est celui qui fait l’enquête : le policier. De quels pouvoirs disposent-ils ? L’arrestation, les perquisitions, les saisies et… la garde à vue. Question : augmente-t-on les pouvoir du policiers ? En tout cas, il y a une volonté très nette de modifier la garde à vue.

Cette mesure tient une place importante dans l’étude du comité. Il renforce tout d’abord la présence de l’avocat durant la GAV et lui donne la possibilité de prendre connaissance de la procédure. Il remarque aussi, avec justesse, qu’elle est souvent interprétée comme une mesure protectrice, tant pour la personne entendue que pour les enquêteurs. Mais il ajoute : « (…) Il doit être expressément rappelé dans la loi que la garde à vue est une mesure de contrainte et qu’une personne ne doit être placée en garde à vue que si cette contrainte est nécessaire. Dans les autres cas, la personne, même s’il existe des indices à son encontre, doit être entendue librement ».

C’est une renversée. Car à ce jour la jurisprudence a toujours estimé que l’OPJ était seul juge de l’opportunité de la garde à vue. On peut donc envisager que le nombre de GAV va aller en diminuant. Et contrairement à ce qu’on pense, les policiers ne sont pas contre, car la paperasse qui entoure une telle mesure est une perte de temps considérable dans le déroulement d’une enquête. Surtout à son début, lorsqu’il faut aller vite. Le rapport préconise même l’impossibilité de la GAV pour des faits susceptibles d’une peine d’emprisonnement de moins d’un an (il n’y en a pas beaucoup).

En contrepartie, et c’est là où le bât blesse, on instaurerait une GAV a minima, dite « retenue judiciaire », d’une durée maximale de 6 heures, applicable pour tous les délits dont la peine encourue est égale ou inférieure à 5 ans. Et dans ce cas, les droits de la personne seraient réduits comme peau de chagrin et les formalités se limiteraient (sans doute) à une simple mention en bas d’un procès-verbal.

Au nom de l’efficacité, on donnerait là un pouvoir exorbitant aux policiers, du moins sans un encadrement sérieux. Surtout si l’on envisageait d’étendre cette mesure aux agents de police judiciaire ou agents de police judiciaire adjoints (police municipale).

Je subodore que cette mesure va faire couler pas mal d’encre.

Je ne suis pas dans la critique systématique, et j’ai volontairement étudié ce texte par le petit bout de la lorgnette, en évacuant les questions centrales dont d’autres parlent beaucoup mieux que moi.

Il y a plein de choses nouvelles dans ce rapport, avec du pour et du contre. Ainsi, avocat_usa_immigration_2009.1236667818.jpg l’Union des jeunes avocats retient un élément favorable : « Les 96 % des affaires où il n’y a aucune intervention d’un juge pendant l’enquête à l’heure actuelle vont enfin passer sous le contrôle d’un juge ». Le comité prévoit en effet des possibilités de recours contre le procureur en s’adressant au juge de l’enquête et des libertés. Pour prendre un cas concret, avec cette réforme, Julien Dray (ici) aurait pu exiger du procureur qu’il prenne une décision: poursuite ou classement. Je crois qu’il aurait bien aimé.

Mais il y a aussi beaucoup d’hypocrisie. On nous dit par exemple, pour nous rassurer, que le parquet et la police mèneront des enquêtes à charge ou à décharge…

Mouais !…

Le jour où dans les statistiques des services de police on ajoutera à côté de la colonne « personnes présentées à la justice », une colonne « personnes innocentées », alors, on en reparlera.

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Pour télécharger le rapport, cliquer ici

La police au féminin

Il y a quelques jours, lors d’un déjeuner de la 23° promotion des commissaires de police, qui ne réunissait que des hommes, l’un des participants a parlé de la « féminisation » de la police. « Tu trouves qu’il y a trop de femmes ? » lui ai-je demandé, afin de faire un peu de provoc.

fete-de-la-femme-2.1236507044.JPGCe n’est pas ce qu’il voulait dire. Ses propos étaient plus profonds. Il pense que les commissaires ne se comportent plus comme des meneurs d’hommes, mais plutôt comme des managers. Il a eu à peu près cette formule, que je livre à votre méditation : « Autrefois, on apprenait aux futurs patrons de la police à gérer les situations. A l’école, on nous enseignait la notion de prise de risques. Aujourd’hui, on inculque aux jeunes le principe de précaution ».

Ce n’est donc pas une question de sexe, mais un véritable problème de société : faut-il, comme on nous le serine, adopter un profil bas et éviter les risques à tout prix, ou au contraire apprendre à les gérer ?

Sans goût du risque, Marco polo, Christophe Colomb, Vasco de Gama et bien d’autres seraient restés les pieds dans les charentaises. Alain Bombard aurait trouvé un autre moyen pour maigrir que de traverser l’Atlantique sur un canot pneumatique. Et Lindbergh aurait attendu l’arrivée du Concorde pour relier New York à Paris.

L’autre jour, je lisais un article dans Le Monde sur le désintérêt croissant des Français pour la voiture : raisons économiques, environnementales, etc. Mais il y a une autre raison, plus viscérale : l’absence de plaisir. En voiture, désormais, on a la peur du gendarme, du radar, de l’alcootest, du téléphone, de la ceinture, du gilet jaune…, mais on n’a plus le droit de se faire peur tout court.

Je sais, je sais, là, j’ai mordu la ligne blanche… Mais je fais partie de ceux qui pensent que de temps en temps, hommes ou femmes, on a besoin d’une petite décharge d’adrénaline. 

Et allez savoir ce qu’on peut faire, lorsqu’on est en manque…

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Mais pour en revenir au sujet, voici un petit historique de la place des femmes dans la police :

C’est à Nice, semble-t-il, en 1935, qu’apparaît pour la première fois une « assistante de police ». J’ignore dans quel contexte, mais il devait y avoir une raison précise. Trente ans plus tard, c’est la brigade des mineurs de Paris qui recrute une femme. Toutefois, comme les concours de la police ne sont pas ouverts au sexe féminin, on la bombarde également « assistante de police ».
En fait, à cette époque, lorsqu’une présence féminine s’impose dans le travail quotidien du policier (filoche, fouille à corps…), il est de coutume de faire appel aux personnels administratifs.

Il faut attendre 1972 pour que le concours d’inspecteurs de police s’ouvre aux femmes. Je crois que Jacqueline Marinont fut l’une des premières à être affectée en PJ, en l’occurrence à la lutte contre le grand banditisme, à l’OCRB.

Deux ans plus tard, c’est au tour des commissaires. fete-de-la-femme-3.1236507162.JPGContrairement à une idée répandue, Martine Monteil, n’est pas la première (ce qui n’enlève rien à son professionnalisme). Elle est de la 26° promotion (1976). En effet, l’année précédente, l’école nationale supérieure de police (ENSP) a accueilli Mmes Elisabeth Abbal, Christine Berthe, Simone Kergaravat et Hélène Lepoix.
(Pour la petite histoire, les bâtiments de l’ENSP, situés à Saint-Cyr-Au-Mont-d’Or, près de Lyon, ont un temps abrité un pensionnat de jeunes filles dirigé par des religieuses.)

C’est en 1978, que la police voit arriver ses premières femmes « gardiens de la paix ».


En 2005, d’après Le Quid, le pourcentage des femmes dans la police est le suivant : hauts fonctionnaires 7,7 ; commissaires 19,1 ; officiers 18,3 ; gradés et gardiens de la paix 16,4 ; adjoints de sécurité 43,8 ; personnels administratifs 76.

Si l’on additionne les pourcentages, cela fait plus de 180%. 180px-smileysvg.1236522819.png C’est ça le mystère de la femme.

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Remerciements à Jean-Marc Pauze pour les photos.

La DCRI déstabilisée

Ça doit maronner dur dans le blockhaus de Levallois-Perret, car la récente décision de la Cour d’appel de Paris de casser une procédure judiciaire de la DST est une véritable bombe à retardement. On ne mélange pas les genres (police administrative et police judiciaire), disent en résumé les hauts magistrats. C’est pourtant la raison d’être de ce service secret – voulu par le président de la République.

dcfi_prosecu.1236332336.pngLa décision est justifiée dans un arrêt de plus de 60 pages. On peut retenir deux points essentiels (ici) :

Violation des droits de la défense – Les aveux ont été obtenus alors que les suspects étaient détenus à Guantanamo et qu’ils se trouvaient « dans un état psychologique particulier puisqu’ils ont été amenés à croire nécessaires ces déclarations pour obtenir leur rapatriement en France et qu’ils n’étaient pas ainsi en mesure de se rendre compte qu’elles pourraient être utilisées contre eux ».

Procédure irrégulière – À partir du moment où une enquête judiciaire (en l’occurrence une simple enquête préliminaire) était ouverte, les policiers de la DST ne pouvaient plus recevoir les déclarations des suspects qu’en respectant les règles de la procédure pénale : « La phase administrative) (… devait prendre fin pour faire place à la procédure judiciaire impliquant le respect de son formalisme, garant des libertés individuelles et des droits des parties concernées ».

C’est donc l’intégralité de la procédure qui a été annulée, ce qui est quand même assez rare. Et du coup, ce 24 février 2009, les cinq hommes condamnés en première instance pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ont été relaxés.

Inutile d’ajouter que le parquet général s’est pourvu en cassation. Mais si la Cour de cassation devait confirmer cette décision, les structures de la DCRI risqueraient d’en être fortement ébranlées. Car alors il faudrait trancher : renseignement ou police judiciaire ?

En effet, on peut lire dans les « statuts » de la DCRI qu’elle « combine ses capacités de service de renseignement et de service de police judiciaire », que ses structures et son fonctionnement « sont couverts par le secret-défense », et que son commandement relève du « seul directeur du renseignement intérieur ».

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En attendant d’être fixé « en droit », on peut quand même se poser des questions sur la raison d’être de ce service un rien disproportionné pour notre petit pays… On peut aussi se demander s’il est normal qu’une enquête judiciaire soit effectuée par des officiers de police judiciaire dissimulés derrière le secret-défense, dans des locaux interdits au public (et aux magistrats), et en utilisant des procédés mystérieux et des fichiers protégés – même du regard indiscret de la CNIL ?

Surtout lorsque le moindre manquement est assimilé à du terrorisme.

En 1968, on a créé une brigade spéciale au sein de la DST pour infiltrer le milieu étudiant. Ce n’était pas dans ses missions, et tout le monde n’était pas d’accord, loin s’en faut. Certains ont alors pris la décision de quitter cette maison. Moi aussi.

Angle de tir

Le procès Colonna a donné lieu à des interprétations variées sur la taille de l’assassin du préfet Érignac. Combat d’experts. Est-il possible de déterminer la taille d’un tireur en fonction de l’angle de tir ? Rien n’est moins sûr.

pistolet-mas-sous-licence-beretta_pmgblog.1236157495.jpgUn expert en balistique qui avait soutenu que le meurtrier devait être pour le moins d’une taille égale à celle du préfet (1.83 mètre) s’est finalement retiré du débat. À sa place, on a eu un pseudo expert qui a affirmé que le tireur devait mesurer au moins 1.85 mètre, en se référant à des tirs de comparaison effectués sur des boîtes de lait concentré avec une arme de collection datant du XIX° siècle. Il s’est fait ridiculiser (ici).

Le médecin légiste avait commis la même erreur, en 2007, avant de revenir sur ses propos en disant que cela ne relevait pas de son métier. Parole d’or.
Il est en effet plus convaincant dans ce cas : Claude Érignac a été tué d’une balle qui a pénétré le crâne derrière l’oreille gauche à une hauteur de 1.70 mètre. Elle est ressortie par le front à une hauteur de 1.68 mètre. Les deux balles qui ont suivi ont été tirées alors qu’il était à terre – et déjà mort (ici).

Alors, j’ai cherché à savoir si l’on pouvait déterminer la taille d’un tireur en fonction d’une trajectoire quasi horizontale. La réponse est non.

Dans son ouvrage ABC de la police scientifique, Jean Gayet nous dit :
« Sur les distances relativement courtes, on peut estimer que la trajectoire d’un projectile est rectiligne… Tous les points particuliers de son parcours se situent sur une même droite :
– le départ de la bouche du canon de l’arme ;
– l’entrée dans le corps de la victime et la sortie ;
– éventuellement l’impact contre un objet ou un obstacle ».

Il conclut en affirmant que si l’on possède deux points, on peut reconstituer le troisième – à condition que le tir ne soit pas horizontal.
«  Mais il n’en est pas de même si la trajectoire est oblique. En effet, compte tenu des attitudes que pouvait avoir chaque antagoniste, on connaît les hauteurs maximum et minimum où l’arme était tenue… ». Du moins « si le médecin légiste a pris soin de mesurer la distance des blessures par rapport aux talons… ».
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On peut donc en conclure que vouloir déterminer la taille du tueur de préfet Érignac relève de la mystification ou de l’amateurisme.

On peut d’ailleurs noter en passant que la théorie d’un meurtrier de la taille ou plus grand que le préfet, en raison d’une trajectoire quasi horizontale, voire légèrement descendante s’inverse complètement si l’arme est tenue crosse horizontale. Ce qui serait une prise en main logique pour une arme de la taille du pistolet utilisé (photo) – si le tireur est plus petit que sa victime.

Mais il s’agit d’une hypothèse qui n’a pas été envisagée.

Colonna : P-V de chique et turlututu

Des policiers qui mentent ou qui se font porter pâles, des suspects dans la nature, des indics fantomatiques, un accusé qui porte plainte contre le président de la République, des avocats qui insultent un président de Cour d’assises : le procès Colonna se poursuit normalement.

shadok-escalier_castaliefr.1235921493.jpgVoici un petit pensum des bizarreries que l’on a pu découvrir au fil des jours :

Un expert désigné par la défense a voulu démontrer que l’assassin du préfet Érignac était nettement plus grand que Colonna. Il a fait un bide.
De plus, les deux témoins oculaires ont définitivement démoli ses déclarations. Marie-Ange C. se souvient d’un homme qui tirait par terre. Lorsqu’il s’est redressé, elle a croisé son regard. Quant à Joseph C., il a vu Claude Érignac courbé en avant tandis qu’un individu tirait sur lui, par derrière.
Aucun des deux n’a reconnu Yvan Colonna.

Antoine Albertini nous apprend, dans Le Monde du 26 février 2009, que deux informations judiciaires avaient été ouvertes simultanément par le parquet antiterroriste. Deux enquêtes parallèles visant les mêmes faits, dont l’une aurait été baptisée « enquête poubelle ». On nous dit que ce n’est pas illégal… Je demande à voir. Dans une enquête criminelle, ouvrir un dossier de « défaisance », un peu comme on le fait aujourd’hui dans une banque pour séparer les actifs pourris de ceux qui semblent sains… C’est pour le moins surprenant.

Là-dessus, un commissaire de police, Didier Vinolas, soulage sa conscience, persuadé qu’il détient le nœud de l’affaire. Et il chuchote le nom de son indic, Michel Poirson, en fait l’un de ses collègues des RG (c’est la première fois à ma connaissance qu’un flic a pour indic un autre flic), lequel lui aurait fourni les noms de deux mystérieux personnages qui auraient participé à l’assassinat du préfet. Ceux-ci ne sont pas des inconnus. Ils ont apparu, dit-on, dans l’enquête sans être autrement inquiétés. Auraient-ils un quelconque rapport avec ces informateurs qui auraient peut-être encaissé la somme rondelette de 300.000€ ? Euh ! Je m’y perds un peu… Là-dessus, Poirson dément les allégations de Vinolas. Turlututu ! C’est le nom qu’on donnait jadis dans un service très secret situé boulevard Saint-Germain, aux opérations complètement bidons dont les militaires sont friands.
Enfin, scrogneugneu ! y a quand même un tonton qui a balancé un tuyau aux gendarmes, lesquels ont répercuté sur le préfet Bonnet. Lequel a fait suivre au procureur et à Roger Marion, le chef de la DNAT. Celui-ci n’y a pas cru. Pourtant, c’était le bon. Vous suivez, vous ?

Après l’arrestation de Bonnet (ici), pour autre cause, Marion finit par se bouger. Une grande rafle parmi les suspects. À l’arrivée, il en manque trois, dont Yvan Colonna. Mais il ne s’est pas mis en cavale, nous affirme son comité de soutien. Il n’était pas au courant. Il gardait ses chèvres. Ce n’est que plusieurs jours plus tard, en ouvrant le journal, qu’il aurait appris qu’il était le principal suspect. Pourquoi parfois j’ai l’impression d’être aussi bête !

On accuse maintenant, le commandant de police Georges tast-qi_moikikicenterblog.1235921639.jpgLebbos d’avoir obtenu des aveux par des moyens… intellectuellement malhonnêtes. Il est certain qu’une garde à vue, ça se rapproche plus du poker menteur que de la belote. D’un côté, il y a ceux qui veulent obtenir des renseignements, voire des aveux ; et de l’autre, ceux qui n’ont pas envie de partir en galère. Alors, il y a trois méthodes. Celle de la guerre d’Algérie, celle de l’ENA, et la bonne : on baratine pour tenter de convaincre les suspects qu’il est de leur intérêt de se confesser. C’est pas beau-beau, mais chez les flics, il n’y a que les gens de la police technique qui mettent des gants blancs. L’un des procédés consiste à établir un P-V de chique : on enferme un suspect dans ses mensonges. Ensuite, on lui met sous le nez les déclarations (bidonnées ou pas) de l’un de ses complices. Ça marche des fois. Rarement chez les voyous. Mais là, on n’est pas dans le « milieu ».

Yvan Colonna a été condamné une première fois. Aujourd’hui, il a pu faire appel grâce à la loi sur les libertés individuelles qui date de l’an 2000, c’est-à-dire après les faits qui lui sont reprochés. Il bénéficie ainsi « rétroactivement » d’une loi qui n’existait pas en 1998. Mais c’est normal, puisqu’elle lui est favorable. Principe de droit.

Il a plus de chance que Maurice Agnelet qui, lui, avait été déclaré innocent du meurtre de sa maîtresse Agnès Le Roux (ici). Après l’appel interjeté par le procureur général, il a écopé de 20 ans. On s’est alors assis sur le fait qu’on utilisait rétroactivement une loi qui allait à l’encontre des intérêts d’un suspect. Peu de réactions dans le monde judiciaire.

Contre Maurice Agnelet, n’y avait pas de preuve (même pas de cadavre), juste un faisceau de présomption et… sa sale gueule. Je n’ai pas souvenir qu’il y ait eu en sa faveur le moindre comité de soutien. Il est entré libre et il est sorti entre deux gendarmes.

Contre Yvan Colonna, il semble qu’il n’y ait pas de preuves matérielles, mais un faisceau de présomptions et… sa bonne gueule de berger corse. Il bénéficie de nombreux soutiens et d’un courant de sympathie. Certains allant même jusqu’à comparer son procès à l’affaire Dreyfus. Il est entré entre deux gendarmes, va-t-il sortir libre ?

rires-et-pleures.1235922031.gifDans cet embrouillamini, on ne sait plus si on doit rire ou pleurer. Mais il ne faut pas oublier que ce n’est pas un jeu : un homme de 60 ans a été lâchement assassiné. Un autre homme a été condamné pour cet acte. Il a fait appel. Il est rejugé.

En attendant le verdict, Yvan Colonna est-il présumé coupable ou présumé innocent ?

Des policiers condamnés pour non-arrestation

Pour ne pas avoir interpellé un homme en état d’ivresse, trois policiers ont été jugés coupables du délit de « délaissement ».

interdiction-de-boire_debactu.1235720557.gifL’affaire remonte à plus de deux ans. Dans la nuit du 22 au 23 novembre 2006, des gardiens de la paix en patrouille, à Nantes, sont informés qu’une personne s’est fait voler son portefeuille. Ils repèrent un individu dont le comportement semble « suspect ». Ils le font monter dans le fourgon pour un contrôle d’identité, puis ils le relâchent au bout de quelques minutes.

L’homme s’appelle Taoufik El-Amri. C’est un ouvrier tunisien de 33 ans. Son corps sera retrouvé 20 jours plus tard dans le canal Saint-Félix. Il avait 3,74 grammes d’alcool dans le sang.

Hier, devant le tribunal correctionnel de Nantes, ils ont écopé de 4 mois de prison avec sursis, pour « faux témoignage » (dans un premier temps, ils ont menti aux enquêteurs) et pour avoir laissé sur la voie publique un homme manifestement en état d’ivresse.

Le délit de délaissement consiste à « abandonner » une personne qui se trouve en état de vulnérabilité en raison de son âge, de son état physique ou psychique. Prévu par l’article 223-3 du Code pénal, il est passible d’un emprisonnement de 5 ans et 75.000 euros d’amende. Mais si le délaissement a entraîné la mort, la peine encourue est de 20 ans de réclusion criminelle.

Les syndicats ne cachent pas leur colère. « C’est inacceptable », dit Thierry Spitz, du syndicat de police Alliance. « Le tribunal n’a pas pris en compte l’ampleur des conséquences… ». « Si une infraction est retenue dans un cas comme celui-là, ajoute Me Annie Hupé, ce sont tous les policiers, gendarmes et même les pompiers qui pourront être touchés par cette décision. Le tribunal correctionnel met une pression énorme sur les épaules des policiers ».

Il faut bien admettre que l’on se trouve ici dans le flou de l’action policière. À la frontière entre la police administrative et la police judiciaire. Ainsi, par exemple, en septembre de l’année dernière, une femme d’une quarantaine d’années est interpellée à Paris, dans le XVIII° arrondissement. Elle déambule en sous-vêtements et tient des propos incohérents. Elle est conduite à l’hôpital Bichat où un médecin signe un bulletin de non-admission. Elle est alors placée en cellule de dégrisement. Deux heures plus tard, elle était morte. On apprendra par la suite qu’elle avait déjà fait l’objet d’un suivi psychiatrique.

La question est la suivante, les policiers sont-ils formés pour prendre en charge des personnes dont l’état relève de la psychiatrie ?

Ce n’est pas un problème nouveau. Je me souviens de cette histoire qui remonte à 30 ans. L’hôpital de Versailles appelle Police-secours : un homme d’une trentaine d’années a baissé son pantalon et se livre à des violences sexuelles sur sa mère, hospitalisée. Les policiers embarquent le bonhomme, car ils pensent avoir à faire à un ivrogne. Il les suit docilement. Mais une fois au poste, il refuse d’intégrer la cellule de dégrisement. Il assomme deux gardiens et menace le troisième à l’aide d’une chaise qu’il brandit au-dessus de lui. Le brigadier M. est tout près de la retraite. Il n’est pas de taille devant ce colosse. Il saisit une arme et il le tue.

Cet homme était un malade mental. Il était en milieu hospitalier. Devait-il être traité par ivresse_polbrunoirisnetbe.1235720717.jpgdes médecins ou par des flics ? Comment déterminer si le comportement délirant d’une personne est le fait de la maladie ou de l’alcool ?

Si l’affaire de Nantes fait jurisprudence, on ne voit pas très bien comment les policiers vont réagir. Devront-ils arrêter toute personne qui aura un comportement bizarre ou qui aura bu un verre de trop ?

À la tienne !    

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