LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Auteur/autrice : G.Moréas (Page 43 of 82)

Gendarmerie : Sarkozy enfonce le clou

Une démarche bizarre de la part du président de la République que celle de se rendre en Sologne pour discuter le bout de gras avec les gendarmes ! « Sarkozy s’efforce de rassurer les gendarmes » a titré l’agence de presse Reuters.

gendarme-se-marie.1275634624.jpgSeraient-ils inquiets ?

Aux environs de midi, ce jeudi 3 juin, une cinquantaine de journalistes attendent l’arrivée du Chef de l’Etat. Après la fouille, ils sont cantonnés à l’arrière de la gendarmerie de Lamotte-Beuvron. Enfin, l’hélicoptère se pose. Nicolas Sarkozy en descend suivi de Brice Hortefeux. Le Président se dirige vers un groupe d’aficionados qui l’attendent derrière les barrières de sécurité. Poignées de main et même une bise à une admiratrice.

Un peu plus tard, dans son discours, il évoque la mémoire du gendarme Jérôme Birault, décédé en 2006 dans l’exercice de ses fonctions lors d’un accident de la circulation. Il déclare qu’il « ne considère pas que cela fasse partie du métier de gendarme que de mourir ». Bon !… Mais pour l’essentiel, ses propos sont basés sur le rapprochement police-gendarmerie. « Il y a deux forces de sécurité en France qui ont les mêmes responsabilités, que nous traiterons à égalité et qui doivent être mises sous même commandement » Jusque là, tout va bien. « Qui peut concevoir que la délinquance rurale dépende du ministre de la Défense et que la délinquance urbaine dépende du ministre de l’Intérieur ? » ajoute-t-il.

Je n’étais pas présent, mais j’imagine qu’il y a eu un grand blanc parmi les pandores. En une phrase, il les a ramenés un demi-siècle en arrière : la police des villes, la gendarmerie des campagnes. Alors que petit à petit, ils avaient réussi à échapper à ce cliché, vous savez, comme dans les bouquins de Simenon, le gendarme qui se colle au garde-à-vous devant Maigret : « À vos ordres, Monsieur le commissaire ! ». Le gendarme d’antan, celui de Guignol, juste bon à s’occuper des vols de poules ou de bicyclettes, laissant les enquêtes sérieuses aux seigneurs de la PJ qui descendent de la capitale…

Heureusement, plus tard, il s’est repris, affirmant qu’il y avait beaucoup de similitude entre le travail de la police en milieu urbain et celui de la gendarmerie en milieu rural. « Je sais que votre travail est difficile mais, en même temps, nous avons décidé une lutte contre le crime implacable. »

Lors d’un échange de propos avec plusieurs gendarmes, il s’est félicité de la tenue vestimentaire qu’il a fait adopter alors qu’il était ministre de l’Intérieur, notamment le treillis et les brodequins. « Moi, je vous le dis, on ne peut pas courir après des délinquants avec des chaussures basses. »

Le Président s’est ensuite rendu à la gendarmerie de Neung-sur-Beuvron, où il a partagé son repas avec une vingtaine de personnes, des élus, mais aussi des gendarmes et leur famille, qui ont été servis dehors, dans le parc de la brigade de gendarmerie.

Ce dégagement champêtre a-t-il guignol-contre-gendarme.1275634644.jpgété productif ? Les gendarmes se sentent-ils mieux dans leur peau après cette attention présidentielle ? On ne le saura pas, car ils ont tous en tête l’exemple du chef d’escadron Jean-Hugues Matelly, viré pour avoir osé s’exprimer publiquement. Message reçu 5 sur 5 : les gendarmes ont parfaitement le droit de se taire.

Le président de la République l’a rappelé, le rapprochement police-gendarmerie, il l’assume entièrement. C’est un choix « absolument sans retour », a-t-il affirmé.

Quant à la représentation syndicale, on verra ça une autre fois, scrogneugneu !

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Profession : bandit a été lu 3 003 fois et a sucité 8 commentaires. A ne pas manquer la petite fable de lionel CH., le 02 juin 2010 à 22:32

 

Profession : bandit

Ces malfrats qui ont tiré tous azimuts, l’autre jour, pour assurer leur fuite, ou ces braqueurs qui ont arrosé à la Kalachnikov avant de faire main basse sur le butin qu’ils convoitaient, sont-ils des « amateurs qui ont perdu leur sang-froid », ou des « malfaiteurs professionnels » ?

la-trilogie-noire-de-leo-malet-par-daoudi-et-bonifay.1275466713.jpgLes avis sont partagés, du moins parmi les intervenants, comme on dit, c’est-à-dire ceux qui plastronnent devant un micro ou une caméra. Alors, qui a raison : le criminologue, le sociologue, le syndicaliste bon teint de la police, l’ancien flic ou le ministre de l’Intérieur ?

On s’interroge.

En les écoutant ces cassandres qui savent tout sur tout, on se dit qu’ils connaissent forcément des choses qu’ils ne veulent pas dire – ou le contraire : ils disent des choses qu’ils ne connaissent pas.

Car c’est quoi, un truand professionnel ? Un type qui de temps en temps braque une banque ou s’attaque à des convoyeurs de fonds, et qui le reste du temps pointe au chômage ?

Soyons sérieux ! Il n’y a pas d’école du banditisme, juste un enchaînement de circonstances. Le délinquant est d’abord un petit voyou qui fracture la porte des chambres de bonnes (c’est une image) et qui un jour finit le calibre à la main. Ce qui a été le cas de Jacques Mesrine (et pour lui, ce n’est pas une image). En fait, sans le savoir, ces truands, ils appliquent le principe de Peter. Ils en veulent toujours plus. Ils sont à la recherche de leur niveau d’incompétence, raison pour laquelle, un jour ou l’autre, ils se font prendre.

Mais il y a un point commun à tous ces crimes ou délits. Oui, l’appât du gain, vous alliez dire. Mais autre chose encore, dont on ne tient pas compte : la peur.

Car tous les braqueurs avec qui j’ai pu discuter, en général à l’issue d’une garde à vue exténuante, m’ont tenu ce même langage : ils montent sur un coup la peur au ventre. C’est même, je crois, ce qui rapproche les flics de leurs clients : la peur, vaincre sa peur, la décharge d’adrénaline… et la recherche non avouée de retrouver cette sensation.

La peur qui fait agir, la peur qui fait réagir…

Bon, mais après avoir égratigné les sociologues et les criminologues, je ne vais pas empiéter le domaine des psychologues.

Le vol à main armée n’est pas une invention de ce siècle, il a toujours existé. Sous la III° République, peut-on lire sur le site du ministère de l’Intérieur : « L’hexagone est, dans cette période, en proie à une grandissante insécurité dont tous les journaux se font largement l’écho, non sans quelques arrière-pensées politiques. »  (On dirait de l’actu.) Et en 1907, Clemenceau signe un décret qui prévoit la création de douze brigades mobiles, en dotant chacune, et c’est une première, de quatre limousines De Dion-Bouton. Car il s’agit de lutter contre la délinquance itinérante.

Aujourd’hui, avec l’ouverture les-brigades-du-tigre.1275466828.jpgdes frontières au sein de l’U-E, nombre de gangs de malfaiteurs sont pilotés depuis un autre pays. Souvent bien à l’est. Et même si l’on a mis sur pied des structures pour tenter de lutter contre cette grande délinquance grandement itinérante, on est loin du compte. Pour faire face, il va falloir des moyens, des hommes et surtout des règles identiques partout.

Mais lorsqu’on voit le temps nécessaire pour qu’enfin on s’interroge juste pour savoir si la garde à vue à la française est conforme ou non au droit européen, on se dit que ces nouveaux bandits de grand chemin ont encore de beaux jours devant eux.

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Le cheval, meilleur ami du policier a été lu 12 624 fois et a suscité 40 commentaires. Et comme le souligne Arnaud, même si certains disent apprécier la viande de cheval, c’était quand même plus cool que dans le billet précédent.

Le cheval, meilleur ami du policier

2010 pourrait bien être l’année du cheval. En effet, au mois de janvier, quatorze députés se sont penchés sur le destin de cet animal, autrefois dit de labeur, et aujourd’hui essentiellement cantonné à des activités sportives et de loisirs. Ils ont donc déposé une garde-a-cheval_blog-clic-cheval.1275214216.jpgproposition de loi pour que le cheval ne soit plus considéré comme un animal de rente, destiné à finir sa vie à l’abattoir, mais comme un animal de compagnie. « Rien ne différencie plus le chien, animal de compagnie, d’un cheval, animal de rente », a dit le député Lionnel Luca, qui est à l’origine de cette initiative. En fait, il s’agit d’ajouter une petite phrase au Code rural : « Art. L. 212-9 A. – Le cheval est un animal de compagnie tel que défini par les dispositions du présent code à l’article L. 214-6. »

Dans la police et dans la gendarmerie, ce n’est pas tout à fait vrai, car le cheval et le chien ne sont pas des animaux de compagnie mais plutôt des « collaborateurs » à quatre pattes.

Et en cherchant à me documenter sur le sujet, je suis tombé sur un personnage original : un commissaire divisionnaire qui s’est réorienté vers l’enseignement, puisqu’il est aujourd’hui professeur à Paris VIII, et qu’il a créé une école d’équitation destinée à former des jeunes « qui se cherchent ».

Philippe Vénère, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est un policier un rien atypique. 37 ans de police, dont 6 comme gardien de la paix. C’est lui, par exemple, qui a ouvert les portes de la 1ère DPJ (division de police judiciaire) de la rue de Courcelles, à Paris, à Bertrand Tavernier, afin qu’il puisse s’inspirer de ces locaux de police particulièrement repoussants pour tourner L.627, film qui a attiré l’attention sur les conditions de travail des policiers.

C’est lui également, alors qu’il dirigeait la 4ème BT (brigade territoriale), en 1984, qui a reçu la mission impossible d’évacuer le squat de « l’îlot Chalon ». Une sorte de cour des miracles qui était devenue un véritable centre commercial de la drogue. On raconte, qu’au flan, il a demandé 1000 hommes. Accordé, a répondu le préfet de police. Et cette opération casse-gueule, et forcément impopulaire, s’est déroulée sans bobo.

Donc, en 1999, avec un officier de l’armée de l’Air, Gilbert La Sala, il fonde l’École des gardes à cheval de Soissons, destinée à former des jeunes qui veulent concilier leur métier et leur passion pour le cheval. « Aujourd’hui, 85% de nos stagiaires sont placés dès la sortie de la formation », dit-il. Les débouchés : gardes-vert, gphilippe-venere_france5.1275299583.jpgardes-chasse, gardes forestiers, et même des sociétés de surveillance qui parfois font appel à des cavaliers. À noter que la gendarmerie nationale recrute des gendarmes adjoints à cheval.

Sinon, pour la police nationale ou municipale et pour la gendarmerie, notamment la Garde républicaine, il faut d’abord passer le concours commun à tous les candidats.

De par le monde, de très grandes villes sont dotées d’une police montée. En France, on semble un peu en retrait. Pourtant, l’idée fait son chemin auprès de certains maires et l’on commence ici ou là à voir apparaître des brigades équestres.

Le policier ou gendarme à cheval présente plusieurs avantages. D’abord, par sa situation dominante, il a une vision étendue. Ensuite, il peut crapahuter dans les espaces verts ou sur des chemins impraticables pour des engins motorisés.

Mais l’avantage le plus important est psychologique. Le couple policier-cheval ne dégage aucune agressivité, bien au contraire. En plus, il est écolo.  À son passage, c’est comme si on arrêtait le temps. Comment dire, le flic, sur son canasson, il est sympa.

Je sais bien que rendre les policiers sympathiques n’est pas la préoccupation première ni des maires ni d’un ministre.

Ils n’ont pas nécessairement raison. L’autre jour, à Limoges, une jeune femme demande l’aide d’un CRS : son bébé de quatre jours est tombé à l’eau et il ne respire plus. Le policier prodigue un massage cardiaque et le bébé reprend vie. Quelques semaines auparavant, sur l’autoroute A25, c’est une policière qui se transforme en sage-femme pour aider à mettre au monde un petit Mathis.

La routine me direz-vous. Oui, mais pourquoi ne montrer toujours que le côté noir des choses ?

Cela dit, le cheval n’a pas encore gagné la partie. Car il n’est pas du tout certain que les députés acceptent de le classer parmi les animaux de compagnie. À cela, il y a plein de raisons pratiques que rappelle le Groupe des entreprises du secteur cheval en agriculture (GESCA) dans un rapport qui conclut que « le cheval animal de sport, de sport de loisirs, de trait, de consommation [doit être] maintenu dans la classification juridique d’animal de rente ».

Avec un argument fort, surtout à notre époque : 70 000  emplois à la clé.

Ce qui me gêne le plus, c’est le mot « consommation ».

D’ailleurs, en fin de carrière, les chevaux de la Garde républicaine ne sont plus envoyés à l’abattoir, mais ils peuvent être rachetés par leur cavalier ou confiés à des associations.

Pour moi, et je crois que nous sommes nombreux dans ce cas, le steak de cheval ne passe pas.

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La 1ère photo provient du blog Clic-cheval et la seconde d’un reportage de France 5.
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Politique sur le dos des morts a été lu 9 780 fois et a suscité 44 commentaires

Politique sur le dos des morts

Beaucoup d’émotion, hier, lors de l’hommage national rendu à Aurélie Fouquet en présence du président de la République. Même si certains aspects de cette affaire sont encore ténébreux, le temps n’est pas à la polémique, mais au recueillement.

croix-dattelle_dominiqueetcompagnie.1274946149.jpgCela m’a rappelé d’autres morts, dans d’autres circonstances.

C’était le 31 mai 1983, lors d’un banal contrôle d’identité, avenue Trudaine, à Paris. Plusieurs individus dans une voiture ouvrent le feu sur les policiers. Deux meurent sur le coup et le troisième est grièvement blessé. Deux jours plus tard, un motard interpelle un jeune homme pour vérifier son permis de conduire, il est tué d’une balle dans le dos.

Trois morts et un blessé grave en quelques jours.

Lors de la cérémonie dans la cour de la préfecture de police, le ministre de l’Intérieur, Gaston Defferre, et le secrétaire d’État à la Sécurité publique, Joseph Franceschi, sont accueillis par des huées et des sifflets. Certains policiers, à leur passage, leur tournent même ostensiblement le dos. Après le cérémonial, ils se retrouvent dans la rue et marchent en direction de la place Vendôme pour hurler leur désaccord avec la politique pénale menée par Robert Badinter. La Chancellerie est protégée par quelques dizaines de gardiens de la paix, qui mettent képi bas, et par deux escadrons de la gendarmerie.

Les policiers estiment qu’ils sont lâchés par le pouvoir en place et que les nouvelles lois, trop permissives, vont les empêcher de faire leur travail normalement. Et même si  personne n’en parle haut et fort, ils sont beaucoup à penser que la suppression de la peine de mort ne va pas arranger les choses. Pour certains, il s’agit d’un véritable message de faiblesse vis-à-vis des criminels…

À la suite de cette manifestation, les sanctions vont tomber. À tous les niveaux : le préfet de police démissionne, le directeur général est remercié, sept policiers sont suspendus et deux représentants syndicaux révoqués.

Mais la gauche au pouvoir tient compte de l’avertissement. C’est le tocsin de l’angélisme et le dur retour à la réalité.

Et pourtant, même si l’émotion qui a suivi la mort de ces policiers est parfaitement compréhensible, avec le recul, on peut se dire que leur réaction était exagérée, et qu’en fait, ils se sont fait manipuler.

En effet, depuis la mairie de Paris, Jacques Chirac se prépare déjà pour les élections présidentielles. Il a créé auprès de lui une cellule, une sorte de « ministère de l’Intérieur fantôme », comme l’appelle le regretté Philippe Madelin dans son livre La guerre des polices (Albin Michel), cellule dirigée par un commissaire et placée sous la houlette de Robert Pandraud.

Et ce sont eux qui tirent les ficelles.

Je ne sais pas pourquoi, cette cérémonie à la mémoire de cette jeune policière tuée en service m’a rappelé ces événements.

Et j’ai ressenti la même gêne.

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Taser contre kalachnikov a été lu 22 192 fois et a suscité 71 commentaires. On s’interroge beaucoup sur le rôle que doit désormais tenir la police municipale.

Taser contre Kalachnikov

Après la fusillade de Villiers-sur-Marne, la décision soudaine de Brice Hortefeux d’autoriser les maires à doter leur police municipale d’un pistolet Taser tombe vraiment comme un cheveu sur la soupe.

drapeau_photo-nadine_breizphoto_flickr.1274696962.jpgLes syndicats ne sont d’ailleurs pas dupes, ainsi Patrick Masante, le porte-parole du Syndicat national du policier municipal, tout en regrettant que les  » municipaux  » ne bénéficient pas du même armement (en 1e catégorie) que les  » nationaux « , déclare que « les Tasers et les flashballs ne sont que des gadgets ».

En effet, à quoi un Taser peut-il bien servir face à une Kalachnikov !

Dans cette histoire dramatique, on a bien du mal à imaginer l’enchaînement des événements. Personnellement, je n’ai pas compris.

Le Figaro du 21 mai nous dit que « des policiers du commissariat de Villeneuve-Saint-Georges, en route pour une séance d’entraînement au tir, croisent un fourgon qui comporte deux petits trous dans la carrosserie, semblables à des impacts de balles […] Ils le prennent en chasse ». Alertés par radio, d’autres policiers, de la Compagnie de sécurisation, repèrent le véhicule et se joignent à la poursuite. Échange de coups de feu.

À Villiers-sur-Marne, le fourgon heurte une voiture. Des policiers municipaux, apparemment non informés de cette suite d’événements, arrivent sur les lieux et se positionnent en travers de la route, sans doute pour interdire la circulation. Pensent-ils à un accident de la circulation ? C’est alors que les truands arrosent tout le monde avec des armes de gros calibres.

Selon une version plus récente, les policiers auraient tenté de contrôler le fourgon alors qu’il circulait sans plaque d’immatriculation. Refus de s’arrêter. Début de course-poursuite. Fusillade, jusqu’à l’accident à Villiers-sur-Marne.

Je ne vois pas trop des braqueurs monter sur un coup dans ces conditions… C’est quand même le meilleur moyen d’attirer l’attention.

Une troisième version circule, qui suppose que cette équipe de voyous était sous surveillance depuis pas  mal de temps.

Sinon, on peut mixer les trois hypothèses, et l’on obtient alors quelque chose de cohérent. On imagine…

L’antigang planque sur une équipe qui projette de se faire un fourgon blindé. Pas question d’intervenir à chaud : trop de risques. Alors, on surveille, on filoche, on écoute… On attend le moment propice, le plus souvent après le coup, lorsque les malfrats sont persuadés d’avoir réussi et qu’ils relâchent la pression. Ce qu’on appelle l’opération retour. Mais là, c’est le grain de sable. Des collègues de la circulation qui trouvent le fourgon suspect et qui le prennent en chasse. Alors, à l’antigang,  c’est l’affolement. On sait que cela risque de mal tourner. On s’époumone à la radio, mais ça cafouille un peu sur les fréquences. Trop tard. Les truands ont repéré les flics. À présent, ce sont des fauves, prêts à tout…

C’est de la fiction, bien entendu. Et peu importe comment les choses se sont déroulées, me direz-vous. Pas si sûr. Lorsqu’on est devant un tel pépin, il faut faire le débriefing. Il faut tirer les conséquences. Certes, ce n’est pas à moi de le faire, je n’ai pas les éléments. Une chose est sûre, il ne suffit pas de claironner que les coupables seront arrêtés, qu’ils seront punis, autant de phrases creuses qui n’ont jamais empêché un braqueur d’être un assassin en puissance. Et ce n’est pas un phénomène nouveau. Et à la différence du policier ou du gendarme, le voyou, lorsqu’il ouvre le feu, il se fiche pas mal de savoir où ses balles atterrissent.

Aurélie Fouquet, une jeune femme de 26 ans, a perdu la vie lors de cette fusillade, et sept autres personnes ont été blessées, dont un chauffeur routier et quatre automobilistes qui se trouvaient là au mauvais moment. C’est le bilan accablant d’une course-poursuite improvisée.

Et aucun Taser au monde n’y aurait rien changé.

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Fumer un joint ou conduire, il faut choisir ! a été lu 31 858 fois et a suscité 92 commentaires, dont certains… fumants.
(La photo du drapeau a été empruntée à Nadine.)

Fumer un joint ou conduire, il faut choisir !

Les 4 millions de fumeurs de cannabis, occasionnels ou habituels, peuvent remercier les sénateurs. Il y a trois jours, surchargés de travail, paraît-il, ils ont repoussé intermede_diogenech_editions-libres.1273904559.gifaux calendes grecques l’adoption de la Loppsi. Information démentie dès le lendemain : cette loi sera examinée à la rentrée.

À la sécurité routière, ils ont dû pousser un ouf de soulagement. Car en février dernier, lors d’un comité présidé par François Fillon, il a été décidé d’intensifier le dépistage du cannabis chez les automobilistes. Sous réserve, justement, de l’adoption de la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, autrement dit la Loppsi.

Aujourd’hui, le contrôle de stupéfiants est obligatoire en cas d’accident mortel et facultatif en cas d’accident corporel. De plus, il est possible en cas d’infraction susceptible d’entraîner le retrait du permis de conduire ou si le comportement du conducteur laisse supposer qu’il est sous l’emprise d’une drogue.

63 500 contrôles en 2009. Chiffre qui doit rapidement augmenter avec en ligne de mire 100 000  par an. Au pays de Descartes, on aime bien les chiffres ronds.

Mais surtout, les conditions d’application doivent être modifiées.

Les contrôles seront obligatoires en cas d’accident corporel, mortel ou non, et possibles pour tous les accidents matériels. Ils seront également possibles en cas d’infraction, même bénigne, au Code de la route, ou en cas de présomption d’usage de stupéfiants. Bref, à partir du moment où un piéton devient automobiliste, le policier ou le gendarme pourra vérifier si par hasard il n’aurait pas fait tourner un pétard.
De plus, des contrôles « stupéfiants » aléatoires pourront être mis en place, comme c’est actuellement le cas en matière d’alcoolémie.

Fort opportunément, Liaisons*, le magazine de la Préfecture de police de Paris, nous rappelle comment se déroulent ces contrôles routiers. Tout repose sur un test salivaire, le Rapid Stat, dont certains toxicologues contestent pourtant la fiabilité. Il y aurait pas mal de « faux positifs » qui seraient ensuite démentis par la prise de sang. Par ailleurs, il suffirait de s’être brossé les dents ou rincé la bouche juste avant le contrôle pour éliminer les résidus de fumée de cannabis et ainsi abuser le test.

Test qu’il ne doit pas être facile d’effectuer au bord d’une route de campagne, à la lueur d’une torche électrique, par exemple.

Extrait du dossier Liaisons sur les stupéfiants.JPG


Si toutes les lignes ne sont pas roses, la vie non plus, car c’est la prise de sang. Dans ce cas, il faut au minimum 72 heures avant d’obtenir le résultat. Et si les analyses de laboratoire confirment le test salivaire, le « délinquant » devra payer les frais du laboratoire, soit une somme forfaitaire de 300 euros.

code-de la route_legifrance.1273905114.JPG

Une telle opération demande environ un quart d’heure. Et, sans faire de mauvais esprit, on peut s’interroger sur la manière de mettre en place un contrôle aléatoire…

On imagine l’embouteillage…

La voiture a longtemps été un Code pénal_stups_extrait dossier Liaisons.1273905215.JPGmoyen de s’évader, un peu de rêve…, un petit bout de liberté. Peu à peu, sans doute avec les meilleures intentions du monde, on en fait un objet maudit.

Avec ce nouveau tour de vis, n’est-on pas dans l’excès ?

Selon une estimation de 2005, il y aurait environ 230 morts par an, victimes d’un chauffard flottant dans les limbes du cannabis. Par comparaison, en 2008, 1200 personnes ont été victimes d’un conducteur qui avait bu un verre de trop.

Bon, enfin, ce que j’en dis… Là-dessus, je vais grimper dans mon vieux 4X4 pollueur, vous savez, celui qui est immatriculé en Guyane…, et prendre quelques jours de vacances. Vous en conviendrez avec moi, des vacances bien méritées.

Et même si je ne fume pas, avant de partir, je me brosserai les dents.

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* Un dossier très complet, Drogue, ennemi public n°1.
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Internet, roulette et grosse galette a été lu 7 913 fois et a suscité 16 commentaires. Mercredi 12 mai, le Conseil constitutionnel a rejeté le recours du PS et validé  la loi sur les jeux d’argent en ligne.

Internet, roulette et grosse galette

Aujourd’hui, on doit connaître les joueurs sélectionnés pour la Coupe du monde de football, mais d’autres personnages piaffent dans les starting-blocks : ceux qui attendent les jeux en ligne. Même si les choses ont pris un peu de foot-et-argent_plocteville.1273562408.gifretard, à cause de Malte, qui ne voit pas d’un bon œil lui échapper les « clandés » qui prospèrent sur son sol, c’est promis juré, avant le premier coup de sifflet de l’arbitre, les jeux seront faits. Juste deux ou trois obstacles juridiques à franchir et l’Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL), délivrera les premières licences. Pour l’instant cela concerne le poker, les paris sportifs et les paris hippiques.

Dans les coulisses, dans le monde de la finance et de la politique, on imagine les pourparlers, les négociations, le donnant, donnant…

Car, même si Charles Pasqua a été blanchi dans l’affaire du casino d’Annemasse, on sait bien que les jeux d’argent et la politique sont inséparables.

Cette masse de billets que génèrent les casinos a toujours suscité convoitises et tentations. Et comme ces entreprises « à part » ont besoin d’autorisations administratives, on imagine les magouilles… En sera-t-il de même avec les jeux virtuels ?

Si aujourd’hui la guerre commerciale est ouverte, en tout cas, la guerre des jeux n’est pas un long fleuve tranquille, loin s’en faut. Voici deux exemples, parmi tant d’autres, l’un, vieux de plusieurs dizaines d’années, l’autre, plus récent.

Dans les années 70, grandes manœuvres pour l’ouverture d’un deuxième casino à Nice, le Ruhl. Le 13° de la Côte d’Azur. Chiffre qui ne portera pas chance à tout le monde. C’est Jean-Dominique Fratoni, dit Jean-Do, qui mène la danse. Le bonhomme est ambigu. Il cultive les relations mais il n’a sans doute pas les épaules pour agir de son propre chef. Derrière, on subodore des hommes puissants…

Jean Bozi, un ancien député UDR, appuie la demande d’agrément. Or Bozi est casino-ruhl.1273562546.jpgégalement un proche de Marcel Francisci, qui est lui-même un ami d’Alexandre Sanguinetti, lequel roule dans le sillage de Roger Frey. Pour situer les personnages, les années précédentes, alors que le pays est déstabilisé par la fin de « l’Algérie française », Frey est ministre de l’Intérieur et à ses côtés Alexandre Sanguinetti recrute des gros bras dans la pègre pour lutter contre l’OAS. Il est d’ailleurs l’un des fondateurs du SAC (service d’action civique) avec Charles Pasqua et Etienne Léandri, association 1901 destinée à l’origine à soutenir la politique de De Gaulle, et téléguidée en sous-marin par Jacques Foccart.

Pour en revenir au Ruhl, Jacques Médecin, le maire de Nice, n’est pas en reste. Il veut que sa ville supplante Monaco. Il rajoute au pot et accorde même à Fratoni une réduction importante sur le montant des taxes qu’il doit régler à la commune. Tandis que son concurrent, situé à moins de trois cents mètres, Le Palais de la Méditerranée, paie plein pot.

En fait, il n’y a pas la place pour deux casinos à Nice. Rapidement, les hostilités sont ouvertes. Ainsi, en 1975, un mystérieux groupe de joueurs italiens fait pratiquement sauter la banque du Palais dans des circonstances qui n’ont jamais été vraiment élucidées.

Mais Fratoni a beau se démener, la mayonnaise ne prend pas, et malgré le renflouement d’Alain Delon, le Ruhl connaît rapidement de sérieuses difficultés financières.

Raison qui explique la tentative de prendre le contrôle du Palais de la Méditerranée, via les actions détenues par la fille de sa dirigeante, Renée le Roux. On connaît la suite: la disparition d’Agnès Le Roux qui a conduit, plus de trente ans plus tard, son amant, l’avocat Maurice Agnelet, à être condamné à vingt ans de réclusion criminelle – sans pour cela qu’on n’en sache plus sur cette affaire.

À cette époque, derrière chaque casino, on devine l’ombre de Marcel Francisci ou de son concurrent, Baptiste Andréani. Entre les deux, une ribambelle de cadavres.

Mais indiscutablement, c’est Francisi qui  porte la couronne. Jusqu’en 1981, où ses ennuis commencent avec le nouveau ministre de l’Intérieur, Gaston Defferre. Il n’en verra pas le bout. Il est tué dans le parking de son immeuble, à Paris, en janvier 82. Trois balles de 11.43, à bout touchant. Les soupçons des enquêteurs se portent sur ses anciens associés, les frères Zemour. Sans preuve. Mais il semble que d’autres ne s’embarrassent pas de ces détails: Edgard Zemour est abattu l’année suivante, à Miami, en Floride, où il s’est retiré ; et Gilbert Zemour quelques mois plus tard. Deux balles de 357 alors qu’il promenait ses quatre caniches. Et une dernière, pour la route, le canon de l’arme sous le menton.

On peut se dire, bon, tout ça c’est de l’histoire ancienne…

Alors, parlons du cercle Concorde. Cette maison de jeu de la rue Cadet, à Paris,  a obtenu une autorisation d’ouverture en novembre 2006, alors qu’à cette époque l’établissement était dans le collimateur des policiers. Ceux-ci enquêtaient (entre autres) sur un flingage qui avait eu lieu quelques mois auparavant à Marseille, à la brasserie des Marronniers. Quatorze balles, trois morts. Lorsque les enquêteurs déterminent qu’un certain Paul Lantieri pourrait être l’un des instigateurs de ce règlement de comptes, finauds, ils font le rapprochement avec le cercle Concorde. Car le bonhomme, qui possède pas mal d’établissements de toutes sortes sur l’Île de Beauté, est également propriétaire du restaurant qui jouxte le cercle de jeux. Il est arrêté en janvier 2007 et mis en examen pour association de malfaiteurs. Bizarrement, il est laissé libre. Dès lors, la PJ ne le lâche plus d’une semelle. Ce qui va permettre aux enquêteurs un sacré coup de filet dans lequel se prendront au passage un banquier suisse, un ancien capitaine de gendarmerie et un vieux de la vieille du milieu marseillais : Roland Cassone.

Pour le folklore, celui-ci est arrêté alors qu’il taille la haie de son jardin, un flingue dans la ceinture et le gilet pare-balles à portée de la main. Un rôle en or pour le regretté Paul Meurisse.

En janvier 2008, l’Express s’interrogeait : « Il reste à comprendre pourquoi Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, a autorisé l’ouverture de la maison de jeux avec à sa tête ce sulfureux attelage à l’automne 2006, et pourquoi Michèle Alliot-Marie a renouvelé cette autorisation un an après. Dans les écoutes, l’un des suspects fait allusion à un ancien ministre proche de Charles Pasqua et de Sarkozy ».

Depuis des lustres, la roulette est interdite en région parisienne, pour éviter, disait-on dans le temps, que les ouvriers n’y laissent leur paie. Aujourd’hui, le poker, boosté par des stars du showbiz et soigneusement mis en scène par la télévision, notamment Canal +, a changé la donne. Sa popularité renforce l’attrait des salles de jeux parisiennes. Businessmen et voyous s’en pourlèchent les babines.

chien-voyou1170497922.1273562632.jpgQue va-t-il se passer lorsque les jeux en ligne vont s’ouvrir légalement aux Français ?

Pour l’instant, il paraît que le combat est acharné. L’objectif est de figurer à tout prix dans le peloton de tête, quitte à perdre de l’argent au départ. Car les gains espérés sont énormes.

Mais si tous les coups sont permis – on n’en est pas encore aux coups de calibre.

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Le torchon brûle entre commissaires et magistrats

C’est tout juste si elle ne les traite pas de fainéants. Ce n’est pas la première fois que la secrétaire générale du SCPN (Syndicat des commissaires de la police nationale), Sylvie Feucher, s’en prend aux magistrats. C’est même l’un de ses dadas. Mais cette fois, dans une lettre adressée à son ministre, Brice Hortefeux, elle avance des arguments…

autruche_christian-aubry.1273237133.pngLe samedi 24 avril, un automobiliste tente vainement de se soustraire à un banal contrôle routier. Son comportement lui vaut le grand jeu. Les policiers s’aperçoivent rapidement qu’il se dissimule derrière une fausse identité pour mieux échapper à deux fiches de recherche. L’une pour une peine de douze ans de réclusion criminelle, et une autre, d’un juge d’instruction, dans une affaire de trafic de stupéfiants.

Ce qu’on appelle un beau mec !

L’OPJ tente de joindre l’un ou l’autre des magistrats indiqués sur les fiches de recherche. « Aucun des magistrats mandants, tant à la Cour d’appel de Versailles qu’à l’Instruction à Paris, n’était disponible ou ne souhaitait se déplacer pendant le week-end… », écrit Sylvie Feucher. Le substitut de procureur de Chartres décide donc d’une mesure de garde à vue.

L’homme, comme c’est son droit, sollicite alors un examen médical. Or, dans cette ville, comme dans d’autres sans doute, en raison des difficultés qu’ils ont à se faire régler leurs honoraires par la justice, aucun des médecins libéraux n’accepte de se déplacer. Il est donc conduit à l’hôpital, où il est bien difficile aux policiers d’empêcher des échanges verbaux avec ses amis qui, comme par hasard, se trouvent sur place.

A l’approche de la fin du délai de garde à vue, il faut prendre une décision. La procédure habituelle est ici inapplicable. Aussi, pour éviter tout risque d’évasion, le substitut de Chartres est d’accord pour venir sur place, mais la présence du Juge des libertés et de la détention est également nécessaire. Celui-ci refuse.

En fait, cela n’a guère d’importance, car à six heures, le dimanche matin, deux événements vont changer le cours des choses : un incendie dans un garage BMW et, peu après, une personne se présente pour déposer une plainte.
Or, pour une ville de 50 000 habitants, les effectifs du commissariat en ce dimanche 25 avril sont de sept fonctionnaires. Deux sont en patrouille de sécurisation, trois se rendent sur l’incendie, reste deux au commissariat, le chef de poste et le gardien, pour l’heure occupé à enregistrer les déclarations de l’opportun plaignant.

Aucun des deux ne se rend compte que des individus profitent de ce vide. Ils grimpent sur le toit de l’immeuble et parviennent à se faufiler jusqu’aux cellules de garde à vue. Là, sans fanfare, ils libèrent leur complice (la clé est sur la serrure) et prennent la fuite par le même chemin.

Rien vu rien entendu. Il existe bien un système vidéo, mais les vitres en plastique des cellules sont, avec le temps, devenues quasi opaques. Impossible de voir à travers.

Il subsiste quelques zones d’ombre dans cette histoire rocambolesque telle que la rapporte la représentante du SCPN. On peut se demander pourquoi la PJ n’a pas été prévenue. N’existe-t-il pas un office chargé des personnes recherchées dont l’une des missions est d’apporter une assistance aux services de police et de gendarmerie ? Et comment peut-on tolérer que les médecins refusent  de se déplacer, alors qu’ils ne peuvent légalement se dérober à une réquisition de justice ? Enfin, n’y a-t-il pas un certain embrouillamini dans les textes qui régissent les mandats de justice ?

Il en existe en effet de plusieurs sortes. Dans son courrier au vitriol, la commissaire Feucher parle de « fiches de recherche ». Or, la procédure varie selon le type de mandat:
–    Mandat de recherche : garde à vue de 24 heures
–    Mandat d’amener ou mandat d’arrêt : rétention de 24 heures.

Et, sans entrer dans les détails, il faut savoir que la marche à suivre varie selon que l’on se trouve ou non dans un rayon de 200 km autour du siège du magistrat mandant.

Mais, pour s’adapter aux circonstances, les policiers ne pouvaient-ils pas dresser une procédure de flagrant délit pour usage de faux papiers, délit de fuite, ou je ne sais quoi ?

extfrait-lettre-scpn.1273237013.JPGExtrait de la lettre du 4 mai 2010 du SCPN adressée au ministre de l’Intérieur

Il me semble que la charge contre les magistrats « qui se la coulent douce la nuit et les week-ends » est un peu exagérée. Car cette situation pointe un problème bien plus réel : la pauvreté des locaux et le manque d’effectifs, de plus en plus sensible, notamment en province, qu’il s’agisse des commissariats ou des gendarmeries.

Et la coupe sombre dans les dépenses de l’État ne permet guère d’envisager la moindre amélioration, d’autant qu’à l’Intérieur, dit-on, les caisses sont vides depuis longtemps.

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Hier, 6 mai, le SCPN a obtenu 66.2 % des voix à l’élection des représentants du personnel, et 3 des 4 sièges à la Commission administrative paritaire nationale. Le deuxième syndicat, le tout récent SICP (syndicat indépendant des commissaires de police), membre de la fédération CFDT, a donc perdu un siège.

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Un truand décoré par Sarkozy !? a été lu 41 161 fois et a suscité 54 commentaires. Quant à savoir s’il y avait réellement une cave au Bar des 3 Canards…, c’est ce que racontaient les anciens. Mais les choses sérieuses se passaient peut-être dans l’arrière-salle…

Un truand décoré par Sarkozy !?

François Marcantoni, alias Monsieur François, va être décoré de la Légion d’honneur par Nicolas Sarkozy. C’est du moins ce que nous annonce France Soir, dans une brève du 3 tintin_lepost.1273041078.jpgmai 2010. Vous me direz, rien d’original… Sauf que cette fois, le récipiendaire n’est pas n’importe qui, et la nouvelle a dû faire bondir plus d’un flic de ma génération.

Car si aujourd’hui, Marcantoni est un vieux monsieur – il aura 90 ans à la fin du mois – qui coule une retraite paisible dans sa résidence de l’ouest de la région parisienne, il n’en a pas toujours été ainsi…

En 1942, il est ouvrier artificier à l’arsenal de Toulon, et il participe au sabordage de la Flotte française. L’année suivante, il fuit le travail obligatoire (STO) et s’enrôle dans la Résistance. marcantoni_france-soir-copie.1273041392.JPGSon passé de résistant sera d’ailleurs reconnu par la suite, notamment son adhésion aux Forces françaises de l’intérieur (FFI) entre janvier 43 et mai 44 – mois où il sera interpellé par la police parisienne au volant d’une voiture volée. Sans doute pour se dédouaner, il raconte alors qu’il est en mission pour la Gestapo (après la guerre, il dira que c’était pour la Résistance). Une histoire pas très claire pour laquelle il écopera de dix mois de prison. Sa première condamnation.

Dans ses mémoires, il raconte qu’à la Libération, il s’en prend aux fortunes mal acquises, autrement dit, il se livre à un petit jeu à la mode à cette époque qui consiste à racketter les Collabos.

Puis, dans les années qui suivent, sa vie est parsemée d’arrestations, de contrôles et de petites peines de prison. Jusqu’en 1951. Année où l’un de ses amis, Leybus Schlimer, dit Léon le Juif, est arrêté par la 1ère brigade mobile pour un hold-up  à la Banque Algérienne de Paris. À l’époque, ce service de police judiciaire de la sûreté nationale est particulièrement redouté du milieu, car bien peu de truands ont su résister aux interrogatoires du groupe chargé de la répression du banditisme. On dit de ces policiers qu’ils manquaient de psychologie…

En tout cas, Léon le Juif balance Marcantoni. Lequel prendra cinq ans. Il en fera trois. Quant au beau Léon, il succombera à une overdose de plomb, une semaine après sa sortie de prison. Son assassin ne sera jamais identifié.

Courant 53, Marcantoni fait la connaissance, dans un bar de Toulon tenu par son frère, d’un jeune mataf un rien désœuvré qui revient d’Indochine : Alain Delon. Ils resteront amis. Et plus tard, devenu une star, Delon lui fera découvrir le monde du showbiz. Mais, même s’il se dit alors producteur, Marcantoni ne quitte pas le milieu du banditisme. On le dit très proche de la bande des Trois Canards. Une équipe à tiroirs spécialisée dans les braquages et le racket, et ainsi surnommée pour ses séances « gestapistes » dans la cave du bar de ce nom.

En prenant de la bouteille, le personnage devient cependant plus prudent. Et même si son nom apparaît dans des enquêtes concernant des règlements de comptes, des vols ou des histoires de fausse monnaie, il parvient le plus souvent à passer à travers les mailles du filet. Comme beaucoup de Corses, on dit aussi qu’il a été « Algérie française » et proche de l’OAS, mais il s’est toujours défendu d’avoir été une barbouze.

Dans les années 60, peu à peu, il se retire des affaires. S’il ne devient pas un parrain, dans le milieu, on le considère plus ou moins comme un sage. On le gratifie du surnom de « Commandant ».

Sa vie bascule vraiment un matin d’octobre 68, lorsqu’on retrouve le corps de Stéfan Markovic enveloppé dans une housse de matelas sur une décharge publique d’Élancourt, dans les Yvelines. Or cet homme est depuis trois ans le garde du corps d’Alain et de Nathalie Delon. Et quelques jours plus tard, les enquêteurs de la PJ de Versailles (l’ancienne 1ère brigade mobile) prennent connaissance d’une lettre du mort dans laquelle il déclare que s’il lui arrive malheur, les soupçons devront se porter sur Marcantoni et les époux Delon. Peu après, des photos circulent sous le manteau représentant des personnalités de la politique, du spectacle, des médias et autres, en pleine action lors de soirées fines. Partouzes dont Markovic est l’un des organisateurs. Et l’affaire prend une tournure vraiment politique lorsque parmi ces photos, on découvre l’épouse de Georges Pompidou, l’ancien Premier ministre qui vient d’être remercié par le général de Gaulle.

On dira par la suite qu’il s’agissait d’un montage du SDECE, le service secret français, pour déstabiliser Pompidou, devenu un concurrent du grand Charles. Le fait est qu’une fois élu président de la République, Pompidou va dissoudre ce service.

Quant à Marcantoni, il se défend de toute accusation. Il ne cède rien. Pourtant, les enquêteurs ont des billes. Ils ont effectué un travail de fourmi, notamment sur la housse de matelas qui enveloppait le corps de Markovic. En partant de plus de 800 acquéreurs de matelas Treca, ils parviennent à sept noms, sept suspects, dont Marcantoni. Sept ans plus tard, malgré un sérieux faisceau de présomptions, le procureur de Versailles, Pierre Bezio, rendra pourtant un non-lieu. On dit que le Premier ministre, Jacques Chirac, n’était pas chaud pour que cette affaire revienne à la une de l’actualité… C’était en tout cas l’avis de Me Roland Dumas, l’avocat du frère de la victime.

Va savoir.

marcantoni_france-3.1273041506.jpgFrançois Marcantoni est devenu au fil des ans un personnage charismatique. Pour avoir déjeuné avec lui il y a quelques années, alors que nous n’étions plus « aux affaires », ni lui ni moi, je dois reconnaître que le bonhomme a quelque chose d’assez fascinant, comme un mystère qui l’entoure, qu’il entretient d’ailleurs habilement. Ses dons de conteur y sont pour beaucoup.

Mais personne ne peut renier son passé. Les quinze mois au service de la France, dans les FFI, peuvent-ils effacer une vie de truand…

Désolé, Monsieur François, je crois que pour vous, « la rouge » n’est pas de mise. Et d’ailleurs, cela nuirait à votre légende.

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Quelque part une petite école…

Alors que les vacances de Pâques se terminent  pour l’ensemble des écoliers français, au fin fond de l’Afrique, il y a une petite école…

capture1.1272785400.JPGOh, elle ne paie pas de mine l’école primaire de Sakabi, sur la nationale 10, au nord de Bobo-Dioulasso, au Burkina Faso ! Mais autrefois, elle était encore plus sinistre : ses classes étaient désertes.

Eric, l’instituteur, était au désespoir : comment faire venir les enfants ? se demandait-il. Et un jour, il a eu une idée : il faut une cantine ! Car pour se remplir la tête, il ne faut pas que l’estomac soit vide. Et il a défendu son projet auprès de l’administration, et, surtout, il a su convaincre une poignée de gens, des Suisses et des Français, délégués sur place pour une mission sanitaire.

« Il nous a fait part de son envie de faire un jardin maraîcher à proximité de l’école, eric-dans-son-jardin.1272785620.JPGdit le docteur Odile Dufriche. Il pourrait profiter de l’eau du forage qui s’écoulait librement et gratuitement à proximité de l’école pour arroser le jardin. Jardin qui serait cultivé par les enfants et dont les légumes et les fruits permettraient d’améliorer l’ordinaire de la cantine qu’il voulait mettre en place. »

En dehors de toute association, sans faire appel à des donateurs, sans en parler, ceux-ci ont décidé de l’aider.

Il faut dire que dans un pays si pauvre, même un pauvre de chez nous est riche. Et il ne fallait pas grand-chose pour la mise en route : un peu d’argent pour construire le local, quelques sacs de riz et deux ou trois tonneaux d’huile.

la-cuisine.1272785932.JPGL’affaire a été vite réglée.  Et depuis, à tour de rôle, ce sont les mamans qui viennent faire la cuisine, tandis que les enfants apportent le bois pour mettre sous le chaudron. Chaque matin, sagement, avant les cours, les élèves font la queue pour une louche de riz ou une boulette faite de graines de néré, le soumbala, qui ressemble aux boules que chez nous  les gens de bon cœur  accrochent aux branches pour nourrir les oiseaux. Et à la récré, ils vont tirer l’eau à la fontaine, pour arroser les plantations.

Depuis les classes se sont garnies. L’année corvee-deau.1272786979.JPGdernière, l’instituteur  a accueilli 731 élèves. Des enfants attentifs, correctement nourris, l’esprit en éveil…

Hélas, dans tous les contes de fées, il y a un méchant. Dans le nôtre, c’est le maire. Un beau jour, il a décidé de faire payer l’eau de la fontaine.

Bien trop cher pour le budget toujours ric-rac de la petite école.

Alors, les plantes se sont ratatinées, les arbres sont morts, l’un après l’autre. Au bout de quelques semaines, le beau jardin était tout sec.

le-jardin-apres.1272786193.JPGAprès un moment de découragement, Eric, soutenu par tous les autres enseignants, a dégotté un autre terrain, à 25 km de la ville, donc pas trop cher, mais surtout à quelques pas d’un point d’eau. Toujours grâce à ses mécènes, il a pu l’acheter et entreprendre un défrichage. La coupe des arbres, effectuée avec l’autorisation de l’administration, a payé une bonne partie des travaux. Quel drôle de pays ! On n’y parle guère d’écologie, mais là-bas, pour couper un arbre, il faudrait une autorisation…

Ce terrain, c’est sûr, est bien loin de l’école. Il ne présente pas les mêmes avantages que l’ancien. Mais  pour Eric, le principal est que ses enfants mangent de nouveau des fruits et des légumes. D’ailleurs, en 2009, la première récolte de sésame a été plutôt bonne.

Et cette année-là, le taux de capture3.1272786075.JPGréussite aux examens est passé de 53 à 79 %.

Mais il ne compte pas s’arrêter là. Son objectif, à présent, est de rendre son établissement financièrement autonome. Pour cela, il envisage d’acheter un moulin, pour moudre le mil, et aussi, à l’occasion, pour l’usage des agriculteurs, moyennant une modeste contribution.

Voilà, à la différence d’une fable, tout est vrai dans ce récit, et il n’y a pas de morale. Ou plutôt, il y en a plusieurs. À chacun de choisir la sienne.

Je ne connais pas le Burkina, et cette histoire m’a été racontée par le docteur Odile Dufriche et Jean-Marc Pauze, à qui l’on doit les photos.

palais_kosyam.1272786307.jpg

Palais présidentiel de Kosyam à Ouagadougou

Bien sûr, pour rester raccord avec l’objet de ce blog, j’aurais pu parler de la loi « autorisant l’approbation de l’accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Burkina Faso relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au développement solidaire ». Accord qui prévoit « la mobilisation des compétences et des ressources des migrants burkinabés afin que leur migration favorise le développement et l’enrichissement du Burkina Faso ».

Mais à quoi bon…

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Les détectives privés sont à la fête a été lu 10 695 fois et a suscité 8 commentaires.
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