La déchéance de la nationalité française, dont l’objectif serait de protéger les forces de l’ordre, présente-t-elle un intérêt quelconque ? On peut en douter. Si la crainte d’aller en prison ne fait pas reculer un criminel, il y a gros à parier que le risque de se voir – en plus – déchu de sa nationalité ne lui fera ni chaud ni froid.
Cette loi va s’insérer dans l’article 25 du Code civil. Ce sera l’alinéa 5. Pour la petite histoire, cet alinéa 5 existait déjà par le passé et prévoyait la déchéance pour toute condamnation criminelle à une peine de plus de cinq ans d’emprisonnement. Il a été supprimé en 1998, sous le gouvernement Jospin.
Qui est visé par ce texte ?
Le Code parle d’un « individu qui a acquis la nationalité française ». Or, pour un adulte, il n’y a que deux moyens : la naturalisation ou le mariage (et de manière marginale, la réintégration).
Si l’on en croit ces deux tableaux (l’un du Parlement, l’autre de l’Institut national d’études démographiques), c’est donc environ 100 000 personnes par an qui seraient concernées.
Pour les mineurs, c’est plus compliqué. Ceux qui sont nés en France, par exemple, et qui y résident, obtiennent automatiquement la nationalité française à leur majorité. Mais je dois avouer que je suis incapable de dire si ces jeunes Français sont potentiellement « révocables », tout comme les enfants des personnes naturalisées (le charmant titre « Effets collectifs », dans le premier tableau)…
De plus, cette déchéance ne concerne que les personnes qui bénéficient d’une deuxième nationalité. Ce qui doit être le cas de presque tous les immigrés (sauf les apatrides, évidemment) puisque la France accepte le principe de la double nationalité.
Ainsi, l’année dernière, alors que M. Eric Besson nous faisait le grand jeu sur « l’identité nationale » et « la fierté d’être Français », la France a même renforcé le principe de la double nationalité en dénonçant partiellement une convention européenne signée par une douzaine de pays, dont le nôtre. Cette convention, qui date de 1963, et qui a été modifiée en 1993, estime que « le cumul de nationalités est une source de difficultés ». Et qu’un ressortissant européen qui acquiert la nationalité d’un état signataire doit abandonner sa nationalité antérieure.
Depuis le 5 mars 2009, ce n’est donc plus le cas pour les Français. Et les personnes qui auraient perdu leur nationalité sur le fondement de cette convention, peuvent même la retrouver si elles le souhaitent.
C’est sans doute en raison de la complexité des textes que Carla Bruni s’emmêle parfois ses jolis pinceaux lorsqu’on lui demande si elle est française, italienne, ou les deux à la fois. Affirmant devant les Italiens : « Automatiquement, quand on épouse une personne, si c’est bien votre question, on a la double nationalité. Si l’on n’en a plus besoin, il faut faire une demande pour y renoncer. Mais cela m’aurait peiné de le faire. » – Ou aux Etats-Unis, devant une caméra télé : « Non, je suis juste française maintenant (…) On ne peut pas garder la double nationalité. »
Pour faire simple, notre pays admet qu’un étranger puisse devenir français tout en restant étranger et qu’un Français puisse devenir étranger tout en restant français…
Cela dit, si l’objectif de cette loi est de « protéger » les membres des forces de l’ordre, ils ne sont pas seuls à être concernés. On peut trouver le détail dans les articles 221-4 et 222-8 du Code pénal : magistrats, jurés, avocats, officiers publics ou ministériels, douanes, administration pénitentiaire, sapeurs pompiers, gardiens assermentés, etc.
Alors, policiers et gendarmes sont-ils satisfaits de cette nouvelle mesure ? Je ne crois pas me tromper en disant qu’ils n’en ont rien à battre. Lorsqu’on risque sa peau, on se fiche bien de savoir si le type qui tient le flingue va perdre ou non sa carte nationale d’identité. Non, on prie surtout pour que l’administration n’ait pas lésiné sur le prix des gilets pare-balles.
Sûr qu’ils préféreraient, en cas de pépin, que leur famille bénéficie à la fois d’un soutien psychologique et d’une aide efficace pour régler les difficultés matérielles.
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Les policiers doivent-ils apprendre à désobéir a été lu 20 946 fois et a suscité 187 commentaires.
pas pour olivier tracoulat, ni pour yvan colona.
non plus pour maxime brunerie
Il existe un moyen très simple de solutionner tout ça : réformer le code de la nationa-lité !!!
Je m’explique : Ce n’est pas parce qu’une chatte ferait ses petits dans la niche du chien que ceux ci deviendraient automatiquement des épagneuls ou des caniche !!!
Selon moi, pour avoir la nationalité Française il faut qu’au moins l’un des deux parents soit lui même Français.
Le droit du sang plutôt que celui du sol….
Du coup ce problème de déchéance de nationalité deviendrait moins crucial non ?
Par contre, c’est sûr qu’une île comme Mayotte forte de ses 186 452 habitants perdrait la particularité d’être la détentrice de la plus grosse maternité de « France »…..
Je suis pour la déchéance de nationalité de tous ceux qui préfèrent payer leurs impôts à l’étranger…tout en profitant du système quand ils sont malades!
Déchéance de nationalité : pour qui et pour quoi ?
Personnellement, je ne comprend pas bien l’utilité de cette loi…
Il est certain que le but n’est pas de protéger policiers et gendarmes!
Par contre je me pose la question de ce qu’il advient d’une personne déchue de la nationalité française lors qu’elle récidive? La justice a t-elle le moyen de l’expulser dans le pays de sa seconde nationalité? Est ce la le but recherché de cette loi?
Si quelqu’un peut m’éclairer ma lanterne, merci!
Tout d’abord, La France peut bien accepter la double nationalité, ou concevoir que l’on puisse retrouver sa nationalité antérieure, encore faut-il que le pays d’origine de la personne concernée y consente. Certains pays considèrent qu’adopter une autre nationalité est un abandon irrémédiable de sa nationalité d’origine. Dans ce cas, la personne déchue deviendrait apatride, ce qui est précisément exclu par la loi (car notamment contraire à nos engagement internationaux)
Ensuite, la déchéance de nationalité est bien évidemment contraire à la constitution (ou plutôt à ce que l’on appelle le bloc de constitutionnalité : déclaration de 1789, préambule de 1946 et constitution) et à la convention européenne des droits de l’homme. Certes, cette disposition a existé dans notre droit antérieurement, mais le contrôle de constitutionnalité et de conformité avec le droit international n’y était pas aussi rigoureux qu’aujourd’hui. A la rigueur on pourrait concevoir une déchéance lorsque l’auteur d’un délit exprime par celui-ci sa volonté de renoncement (trahison, espionnage, terrorisme, acte de guerre contre la France). Le reste, c’est du n’importe quoi.
Enfin, ce type de loi illustre deux choses : les hommes politiques sont prêts à n’importe quoi pour être réélus, et se fichent complètement du bien commun, et les français sont absolument désinformés sur les moyens efficaces de lutter contre la délinquance (au demeurant plutôt stable. On leur « vends » seulement une lutte contre le sentiment d’insécurité, éminemment irrationnel et subjectif. On peut avoir une politique ferme contre la délinquance, mais sur des critère objectifs d’efficacité.
ah, je me disais bien aussi…
quel désordre ici,
ça doit vous grattez, ça !
non ?
@ arnaud24 : l’insulte est en général tout à fait inutile, voir contre-productive, mais la provocation, quand elle est intelligemment amenée, est bien souvent nécessaire pour faire ouvrir les yeux à certains…
Encore une fois un petit malin laisse un commentaire en se servant de mon pseudonyme (le 10.10.2010 à 11h36). Les propos laissés ne sont ni orduriers ni diffamatoires ni quoi que ce soit d’ailleurs, mais si leur auteur voulait bien éviter de se faire passer pour un autre… Merci.
@ amghar “je suis persuadé que mes interventions permettent à certains de mes contradicteurs, même parmi les plus obtus, de mieux comprendre certains points de vue qu’ils n’avaient même pas envisagés”.
Effectivement, un regard different est toujours interessant. Le tout est de savoir faire passer ses idées … et d’accepter celles des autres.
Toute opinion argumentée est non seulement recevable, mais indispensable au débat.
La provocation et l’insulte ne sont par contre pas utiles.
Pas de quoi 😉
bien que je ne te mettais pas dans le même sac que « les plus obtus »…
t’es un peu obtus, mais t’es loin d’être le plus obtus parmi les intervenants de ce blog et parmi tes collègues!
j’espère que tu t’en rendra compte assez vite!
Bon dimanche,
bien cordialement…
@ amghar « je suis persuadé que mes interventions permettent à certains de mes contradicteurs, même parmi les plus obtus, de mieux comprendre certains points de vue qu’ils n’avaient même pas envisagés ».
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En effet, amghar, je suis dans ce cas : grâce à vous, j’ai souvent l’impression de devenir un peu plus intelligent, ou du moins, beaucoup moins sectaire.
Merci de me faire progressivement évoluer dans le bon sens.
@ spéciale :
Ben déjà : y a un obtus qui apprend un peu d’orthographe et de vocabulaire, c’est déjà une grande victoire pour ce blog !
J’ai une requête à M. Moréas, d’ailleurs à ce propos : c’est possible un papier sur les stages « touches du clavier » qu’on effectue (ou pas) dans la police nationale ?
Nan, parce que niveau lenteurs administratives, je suis sûr qu’on pourrait gagner en productivité, des fois…
souvent, même!
Pour le poste de maire du blog, ma candidature reste ouverte 😉
Je propose un vote à main levée.
Et sinon, pour le sujet qui nous intéresse aujourd’hui, je ne dirais qu’une chose : ces derniers temps, avec sa politique poujadiste, la France m’a beaucoup déchu!
Toutafé cordialement
@amghar:Tu es remonté sur ta CHAIRE?????????
Pas entendu parler du « code “motiver”. » C’est logique, me direz-vous, puisque c’est secret.
Le dernier paragraphe inciterait à une lecture pour le moins cruelle. Encore faudrait-il trouver le nègre capable de produire une telle prose. Ça ne tient pas début, à mon humble avis, parce que s’il en est capable de produire un texte éthique, il ne peut pas ensuite jouer le jeu.
L’actuel quinquennat s’achèvera, si on en croit les chiffres présents, par l’éviction du pouvoir actuel. Alors, le pays pourrait demander des comptes pour certains mauvais fonctionnements de l’Etat.
Par exemple pour les émeutes consécutives aux « accidents et bavures » annoncés à l’avance par la police secrète par le code « motiver ».
La police secrète tenterait-elle de se préserver de ces conséquences futures en envoyant ses retraités écrire qu’elle (qu’ils) n’approuve pas tous les agissements de l’Etat ?
« l’amghar, sorte de maire élu pour une année, avait pour mission d’exécuter les décisions de l’assemblée et de maintenir l’ordre et la paix, notamment sur le souk. »
Mon cher, avec tout mon respect, je me dois de vous prévenir : ce n’est pas demain qu’on va vous élire. Vous avez sûrement dû vous méprendre : c’est calmer le souk. Avouez que vous y prenez un certain plaisir, parfois, a le foutre aussi. !-)
Très cordialement
« Tout d’abord merci pour ce blog qui loin de participer à la division du pays comme le craint Janssen J-j, me semble plutôt œuvrer pour une meilleure comprehension mutuelle. »
Tout à fait d’accord!
Moi, ça me permet en tout cas de mieux comprendre le degré abyssale de réflexion et de culture d’une certaine « france » qui se croit au dessus des autres…
ça me permet aussi d’échanger avec d’autres des points de vue contradictoire dans la joie et la bonne humeur, l’humour et la reflexion commune.
bon, ça se passe pas toujours hyper cordialement avec tout le monde, mais dans l’ensemble, je pense que ce blog apporte des réflexions intéressantes et fait réfléchir même des cas qu’on pensait désespérés.
et je suis persuadé que mes interventions permettent à certains de mes contradicteurs, même parmi les plus obtus, de mieux comprendre certains points de vue qu’ils n’avaient même pas envisagés.
Merci encore, donc, à Georges Moréas.
« La déchéance de la nationalité française, dont l’objectif serait de protéger les forces de l’ordre, présente-t-elle un intérêt quelconque ? »
Réponse simpliste : pour les forces de l’ordre, non. Pour ceux qui sont à l’origine de la modification de l’alinéa, oui, mais comme manœuvre de diversion. Comme un fuyard qui jetterait du poivre sur ces traces pour faire éternuer les limiers qu’il aurait à ses trousses.
En tout cas, tout à fait d’accord à l’article du gilet. Personnellement, si l’on en viendrait à qu’on m’envoyasse au front, ça m’énerverait de penser qu’on me prend pour un naïf. !-) (rire jaune)
Une notion de fond du présent quinquennat est l’inégalité des citoyens.
Inégalité voulue, montrée, démontrée au pays. Par les lois, les faits divers, les paroles de certains magistrats.
Inégalité nécessaire à la tranquille exploitation de l’Homme par l’Homme, qui est l’objectif le l’oligarchie et de son premier représentant.
Rendre tous ceux qui protègent ou représentent l’Etat plus égaux que les autres, c’est vouloir forcer la nature d’un pays égalitaire, qui porte encore haut dans sa Constitution l’héritage de son acte fondateur, la Révolution.
Tout d’abord merci pour ce blog qui loin de participer à la division du pays comme le craint Janssen J-j, me semble plutôt œuvrer pour une meilleure comprehension mutuelle.
Si la France reconnait la double nationalité, ce n’est pas toujours le cas du pays d’origine. La Corée du Sud pour ne citer qu’elle (sans doute cela parait-il marginal, mais je suppose que ce n’est pas le seul pays) déchoit de leur nationalité ses ressortissants optant pour une autre (sans doute pour éviter que les membres de la « diaspora coréenne » tant aux USA qu’en Australie ou plus marginalement en Europe n’aient la possibilité d’influencer la politique nationale et se prémunir de tout retour de ces émigrés).
Déchoir de leur nationalité française acquise ces personnes reviendrait donc a créer des apatrides.
Cette loi absurde est juste le premier acte du rétablissement de la double peine.
« » »Alors, policiers et gendarmes sont-ils satisfaits de cette nouvelle mesure ? Je ne crois pas me tromper en disant qu’ils n’en ont rien à battre. » » » M. MOREAS vous avez trouvé la réponse à cette loi à la « » »Dubout » » ». Si les sénateurs et députés n’ont que çà à faire c’est affligeant….
Le seul chiffre m’intéressant est le nombre de personnes détentrices d’une certaine autorité tuées (assassinat, meurtre à l’exclusion des coups et blessures ayant entraîner la mort sans l’intention de la donner) par un français de fraîche date (avec deuxième nationalité) ces 10 ou 20 dernières années. A mon avis, c’est le seul chiffre permettant d’estimer l’impact de cette loi.
On peut parier pour un cas sur les dix prochaines années. Avec l’énergie dépensée par tout un chacun et les frais liés à cette plaisanterie législative (temps passé, papier imprimé et j’en passe), il est certain que les veuves et veuf de policières et policiers morts en service auraient pu toucher le jack pot au lieu de se contenter de subsides minables.
Le populisme coûte trop cher…
« Lorsqu’on risque sa peau, on se fiche bien de savoir si le type qui tient le flingue va perdre ou non sa carte nationale d’identité »…
Conclusion : encore un objet de politique publique démagogique pour susciter la haine entre les citoyens du pays…, Et vous, Georges, vous nous en remettez une petite couche. Sûr que vous allez provoquer plus de 250 commentaires déchaînés, du genre nauséabond de ceux du billet précédent…
Votre honnêteté intellectuelle n’est évidemment pas en cause, mais pesronnellement, je ne vois pas très bien l’intérêt de revenir sur ce sujet sans aucun intérêt en soi, si c’était pour aboutir à pareille conclusion !…