LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Actualité (Page 9 of 71)

Un peu las, les OPJ renâclent

Plusieurs centaines de policiers auraient demandé à leur parquet respectif le retrait de leur habilitation à la fonction d’officier de police judiciaire. Ils veulent ainsi démontrer leur exaspération devant l’application d’une nouvelle loi qui modifie, à la marge, le déroulement de la garde à vue.

echarpe-1-copieIls estiment notamment qu’ils croulent sous la paperasserie et les taches annexes, ce qui les détourne de leur mission d’enquêteur judiciaire.

Même s’il est troublant de voir des représentants de la loi discuter sur le bien-fondé d’une loi qui a été adoptée par les élus il y a bientôt six mois, il faut reconnaître qu’ils n’ont pas tort : « Les multiples réformes intervenues depuis plus d’une vingtaine d’années ont toutefois rendu complexes et peu lisibles les règles de procédure pénale et, ce faisant, affecté leur efficacité pour les praticiens et les justiciables », peut-on lire dans le projet de la loi du 3 juin 2016, celle, justement, que critiquent les policiers.

Vous me direz, c’est tout pareil dans la vie de monsieur et madame Tout-le-Monde. Avant la moindre initiative, il faut tenter de savoir ce qui est permis, interdit, toléré, obligatoire, etc. C’est le mal de notre pays. Et même lorsqu’il est question de simplifier les choses, la technocratie prend le pas sur les bonnes intentions et tout devient plus compliqué qu’avant. Continue reading

Légitime défense des policiers : faut-il tordre le droit ?

Comme aux élections présidentielles de 2012, certains policiers revendiquent le droit d’utiliser leur arme sans avoir de comptes à rendre à la justice. Ce marronnier politico-policier frôle la démagogie, et pourtant, Bernard Cazeneuve a annoncé que les règles d’ouverture de feu par les forces de l’ordre seraient réexaminées.

Libre interprétation du trou de (la) balle qui a eu raison du parrain québécois Nicolo Rizzuto.

Il semblerait que dans un rapport, l’INHESJ (Institut national des hautes études sur la sécurité et la justice) préconise d’aligner ces règles sur celles en vigueur dans la gendarmerie.
C’est-à-dire une réglementation basée sur une loi et un décret promulgués par le gouvernement de Vichy afin de permettre aux policiers et aux gendarmes de lutter contre la Résistance. Des textes qui se référaient d’ailleurs à un décret de 1903 et à une loi de 1798.

Il est quand même assez étonnant de chercher à régler un problème actuel en se basant sur des textes aussi anciens… Continue reading

Police : la mutinerie

Quelques centaines de policiers s’attroupent, la nuit, depuis une semaine, pour manifester leur hostilité au gouvernement. L’attaque aux cocktails Molotov de Viry-Châtillon et les propos malheureux de Bernard Cazeneuve sur ces « sauvageons » qui s’en prennent aux forces de l’ordre ont suffi à faire sauter le couvercle d’une police en rupture.

france-mecontente2Ce n’est pas la première fois que la marmite déborde, car ce métier ne fait aucun cadeau ! Le flic prend l’homme. Et du coup, les policiers ont une inclinaison au nombrilisme. Ils sont souvent comme ces comédiens, tellement pris par leur personnage, qu’ils ne parviennent pas à séparer leur vie professionnelle de leur vie tout court. Et ils prennent tout dans la gueule. C’est sans doute l’une des raisons qui fait qu’il y a tant de suicides dans la profession…

C’est une charge difficile, pour celui qui l’exerce et pour le ministre qui se veut leur patron. Il n’est pas évident pour ce dernier d’écouter et de comprendre sans tomber dans l’excès, de la démagogie à la « couvrante » systématique. « Si la police était facile, il n’y aurait pas besoin de police », disait Dominique Monjardet, le premier sociologue à avoir exploré l’univers policier*.

C’est le métier qui veut ça. Continue reading

Prescription pénale : la patate cachée derrière l'infraction cachée

patateLe temps qui passe doit-il estomper un crime ou un délit au point que son auteur ne sera jamais poursuivi ? À cette question, le système juridique français répond oui. C’est le droit à l’oubli. La prescription extinctive de l’action publique. Cette mansuétude trouve son fondement dans le fait qu’au bout d’un certain temps, il ne serait pas souhaitable de raviver le souvenir d’une infraction. Pour des raisons de tranquillité publique, diront les ingénus, mais en réalité pour masquer la défaillance de la société.

Le principe de la prescription existe depuis la nuit des temps, mais aujourd’hui, cette mesure rencontre une hostilité certaine, probablement en raison de cette mémoire informatique qui a bouleversé notre monde. Une simple recherche sur Google nous ramène des années en arrière ! Et alors que la prescription était là pour ne pas raviver les souvenirs, elle apparaît maintenant comme un instrument de l’injustice.

Aussi, les juges n’hésitent plus à piocher dans le panier aux arguties pour tordre le droit au nom de la justice.

Car une infraction qui ne fait pas l’objet de poursuite peut être considérée comme un dysfonctionnement du système judiciaire : le ministère public n’a pas fait le job. Continue reading

Info trafic… d’influence

Ces temps-ci, plusieurs affaires judiciaires visant le trafic d’influence ont fait la une des journaux, notamment celles qui touchent les hautes sphères de la hiérarchie policière. La dernière en date concerne Bernard Squarcini, l’ancien patron du Renseignement intérieur. On peut toujours en déduire que les flics sont moins honnêtes qu’auparavant ou les juges plus sévères, mais la réalité est tout autre : le marché de la sécurité et du renseignement est devenu un champ de mines – de mines d’or, s’entend !

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Extrait du mensuel Super Picsou

Dans les entreprises, notamment les grands groupes, l’espionnage est aujourd’hui une bête noire. Elles sont tenues de se protéger – et accessoirement, mais il ne faut pas le dire, de rendre la pareille à leurs concurrents. On comprend bien que ni le droit ni la morale n’ont de place dans cette guerre underground ou tout est permis sauf de se faire prendre. Ainsi, peu de gens sont au fait des arcanes des énormes marchés militaires que la France a récemment remportés ! Or, dans ce jeu off, les services de l’État ne sont pas innocents, mais ils ne doivent pas apparaître : il leur faut une couverture. Qui est mieux placé qu’un ancien de leurs services ! C’est ainsi que nombre de policiers ou de militaires (pas nécessairement des gendarmes) se lancent dans l’aventure, oubliant parfois qu’ils agissent désormais sans gilet pare-balles.

Et les balles proviennent d’une loi du 4 juillet 1889 qui est issue d’un trafic de décorations. Continue reading

15 ans, l’âge pénal de raison

Plusieurs adolescents d’une quinzaine d’années ont été arrêtés ces derniers jours pour s’être laissés embobiner par des partisans du djihad armé, au point, pour certains, paraît-il, d’être à deux doigts de « passer à l’acte ». Les enquêtes antiterroristes étant secrètes, nous sommes tenus de croire ce que l’on nous raconte, néanmoins, il est difficile de ne pas s’interroger : un délit d’intention peut-il s’appliquer à un enfant ?

La scène médiatique du terrorisme offre une tentation forte de vouloir y jouer un rôle. On en a un bon exemple avec ces ados qui ont « scénarisé » l’alerte bidon dans une église du quartier des Halles de Paris. Comment faire la différence entre l’intention malicieuse et l’intention pernicieuse ? Au lieu de déclarer que l’État se portera partie civile, le ministre de l’Intérieur n’aurait-il pas été plus inspiré de dire que cet événement a été un excellent exercice pour ses services parisiens ! Leur rapidité d’intervention a en effet démontré que l’on peut compter sur eux.

Manuel Valls, lui, a promis des « sanctions exemplaires » contre ces garnements. Euh !…

NOMBRE JEUNES DELINQUANTSLa justice des mineurs est sérieusement encadrée et s’il y a un domaine où les magistrats montrent leur indépendance, c’est bien celui-là. Continue reading

L’Europe désarme les « civils »

Lors de son fameux discours devant le congrès, après les attentats du 13 novembre 2015 (vous vous souvenez : « La France est en guerre… »), François Hollande a décidé de donner aux magistrats les « moyens d’enquête les plus sophistiqués, pour lutter contre le trafic d’armes « car ce sont avec les armes du banditisme que les actes terroristes sont commis ».

Proc Epique

Il a également rappelé que la France avait depuis longtemps demandé à l’Europe de prendre des dispositions pour lutter contre le trafic d’armes.

La Commission européenne avait alors réagi au quart de tour. 48 heures après ce discours, elle annonçait une révision de la directive sur l’acquisition et la possession des armes à feu en dressant une palette de mesures qui allaient du bon sens au non-sens. Finalement, lors des débats en commission du commerce intérieur, la présidente avait reconnu que « le texte avait sérieusement besoin d’être retravaillé ». En gros, il devenait quasi impossible pour un particulier de posséder une arme légalement. Un bien mauvais signal, car, historiquement, c’est l’une des premières mesures prises dans les pays où s’installe le totalitarisme.

Trop de précipitation, sans doute. Continue reading

Une Cour de sûreté antiterroriste !

À l’approche des élections présidentielles, les (grands) esprits s’efforcent de nous persuader qu’ils ont trouvé la solution miracle pour lutter contre le terrorisme. Le plus simple, affirment certains, serait de réformer la Constitution, afin de rendre légales des mesures illégales, comme l’enfermement administratif des Français faisant l’objet d’une fiche S (les étrangers, eux, les veinards, étant seulement expulsés). C’est l’avis de notre ancien président Nicolas Sarkozy. Pourquoi pas ! Après tout, François Hollande a bien voulu changer la Constitution pour y inscrire la déchéance de nationalité ! Sarkozy veut également créer une « Cour de sûreté antiterroriste », sur le modèle de l’ancienne Cour de sûreté de l’État et un parquet antiterroriste.

Holà ! Pas question lui répond François Molins, le procureur de Paris, en s’immisçant dans le débat politique. Il y a déjà un procureur national antiterroriste, et c’est moi ! « Depuis, trente ans, dit-il aux journalistes du Monde (3 sept. 2016) la justice antiterroriste fonctionne de manière centralisée et spécialisée. Le dispositif actuel est un gage d’efficacité et de cohérence […] Quant à la cour d’assises spéciale, elle a son propre fonctionnement, sans jury. »

Code et menottesLe procureur de Paris fait référence à une loi qui a effectivement 30 ans – presque jour pour jour, puisque la première loi antiterroriste a été votée le 9 septembre 1986. Continue reading

Nice : après le drame, le cafouillage

Quelques heures après l’attentat au camion fou sur la Promenade de Nice, en pleine nuit, François Hollande s’est adressé à la Nation pour faire connaître les décisions qu’il avait prises.

Coucher soleilSi c’était pour nous rassurer, c’est raté. Car il est pour le moins inquiétant de voir le chef de l’État réagir ainsi à un événement, aussi dramatique soit-il, sans prendre le recul que lui imposent ses responsabilités. Cela ressemble trop à de l’affolement.

« Nous continuerons à frapper ceux qui, justement, nous attaquent sur notre propre sol, dans leur repaire ! » déclame-t-il. Et il annonce de nouvelles (?) mesures, comme renouveler l’état d’urgence, alors qu’il venait de dire que la dernière loi antiterroriste le rendait inutile, et renforcer l’action militaire en Syrie et en Irak. Il est à peine 4 heures du matin. Le drame a eu lieu à 22 h 45.

Petit flou le vendredi, lorsque les premiers éléments de l’enquête laissent à penser que le terroriste n’est pas un loup solitaire, mais plutôt un barjot solitaire, sous soins psychiatriques, qui aurait décidé de « sublimer » son suicide.

Lors d’une conférence de presse, François Molins, le procureur de Paris, prend d’ailleurs des gants pour nous dire que l’attentat n’a pas été revendiqué et que l’individu abattu par la police n’était pas radicalisé et qu’il est inconnu des services de renseignement. Puis il donne son identité, laquelle avait d’ailleurs déjà fuité dans la presse.

Ce qui va permettre à l’État islamique d’effectuer les vérifications nécessaires, afin de revendiquer l’attentat. 36 heures plus tard, Mohamed Machin est ainsi devenu un soldat du califat. (Je reste persuadé qu’il faut anonymiser les terroristes pour éviter que naissent des disciples.) Continue reading

Je n’irai pas cracher sur vos tombes

Lors de son discours de Versailles, devant les cercueils de Jessica Schneider et Jean-Baptiste Salvaing, les deux fonctionnaires de police assassinés à Magnanville, François Hollande n’a pas prononcé le nom de leur meurtrier. Il a parlé de ces « barbares qui commettent des horreurs au nom d’une religion qu’ils défigurent et qu’ils dévoient ». Et d’une guerre qui sera longue…

Ecusson-dcsp-en-deuilC’était un moment fort pour les policiers, les gendarmes et tous ceux qui se trouvaient sur cette place de Versailles. De ces moments que chacun de nous a connus, où, devant le corps d’un parent, d’un ami, croyant ou non, on se laisse prendre par l’envoutement d’une cérémonie mortuaire. Hier, sur la place, devant la préfecture de Versailles, il y avait l’immobilité, longue, de celle qui oblige au recueillement ; la musique militaire, prenante, que l’on a l’impression d’entendre pour la première fois ; puis le discours du Président, juste, au début, avant de devenir plus politique. Mais peu importe, on ne l’écoute plus, les paroles ne sont qu’un bruit de fond, une sorte de mélopée qui vient renforcer l’émotion. On pense à ces amis, à ces collègues, qui ne demandaient qu’à vivre. On pense à cet enfant privé de ses parents. Puis surgit l’introspection : ses propres collègues, ses amis, sa famille, soi… C’est un moment où l’on se demande pourquoi on a choisi ce métier-là. Continue reading

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