LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Actualité (Page 38 of 71)

Fumer un joint ou conduire, il faut choisir !

Les 4 millions de fumeurs de cannabis, occasionnels ou habituels, peuvent remercier les sénateurs. Il y a trois jours, surchargés de travail, paraît-il, ils ont repoussé intermede_diogenech_editions-libres.1273904559.gifaux calendes grecques l’adoption de la Loppsi. Information démentie dès le lendemain : cette loi sera examinée à la rentrée.

À la sécurité routière, ils ont dû pousser un ouf de soulagement. Car en février dernier, lors d’un comité présidé par François Fillon, il a été décidé d’intensifier le dépistage du cannabis chez les automobilistes. Sous réserve, justement, de l’adoption de la loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, autrement dit la Loppsi.

Aujourd’hui, le contrôle de stupéfiants est obligatoire en cas d’accident mortel et facultatif en cas d’accident corporel. De plus, il est possible en cas d’infraction susceptible d’entraîner le retrait du permis de conduire ou si le comportement du conducteur laisse supposer qu’il est sous l’emprise d’une drogue.

63 500 contrôles en 2009. Chiffre qui doit rapidement augmenter avec en ligne de mire 100 000  par an. Au pays de Descartes, on aime bien les chiffres ronds.

Mais surtout, les conditions d’application doivent être modifiées.

Les contrôles seront obligatoires en cas d’accident corporel, mortel ou non, et possibles pour tous les accidents matériels. Ils seront également possibles en cas d’infraction, même bénigne, au Code de la route, ou en cas de présomption d’usage de stupéfiants. Bref, à partir du moment où un piéton devient automobiliste, le policier ou le gendarme pourra vérifier si par hasard il n’aurait pas fait tourner un pétard.
De plus, des contrôles « stupéfiants » aléatoires pourront être mis en place, comme c’est actuellement le cas en matière d’alcoolémie.

Fort opportunément, Liaisons*, le magazine de la Préfecture de police de Paris, nous rappelle comment se déroulent ces contrôles routiers. Tout repose sur un test salivaire, le Rapid Stat, dont certains toxicologues contestent pourtant la fiabilité. Il y aurait pas mal de « faux positifs » qui seraient ensuite démentis par la prise de sang. Par ailleurs, il suffirait de s’être brossé les dents ou rincé la bouche juste avant le contrôle pour éliminer les résidus de fumée de cannabis et ainsi abuser le test.

Test qu’il ne doit pas être facile d’effectuer au bord d’une route de campagne, à la lueur d’une torche électrique, par exemple.

Extrait du dossier Liaisons sur les stupéfiants.JPG


Si toutes les lignes ne sont pas roses, la vie non plus, car c’est la prise de sang. Dans ce cas, il faut au minimum 72 heures avant d’obtenir le résultat. Et si les analyses de laboratoire confirment le test salivaire, le « délinquant » devra payer les frais du laboratoire, soit une somme forfaitaire de 300 euros.

code-de la route_legifrance.1273905114.JPG

Une telle opération demande environ un quart d’heure. Et, sans faire de mauvais esprit, on peut s’interroger sur la manière de mettre en place un contrôle aléatoire…

On imagine l’embouteillage…

La voiture a longtemps été un Code pénal_stups_extrait dossier Liaisons.1273905215.JPGmoyen de s’évader, un peu de rêve…, un petit bout de liberté. Peu à peu, sans doute avec les meilleures intentions du monde, on en fait un objet maudit.

Avec ce nouveau tour de vis, n’est-on pas dans l’excès ?

Selon une estimation de 2005, il y aurait environ 230 morts par an, victimes d’un chauffard flottant dans les limbes du cannabis. Par comparaison, en 2008, 1200 personnes ont été victimes d’un conducteur qui avait bu un verre de trop.

Bon, enfin, ce que j’en dis… Là-dessus, je vais grimper dans mon vieux 4X4 pollueur, vous savez, celui qui est immatriculé en Guyane…, et prendre quelques jours de vacances. Vous en conviendrez avec moi, des vacances bien méritées.

Et même si je ne fume pas, avant de partir, je me brosserai les dents.

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* Un dossier très complet, Drogue, ennemi public n°1.
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Internet, roulette et grosse galette a été lu 7 913 fois et a suscité 16 commentaires. Mercredi 12 mai, le Conseil constitutionnel a rejeté le recours du PS et validé  la loi sur les jeux d’argent en ligne.

Internet, roulette et grosse galette

Aujourd’hui, on doit connaître les joueurs sélectionnés pour la Coupe du monde de football, mais d’autres personnages piaffent dans les starting-blocks : ceux qui attendent les jeux en ligne. Même si les choses ont pris un peu de foot-et-argent_plocteville.1273562408.gifretard, à cause de Malte, qui ne voit pas d’un bon œil lui échapper les « clandés » qui prospèrent sur son sol, c’est promis juré, avant le premier coup de sifflet de l’arbitre, les jeux seront faits. Juste deux ou trois obstacles juridiques à franchir et l’Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL), délivrera les premières licences. Pour l’instant cela concerne le poker, les paris sportifs et les paris hippiques.

Dans les coulisses, dans le monde de la finance et de la politique, on imagine les pourparlers, les négociations, le donnant, donnant…

Car, même si Charles Pasqua a été blanchi dans l’affaire du casino d’Annemasse, on sait bien que les jeux d’argent et la politique sont inséparables.

Cette masse de billets que génèrent les casinos a toujours suscité convoitises et tentations. Et comme ces entreprises « à part » ont besoin d’autorisations administratives, on imagine les magouilles… En sera-t-il de même avec les jeux virtuels ?

Si aujourd’hui la guerre commerciale est ouverte, en tout cas, la guerre des jeux n’est pas un long fleuve tranquille, loin s’en faut. Voici deux exemples, parmi tant d’autres, l’un, vieux de plusieurs dizaines d’années, l’autre, plus récent.

Dans les années 70, grandes manœuvres pour l’ouverture d’un deuxième casino à Nice, le Ruhl. Le 13° de la Côte d’Azur. Chiffre qui ne portera pas chance à tout le monde. C’est Jean-Dominique Fratoni, dit Jean-Do, qui mène la danse. Le bonhomme est ambigu. Il cultive les relations mais il n’a sans doute pas les épaules pour agir de son propre chef. Derrière, on subodore des hommes puissants…

Jean Bozi, un ancien député UDR, appuie la demande d’agrément. Or Bozi est casino-ruhl.1273562546.jpgégalement un proche de Marcel Francisci, qui est lui-même un ami d’Alexandre Sanguinetti, lequel roule dans le sillage de Roger Frey. Pour situer les personnages, les années précédentes, alors que le pays est déstabilisé par la fin de « l’Algérie française », Frey est ministre de l’Intérieur et à ses côtés Alexandre Sanguinetti recrute des gros bras dans la pègre pour lutter contre l’OAS. Il est d’ailleurs l’un des fondateurs du SAC (service d’action civique) avec Charles Pasqua et Etienne Léandri, association 1901 destinée à l’origine à soutenir la politique de De Gaulle, et téléguidée en sous-marin par Jacques Foccart.

Pour en revenir au Ruhl, Jacques Médecin, le maire de Nice, n’est pas en reste. Il veut que sa ville supplante Monaco. Il rajoute au pot et accorde même à Fratoni une réduction importante sur le montant des taxes qu’il doit régler à la commune. Tandis que son concurrent, situé à moins de trois cents mètres, Le Palais de la Méditerranée, paie plein pot.

En fait, il n’y a pas la place pour deux casinos à Nice. Rapidement, les hostilités sont ouvertes. Ainsi, en 1975, un mystérieux groupe de joueurs italiens fait pratiquement sauter la banque du Palais dans des circonstances qui n’ont jamais été vraiment élucidées.

Mais Fratoni a beau se démener, la mayonnaise ne prend pas, et malgré le renflouement d’Alain Delon, le Ruhl connaît rapidement de sérieuses difficultés financières.

Raison qui explique la tentative de prendre le contrôle du Palais de la Méditerranée, via les actions détenues par la fille de sa dirigeante, Renée le Roux. On connaît la suite: la disparition d’Agnès Le Roux qui a conduit, plus de trente ans plus tard, son amant, l’avocat Maurice Agnelet, à être condamné à vingt ans de réclusion criminelle – sans pour cela qu’on n’en sache plus sur cette affaire.

À cette époque, derrière chaque casino, on devine l’ombre de Marcel Francisci ou de son concurrent, Baptiste Andréani. Entre les deux, une ribambelle de cadavres.

Mais indiscutablement, c’est Francisi qui  porte la couronne. Jusqu’en 1981, où ses ennuis commencent avec le nouveau ministre de l’Intérieur, Gaston Defferre. Il n’en verra pas le bout. Il est tué dans le parking de son immeuble, à Paris, en janvier 82. Trois balles de 11.43, à bout touchant. Les soupçons des enquêteurs se portent sur ses anciens associés, les frères Zemour. Sans preuve. Mais il semble que d’autres ne s’embarrassent pas de ces détails: Edgard Zemour est abattu l’année suivante, à Miami, en Floride, où il s’est retiré ; et Gilbert Zemour quelques mois plus tard. Deux balles de 357 alors qu’il promenait ses quatre caniches. Et une dernière, pour la route, le canon de l’arme sous le menton.

On peut se dire, bon, tout ça c’est de l’histoire ancienne…

Alors, parlons du cercle Concorde. Cette maison de jeu de la rue Cadet, à Paris,  a obtenu une autorisation d’ouverture en novembre 2006, alors qu’à cette époque l’établissement était dans le collimateur des policiers. Ceux-ci enquêtaient (entre autres) sur un flingage qui avait eu lieu quelques mois auparavant à Marseille, à la brasserie des Marronniers. Quatorze balles, trois morts. Lorsque les enquêteurs déterminent qu’un certain Paul Lantieri pourrait être l’un des instigateurs de ce règlement de comptes, finauds, ils font le rapprochement avec le cercle Concorde. Car le bonhomme, qui possède pas mal d’établissements de toutes sortes sur l’Île de Beauté, est également propriétaire du restaurant qui jouxte le cercle de jeux. Il est arrêté en janvier 2007 et mis en examen pour association de malfaiteurs. Bizarrement, il est laissé libre. Dès lors, la PJ ne le lâche plus d’une semelle. Ce qui va permettre aux enquêteurs un sacré coup de filet dans lequel se prendront au passage un banquier suisse, un ancien capitaine de gendarmerie et un vieux de la vieille du milieu marseillais : Roland Cassone.

Pour le folklore, celui-ci est arrêté alors qu’il taille la haie de son jardin, un flingue dans la ceinture et le gilet pare-balles à portée de la main. Un rôle en or pour le regretté Paul Meurisse.

En janvier 2008, l’Express s’interrogeait : « Il reste à comprendre pourquoi Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, a autorisé l’ouverture de la maison de jeux avec à sa tête ce sulfureux attelage à l’automne 2006, et pourquoi Michèle Alliot-Marie a renouvelé cette autorisation un an après. Dans les écoutes, l’un des suspects fait allusion à un ancien ministre proche de Charles Pasqua et de Sarkozy ».

Depuis des lustres, la roulette est interdite en région parisienne, pour éviter, disait-on dans le temps, que les ouvriers n’y laissent leur paie. Aujourd’hui, le poker, boosté par des stars du showbiz et soigneusement mis en scène par la télévision, notamment Canal +, a changé la donne. Sa popularité renforce l’attrait des salles de jeux parisiennes. Businessmen et voyous s’en pourlèchent les babines.

chien-voyou1170497922.1273562632.jpgQue va-t-il se passer lorsque les jeux en ligne vont s’ouvrir légalement aux Français ?

Pour l’instant, il paraît que le combat est acharné. L’objectif est de figurer à tout prix dans le peloton de tête, quitte à perdre de l’argent au départ. Car les gains espérés sont énormes.

Mais si tous les coups sont permis – on n’en est pas encore aux coups de calibre.

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Le torchon brûle entre commissaires et magistrats a été lu 2 290 fois et a suscité 14 commentaires.

Le torchon brûle entre commissaires et magistrats

C’est tout juste si elle ne les traite pas de fainéants. Ce n’est pas la première fois que la secrétaire générale du SCPN (Syndicat des commissaires de la police nationale), Sylvie Feucher, s’en prend aux magistrats. C’est même l’un de ses dadas. Mais cette fois, dans une lettre adressée à son ministre, Brice Hortefeux, elle avance des arguments…

autruche_christian-aubry.1273237133.pngLe samedi 24 avril, un automobiliste tente vainement de se soustraire à un banal contrôle routier. Son comportement lui vaut le grand jeu. Les policiers s’aperçoivent rapidement qu’il se dissimule derrière une fausse identité pour mieux échapper à deux fiches de recherche. L’une pour une peine de douze ans de réclusion criminelle, et une autre, d’un juge d’instruction, dans une affaire de trafic de stupéfiants.

Ce qu’on appelle un beau mec !

L’OPJ tente de joindre l’un ou l’autre des magistrats indiqués sur les fiches de recherche. « Aucun des magistrats mandants, tant à la Cour d’appel de Versailles qu’à l’Instruction à Paris, n’était disponible ou ne souhaitait se déplacer pendant le week-end… », écrit Sylvie Feucher. Le substitut de procureur de Chartres décide donc d’une mesure de garde à vue.

L’homme, comme c’est son droit, sollicite alors un examen médical. Or, dans cette ville, comme dans d’autres sans doute, en raison des difficultés qu’ils ont à se faire régler leurs honoraires par la justice, aucun des médecins libéraux n’accepte de se déplacer. Il est donc conduit à l’hôpital, où il est bien difficile aux policiers d’empêcher des échanges verbaux avec ses amis qui, comme par hasard, se trouvent sur place.

A l’approche de la fin du délai de garde à vue, il faut prendre une décision. La procédure habituelle est ici inapplicable. Aussi, pour éviter tout risque d’évasion, le substitut de Chartres est d’accord pour venir sur place, mais la présence du Juge des libertés et de la détention est également nécessaire. Celui-ci refuse.

En fait, cela n’a guère d’importance, car à six heures, le dimanche matin, deux événements vont changer le cours des choses : un incendie dans un garage BMW et, peu après, une personne se présente pour déposer une plainte.
Or, pour une ville de 50 000 habitants, les effectifs du commissariat en ce dimanche 25 avril sont de sept fonctionnaires. Deux sont en patrouille de sécurisation, trois se rendent sur l’incendie, reste deux au commissariat, le chef de poste et le gardien, pour l’heure occupé à enregistrer les déclarations de l’opportun plaignant.

Aucun des deux ne se rend compte que des individus profitent de ce vide. Ils grimpent sur le toit de l’immeuble et parviennent à se faufiler jusqu’aux cellules de garde à vue. Là, sans fanfare, ils libèrent leur complice (la clé est sur la serrure) et prennent la fuite par le même chemin.

Rien vu rien entendu. Il existe bien un système vidéo, mais les vitres en plastique des cellules sont, avec le temps, devenues quasi opaques. Impossible de voir à travers.

Il subsiste quelques zones d’ombre dans cette histoire rocambolesque telle que la rapporte la représentante du SCPN. On peut se demander pourquoi la PJ n’a pas été prévenue. N’existe-t-il pas un office chargé des personnes recherchées dont l’une des missions est d’apporter une assistance aux services de police et de gendarmerie ? Et comment peut-on tolérer que les médecins refusent  de se déplacer, alors qu’ils ne peuvent légalement se dérober à une réquisition de justice ? Enfin, n’y a-t-il pas un certain embrouillamini dans les textes qui régissent les mandats de justice ?

Il en existe en effet de plusieurs sortes. Dans son courrier au vitriol, la commissaire Feucher parle de « fiches de recherche ». Or, la procédure varie selon le type de mandat:
–    Mandat de recherche : garde à vue de 24 heures
–    Mandat d’amener ou mandat d’arrêt : rétention de 24 heures.

Et, sans entrer dans les détails, il faut savoir que la marche à suivre varie selon que l’on se trouve ou non dans un rayon de 200 km autour du siège du magistrat mandant.

Mais, pour s’adapter aux circonstances, les policiers ne pouvaient-ils pas dresser une procédure de flagrant délit pour usage de faux papiers, délit de fuite, ou je ne sais quoi ?

extfrait-lettre-scpn.1273237013.JPGExtrait de la lettre du 4 mai 2010 du SCPN adressée au ministre de l’Intérieur

Il me semble que la charge contre les magistrats « qui se la coulent douce la nuit et les week-ends » est un peu exagérée. Car cette situation pointe un problème bien plus réel : la pauvreté des locaux et le manque d’effectifs, de plus en plus sensible, notamment en province, qu’il s’agisse des commissariats ou des gendarmeries.

Et la coupe sombre dans les dépenses de l’État ne permet guère d’envisager la moindre amélioration, d’autant qu’à l’Intérieur, dit-on, les caisses sont vides depuis longtemps.

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Hier, 6 mai, le SCPN a obtenu 66.2 % des voix à l’élection des représentants du personnel, et 3 des 4 sièges à la Commission administrative paritaire nationale. Le deuxième syndicat, le tout récent SICP (syndicat indépendant des commissaires de police), membre de la fédération CFDT, a donc perdu un siège.

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Un truand décoré par Sarkozy !? a été lu 41 161 fois et a suscité 54 commentaires. Quant à savoir s’il y avait réellement une cave au Bar des 3 Canards…, c’est ce que racontaient les anciens. Mais les choses sérieuses se passaient peut-être dans l’arrière-salle…

Un truand décoré par Sarkozy !?

François Marcantoni, alias Monsieur François, va être décoré de la Légion d’honneur par Nicolas Sarkozy. C’est du moins ce que nous annonce France Soir, dans une brève du 3 tintin_lepost.1273041078.jpgmai 2010. Vous me direz, rien d’original… Sauf que cette fois, le récipiendaire n’est pas n’importe qui, et la nouvelle a dû faire bondir plus d’un flic de ma génération.

Car si aujourd’hui, Marcantoni est un vieux monsieur – il aura 90 ans à la fin du mois – qui coule une retraite paisible dans sa résidence de l’ouest de la région parisienne, il n’en a pas toujours été ainsi…

En 1942, il est ouvrier artificier à l’arsenal de Toulon, et il participe au sabordage de la Flotte française. L’année suivante, il fuit le travail obligatoire (STO) et s’enrôle dans la Résistance. marcantoni_france-soir-copie.1273041392.JPGSon passé de résistant sera d’ailleurs reconnu par la suite, notamment son adhésion aux Forces françaises de l’intérieur (FFI) entre janvier 43 et mai 44 – mois où il sera interpellé par la police parisienne au volant d’une voiture volée. Sans doute pour se dédouaner, il raconte alors qu’il est en mission pour la Gestapo (après la guerre, il dira que c’était pour la Résistance). Une histoire pas très claire pour laquelle il écopera de dix mois de prison. Sa première condamnation.

Dans ses mémoires, il raconte qu’à la Libération, il s’en prend aux fortunes mal acquises, autrement dit, il se livre à un petit jeu à la mode à cette époque qui consiste à racketter les Collabos.

Puis, dans les années qui suivent, sa vie est parsemée d’arrestations, de contrôles et de petites peines de prison. Jusqu’en 1951. Année où l’un de ses amis, Leybus Schlimer, dit Léon le Juif, est arrêté par la 1ère brigade mobile pour un hold-up  à la Banque Algérienne de Paris. À l’époque, ce service de police judiciaire de la sûreté nationale est particulièrement redouté du milieu, car bien peu de truands ont su résister aux interrogatoires du groupe chargé de la répression du banditisme. On dit de ces policiers qu’ils manquaient de psychologie…

En tout cas, Léon le Juif balance Marcantoni. Lequel prendra cinq ans. Il en fera trois. Quant au beau Léon, il succombera à une overdose de plomb, une semaine après sa sortie de prison. Son assassin ne sera jamais identifié.

Courant 53, Marcantoni fait la connaissance, dans un bar de Toulon tenu par son frère, d’un jeune mataf un rien désœuvré qui revient d’Indochine : Alain Delon. Ils resteront amis. Et plus tard, devenu une star, Delon lui fera découvrir le monde du showbiz. Mais, même s’il se dit alors producteur, Marcantoni ne quitte pas le milieu du banditisme. On le dit très proche de la bande des Trois Canards. Une équipe à tiroirs spécialisée dans les braquages et le racket, et ainsi surnommée pour ses séances « gestapistes » dans la cave du bar de ce nom.

En prenant de la bouteille, le personnage devient cependant plus prudent. Et même si son nom apparaît dans des enquêtes concernant des règlements de comptes, des vols ou des histoires de fausse monnaie, il parvient le plus souvent à passer à travers les mailles du filet. Comme beaucoup de Corses, on dit aussi qu’il a été « Algérie française » et proche de l’OAS, mais il s’est toujours défendu d’avoir été une barbouze.

Dans les années 60, peu à peu, il se retire des affaires. S’il ne devient pas un parrain, dans le milieu, on le considère plus ou moins comme un sage. On le gratifie du surnom de « Commandant ».

Sa vie bascule vraiment un matin d’octobre 68, lorsqu’on retrouve le corps de Stéfan Markovic enveloppé dans une housse de matelas sur une décharge publique d’Élancourt, dans les Yvelines. Or cet homme est depuis trois ans le garde du corps d’Alain et de Nathalie Delon. Et quelques jours plus tard, les enquêteurs de la PJ de Versailles (l’ancienne 1ère brigade mobile) prennent connaissance d’une lettre du mort dans laquelle il déclare que s’il lui arrive malheur, les soupçons devront se porter sur Marcantoni et les époux Delon. Peu après, des photos circulent sous le manteau représentant des personnalités de la politique, du spectacle, des médias et autres, en pleine action lors de soirées fines. Partouzes dont Markovic est l’un des organisateurs. Et l’affaire prend une tournure vraiment politique lorsque parmi ces photos, on découvre l’épouse de Georges Pompidou, l’ancien Premier ministre qui vient d’être remercié par le général de Gaulle.

On dira par la suite qu’il s’agissait d’un montage du SDECE, le service secret français, pour déstabiliser Pompidou, devenu un concurrent du grand Charles. Le fait est qu’une fois élu président de la République, Pompidou va dissoudre ce service.

Quant à Marcantoni, il se défend de toute accusation. Il ne cède rien. Pourtant, les enquêteurs ont des billes. Ils ont effectué un travail de fourmi, notamment sur la housse de matelas qui enveloppait le corps de Markovic. En partant de plus de 800 acquéreurs de matelas Treca, ils parviennent à sept noms, sept suspects, dont Marcantoni. Sept ans plus tard, malgré un sérieux faisceau de présomptions, le procureur de Versailles, Pierre Bezio, rendra pourtant un non-lieu. On dit que le Premier ministre, Jacques Chirac, n’était pas chaud pour que cette affaire revienne à la une de l’actualité… C’était en tout cas l’avis de Me Roland Dumas, l’avocat du frère de la victime.

Va savoir.

marcantoni_france-3.1273041506.jpgFrançois Marcantoni est devenu au fil des ans un personnage charismatique. Pour avoir déjeuné avec lui il y a quelques années, alors que nous n’étions plus « aux affaires », ni lui ni moi, je dois reconnaître que le bonhomme a quelque chose d’assez fascinant, comme un mystère qui l’entoure, qu’il entretient d’ailleurs habilement. Ses dons de conteur y sont pour beaucoup.

Mais personne ne peut renier son passé. Les quinze mois au service de la France, dans les FFI, peuvent-ils effacer une vie de truand…

Désolé, Monsieur François, je crois que pour vous, « la rouge » n’est pas de mise. Et d’ailleurs, cela nuirait à votre légende.

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Quelque part une petite école… a été lu 8 546 fois et a suscité 22 commentaires.

Les détectives privés sont à la fête

Nestor Burma peut s’en réjouir (ou le regretter), mais les détectives, ou plus exactement les « agents privés de recherches », vont perdre un peu de leur poésie et de leur folklore. Loin de la fiction, cela fait des années la-trilogie-noire-de-leo-malet-par-daoudi-et-bonifay.1272612557.jpgqu’ils attendent que leur profession s’appuie sur des bases solides. Aujourd’hui, cela prend tournure.

En effet, dans une circulaire du 31 mars 2010, adressée aux préfets, le ministre de l’Intérieur explique en long et en large les applications qui résultent d’une foultitude de lois, décrets et circulaires qui, depuis 2003, tentent d’encadrer l’ensemble de l’activité liée aux « recherches privées ».

Un texte assez rébarbatif qui peut se résumer ainsi : Pour exercer la profession de détective, il faut dès à présent solliciter du préfet un agrément, lequel est soumis à certaines conditions, notamment un casier judiciaire vierge (n° 2) et une enquête de moralité. Pour celle-ci, l’administration est autorisée à consulter les fichiers de police et de gendarmerie (STIC et JUDEX) afin de vérifier « l’absence de mise en cause ». La circulaire insiste toutefois sur la nécessité d’interpréter les données figurant dans ces fichiers, notamment en tenant compte de l’ancienneté des faits mentionnés.

Une manière de reconnaître que ces fichiers n’ont toujours pas été expurgés des mentions obsolètes…

Le préfet doit en outre vérifier la qualification et l’aptitude professionnelles du postulant. Il peut s’agir d’un titre ou d’un certificat, d’une expérience antérieure dans le privé ou dans l’administration (policiers, gendarmes, militaires et certains fonctionnaires du ministère de la Défense).

Pour les policiers et les gendarmes qui ont quitté leurs fonctions depuis moins de cinq ans, ils doivent en outre obtenir une autorisation du ministre de l’Intérieur.

Une fois ces formalités accomplies, le préfet pourra délivrer une attestation valant aptitude professionnelle au plan national. Cette réglementation est d’ailleurs valable pour tous les ressortissants de l’Union.

Il s’agit là de mon interprétation de cette circulaire. On peut la lire en intégralité sur La Gazette des enquêteurs et détectives privés.

Pour l’heure, il semble que l’administration hésite encore à attribuer une carte professionnelle officielle aux détectives privés. Ce sera sans doute l’étape suivante. Car la sécurité privée va prendre une place de plus en plus importante dans notre société. Ainsi, lors du premier sommet européen de la sécurité privée qui s’est tenu en décembre 2008, il a été rappelé que ce secteur représente aujourd’hui en Europe un chiffre d’affaires de 15 milliards d’euros. Et Nicolas Sarkozy, alors président de l’Union, a prêché pour « coproduire des solutions public-privé de sécurité ».

Ce que certains souhaitent, d’autres, comme moi, le regrettent. Un rien de nostalgie, peut-être…

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Le BB sous-préfet est né a été lu 1 363 fois et a suscité 13 commentaires.

Le BB sous-préfet est né

Le 23 avril, c’était ma fête, mais c’est Bruno Beschizza qui devait être aux anges en lisant ces quelques mots : « Par décret du président de la République  (…)  M. Bruno Beschizza, commandant de police fonctionnel, est nommé sous-préfet hors  cadre. »

bebe-dans-la-lune_infobebes.1272438914.gifEst-il fier de lui, le BB ? Je n’en suis pas sûr. Tant il est difficile à supporter le jugement de ses pairs !… Mais que lui reproche-t-on au juste ?

Même si dans certaines critiques, il y a un zeste de jalousie, ce qui ne passe pas, mais pas du tout, c’est le mélange des genres. Pour prendre une comparaison, c’est un peu comme si François Chérèque acceptait un poste de ministre…

Car c’est bien de ça qu’il s’agit, le mélange des genres. Parachuté dans la campagne des Régionales par le président de la République alors qu’il était secrétaire général du syndicat Synergie Police, on s’aperçoit aujourd’hui, une fois les élections passées, que de par son statut, il ne peut pas siéger au Conseil régional. Et, pour que cette aventure ne lui coûte pas d’argent (4 000 € dans la police contre 2 000 au Conseil régional), on le bombarde sous-préfet.

En fait, Beschizza est victime du système Sarkozy : on fait les choses d’abord, et l’on s’arrange après.

Cela dit, il n’est pas le premier policier à faire une carrière grâce  à l’entregent, l’intrigue, le savoir-faire, la réclame (Villiers de l’Isle-Adam, 1883), mais jusqu’à présent, les pistonnés restaient dans la « maison » (ce qui n’est pas le cas pour certains magistrats qui aspirent volontiers à  la députation). Le plus célèbre des flics-chouchous  n’est pas Frédéric Péchenard, comme le disent certaines mauvaises langues, car il était commissaire de police bien avant que son ami d’enfance ne soit ministre de l’Intérieur, mais Raymond Sasia. Garde du corps du général de Gaulle à Londres, il a traversé en un éclair toute la hiérarchie policière sans jamais passer un concours. On lui doit la méthode de tir instinctif, dite méthode Sasia, qui consistait, lucky-luke.1272439052.jpgau coup de sifflet, à dégainer et à vider son chargeur ou son barillet dans le laps de temps le plus court possible. Un geste qui devait devenir un automatisme. Les anciens se souviennent de ces heures d’entraînement… On appelait ça faire sa prière.

En attendant, BB a trahi ses troupes. Il a torpillé son  syndicat. Un conseil national doit se tenir la semaine prochaine. L’ambiance  risque d’être houleuse.

Le mot de la fin revient au secrétaire général du SNOP, syndicat majoritaire des officiers de police : « Cette nomination (…) jette le discrédit sur le syndicalisme policier ».

À un moment où ça marmonne pas mal dans les rangs, c’était peut-être le but recherché.

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Sofremi, kesako ? a été lu 15 927 fois et a suscité 14 commentaires.

Sofremi, kesako ?

Le procès de Charles Pasqua met en lumière une drôle de petite entreprise, la société française d’exportation du ministère de l’Intérieur.

lombre_agoravox_jack-mandon.jpgDe quoi s’agit-il ?

D’une société privée dont le capital social était réparti entre quelques grandes entreprises françaises, et, à sa création, le ministère de l’Intérieur. Majoritaire avec 35% des actions.

Une structure originale, du moins en France. Cela fait penser à ces agences américaines, comme on en voit dans les films, qui se chargent des coups tordus que ne peuvent se permettre les services officiels.

Mais, bien entendu, cela n’a rien à voir.

La Sofremi a été voulue par Pierre Joxe, en 1986, pour effectuer le commerce avec d’autres États de matériels de police dits sensibles. Ce qui se pratiquait déjà, à petite échelle, mais via un circuit tortueux allant d’un ministère à l’autre.

Y avait-il en arrière plan l’idée de récupérer des commissions occultes pour financer le Parti socialiste ? Je ne sais pas.

De toute façon, Pierre Joxe n’aura pas le temps de juger du bien-fondé de sa décision, car peu après, c’est la première cohabitation. Charles Pasqua lui succède.

On peut penser que les instigateurs, ceux qui ont poussé à la création de la Sofremi, se trouvaient à l’époque en fonction au service de coopération technique internationale de police, le SCTIP.

Ce service a vu le jour en 1961, alors que la France avait entamé son processus de décolonisation en Afrique. Son objectif était de fournir, aux jeunes États qui le souhaitaient, une assistance technique et humaine  pour les aider à mettre en place une force de police.

Dans les années 80, le SCTIP a pris de l’extension et son horizon s’est élargi à d’autres pays d’Afrique et même à d’autres continents (aujourd’hui, il compte une centaine d’implantations de par le monde).

Or, les policiers et les gendarmes du SCTIP sont bien placés pour connaître les besoins en matériel des pays où ils sont en fonction. Et en plus, souvent, ils ont les bons contacts. Mais, en aval, il faut des commerciaux pour assurer le marchandising.

Quant on parle de matériel de police, on pense aussi bien aux moyens de transmission, de surveillance, d’écoutes,… qu’aux équipements de maintien de l’ordre et même à l’armement. Du moins l’armement individuel. D’ailleurs, en 1995, la Sofremi récupère Milipol, le salon international de la sécurité intérieure des États, qui désormais se tiendra sous l’égide du ministre de l’Intérieur.

Ce qui est encore le cas aujourd’hui. Les années impaires à paris, les années paires au Qatar.

Le salon de novembre 2009 a été inauguré par M. Brice Hortefeux. L’accent était mis sur des matériels de pointe « des forces de sécurité intérieure » bisounours_en_guerre_aufeminblog.jpgdont le catalogue allait des moyens de gestion de risque de pollution maritime, au déminage, moyens de police scientifique, terminaux et caméras embarqués, système de lecture automatisée des plaques d’immatriculation, géolocalisation, drone ELSA, etc.

Pour en revenir à nos moutons, lorsque Mitterrand entame son deuxième septennat, Joxe retrouve la place Beauvau. Maroquin qu’il cédera de nouveau à Pasqua, 2 ans ½ plus tard.

Dans Le Monde du 20 avril 2010, Pascale Robert-Diard écrit que l’arrêt qui renvoie Charles Pasqua devant la Cour de justice de la République souligne « que parmi les raisons avancées à l’intérêt immédiat de Charles Pasqua pour la Sofremi et à sa décision d’y placer, dès sa nomination, de nouveaux dirigeants, figure le fait que cette société servait auparavant de « pompe à finances pour le Parti socialiste » ».

Remarque intéressante.

Pendant ces années-là, la Sofremi tourne à plein régime, sans qu’on sache trop ce qui s’y passe.

Pour les policiers, c’est un truc à part, surtout depuis que cette société a quitté l’annexe du ministère de la rue Nélaton (là où se trouvait le siège de la DST), pour s’installer dans des locaux privés du VIII° arrondissement.

Un panier de crabes, disaient certains, où se côtoyaient l’argent, la politique et les barbouzes. Un mélange toujours détonant. Ce qui n’a pas empêché des retraités des deux Grandes maisons de servir d’intermédiaires ou de rabatteur d’affaires. Après tout, rien de plus normal pour d’anciens policiers et gendarmes que de travailler pour une boîte qui dépend du ministère de l’Intérieur !

En tout cas, les affaires traitées devaient être juteuses, car le remplaçant de Pasqua, au mois de mai 1995, Jean-Louis Debré, même s’il prend ses distances et réduit nettement son activité, se garde bien de la dissoudre. Et il ne tient pas compte des mises en garde qui lui parviennent, sous la forme de deux rapports distincts, qui pointent de nombreuses anomalies de fonctionnement.

La vérité, c’est que même dans les cabinets ministériels, on ne connaissait pas trop la couverture politique de cette entreprise de quatre sous.  Et dans le doute…

En 1997, Jean-Pierre Chevènement prend moins de précaution. Dorénavant, on ne paiera plus les intermédiaires, décrète-t-il. Donc, plus de commissions.

La Sofremi était déjà en perte de vitesse. C’est son arrêt de mort. Vingt millions de francs de pertes en 1998. Il faudra attendre les années 2000, et la mise en examen de plusieurs de ses anciens cadres, pour que l’État cède, enfin, sa participation dans cette société, qui redevient alors une entreprise comme une autre – ou presque.

Mais, il devait y avoir comme un rire_bondyblog.1272180742.pngvide, car l’année suivante, le ministère de l’Intérieur a créé sa petite soeur, CIVIPOL Conseil.

Heureusement, Pasqua a pris sa retraite.

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Sur ce sujet, on peut lire l’article du Point de janvier 2007 et celui de L’Express d’avril 2001.
Le dessin du haut de page provient d’un article (Vote sur la peur de l’ombre ) de Jack Mandon, sur le site Agoravox.
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On a crotté le drapeau français a été lu 4 306 fois et a suscité 36 commentaires. Sur un tel sujet, je m’attendais à me faire écharper, mais non, pas trop finalement. Le plus gênant dans cette histoire, me semble-t-il, c’est l’amalgame entre la politique et le drapeau. Car le drapeau français n’est l’étendard d’aucun parti, ni de droite ni de gauche.

On a crotté le drapeau français !

On l’a déjà sifflé, piétiné, brûlé, déchiré, mais c’est sans doute la première fois qu’on s’essuie le derrière avec.

photo-concours-de-nice2.1271868627.jpgCe drapeau bleu, blanc, rouge, dont nous, Français, avons parfois tendance à nous moquer, représente pourtant quelque chose d’important. C’est l’emblème de notre pays et il est l’image de notre histoire sur plus de deux siècles. Et nous avons tort de ne pas le considérer avec plus de respect – et surtout d’en faire un symbole politique.

Car il s’agit bien de cela.

Comment comprendre autrement que le jury d’un concours organisé par la Fnac de Nice prime, dans la catégorie « politiquement incorrect », une photo sur laquelle un homme se torche avec le drapeau français ?
Comment le responsable de ce magasin, qui se veut une référence culturelle, a-t-il pu laisser passer ça ? Assailli de réclamations, il a finalement pris la décision de retirer ladite photo de la liste des lauréats, avec l’accord du photographe, précise-t-il. Un peu tard. Quant à la ministre de la Justice, elle vient enfin de réagir en assurant que des poursuites seraient engagées. Un peu tard aussi.
Mais des poursuites contre qui ?

L’auteur de la photo, l’homme qui baisse son froc, le jury du concours, le dirigeant du magasin de Nice ou le grand patron de la Fnac ?

Pour mémoire, la Fnac fait aujourd’hui partie du groupe PPR, dirigé par François Pinault, lequel, en avril 2007, a été promu commandeur de la Légion d’honneur…

Je ne sais pas si l’article 433-5-1 du Code pénal (outrage à l’emblème national) s’applique à ce cas d’espèce, mais peu importe : il s’agit d’une responsabilité morale.

Il est quand même troublant de noter la différence de traitement entre le pataquès qui a suivi les propos tenus le 6 mars sur Canal+ par M. Eric Zemmour, et le silence assourdissant qui a suivi cet outrage au drapeau français commis douze jours plus tard.

Je sais, ça n’a rien à voir, mais j’avais envie de faire claquer le drapeau.

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Un nom sur une porte : mémorial pour un flic a été lu 1 901 fois et a suscité 25 commentaires.

Un nom sur une porte : mémorial pour un flic

Il s’appelait Francis Violleau. Le préfet de police de Paris vient d’inaugurer une nouvelle salle qui porte son nom, dans les locaux des compagnies de circulation. Personne ne le connaît, son histoire est si lointaine. La voici…

avis-de-recherche_spiegelde.1271576606.jpgCe jour du mois d’août 1981, lui et son collègue règlent la circulation dans le quartier de Montparnasse. Une moto de petite cylindrée, genre cyclomoteur, grille un feu rouge. Violleau s’époumone dans son sifflet. Sans résultat. L’engin poursuit sa course. Et en plus le pilote ne porte pas de casque ! Dans le cas d’une voiture, il aurait sans doute relevé le numéro, ce que l’on fait généralement dans ce cas. Et parfois même, lorsqu’ils n’ont pas eu le temps de le noter, les policiers font semblant, pour sauver la face, pour que les badauds soient persuadés que le chauffard ne s’en sortira pas à si bon compte. Mais là, pas de plaque minéralogique… Alors, les deux gardiens de la paix enfourchent leur vélomoteur et se lancent à la poursuite du contrevenant. Le collègue de Violleau fait une chute. Pas de bobo, mais il perd toute chance de recoller à la filature qui s’engage dans les rues de la capitale.

Mouais, je sais,  pas de gyrophare, pas de grincement de pneus, pas de deux-tons assourdissants. On est loin des films d’Olivier Marchal : deux vélomoteurs qui se tirent la bourre à, combien… 30, 40 km à l’heure ! Les deux engins remontent le boulevard Raspail à contre-sens.

Au bout d’un moment, le motocycliste est persuadé d’avoir semé son poursuivant. Il rejoint son garage, au fond d’une impasse. Soudain, le policier surgit. On imagine la scène. Il descend de son deux-roues, le cale contre un mur, et, tout en restant sur le qui-vive, il se dirige d’un pas assuré vers le fautif. Ne représente-t-il pas la loi ! On peut même penser qu’il sort déjà de sa poche son carnet à souches…

Surprise ! Le motard est une femme. Elle a son âge, à peu près. Elle n’est pas vilaine. C’est peut-être ce qui le déconcentre, lui fait baisser la garde. Le rend moins méfiant. Il arrive à sa hauteur. Sans doute lui demande-t-il ses papiers. Elle dézippe son blouson… Une arme jaillit. Il porte la main à la crosse de son 357. Il n’a pas le temps de finir son geste. Une balle lui traverse la gorge et vient s’écraser contre la 7e vertèbre cervicale.

« Quand pourrai-je enfin me lever ? » demande-t-il à Yolaine, son épouse, quelques semaines plus tard.  « Il faut le lui dire », lui souffle le médecin. Elle ne sait pas comment faire. Ni comment annoncer à ses trois enfants, dont le plus âgé a dix ans : votre papa est paralysé des quatre membres. Il est tétraplégique.

Après deux années dans un centre de réadaptation, contre l’avis du corps médical, Yolaine décide de ramener son mari à la maison. Mais c’est un travail de tous les instants, le jour, la nuit… Il faut le nourrir, le laver, lui prodiguer des soins, le retourner dans son lit… Au bout de quelques mois, elle craque. Une dépression. Elle est placée en clinique.

Quant à Francis Violleau, il atterrit dans un foyer pour personnes handicapées. Où il est mort en 2000, à l’âge de 54 ans, après avoir passé presque vingt ans de sa vie, parfaitement conscient et lucide, mais incapable de bouger, si ce n’est le bout des doigts, et de tenir une conversation de plus de quelques mots.

Officiellement, il n’est pas mort en service, pourtant…

Son « assassin » se nomme Inge Viett. Elle est membre de la RAF (Fraction armée rouge), ce groupe terroriste qui à l’époque cherche à déstabiliser l’Allemagne de l’ouest. Recherchée, elle se réfugie en RDA, où la Stasi, la police secrète de l’Allemagne de l’est, lui fournit une nouvelle identité. Avec  plusieurs de ses complices de la RAF, elle va y mener une vie pépère, poursuivant à distance son combat destructeur. La chute du mur inge-viett_bildde.jpgde Berlin lui sera fatale. Elle est arrêtée en 1990. Condamnée à treize ans de prison, elle est libérée à mi-peine. Derrière les barreaux, elle a écrit son autobiographie, publiée en Allemagne sous le titre Nie war ich furchtloser  (Je n’ai jamais été sans peur*).

Répondant pour l’occasion à une interview de Libération, elle a déclaré : « Je ne comprends pas pourquoi ce policier a voulu sortir son arme alors que je le braquais… Je crois qu’il ne m’a pas prise au sérieux, parce que j’étais une femme. »

Pas un mot de remords, aucun regret. Des années plus tard, elle ne comprend toujours pas…

Que peut-on dire de cette ex-terroriste de 66 ans qui vit probablement aujourd’hui de la retraite que lui verse l’Allemagne réunifiée ? Rien – même pas qu’elle a mal vieilli.

________________________________ Cette histoire, je l’ai reconstituée bribe par bribe, surtout à l’aide de documents allemands, en m’efforçant d’être au plus près de la vérité. Il y a peut-être des imprécisions, que les proches de Francis Violleau me pardonnent.
* Si j’en crois certains commentaires, la signification pourrait être inversée. Le journaliste de Libé, dont l’article est en lien, avait opté pour Jamais je n’ai eu aussi peu peur. Mais, entre nous, ce n’est pas le sujet.

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Des rumeurs du micro…cosme aux écoutes téléphoniques a été lu 11 605 fois et a suscité 18 commentaires. Pour ceux qui s’interrogent sur le fonctionnement et la technique des téléphones portables, on peut lire Principes de base du fonctionnement du réseau GSM, de Cédric Demoulin et Marc Van Droogenbroeck.

Des rumeurs du micro… cosme aux écoutes téléphoniques

Dans cette affaire dite des « fausses rumeurs » lancée par on ne sait trop qui et relayée par on sait qui mais sans savoir trop pourquoi, à la réflexion, un seul élément vaut le coup qu’on s’y attarde : Mme Dati a-t-elle fait ou non l’objet d’une écoute téléphonique ?

grandes-oreilles_film-la-legende-de-despereaux.1271316597.jpgBernard Squarcini, le patron de la DCRI, a annoncé clairement les choses : c’est non ! Son service a effectivement effectué une enquête mais il n’a pas été fait usage  d’écoutes téléphoniques, ni sur ladite dame ni sur personne.

Pour les non-initiés, il existe trois sortes d’écoutes téléphoniques : les écoutes administratives, les écoutes judiciaires et les écoutes sauvages.

Les premières sont réservées à certains services de police, gendarmerie, douanes… Chacun de ces services disposant d’un quota. Du temps de Mitterrand, la cellule élyséenne avait le sien. Les « productions » sont classifiées et ne peuvent être utilisées en justice. Pour cela, il faut utiliser les écoutes judiciaires.  Elles sont ordonnées soit par le juge d’instruction, soit, depuis la loi Perben II, par le procureur, via le juge de la détention et des libertés. Les autres, peut-être les plus nombreuses, ce sont les écoutes sauvages. La technique permet aujourd’hui des tas de choses, comme piéger un téléphone portable, ou le transformer en micro d’ambiance. Mais le top, c’est la réception en direct, par voie hertzienne, sans passer par l’opérateur. Donc, sans laisser de trace.  Pour cela, il suffit d’une valise de type « apériodique » qui permet de détecter tous les téléphones portables dans un rayon de plusieurs centaines de mètres.

Combien existe-t-il d’écoutes ? Inutile d’avancer un chiffre, il serait faux. Mais en fait, tout le monde est écouté, puisque la loi oblige les fournisseurs de réseaux à conserver la trace des communications pendant un an. On est donc écoutés par défaut.

En réalité, l’écoute des conversations est devenue accessoire. Il est plus important d’enregistrer un carnet d’adresses, de savoir qui appelle qui, à quelle fréquence, de quel endroit ; ou de détecter d’un clic de souris, toutes les personnes qui se trouvent à proximité de telle autre. Et tout cela peut aujourd’hui se faire de façon quasi automatique. On envisage pour demain – si ce n’est déjà fait –  l’enregistrement de toutes ces données d’une façon systématique. Aucune atteinte à la vie privée, nous dira-t-on, car ces données ne seraient utilisées qu’en cas de besoin.

Il y a un aspect positif à cette histoire de « petits clapotis ». Puisque la DCRI a été chargée d’effectuer des recherches sur l’origine de ces rumeurs, cela peut vouloir dire, a contrario, qu’il n’existe pas auprès du président de la République un service top secret capable de le faire…

Donc, pas de « bad » brigade au Château, comme cela était le cas à d’autres époques. Une bonne chose pour la démocratie.

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Le poisson d’avril de MAM a été lu 3 713 fois et a suscité 9 commentaires.
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