LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Les Irlandais de Vincennes

Après l’attentat de la rue des Rosiers, Mitterrand saisit l’occasion de justifier la création de sa cellule antiterroriste. C’est le début d’une mélasse «politico-gendarmesque», qui a transformé le palais de l’Elysée en Cour des miracles, nous rappelant les plus mauvais aspects de la monarchie.

Nous sommes le 9 août 1982. Il est un peu plus de 13 heures. La foule se presse dans le restaurant Goldenberg, au centre du vieux quartier juif, à Paris. Un homme lance une grenade à l’intérieur de l’établissement. C’est la panique. Mais ce n’est pas fini. Un commando de quatre ou cinq hommes descend la rue des Rosiers en tirant dans la foule. L’attentat fait six morts et vingt-deux blessés. Il n’y aura aucune revendication. Les soupçons se portent sur un groupe palestinien dissident de l’OLP.

Mais, quinze jours plus tard, la cellule antiterroriste interpelle les auteurs de cet attentat. Il s’agit de nationalistes irlandais. C’est du moins ce qu’annonce la presse, suite au communiqué de l’Elysée.

Tout est bidon.prouteau_barril_photo-paris-match.1173876118.jpg

Se fiant aux informations d’un indic, que gendarmes, douaniers et policiers, connaissent de longue date, le capitaine Paul Barril, et ses hommes de la cellule, investissent l’appartement d’un ressortissant irlandais, un certain Michael Plunkett, rue Diderot, à Vincennes. Ils espèrent y découvrir armes et explosifs. Ils font chou blanc. Mais déjà le succès est claironné. Prouteau, le chef de la cellule est en vacances. Barril, son adjoint, lui a rendu compte par téléphone, et Prouteau a renseigné Mitterrand. Tout le monde jubile, tandis que les autres services de police, tenus à l’écart, sont pour le moins dubitatifs. Ils ont raison. Car l’affaire est dans l’affaire. Pour ne pas reconnaître qu’il a chanté victoire trop vite, Barril dissimule des armes dans l’appartement de Plunkett. Il s’aperçoit alors, mais un peu tard, qu’il n’est pas officier de police judiciaire, donc juridiquement non compétent pour effectuer la perquisition. Il fait appel à son collègue, le capitaine Jean-michel Beau, tout nouveau promu à la tête de la section de Paris. Ce dernier est en confiance, à la différence du commissaire P., qui lui a décliné la proposition, il prend en charge la procédure. Mais il est arrivé après la bagarre, et il ne connaît rien des faits. Certes, ce jour-là, il a commis une grave irrégularité, suffisante pour carboniser le dossier, mais ce n’est pas moi qui lui jetterais la pierre. Il m’est arrivé de faire de même, pour éviter des ennuis à des collègues. Les trois Irlandais de Vincennes, feront neuf mois de détention pour rien – pour rien, du moins sur le plan du droit.

Lorsqu’il a fallu rechercher les responsables, Barril s’est retranché derrière Prouteau, et Prouteau, derrière le fait qu’il était en vacances. Seul Mitterrand a assuré. Il a dû se dire que cela ne ferait que pigmenter son auréole, et ajouter un mystère à sa légende.

Quant à Jean-Michel Beau, il a été jugé, et condamné. Il a payé. C’est normal. Mais ce qui l’est moins, c’est la pression qu’il a subie. On a tenté de le juguler. Il a été surveillé,la-verite-de-jack-palmer-par-petillon.1173876606.jpg pressuré, mis sur écoutes, lâché par sa hiérarchie, et peut-être par ses amis… Et depuis plus de vingt ans, il se bat pour retrouver un peu de son honneur perdu.

Mission accomplie. La cour d’appel de Paris, ce mardi 13 mars 2007, a reconnu qu’il avait été placé sous écoute par la cellule de l’Elysée. Elle lui a octroyé des dédommagements et, surtout, elle a intimé aux protagonistes l’obligation de publier un communiqué dans deux journaux différents.

Jean-Michel Beau m’écrivait, il y a deux jours : « Je souffre le martyre depuis 24 ans et je ne veux pas mourir sans que tout soit au clair ».

Longue vie, mon colonel.

5 Comments

  1. DURAND

    Aller sur Google et taper Le gendarme durand denonce

    pour prendre connaissance des réalités concernant l’Affaire des Irlandais et celle des Ecoutes de l’Elysée.

    Y sont dénoncées une propagande et une imposture monstrueuses, un véritable déni GENDARMO-MEDIATICO-POLITICO-JUDICIAIRE. Cela par le témoin principal des faits.

  2. Durand

    En octobre 2011 vient de paraître un livre ayant pour titre « L’INQUISITION MEDIATIQUE » aux éditions DUALPHA. Son signataire, ancien grand reporter au Figaro, y révèle ce qu’est trop souvent la désinformation opérée par la presse.

    En particulier, il relate la manière dont lui et ses confrères ont été instrumentalisés par Jean-Michel Beau, le bâtisseur d’une légende voulant qu’il soit considéré comme une victime du mitterrandisme et « bénéficiaire » d’une récompense nationale.

  3. Durand

    Voir sur Google « Le gendarme Durand dénonce » pour connaître les dessous de l’Affaire des Irlandais de Vincennes et ses conséquences.
    Témoignages, analyses et mise au point crédibles et édifiantes !

  4. film streaming

    Ce post est très pertinant à mon gout, c’est vraiment une réussite, bonne continuation.

  5. joigny

    salut jadore la police

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