Si l’insécurité n’est pas le débat majeur des élections municipales, à quelques jours du scrutin, il n’est peut-être pas inutile de revenir sur les pouvoirs de police du maire et de sa police municipale. Alors que Manuel Valls revendique le titre de premier flic de France, le maire peut-il dire de même dans les limites de sa commune ?
Et le souhaite-t-il ?
Le maire, officier de police judiciaire – En tant qu’officier de police judiciaire, le maire peut recevoir les plaintes et les dénonciations, constater des faits par procès-verbal, arrêter des suspects lors d’un flagrant délit, les placer en garde à vue, faire des perquisitions, des saisies… Mais il doit également en informer le procureur de la République, lequel va probablement le sermonner et lui conseiller gentiment de passer à la main à des professionnels.
Car si le maire et ses adjoints sont OPJ de droit (art. 16-1 du CPP), c’est une qualité tombée en désuétude. Cette prérogative originale et révolutionnaire ne fait plus recette. Et peu de maires la revendiquent. Pourtant, si l’on remonte le temps…
On imagine assez mal, après les Municipales, le préfet de police remettre ses pouvoirs au maire de Paris… Et cela malgré les coups d’épingle de la gauche contre son autocratie – du moins lorsqu’elle était dans l’opposition. C’est pourtant grosso modo ce qui s’est passé en juillet 1789. Puis, peu à peu, ce sont toutes les municipalités qui ont pris en charge les fonctions de sûreté générale. Et les commissaires de police, qui étaient alors des élus, ont accumulé police municipale, police criminelle et maintien de l’ordre public. Tandis que dans la pagaille postrévolutionnaire, depuis la capitale, le ministère de l’Intérieur, le ministère de la défense puis le ministère de la police générale, tentaient vainement d’organiser une police cohérente et forte pour étouffer le vent libertaire qui soufflait alors sur la France. Heureusement pour nos ancêtres révolutionnaires, à cette époque, les grands de ce monde ne s’occupaient guère de géopolitique… Après le coup d’État du 18 brumaire, Bonaparte prend les choses en main. À Paris, il met sur pied une préfecture puissante et nomme dans toutes les villes de plus de 5 000 habitants des commissaires de police placés sous les ordres du préfet. Les maires rentrent dans le rang et perdent une grande partie de leur autonomie en matière de police. Toutefois, lors de l’adoption du code d’instruction criminelle, en 1808, ils sont expressément désignés comme pouvant exercer la police judiciaire. Et dans la loi municipale du 5 avril 1884 (130 ans !) qui fonde le régime communal républicain tel qu’on le connaît, il n’est pas fait référence au code d’instruction criminelle. Le maire conserve donc sa qualité d’OPJ. Le Code de procédure pénale de 1957 confirme ce statut, tant pour lui que pour ses adjoints.
Comme un souvenir, il reste aux maires aujourd’hui ce titre d’officier de police judiciaire. Une qualité qui n’est pas utilisée et qui ne leur donne même pas le droit de porter une arme… Heureusement, ils disposent de bien d’autres pouvoirs, lesquels leurs permettent d’être efficaces sans utiliser ni le titre ni le flingue.
Les pouvoirs de police du maire – Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du préfet, « de la police municipale, de la police rurale et des actes de l’État qui y sont relatifs » (art. L2112-1 du code général des collectivités territoriales) et il concourt à la prévention de la délinquance. À ce titre, il est en relation permanente avec les responsables locaux de la police et de la gendarmerie. C’est généralement l’un de ses adjoints qui le représente dans les diverses et nombreuses réunions autour de représentants de la préfecture, du parquet, et des autorités locales de police et de gendarmerie.
Car, depuis des années, le pouvoir central cherche à impliquer de plus en plus les élus locaux dans la lutte contre l’insécurité. Mais, dans le même temps, le ministre de l’Intérieur veut garder la main. On assiste donc à une sorte de pas de deux, entre bonnes intentions et reculades. Ce qui place souvent les chefs de service, policiers ou gendarmes, dans des situations inconfortables, coincés entre les sollicitations locales et les instructions parisiennes. Car leur autonomie à agir frôle le zéro. Nous sommes dans un système centralisé et on y reste. Pourtant, il y a des choses à faire. Émilie Thérouin, qui est adjointe au maire d’Amiens, chargée de la sécurité et de la prévention, regrette un manque de confiance : « Avec une plus grande latitude à agir, nous pourrions faire plus de choses. Les élus locaux sont pourtant assez volontaires en matière de prévention et jouent un rôle important en matière de sécurité ne serait-ce qu’en tant qu’employeur ou qu’aménageur. Ce qu’il nous faut, ce ne sont pas des donneurs d’ordres, mais des véritables partenaires. Lorsque les maires ont un problème à résoudre, ils pourraient avoir un interlocuteur en préfecture ou au ministère de l’Intérieur. » Il est quand même étonnant que Manuel Valls, qui a été un maire actif en matière de sécurité, n’ait pas mis en place un bureau à l’écoute des municipalités. Mais y a-t-il, Place Beauvau, des fonctionnaires qui connaissent les problèmes d’Amiens ou de Carpentras ?
Là où les services communaux pourraient être le plus efficaces, c’est en matière de prévention. Or, si j’ai bien compris, il est fini le temps où l’on critiquait les flics qui jouaient au foot avec les ados. Mais qu’a-t-on fait depuis cette époque ? « L’administration territoriale comprend une filière technique, une filière sociale, une filière animation, police municipale…, mais il n’existe aucune filière sécurité prévention. La fonction publique territoriale pourrait évoluer en ce sens et reconnaître ces nouveaux métiers : médiateurs, opérateurs vidéo, ASVP… », indique Émilie Thérouin. Et pourtant la fonction publique territoriale revendique 1,7 million d’agents répartis en 250 métiers « de terrain ».
Le maire dispose également de nombreux pouvoirs de police spéciale qui touchent au plus près la vie de tous les jours : circulation, stationnement, urbanisme, animaux dangereux, débits de boissons, santé publique, étrangers…
La police municipale – La décision de créer une police municipale appartient au conseil municipal, mais une fois celle-ci en place, le maire n’en fait pas ce qu’il veut. Si son autorité ne fait aucun doute dans les missions liées à son mandat, « le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques », il y a d’autres domaines où l’action des agents de la police municipale lui échappe peu ou prou.
Ainsi, c’est le code des communes qui spécifie la tenue, l’équipement, la carte professionnelle… pour qu’il y ait à la fois une unité nationale et en même temps une différenciation avec la police nationale. (Il faut avouer que sur ce dernier point, le résultat n’est pas évident.) En matière d’armement, c’est le maire qui détermine si ses policiers doivent être armés ou non, mais l’autorisation de porter une arme est encadrée par le type de missions et par la nécessité d’avoir signé une convention de coordination (avec les services de l’État). Et c’est le préfet qui décide avec l’accord du procureur de la République.
Les polices municipales ont explosé ces dernières décennies au point que l’on parle aujourd’hui de « la » police municipale. Pourtant, il me semble important que ses agents ne deviennent pas une force de frappe qui viendrait combler les vides dans les effectifs de la police et de gendarmerie nationales. Ce qui serait le moyen de nous faire payer deux fois pour assurer notre sécurité. Ces policiers doivent au contraire conserver leur singularité et constituer une police rassurante au service de la population d’une ville.
Mais tous les maires ne le voient pas ainsi. De l’un à l’autre, l’orientation donnée à la police municipale peut être différente. Les uns souhaitent une action répressive orientée contre la petite délinquance ; tandis que d’autres envisagent plutôt une police d’assistance, à l’écoute des administrés, prompt à intervenir en cas de problèmes et dont la fonction judiciaire ne serait qu’occasionnelle.
Les missions de la police municipale – Pour assurer leurs missions, les agents de la police municipale sont investis de pouvoir de police administrative et judiciaire. Ils sont chargés d’assurer l’exécution des arrêtés du maire et éventuellement de dresser des procès-verbaux. Il en est de même pour certaines infractions au code de la route et des contraventions dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État. Ils peuvent également constater le délit de « hall d’immeuble » (art. L. 126-3 du code de la construction et de l’habitation). Mais sur le terrain la différence entre police administrative et police judiciaire est ténue. Le maire (ou le préfet) peut, par exemple, prendre des arrêtés interdisant la circulation et le stationnement des personnes prostituées. Et, sur le trottoir, il appartient aux policiers municipaux d’intervenir pour faire respecter ces décisions.
Leurs missions sont donc multiples et leurs pouvoirs plus étendus qu’on l’imagine. Ainsi, les rapports qu’ils peuvent établir possèdent la même valeur probatoire que les procès-verbaux ou rapports dressés par leurs collègues de la « nationale ». Et si le Conseil constitutionnel a refusé la qualité d’APJ aux directeurs de la police municipale, ce n’était pas pour diminuer leurs prérogatives mais essentiellement parce qu’il s’avérait impossible de les placer sous les ordres directs du procureur de la République ni même d’un OPJ. Car leur patron reste le maire.
Garde à vue indirecte – Néanmoins, les policiers municipaux ont le droit, comme tout citoyen, d’arrêter l’auteur présumé d’une infraction flagrante et de le conduire devant l’OPJ compétent. Avec un petit plus : toute arrestation par un agent de la police municipale entraîne une garde à vue. L’OPJ est en effet tenu par l’article 73 du code de procédure pénale de placer en garde à vue toute personne qui a été conduite devant lui par la force publique.
Il est probable que dans les années à venir, l’intervention du maire dans la sécurité de sa ville sera de plus en plus importante. Et d’une manière ou d’une autre, la police municipale deviendra plus « judiciaire ». Je ne sais pas si c’est une bonne chose, mais cela n’ira pas sans un déséquilibre entre les communes riches et les communes pauvres. On pourrait alors voir un glissement de la délinquance en direction des zones rurales. Un glissement qui a déjà commencé.
Bonjour, maire adjoint (Mon maire en indisponibilité) d’un petite commune de l’Essonne, je suis confronté à la mauvaise attitude sur ma commune d’un responsable de police municipal d’une ville limitrophe plus importante. En effet ce monsieur qui transite (avec sa voiture de service sérigraphié et équipé de rampe de gyrophare) matin midi et soir par ma commune pour ce rendre chez lui, ne respect pas un arrêté du Maire de mise en sens unique temporaire pour travaux d’une rue de ma commune. Il se retrouve, de fait, régulièrement en face à face avec les véhicules circulant dans le bon sens. Mon appariteur lui a fait la remarque de sa mauvaise conduite mais il a joué les gros bras et à justifié son comportement par le détour à faire pour se rendre à son bureau. En tant que Maire Adjoint, OPJ, détenteur des devoirs de police de ma commune et responsable de la sécurité de mes administrés, quel moyens puis-je employer pour qu’il respecte la signalisation. A savoir que j’en ai déjà parlé à son Maire qui manifestement n’a rien fait ou n’a pas été entendu.
Le Maire, la Police Municipale ont été informés du stationnement anarchique, trottoirs , intersections etc….Les piétons sont obligés d’emprunter la chaussée. En cas d’accident sur la voie publique d’un automobiliste renversant un piéton qui ne peut utiliser le trottoir lui étant réservé, la responsabilité du Maire ne remplissant pas son devoir de Police’ ordre public, tranquillité publique, salubrité publique, sécurite publique’ peut-elle être engagée; Je précise qu’il s’agit de voie publique ouverte à la circulation
C’est quand même surprenant que la police municipale ne soit pas intercommunalisée.
la notion d’agent de la FP reste vague, elle n’est pas définie de façon précise sauf de manière jurisprudentielle et donc de façon subjective, je ne vois pas l’utilité de séparer les « agents communaux » des autres agents de la force publique car il y a eu des jugements les incluant dans les AFP.
En revanche, la conclusion prête à polémique car l’entretien d’une PM est une goutte d’eau dans un budget communal et les possibilités données sur un plan intercommunal de recruter des agents permettraient de créer des PM dans des zones rurales qui sont maintenant désenclavées par des axes routiers importants et à la portée d’une délinquance itinérante à l’affût de zones mal surveillées mais surveillées normalement par qui ? On peut critiquer les effets (pallier au sentiment d’insécurité ou à l’insécurité par la création de PM) mais les PM sont-elles la cause d’une « inégalité » entre villes prétendument riches et d’autres « pauvres », c’est discutable car les PM n’en sont pas la cause et le raisonnement peut être renversé en prétendant que l’inégalité est justement palliée par la création de PM…
l’article est bien car il fait la différence entre la police municipal au sens NORMATIF et la police municipale au sens ORGANIQUE et bien souvent ces notions sont confondues, les compétences des agents de PM vont au-delà de la police municipale au sens normatif; dans les faits, la vocation d’une PM est celle d’une police de voie publique en tenue classique, compétences d’investigations exceptées (et encore puisque des enquêtes « administratives » existent parfois à la limite du judiciaire) mais elle est traduite de façon souvent maladroite par une disparité des moyens et des missions parfois farfelues. Ceci dit, la fonction d’OPJ est bien utile car elle permet au maire de connaitre des affaires importantes touchant à la sécurité publique dans le cadre notamment du devoir d’information liant les forces de police de l’Etat au maire.
Monsieur ,
Je suis confronté avec des aboiements de chiens permanents depuis 6 ans . Le maire a été d’une inutilité totale ! Si ce Maire est ce point inutile comment peut-il s’attaque à des problèmes autrement plus complexe comme la drogue, l’insécurité et autres problèmes comme l’emploi. Seule la Gendarmerie fait son travail correctement mais le Maire qu’il continue à s’occuper de son PLU et de sa station dépuration , il aura l’impression d’être utile !
Un maire qui dérape….
http://www.dailymotion.com/video/xwfovr_wikijoch-no5-feodalisme_news
Chers (e) internautes
il est vrai que les maires sont les « patrons » de la police municipale dans leurs communes, si elles en sont dotées, toutefois la qualité d’OPJ est souvent mal utilisée l’exemple de Biarritz en est la preuve : un élu a considéré avoir le pouvoir d’un procureur et a « fait sauter » un nombre considérable de procès verbaux…critiquant au passage le manque de discernement des agents verbalisateurs…
Les policiers municipaux ont une situation bien difficile, tenus à un code de déontologie et au code de procédure pénale, la seule pression qui peut être exercée par leurs employeurs c’est bien évidemment leur carrière, car libre administration des collectivité territoriales oblige, le maire peut faire évoluer ou pas (et ce sans motiver) un fonctionnaire de police municipale.
La profession mériterait quelques reformes, soit un statut dérogatoire, soit des conventions de coordinations systématiques, quant à leurs moyens, bien que la doctrine d’emploi dépende du maire, les risques sont pratiquement les mêmes que ceux de leurs homologues de l’Etat.
La Police municipale n’a pas demandé à existé et aujourd’hui plus que jamais le gouvernement doit l’assumer.
La filière sécurité de fonction publique territoriale existe bien mais ouvrir les portes aux médiateurs, aux ASVP aux chargés de missions des CLSPD ne serait pas forcement une bonne chose car ces cadres d’emploi n’ont pas vocation d’être des professionnels de la sécurité publique. On pourrait y voir aussi une tentative de pérennisation de certains postes par complaisance.
La Police municipale se professionnalise, grace aux formations initiales et continues et grace à l’arrivée des « détaches » et des emploies réservés de la police nationale et de la gendarmerie, elle est amenée a devenir une force de police locale efficiente et complémentaire des forces étatiques.
Pour conclure les policiers municipaux ne désirent pas plus de compétences s’il n’y a pas une reconnaissance de la profession en matière d’évolution sociale, ils ne désirent pas non plus imiter ou remplacer les policiers nationaux ou les gendarmes mais plutôt être complémentaires et ainsi pouvoir lutter contre l’insécurité au niveau local avec des moyens adaptés.
La direction de la communication de l’Union Syndicale Professionnelle des Policiers Municipaux
L’OPJ n’est nullement tenu de placer en garde à vue une personne qui lui est amenée par le force publique !
« Lorsque la personne est présentée devant l’officier de police judiciaire, son placement en garde à vue, lorsque les conditions de cette mesure prévues par le présent code sont réunies, n’est pas obligatoire dès lors qu’elle n’est pas tenue sous la contrainte de demeurer à la disposition des enquêteurs et qu’elle a été informée qu’elle peut à tout moment quitter les locaux de police ou de gendarmerie. Le présent alinéa n’est toutefois pas applicable si la personne a été conduite par la force publique devant l’officier de police judiciaire »
Mais si aucune infraction n’a été commises pas de garde à vue bien sur…
Désolé, mais vous êtes sur d’avoir été policier ? 😉
——
Euh ! Je ne comprends pas. Vous transcrivez l’article 73 et vous concluez en affirmant le contraire de ce qu’il énonce. L’utilisation de la force publique pour mener une personne devant un OPJ est évidemment une « contrainte ». GM
L’article ne vise le cas d’une personne contre laquelle « lorsque les conditions de cette mesure prévues par le présent code sont réunies ». La GAV n’est pas obligatoire s’il n’y a pas de contrainte, elle l’est s’il y a eu contrainte….
Mais si les conditions de la GAV ne sont pas réunies, il n’y a pas de gav (arrestation arbitraire, erreur des forces de l’ordre, etc.
Et c’est bien l’OPJ qui apprécie ces éléments. Donc parler de GAV indirecte est totalement faux.