Le journaliste professionnel est celui qui a pour occupation principale l’exercice de ce métier d’une façon régulière et rétribuée. Le statut est encadré par la loi (art. L761-2 du code du travail). Mais les journalistes font-ils bien leur travail ?

carte_presse.1176467066.gifIls ne disposent pour cela d’aucun pouvoir particulier, et les juges, ces dernières années, ne leur ont pas facilité les choses. En effet, le juge pénal n’hésite pas à poursuivre pour recel de documents volés, le journaliste qui s’est procuré ledit document pour bétonner son article. Mais ce document sera exigé par le juge civil en cas de poursuites en diffamation. Toutefois, ils ont quelques avantages. Ce sont (je crois) les seuls salariés du secteur privé à détenir une carte professionnelle barrée de bleu blanc rouge, et les seuls également à être autorisés à déclarer au fisc des revenus inférieurs à leurs revenus réels. Ils sont chouchoutés par les uns et redoutés par les autres. Ce sont souvent les mêmes.

Leur devoir est de nous informer – objectivement. Peut-on leur faire confiance ? Voici quelques exemples d’une information non objective – de ma part, s’entend :

Franz-Olivier Giesbert, directeur du Point, et le journaliste Jean-François Jacquier, ont écrit et publié un article de complaisance sur le milliardaire libanais recherché par la justice française (Le Monde du 31 mars et du 11 avril 2007). Un certain Iskandar Safa. Leur intermédiaire était Marc Francelet. Francelet, que je connais bien, est un homme charismatique qui, pour faire simple, vit de la bêtise des autres. Ce qui le rend plutôt sympathique. En l’occurrence, « les autres » sont les deux journalistes susnommés. Ils affirment ne pas avoir touché d’argent. Ils ont tort de s’en défendre, car la commission de la carte d’identité des journalistes professionnels (CCIJP) nous dit que si le métier de journaliste est incompatible avec celui d’agent de publicité, « cela ne signifie pas que les journalistes ne puissent occasionnellement percevoir des commissions d’ordre publicitaire ». On peut en discuter, mais, s’il y a débat sur ce sujet, cela ne concerne pas Marc Francelet, puisque lui ne possède pas de carte de presse. C’est pourtant lui qui est allé en prison.

À Nice (Libération du 12 avril 2007), grâce à la vigilance du procureur-zorro Éric de Mongolfier, le rédacteur en chef de Nice-Matin, Dominique Dabin, se voit obligé de reconnaître qu’il a bidonné une photo pour illustrer un article tout aussi bidon sur la vente clandestine d’armes de toute nature. Pour sa défense, il déclare : « […] comme ce n’était pas facile à illustrer, il a bien fallu monter une photo… » Cet homme est coupable, monsieur le juge, pourrait dire le policier, mais comme ce n’était pas facile à démontrer, j’ai préféré fabriquer des pièces à conviction…

Le Monde.fr a repris, il y a quelques jours, l’information du Canard Enchaîné sur un accord occulte, une sorte de Yalta, entre Chirac et Sarkozy, pour que ce premier échappe à la justice. Même sans être du sérail, on comprend bien qu’il s’agit typiquement d’une allégation invérifiable. Car en supposant que les deux ennemis de douze ans aient passé ce genre d’accord, on n’imagine pas qu’ils l’aient fait devant témoins. A moins que par souci de réciprocité, Le Canard n’ait installé des micros à l’Elysée… Et Le Monde.fr a appelé ses lecteurs à réagir. Et chacun de verser sa bile, d’apporter sa dose de venin. Je dois dire que d’une manière générale, les commentaires sur les blogs et sur l’Internet ont de quoi faire frémir. Derrière les mots, on sent la passion, la haine, la bassesse, et parfois la vulgarité. Les élections présidentielles ressemblent de plus ennon-a-l-a104.1176467952.jpg plus à une finale de football. Mais cette fois, les hooligans ne sont pas dans la rue. Du moins pas encore.

Et pendant que Nicolas Hulot cahin-caha retourne au charbon (visiblement, il n’y croit plus), pas un média ne parle du scandale de l’autoroute A104. Personne ne cloue au pilori le proche de Sarkozy, le sieur Dominique Perben, qui a décidé, derrière la porte feutrée de son cabinet ministériel, de faire passer une autoroute à travers trois agglomérations, comptant plusieurs centaines de milliers d’habitants. Pour la première fois en France, trois villes vont être coupées en deux par le passage d’une autoroute à six ou huit voies. Bon, ce n’est pas grave, ce sont des villes qui votent à gauche. Les médias s’en fichent, ce n’est pas vendeur. Ah, parlez-nous du look de Ségolène, du petit verre de rouge que Nicolas a fait semblant de boire ou des turpitudes verbales de François. Les journaux de «pensées» ressemblent de plus en plus à des peoples, pour ceux qui les lisent, et à du bizness pour ceux qui les font. Et nous on marche ! Après les présidentielles, nous aurons les législatives, puis la mise en place du gouvernement. Pour cet été, ce sera la sécheresse, puis la canicule. A la rentrée, avec les premières grèves des enseignants et de la SNCF, surviendront les inondations, etc.

moutonolivier_celineextenso_over-blog.jpegTrop de lumière aveugle. Je crois que dans ce monde où communication et information sont paroxystiques, notre vision des hommes, des choses, des événements, s’est embrumée. Alors, par paresse intellectuelle, on se complaît à écouter ou à lire tel éditorialiste ou tel chroniqueur, dont le principal mérite est de penser pour nous.

Et vainement on cherche les moutons noirs dans le troupeau.