LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Société (Page 19 of 40)

Bon anniversaire, Monsieur Kalachnikov !

En ce 10 novembre, il fête ses 93 ans. Il était tout jeunot lorsqu’il a inventé le fusil-mitrailleur qui va symboliser une époque. L’arme de toutes les révolutions. Que l’on retrouve aujourd’hui chez nous, dans les guéguerres des cités.

L’histoire de Mikhaïl Timofeïevitch Kalachnikov ne démarre pas sur les bancs de l’école. Né le 10 novembre 1919, près de la frontière chinoise, d’une famille paysanne, il est le 17e d’une fratrie de 19 (Wikipédia). Pour le régime communiste, son père est un koulak. Autrement dit un paysan qui se serait enrichi sur le dos des travailleurs. Lui et sa famille sont déportés en Sibérie. Mikhaïl a 11 ans. Il voit mourir ses frères et ses sœurs. Sept seulement ont survécu. À 15 ans, il s’évade. Repris deux ans plus tard, il s’évade de nouveau. Il se fait alors embaucher dans un atelier des chemins de fer et se découvre une véritable passion pour la mécanique. À 19 ans il dépose son premier brevet : un dispositif pour mesurer le kilométrage et la consommation des véhicules, juste avant de partir pour remplir ses obligations militaires. Il est affecté dans les chars. Lors de son stage de formation, il impressionne ses instructeurs par l’effervescence de ses idées. Dès qu’il découvre un nouvel outil, un nouveau dispositif…, il cherche à améliorer son fonctionnement. Comme il le fit avec le Tokarev T33. Un pistolet qui restera en dotation dans la police et dans l’armée jusqu’aux années 60.

Mais le 22 juin 1941, c’est l’opération Barbarossa : la Wehrmacht envahit l’URSS. Lors de la bataille de Briansk, destinée à stopper l’avancée allemande vers Moscou, Mikhaïl Kalachnikov est grièvement blessé. Son séjour à l’hôpital lui sera profitable. En effet, les soldats se plaignent de la supériorité de l’armement des forces allemandes. Ils le trouvent bien supérieur à celui de l’Armée rouge. Ce qui titille Mikhaïl. C’est ainsi que lui vient l’idée de créer une arme automatique. Il effectue de nombreuses esquisses sur son lit d’hôpital. À sa sortie, convalescent, il rejoint son ancien atelier aux chemins de fer et se met à bricoler un truc qui ressemble à un fusil d’assaut, même si le terme n’existe pas encore. À l’époque, au mieux, les militaires possèdent des fusils semi-automatiques. Dans les troupes françaises, le fusil Lebel, dont l’invention remonte à 1886, est encore largement utilisé, même s’il est peu à peu remplacé par le MAS 36. Une fois son arme conçue, Mikhaïl ne sait pas trop quoi en faire. À qui la présenter ? Il se rend au commissariat et… il est arrêté pour détention d’arme. Ce sont ses compagnons du Komsomol (les Jeunesses communistes) qui le font libérer. Il est alors convoqué au Parti où un dirigeant lui dit que ce qu’il a fait était bien « même si ton arme n’est pas très belle ». Et il l’expédie faire des études à l’Université. En 1942, Mikhaïl créé un deuxième prototype, plus proche du modèle final, aujourd’hui exposé au musée de Saint-Pétersbourg – et il épouse la dessinatrice industrielle qui l’accompagne dans ses recherches.

L’arme n’a été officiellement déposée qu’en 1947 (son nom officiel est Avtomat Kalachnikova 1947 ou AK-47).

L’AK-47 est conçu pour durer. Et du coup, quelles que soient les conditions (marécages, sable…), il ne s’enraye jamais. C’est cette simplicité et sa robustesse légendaire qui en ont fait l’arme des pauvres. Et sa beauté vient de son succès. Mais rien ne laissait supposer que la kalache deviendrait une star mondiale…

C’est le fusil préféré des guérilleros. « Je suis très fier qu’il soit devenu pour beaucoup symbole de liberté », dit Mikhaïl Kalachnikov. Pas une révolution, pas une rébellion sans des images de combattants agitant leur kalache. Elle était aux premières loges de la révolution libyenne, comme c’est le cas aujourd’hui en Syrie ou au sein des Forces armées révolutionnaires de Colombie. On dit, après le deuxième conflit irakien, que les Américains ont négligé (volontairement ou non) de détruire les importants stocks de kalachnikovs constitués par Saddam Hussein. Ce sont des millions de kalaches qui se seraient évaporées dans la nature. Cette arme est chargée de symbole même pour les grands de ce monde. Ainsi, Salvador Allende se serait suicidé avec l’AK-47 que lui avait offert Fidel Castro et qui portait la dédicace : « À mon ami Allende, de la part de Fidel, qui essaye par des moyens différents d’atteindre les mêmes buts ».

Le modèle actuel de ce fusil d’assaut est l’AK-74. Il est toujours fabriqué dans la même usine, laquelle est sous contrat avec le gouvernement russe. Mais les choses pourraient évoluer, car, si l’AK s’est illustré dans de nombreux conflits, il a fait son temps. Ce que personne n’ose trop dire à son inventeur de crainte de lui faire de la peine. Il est vaguement question d’un nouveau modèle, l’AK-12 (pour 2012), mais l’usine Ismash, à Ijevsk, dans l’Oural, qui fabrique cette arme depuis toujours, serait au bord du dépôt de bilan (son sort semble lié au succès de la nouvelle voiture « low cost », la Lada Granta, dont elle assure la production). D’autant que l’armée russe, d’après un expert, possède un stock d’armes légères « suffisant pour mener plusieurs guerres mondiales ».

Alors que l’inventeur du fusil américain M16 percevait un dollar sur chaque arme qui sortait de l’usine, Mikhaïl Kalachnikov dit, non sans malice, qu’il n’a jamais touché un kopeck de royaltie sur son invention. En revanche, il a été comblé d’honneurs. C’est l’homme le plus décoré de Russie. Il a été fait général en 1994. Et il est devenu une légende.

Monsieur Kalachnikov aime à se raconter, ce qu’il a d’ailleurs fait dans un livre, Ma vie en rafales, sorti au Seuil en 2003. Et même si l’on peut hésiter à montrer de l’admiration pour l’inventeur d’une arme de guerre, on a du mal à ne pas trouver le personnage sympathique. Surtout lorsqu’il confesse : « J’aurais préféré inventer une chose plus utile, par exemple une tondeuse à gazon… »

Quadruple meurtre de Chevaline : l’arme du crime

La publication par Le Monde d’éléments provenant des constatations effectuées sur la scène de crime a semé un malaise au sein de la gendarmerie nationale. Au point, d’après Le Figaro, que le lieutenant-colonel qui dirige l’enquête s’est fendu d’un communiqué à l’AFP qui met indirectement en doute l’authenticité du reportage.

Comme il n’est pas dans les habitudes du Monde de « bidonner », on peut penser que cette fuite va nécessairement donner lieu à une enquête interne.

Pour être franc, le plan de com’ de la gendarmerie nationale et du parquet d’Annecy, surtout au début de l’affaire, en a surpris plus d’un.  Mais ce flot d’informations était sans doute destiné à éviter tout clash avec nos voisins d’Outre-manche, comme cela avait été le cas pour les Portugais, lors de la disparition de la petite Maddie. Les deux juges d’instruction sont beaucoup plus discrets.

En tout cas, dans de récentes déclarations, le procureur Éric Maillaud souligne « l’absence de conviction personnelle » des enquêteurs français et britanniques. Ce qui laisse peu de doutes sur l’avancée de l’enquête : on est dans le fog.

Et même le formidable travail « technique » qui a permis de reconstituer en partie la scène de crime ne fait guère avancer les choses. On ne sait même pas quelle a été la première cible du tueur.

En fait, il semble bien que les seuls éléments concrets sur lesquels les enquêteurs peuvent s’appuyer sont les balles extraites du corps des victimes, les balles perdues et les douilles.

Après étude de ces pièces à conviction, les spécialistes seraient arrivés à la conclusion que l’arme utilisée est un pistolet automatique Parabellum Luger de calibre 7,65. Une arme qui a été en dotation dans l’armée suisse – et qui a une histoire…

À la fin du XIXe siècle, l’Autrichien Georg Luger développe une nouvelle arme de poing : le pistolet automatique Parabellum (du latin : prépare la guerre – dans l’expression Si tu veux la paix, prépare la guerre). Une arme à la forme caractéristique par sa culasse « à genouillère » et qui est devenue une sorte de mythe de l’arme de poing. Au point que le mot Parabellum est rapidement devenu synonyme de pistolet automatique. Chambré pour des munitions de 7,65 x 21 mm Para, il est adopté par l’armée allemande en 1908, mais au calibre 9 mm, sous le sigle P08 (pour Pistole 1908, l’année de l’homologation par l’armée). Tandis que l’armée suisse préférait conserver le calibre initial. Je suppose, mais je n’en suis pas sûr, que cette arme a été enregistrée en Allemagne en 1906, d’où P06. Toutefois, la commande effectuée par la Suisse est bien antérieure à cette date. Elle a d’ailleurs été la première nation à adopter le Parabellum 7,65 comme arme de poing réglementaire.

À partir de 1929, ce PA a été fabriqué à Berne. Il y en a eu 27 941 exemplaires pour les besoins de l’armée helvétique et 1 916 pour des civils. Ces derniers portent la lettre P devant le numéro de série (d’après Les armes à feu modernes, aux éditions Denoël, 1975). Il existe un marché restreint parmi les collectionneurs. On peut voir ici une vidéo d’une annonce concernant une arme de ce type (photo) vendue avec deux chargeurs au prix de 1 400 euros.

Ce pistolet a une capacité de huit cartouches. Comme les enquêteurs ont récupéré 25 étuis (ou douilles) on peut donc en déduire que le tireur possédait trois chargeurs et qu’il avait en plus une balle engagée dans le canon. Auquel cas il y a eu trois salves lors de la tuerie de Chevaline, chacune espacée de plusieurs secondes.

Toutefois, sauf dans les films, il est peu courant de se balader avec un pistolet et trois chargeurs. Si l’on retient l’hypothèse que le tueur n’en possédait que deux, cela signifie qu’il a dû réapprovisionner. Pour garnir un chargeur il faut d’abord l’éjecter, puis poser son arme pour libérer sa deuxième main, et, enfin, récupérer des cartouches pour les glisser dedans. Une opération délicate (il faut comprimer le ressort du chargeur) qui peut prendre plusieurs dizaines de secondes… Ensuite, on met le chargeur à poste et on actionne la culasse. Cela suppose que durant cette manipulation, à Chevaline, toutes les victimes étaient mortes, blessées ou tétanisées. En tout cas, incapables de prendre la fuite. Une fois son arme rechargée, on peut alors imaginer que l’assassin a fait le tour de « sa » scène de crime pour administrer à chacun le coup de grâce.

Plaquette de crosse avec son marquage

Ce qui conforte cette hypothèse, ce sont les fragments du pistolet retrouvés près du corps du cycliste. Probablement des morceaux d’une plaquette de crosse, la partie la plus fragile. Car pour regarnir son chargeur, lorsque l’on ne possède pas d’étui, il est presque naturel de glisser son arme sous son coude en la plaquant contre son corps. Un bon moyen de la faire tomber. Surtout dans une situation de stress, où il est parfois difficile de contrôler ses gestes.

Mais il y avait peut-être trois chargeurs…  En tout cas, cela ne permet pas de déterminer l’ordre dans lequel les personnes ont été abattues. Est-ce le cycliste, Sylvain Mollier qui a été la première victime ? Et alors pourquoi ? Pour rien, si l’on retient l’éventualité d’un tueur fou.  Et il en est peut-être de même pour Saad al-Hilli et sa famille. Mais il faut reconnaître que la piste Saddam Hussein est plus exaltante. L’argent du compte en Suisse, avait laissé entendre un avocat de la famille, au début de l’enquête, ne provient pas de Saddam Hussein mais trouverait son origine dans les commissions liées à l’affaire Pétrole contre nourriture. Une information relayée aujourd’hui par un journal allemand. Cette affaire date de l’époque où l’embargo contre l’Irak avait été adouci par souci humanitaire – et aussi pour récupérer quelques barils de pétrole. Mais pour obtenir le feu vert de l’ONU, les entreprises qui voulaient faire du business avec l’Irak devaient d’abord obtenir l’accord de leur  gouvernement. D’où un lobbying qui aurait donné lieu à de substantielles commissions occultes allégrement empochées par des hommes politiques malhonnêtes. Et un système de surfacturation qui aurait engraissé pas mal d’entreprises. Dans ce dossier, la France et la Suisse sont aux premières loges. Une affaire qui, pour le volet français, devrait bientôt recevoir une réponse judiciaire.

C’est un beau roman. Mais dans une enquête criminelle, il faut garder les pieds sur terre… Et le plus concret, sans doute, concerne les recherches sur l’arme et les cartouches utilisées. Les 7.65 Para sont devenues des munitions assez rares. Elles doivent se vendre au compte-gouttes. En France, sauf cas particuliers, seuls les chasseurs, les tireurs sportifs et les collectionneurs (avec la nouvelle loi) peuvent acheter et/ou détenir des armes et des munitions.

Une affaire où tout est possible, a dit le procureur Maillaud, un rien défaitiste, en rappelant l’échec de l’enquête sur la disparition du docteur Godard et de sa famille. On espère plutôt que les enquêteurs gardent des atouts dans leur manche, comme des fragments d’empreintes digitales ou des traces ADN qu’ils auraient pu récupérer sur les douilles. Des traces qui, par comparaison, pourraient au moins servir à confondre un suspect. Encore faut-il trouver un suspect !

Le blanchiment au cœur de la finance mondiale

Le démantèlement d’un réseau de blanchiment, dans lequel une élue parisienne vient de se faire poisser, nous fait découvrir un pan de la criminalité peu concerné par les zones de sécurité prioritaires. Ici, pas de Kalachnikov, mais des gens qui se la pètent et qui ont pignon sur rue. On disait autrefois, pas de voleur sans receleur, eh bien, aujourd’hui, on peut dire que tout malfrat qui se respecte doit avoir sa petite blanchisserie. Car le bon argent, sonnant et trébuchant, disparaît peu ou prou de nos porte-monnaie, pour devenir scriptural. Donc « traçable ».

Dans les faits, on peut découper le blanchiment en trois phases :

1/ Le placement, qui consiste à transformer les billets de banque en monnaie électronique ou en d’autres biens, comme des biens immobiliers ou des œuvres d’art.

2/ L’empilage, qui vise à brouiller les pistes en fragmentant cette première activité, et à créer suffisamment d’écrans pour qu’il soit impossible de remonter à la source.

3/ L’intégration, autrement dit l’injection des produits frauduleux (qui ont désormais l’apparence de la légitimité), dans l’économie traditionnelle.

Dans le démantèlement du réseau franco-suisse, les blanchisseurs jouaient sur la crainte du fisc. Crainte que certains banquiers malhonnêtes savent exploiter au mieux de leurs intérêts. Moyennant une honnête commission, ils suggéraient aux détenteurs de comptes en Suisse de leur procurer des liquidités. Puis, moyennant une nouvelle honnête commission, ils proposaient à des intermédiaires douteux de transformer leurs liquidités en lignes de crédit. Florence Lamblin s’en explique ainsi dans Le Parisien : « Avoir un compte en Suisse me paraissait risqué et me mettait mal à l’aise » Mais en même temps, elle craignait de le déclarer au fisc et ne se sentait probablement pas de passer la frontière avec une valise de billets. Un certain Berty prend les choses en main. Le scénario est simple : la dame doit d’abord virer l’intégralité de ses avoirs en Suisse sur un autre compte, également en Suisse. Ensuite, un inconnu lui apportera l’argent liquide à domicile. « Je savais juste que je serais ensuite contactée sur mon portable par un certain Marc pour récupérer les fonds moyennant une commission de 4 % », explique-t-elle. C’est l’étape 1 du processus.

Dans les cités, l’argent de la drogue est blanchi d’une tout autre manière.  Il ne semble pas que les truands de quartier aient suffisamment d’entregent pour fréquenter le monde de la finance. Le blanchiment se fait donc souvent via de petits commerces (qui bidonnent leur CA) – du moins pour l’instant. Car si on laisse faire, ces petits truands pourraient grandir… Ou alors, l’argent sale s’expatrie vers des pays moins regardants.

Il faut dire que la France s’est dotée d’un contrôle très strict de la circulation de la monnaie : interdiction de payer en espèces au-delà de 3 000 €. Mais la criminalité n’est pas à l’origine de cette rigueur. La première loi qui limitait les paiements en espèces a été prise sous le gouvernement de Vichy. Ensuite, la règle a perduré. C’est donc un héritage du passé, sur lequel sans arrêt on remet une couche. Après-guerre, la lutte contre l’inflation (sans résultat, d’ailleurs), ensuite la nécessité d’un contrôle fiscal et douanier. Puis, à partir de 1987, c’est la « sécurité » qui a emporté le morceau. Une loi du 31 déc. 1987 prévoit spécifiquement le délit de blanchiment de l’argent de la drogue. Dix ans plus tard (13 mai 1996), l’infraction s’applique à tous les crimes et à tous les délits.

La suspicion autour de l’argent est désormais ancrée dans notre société. Pourtant, il y a quelques mois, le Conseil d’État a déclaré inapplicable la prohibition des paiements en espèces effectués par les professionnels lorsqu’ils se trouvent à l’étranger. Comme un rappel à la réalité. Caroline Kleiner, qui est maître de conférences à la Sorbonne, nous explique dans le Recueil Dalloz (2012 p. 2289) les enjeux économiques de cette défiance un rien paranoïaque. D’un côté, l’interdiction de régler en espèces pénalise nos entreprises lorsqu’elles font du business dans des pays où la monnaie n’est pas convertible sur le marché des changes. Mais de l’autre, cela favorise fortement les affaires des établissements de crédit qui ont le monopole de la gestion des moyens de paiement électronique. Un CA de plusieurs milliards d’euros. En souriant, on pourrait se dire que ce sont les mêmes qui profitent de l’argent du crime et de l’argent de la lutte contre le crime. Un monde parfait.

Le blanchiment ne concerne pas que l’argent, mais tous les biens qui proviennent d’un crime ou d’un délit. Le simple fait de favoriser la dissimulation de leur origine illégale constitue l’infraction. Mais comme il est souvent impossible de reconstituer le circuit (étape 2 : l’empilage), le législateur parle de « sommes paraissant provenir de l’activité d’organisations criminelles » (loi du 12 juillet 1990). En matière de stups, une loi de 1996 a inscrit dans le code pénal la présomption d’illicéité pour les individus douteux incapables de justifier de leur train de vie et qui sont en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes se livrant au trafic (ou à l’usage) de stupéfiants. Un véritable renversement de la preuve, puisqu’il appartient au suspect de prouver qu’il n’est pas coupable. Ce principe a été généralisé en 2006 (321-6 du CP) pour tout crime ou délit.

Parviendra-t-on un jour à juguler le blanchiment de l’argent du crime ? C’est inenvisageable, selon certains, car cela déstabiliserait complètement l’économie mondiale. L’ONUDC (Office des nations Unies contre la drogue et le crime) parle d’un CA de 870 milliards de dollars, soit 1.5 % du PIB de la planète. Pour prendre un exemple, la famille mafieuse Rizzuto, au Québec, gère une fortune de plusieurs milliards de dollars. Peut-être équivalente à celle de Madame Bettencourt. Mais bien en deçà des trois cartels internationaux auxquels Barack Obama a déclaré la guerre. Chaque année, les groupes criminels organisés font des millions de victimes (directes et indirectes). Leur puissance est telle qu’ils peuvent déstabiliser l’économie d’un pays. Tant qu’il y aura une demande, les réseaux criminels profiteront de la vente de biens illégaux, nous dit l’ONUDC. Et la demande n’est pas prête de s’arrêter, car l’évasion fiscale est la clé de voûte du blanchiment. Or son montant est estimé entre 17 000 et 26 000 milliards d’euros pour l’ensemble de la planète. Un véritable trou noir dans l’économie mondiale, peut-on lire    dans un article du Monde du 23 juillet 2012. D’autant que ces chiffres ne tiennent pas compte des actifs non-financiers des hyper-riches, comme les œuvres d’art, dont il a été question ces derniers jours. Chez nous, en 2007, la Cour des comptes parlait de 30 à 40 milliards d’évasion fiscale.

Florence Lamblin apparaît minuscule dans ce schéma. Est-elle coupable selon les critères de la loi ? Elle ignorait vraisemblablement que cet argent provenait de trafiquants de drogue, mais pouvait-elle ignorer que c’était de l’argent d’origine illicite ? À la justice de trancher. Mais son cas est emblématique. Par leurs agissements, des gens « honnêtes » participent au blanchiment de l’argent du crime.

Si l’on additionne l’ensemble des commissions versées pour payer les intermédiaires, l’ardoise finale peut atteindre 50 %. Ce sont donc des sommes colossales qui atterrissent dans la poche de ces petits malins en col blanc qui font le trait d’union entre l’argent sale et les banques. Grand naïf, j’aime à penser que ni eux ni ceux qui grugent le fisc ne sont conscients qu’ils sont un rouage d’un mécanisme criminel où chaque billet est tâché de sang.

Police de Marseille : comment expliquer l’omerta ?

Alors que Manuel Valls vient de dissoudre l’équipe de jour de la BAC nord de Marseille, bien des questions restent en suspens. Comment expliquer notamment que cette affaire « d’une ampleur que nul ne conteste », comme dit le Ministre, ait pu perdurer sans que personne n’y mette le holà ? Pourquoi les policiers étrangers à ces combines crapuleuses, dont sont soupçonnés une partie de leurs collègues, n’ont rien dit. Pourquoi la hiérarchie a-t-elle gardé la tête sous l’oreiller ?

C’est le côté noir des choses. Et il faudra des réponses, qu’elles soient judiciaires ou administratives. Mais il y a le côté blanc. Le côté rassurant : une enquête de l’IGPN qui redore sérieusement son blason. Une enquête colossale réunissant des dizaines de policiers, avec des moyens techniques dignes d’une affaire relevant de la grande criminalité. Avec un message clair : les flics ne sont pas au-dessus des lois.

Pourtant, si l’on examine le fruit des perquisitions, il s’agit de ripoux petits bras. Quelques centaines de grammes de cannabis et quelques centaines d’euros en argent liquide. Mais évidemment, le problème n’est pas là. Il va même nettement au-delà de la malhonnêteté de certains fonctionnaires. En fait, ce qui est inadmissible, incompréhensible, c’est qu’un réseau quasi mafieux ait pu se mettre en place dans la police française. Une pâle copie de The Shield.

Et de plus en plus de voix s’élèvent contre l’encadrement. Sous-entendu contre les commissaires. Pierre Ottavi, qui a installé la BAC de Marseille, alors qu’il était directeur départemental de la sécurité publique, a déclaré sur BFM-TV qu’il y avait aujourd’hui un sérieux problème de commandement. Cela tient peut-être à la réforme de 2005. Depuis, les commissaires se sont éloignés de leurs équipes pour devenir un corps de « conception », tandis que « le commandement opérationnel » est désormais assuré par les officiers de police. Il ne s’agit pas jeter la pierre à l’un ou à l’autre, mais simplement de s’interroger : l’organisation actuelle des services est-elle adaptée à cette profonde modification des missions ? N’y a-t-il pas trop de chefs à certains endroits et pas assez à d’autres… Notamment sur le terrain. Notamment dans les BAC.

C’est l’un des aspects du problème. L’autre est plus délicat. Personne ne peut imaginer que des flics, dont c’est le métier, ne détectent pas des délits qui se commettraient sous leur nez. Mais que peut faire celui qui ne marche pas dans la combine ? Cafarder ? Pas facile lorsque l’on est intégré à une équipe. En revanche, il est difficile d’admettre qu’il soit quasi impossible de dénoncer des dysfonctionnements dans un service sans encourir les foudres de la hiérarchie. Or, l’administration n’est pas tendre avec ceux qui franchissent le pas.

Rappelons-nous du cas Pichon !

En 2008, ce commandant de police attire l’attention de ses supérieurs sur des irrégularités flagrantes dans la tenue du fichier STIC. Un fichier, il faut le souligner, qui ne concerne pas que les délinquants, et dans lequel figurent plus de six millions de personnes

Devant l’autisme de l’administration, il décide d’aviser les médias en rendant publique la fiche de deux stars du showbiz. Pour celle de Johnny Halliday, par exemple, les faits mentionnés remontent à plusieurs dizaines d’années et auraient dû être effacés depuis longtemps. Une démonstration par l’absurde. Il est cloué au pilori par sa hiérarchie, suspendu de ses fonctions, puis, finalement, viré de la police – alors que la procédure judiciaire à son encontre (pour violation du secret professionnel) est toujours en cours.

Et pourtant Philippe Pichon n’a pas agi par intérêt. Il ne s’est pas mis un fifrelin dans la poche. Non, il a juste eu un geste citoyen. L’année suivante, la CNIL reconnaissait implicitement qu’il avait eu raison en pointant du doigt de graves errements dans la tenue du fichier STIC. Un nouveau contrôle est d’ailleurs en cours.

Aujourd’hui, il rame pour faire vivre sa famille. Il est même victime d’un certain acharnement. Il y a une quinzaine de jours, on lui a reproché d’avoir mis en vente sur Internet des objets et des effets « de police ». Ce qu’il nie catégoriquement. Peu importe : rappel à la loi du procureur. De nombreuses personnes ont trouvé injuste qu’il soit exclu de la police pour avoir dénoncé une faille au sein de la Grande maison. Une association de défense a même été créée. À ce jour, silence radio du côté de la Place Beauvau. En désespoir de cause, son avocat, Me William Bourdon, vient de déposer une plainte auprès du doyen des juges d’instruction du TGI de Paris, contestant les procédés utilisés lors de l’enquête disciplinaire de l’IGPN, notamment l’usage d’écoutes téléphoniques administratives. Un peu comme si un patron piégeait le téléphone personnel de son salarié pour justifier son licenciement.

En marge de l’affaire de Marseille, Manuel Valls a déclaré qu’il « ne tolérerait aucun comportement qui nuise à l’image de la police… ». Il serait bien également de travailler sur l’image que les policiers ont d’eux-mêmes (ou celle que leur hiérarchie leur renvoie). Pour qu’ils se sentent fiers de faire ce métier. Un métier où les petits démerdards ne feront pas la loi.

 

L’imbroglio des meurtres de l’Essonne

Il y a quelques jours, l’avocat de Yoni Palmier a déposé une plainte contre X pour violation du secret de l’instruction. Yoni Palmier, c’est l’individu soupçonné d’être l’auteur des quatre meurtres commis dans l’Essonne, entre novembre 2011 et avril 2012. Or en juillet dernier, il a reçu une lettre de l’une de ses connaissances qui s’accuse de deux de ces meurtres et affirme avoir commandité les deux autres. L’information avait été tenue secrète. Mais récemment, elle est parue dans la presse, ajoutant encore un peu de mystère à une enquête criminelle particulièrement tortueuse. Une enquête où chaque nouvel élément semble vouloir contredire le précédent.

Le 27 novembre 2011, Nathalie Davids, une jeune femme de 35 ans, laborantine à l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière, est retrouvée  agonisante dans le parking de son immeuble, à Juvisy-sur-Orge, dans l’Essonne. Elle a reçu sept balles de calibre 7.65 mm, dont une dans la tête. L’assassin a probablement vidé son chargeur. On peut donc penser à un tir de panique ou d’acharnement. La victime décède à l’hôpital sans avoir repris connaissance. L’enquête menée par la police judiciaire de Versailles (service compétent sur la grande couronne parisienne) progresse rapidement. Dans la semaine qui suit, un homme est arrêté. Il s’agit de Michel Courtois. Amoureux éconduit, il harcelait Nathalie au téléphone. Lors de sa garde à vue, il reconnaît les faits. «J’ai fait tout ça par amour », dira-t-il lors de son audition.  Après avoir emprunté une moto à des copains de bar, il aurait suivi une voiture pour s’introduire dans le parking, en prenant soin de placer un bout de scotch sur la cellule électrique de la porte pour assurer sa retraite. Ensuite, il se serait dissimulé, attendant le retour de sa maîtresse. Un véritable guet-apens. Donc, un assassinat. D’une manière plus ambigüe, d’après Le Monde, il aurait déclaré : « Je pense que c’est moi qui ai tué Nathalie, parce que tous les éléments qui sont à charge contre moi tendent à prouver que je suis l’auteur de l’assassinat ». Une phrase que l’on sent bien dans la bouche d’un policier mais qu’il est difficile d’envisager dans celle d’un suspect… Le seul élément matériel contre lui provient de l’analyse de vêtements et d’un sac sur lesquels des traces de poudre auraient été découvertes. Une contre-analyse n’a cependant pas permis de trancher quant à l’origine de ces traces.

La presse a présenté Michel Courtois, âgé de 46 ans, comme un homme un peu « simplet ». Pourtant, sur cette vidéo de TF 1, il est bien loin de l’image que l’on a donnée de lui. Il dit qu’il ne comprend pas ce qui lui arrive… De fait, rapidement, il s’est rétracté, disant avoir subi des pressions policières. Son avocat, Me Yassine Bouzrou, va plus loin. Il estime que les aveux lui ont été « extorqués ». Ce qui n’est pas l’avis de sa consœur, Me Sarah Valduriez, qui assistait Michel Courtois durant la garde à vue. Elle a déclaré au JDD : « J’étais avec lui lors de toutes les auditions. Les policiers ont toujours été très respectueux (…)  Il a avoué en ma présence, je lui ai même demandé s’il savait ce qu’il faisait. De toute façon, tout a été filmé. » Voilà de quoi convaincre les OPJ encore récalcitrants de l’utilité de l’avocat durant la garde à vue…

En tout cas, pour le meurtre suivant, le 22 février 2012, Michel Courtois a un alibi : il est derrière les barreaux. Cette fois, c’est le voisin de Nathalie Davids qui est visé, Jean-Yves Bonnerue, un cadre technique de 52 ans. Il est abattu dans ce même parking alors qu’il est penché sur le coffre de sa voiture. Une balle dans la tête. Même calibre. C’est lui le premier qui avait découvert Nathalie baignant dans son sang et qui avait appelé les secours. C’est d’ailleurs lors de son audition que les enquêteurs ont appris l’existence de Michel Courtois. D’une certaine manière, il les a mis sur la piste.

De toute évidence, ces deux meurtres sont liés. D’autant, on l’apprendra par la suite, qu’ils ont été perpétrés avec la même arme : un pistolet automatique de calibre 7.65.

Un mois plus tard, le 17 mars, à Ris-Orangis, c’est un retraité de 80 ans qui est tué d’une balle dans la nuque dans le hall de son immeuble. Puis, le 5 avril, à Grigny, c’est le tour d’une mère de famille de 48 ans. Elle n’est pas agressée, juste trois balles dans la tête, alors qu’elle pénètre, elle aussi, dans le hall de son immeuble.

Rien ne relie ces deux crimes aux précédents, si ce n’est le rayon d’action et l’arme utilisée.

La PJ de Versailles met le turbo, d’autant que l’affaire Merah a traumatisé la France entière. Une centaine d’enquêteurs sont sur le coup. Le 6 avril, les policiers lancent un appel à témoins pour retrouver une moto de marque Suzuki de couleur bleue et blanche sur laquelle le meurtrier aurait pris la fuite, après avoir tiré sur cette femme, à Grigny. Ce sont des jeunes de la cité qui ont rapporté la chose aux policiers. Et les motos, ils connaissent suffisamment pour fournir des détails précis. Les magasins spécialisés du département sont visités un à un, le fichier des cartes grises est passé au crible… Le propriétaire de l’engin est finalement retrouvé. Il est inconnu des services de police. Mais, à l’adresse indiquée sur le document, vit Yoni Palmier. Et son profil colle bien à l’enquête. Les planques commencent. Il s’agit de ne pas lui donner l’alerte et d’éviter le scénario de Toulouse.

Huit jours plus tard, il est cueilli en douceur alors qu’il sort du domicile de ses parents. Dans son box, on retrouve la moto. C’est un homme de bientôt 34 ans, né dans le Val-d’Oise, de parents antillais. Il a déjà été condamné pour violences et plusieurs fois pour le délit de port d’arme de 6° catégorie. Officiellement, il subsiste grâce à « diverses allocations », comme dit la procureure d’Évry, mais son train de vie ne correspond pas. C’est en recoupant ses déclarations que les policiers sont amenés à perquisitionner dans un lieu où il a autrefois vécu, et dans lequel ils vont découvrir, dans une poubelle, une douille percutée qui provient de l’arme des crimes. Devant cet élément probant, Yoni Palmier accepte de mener les enquêteurs dans un second box, à Draveil, où sont dissimulées plusieurs armes, dont le fameux PA 7.65. Il déclare que la moto et les armes appartiendraient à un homme dont il ne connaît pas l’identité, probablement celui qui aujourd’hui revendique les meurtres. Mais existe-t-il ?

Yoni Palmier nie donc les faits. Il aurait été manipulé par ce mystérieux personnage. Mais pourquoi ces meurtres ? Quel pourrait être le mobile ? On parle d’actes « d’opportunité ». Ainsi, dans l’hypothèse où Yoni Palmier serait bien le coupable, le meurtre de Jean-Yves Bonnerue aurait été fortuit. Il serait venu sur les lieux, là où Nathalie Davids a été tuée, simplement parce qu’il connaissait l’endroit pour y avoir loué autrefois des emplacements de parking. Et il aurait tiré sur cet homme qui déchargeait ses courses, sans aucune raison. Cela ne tient pas la route. Quant aux deux autres crimes, cela pourrait être une sorte de plagiat de l’affaire Merah.

Autant d’extrapolations qui laissent dubitatif… Ce qui surprend, c’est le modus operandi du premier meurtre par rapport aux suivants. Nathalie Davids est tombée sous les balles d’un tueur compulsif tandis que les autres victimes ont été froidement exécutées.

À ce jour, les enquêteurs n’ont pas trouvé de liens entre Yoni Palmier et Michel Courtois. Lorsque l’avocat de ce dernier a demandé sa remise en liberté, en faisant valoir que deux assassins pour le même meurtre, c’était un de trop, le procureur s’y est opposé ; et la Cour d’appel de Paris lui a donné raison. Mais, bizarrement, quinze jours plus tard, le 11 juin, les deux juges d’instruction en charge de l’affaire ont accédé à sa demande. Comme si le dossier s’était enrichi d’un élément nouveau.

On l’espère. En attendant, quatre personnes ont été tuées avec la même arme. Apparemment, il n’existe aucun mobile, aucune raison, et pour le premier meurtre, deux suspects sont mis en examen. L’un est en prison, l’autre en liberté. Deux hommes qui ne se connaissent pas. Et, quelque part dans la nature, un autre individu a revendiqué ces crimes.

Manuel Valls, de l’Intérieur

Il est sur tous les fronts. Certains le considèrent comme « l’effaceur », celui qui va faire oublier la gauche bisounours ; tandis que d’autres n’apprécient guère ses postures sarkoziennes. Dans la maison poulaga, il a été accueilli avec circonspection. Au début, on en a même souri, lorsqu’il est apparu dans son joli costume blanc. Il avait l’air tellement jeune qu’il a fallu cliquer sur Wikipédia pour s’apercevoir qu’il atteignait la cinquantaine.

C’était un moment important. Si les fonctionnaires ont l’habitude de voir tourner les ministres, les changements de majorité sont plus rares dans une carrière. Et dans la police cela se traduit souvent par un virage à 180°. Aussi, Place Beauvau, radio-gouttière allait bon train : bouleversements, chasse aux sorcières… Non, rien ! Quelques mutations de personnages politiquement trop voyants. Et même le staff réuni autour de lui n’était pas un réel indicateur de la politique du nouveau ministre. Des gens rassurants, plutôt proches de la retraite.

Lorsqu’il est arrivé, Manuel Valls avait dans sa musette les zones de sécurité prioritaires – l’un des 60 engagements du candidat Hollande. Une mesure « de bureau » qu’au moins une demi-douzaine de ministres ont dû vouloir mettre en place avant lui. Des noms différents, mais le même objectif : concentrer davantage de moyens dans des zones fortement criminogènes. Ça n’a jamais fonctionné. Mais dans la police l’obsolescence n’existe pas. Comme l’ampoule centenaire de Livermore, les idées – même mauvaises – ne s’éteignent jamais. On se souvient peut-être que sous le gouvernement Bérégovoy (Mitterrand II), Bernard Tapie avait été nommé ministre de la Ville pour s’occuper des « quartiers difficiles ». Il y a 20 ans. Alors aujourd’hui, en pleine période de disette… Mais mercredi dernier, devant les grands chefs de la police et de la gendarmerie, notre ministre a déjà pris ses distances : Les ZSP « ne sauraient résumer la politique de sécurité que j’entends mettre en œuvre », a-t-il déclaré.

On l’attendait au tournant sur le récépissé lors des contrôles d’identité : une mesure d’application difficile qui agace fortement les policiers. En fait, ce récépissé ne figure pas dans les propositions écrites présidentielles. On en avait juste parlé pour éviter les contrôles au faciès – qui eux y figurent. Ce maudit mot dit, mais non écrit, est devenu le marqueur de l’autorité du nouveau ministre. Il s’est laissé convaincre assez facilement de l’infaisabilité de la chose, et il a planté là le Premier ministre qui, lui, en avait fait une mesure symbolique.

Couac !

Bon, on peut dire que la diplomatie n’est pas la qualité première de M. Valls. On l’a bien vu en mai dernier, lors de la passation de pouvoirs entre l’ancien et le nouveau. On aurait pu envisager, par exemple, la délivrance d’un récépissé pour les contrôles d’identité approfondis… Et tout le monde aurait été content. Mais en jouant cette carte, il a passé l’épreuve « d’admissibilité » et, l’air de rien, Manuel Valls est devenu le premier flic de France. Pour l’instant, il est adopté. « On dirait du Sarko première période », comme l’écrit le journaliste du Monde Laurent Borredon, qui rapporte les propos d’un haut responsable de la police. Pour mémoire, l’état de grâce de Nicolas Sarkozy, en dehors de ses aficionados, n’a pas duré longtemps…

Il faut dire que le nouveau locataire de Beauvau est porté par les circonstances. Les événements d’Amiens et de Marseille – et leur médiatisation – ont fait grimper l’insécurité de plusieurs crans dans l’échelle des préoccupations des Français. +12 points depuis les élections présidentielles, d’après un sondage publié sur Atlantico.

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En fait les premières décisions prises à chaud concernent Marseille. Et là, Manuel Valls a montré son tempérament. À la différence de ses prédécesseurs qui ont surtout brassé du vent, en nommant un préfet de police placé directement sous ses ordres, il se campe au premier rang. Un énarque dirait sans doute que c’est une erreur de commandement, qu’il faut toujours mettre des fusibles entre la décision et l’application, mais, dans la police et la gendarmerie, on aime bien les gens qui prennent leurs patins.

N’empêche que l’idée d’installer un chef de la police et de la gendarmerie dans le département des Bouches-du-Rhône en laisse plus d’un sceptique. Cela nécessite de chambouler complètement la pyramide de la hiérarchie. Autrement dit, il faut revoir l’organisation des différentes directions, et notamment celle de la PJ. Au passage, Christiane Taubira peut-elle accepter qu’une autorité administrative glisse son nez dans les procédures judiciaires, comme cela peut se passer à Paris ? Même si l’ancien préfet de police s’en défendait. Dans son livre (11 propositions chocs pour rétablir la sécurité, aux éditions Fayard) le député Jean-Jacques Urvoas, l’un des aspirants au fauteuil, envisageait de donner au maire de Paris les mêmes pouvoirs de police que les autres maires. La police parisienne, disait-il « doit être placée sous le commandement d’un directeur régional soumis au préfet territorialement compétent, comme dans le reste du pays, et ce dernier doit redevenir le principal interlocuteur des élus. » Pourtant, on dit que c’est lui qui a soufflé cette idée d’un préfet de police marseillais copié-collé sur celui de Paris. « En créant le concept de métropole et de patron unique, on met de la cohésion dans une cité où il y a beaucoup trop de mouvements », dit-il dans Le Télégramme. Comme quoi il faut savoir s’adapter aux circonstances… Mais il est probable que le préfet de police de Marseille n’aura jamais les prérogatives de celui de la capitale.

Il est bien trop tôt pour comparer Manuel Valls à ses prédécesseurs, ni même à Nicolas Sarkozy. Je crois d’ailleurs que c’est son contraire. Alors que ce dernier était impulsif, parfois malavisé dans ses décisions, mais capable d’en changer, M. Valls semble se montrer à l’écoute. Mais il sera probablement inflexible une fois la décision prise.

On l’imagine proche de ses troupes mais en même temps sans concession. Son refus de participer au « gouvernement d’ouverture » de Nicolas Sarkozy situe bien le personnage. Certains policiers, notamment ceux qui ont manifesté contre la décision d’un juge lors de la campagne présidentielle, ont dû avoir les oreilles qui sifflent en entendant la petite phrase prononcée vendredi dernier devant la garde des Sceaux : « Je ne tolérerai pas les mises en cause des décisions de justice ».  Une menace à peine subliminale.

Dans les rangs de la police, le laxisme de ces derniers temps n’est donc plus de mise. Du coup, on entend moins les râleurs. Sinon, pour l’instant, peu de changements. Ah si, à Paris, il y a eu un arrivage de biscuits pour les gardés à vue

Apostille à l’affaire Merah : récit d’une affaire ratée

Manuel Valls a admis qu’il y avait eu des erreurs au niveau de la DCRI. Pour lui, Merah aurait dû être surveillé au vu de son profil et de ses nombreux déplacements au Moyen-Orient et en Afghanistan. Et les conclusions de l’enquête interne entraîneront à coup sûr des réformes sérieuses de la DCRI. Bien au-delà d’un changement de chef. C’est peut-être même l’ensemble de nos services de renseignements (12 à 15 000 personnes ?) qui pourrait être visé. La récente nomination d’un diplomate à la tête de la Direction du renseignement (DR) de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) donne une idée de la nouvelle ligne.

En Norvège, après les massacres perpétrés par Anders Behring Breivik, une commission gouvernementale a reconnu les erreurs de la police et des services de sécurité, estimant qu’ils auraient pu empêcher ou du moins limiter l’action du meurtrier. Chez nous, on n’en est pas là. Et si les propos du ministre de l’Intérieur laissent augurer une remise en cause des services de renseignements, il ne faut pas fermer les yeux sur les erreurs qui ont suivi, en aval du premier meurtre.

Car pour le moins, il n’y a pas eu symbiose entre la PJ et la DCRI. Il a fallu attendre l’assassinat des deux militaires, à Toulouse, pour que le contact s’établisse entre les deux services. Soit 5 jours après le premier assassinat. C’est seulement alors que l’adresse IP de la mère de Merah est repérée parmi les mails reçus par la première victime. Trop tard. Le massacre à l’école juive a lieu le lendemain. Ce délai de 5 jours est incompréhensible, alors que Mohamed Merah était considéré comme une « menace directe », selon M. Valls. Et qu’un rapport les présentait, lui et son frère, comme des proches d’islamistes radicaux qui avaient développé une filière de recrutement de candidats au djihad.

Ensuite, il y a eu la double saisine. De mémoire de flic, un truc qui n’a jamais fonctionné. Lorsque Mohamed Merah est identifié de façon quasi certaine comme l’auteur des crimes, la Brigade de recherche et d’intervention de Toulouse débarque en catastrophe près de son domicile. Avec des instructions simples : on planque sur toutes les issues et on le serre à la première occasion. Dans ce genre d’opération, en général, on attend que l’individu soit dans sa voiture. C’est là où les risques sont les moindres. Une opération classique pour des flics de l’antigang. J’imagine la tête du commandant qui dirigeait le groupe lorsqu’il s’est fait éconduire par les pontes de la DCRI sous prétexte que le poisson était trop gros pour lui. Il ne pouvait pas savoir que, lors d’une réunion qui s’était tenue un peu avant, les autorités avaient décidé de faire intervenir le RAID. Pourtant, le RAID, comme le GIGN, n’est pas là pour faire le boulot des autres mais pour prendre en charge les situations extrêmes. Lorsque les méthodes traditionnelles ne suffisent pas. Et pendant que les uns parlaient et que les autres fourbissaient leurs armes, il semble bien que personne ne surveillait le domicile de Merah. Du moins pas sérieusement, puisqu’il serait sorti de chez lui, peut-être même par deux fois. Sans que personne ne s’en aperçoive.

L’intention des hommes du RAID est de le surprendre dans son « premier » sommeil. En l’absence de toute surveillance physique ou technique, ils ne savent pas que leur client ne dort pas, puisqu’il vient de rentrer chez lui. Les policiers d’élite, équipés légers, s’approchent à pas de loup de la porte. On les imagine en chaussettes, sur la pointe des pieds… C’est une image, évidemment. Alors qu’ils s’apprêtent à faire exploser la porte, celle-ci s’entrouvre et Merah ouvre le feu. Un policier est sauvé par son gilet pare-balles et l’autre par son bouclier de protection. Les hommes du RAID ripostent à travers la porte avant de se replier.

Machine arrière. Ça doit râler pas mal dans les rangs. Y avait-il une autre méthode ? N’étant pas préfet, je ne me permettrais pas de critiquer. Je me souviens pourtant de cette affaire des environs de Nice, où le chef du GIPN avait refusé de donner l’assaut pour déloger un forcené retranché chez lui avec un fusil de chasse. Trop dangereux, avait-il dit. Pas d’otage, on peut attendre. C’était la sagesse. Mais pas l’avis des autorités. On a fait venir un autre patron. Bilan : deux policiers sérieusement blessés et l’individu est abattu, alors qu’il a tiré ses deux cartouches et que son arme est vide.

Pas simple, d’être flic !

C’est alors qu’à Toulouse, commencent des négociations invraisemblables : une véritable vitrine médiatique pour Merah. Au point qu’il pourra dire, plus tard (via le procureur de la République)  « Je suis fier d’avoir mis la France à genoux ». Et cela dure, dure…, au point que cela devient ridicule. Il y a bien quelqu’un qui a dû lâcher : On passe pour des charlots ! Donc, rebelote pour le RAID. En respectant un impératif présidentiel : le capturer vivant. Il faut savoir que les policiers de ce service s’entraînent régulièrement à des tirs de neutralisation dans des parties non-vitales. Pour eux, tuer un suspect, c’est presque un échec. Il s’agissait donc d’une consigne parfaitement inutile et qui, d’une certaine manière, les a déstabilisés. Et les voilà repartis à l’assaut avec un armement léger. Et de nouveau, ils sont accueillis par un feu nourri. Merah tire depuis sa salle de bain, réfugié dans sa baignoire et protégé par un frigo. Les premières balles ont fait péter les canalisations d’eau. Les fuites rendent la porte de la salle de bain étanche aux gaz. Il faudrait donc creuser un trou pour enfumer la pièce. Pas le temps. Merah jaillit de la salle de bain en tirant tous azimuts. C’est le deuxième groupe, celui de couverture, qui riposte, avec des armes en l’occurrence inadaptées dans un local si minuscule. Mais toujours en visant les jambes. Touché plusieurs fois par des munitions puissantes, mais à faible pouvoir d’arrêt, le forcené claudique vers la fenêtre en visant les hommes situés derrière et ceux qui sont en position, un peu plus loin. L’un d’eux tombe du balcon alors qu’il tente de se dégager et qu’une balle lui a éraflé la carotide. Merah arrose dans tous les sens. Un autre policier est blessé au pied. Finalement, un tireur d’élite enfreint la consigne et lui colle une balle dans la tête. Dans son rapport, en termes diplomatiques, le chef du RAID fait remarquer qu’en « s’interdisant l’utilisation de certaines techniques et de certaines armes alors même que les circonstances l’auraient justifiée », on a mis en danger la vie de ses hommes.

Donc, une affaire loupée de A à Z. Pourquoi ce désastre ? Il faut surtout se poser la question de savoir s’il est normal que le ministre de l’Intérieur dirige une opération de police judiciaire. Avec dans son ombre un procureur qui tente de sauver la face. Les policiers et les magistrats ont donc baissé la tête. Aucun n’a eu le courage de dire non.

Après l’affaire Neyret, comment gérer les indics ?

Plusieurs grosses pointures de la police sont venues soutenir Michel Neyret devant le conseil de discipline. Il serait un peu léger de n’y voir que du copinage. Car les ennuis judiciaires et administratifs de ce grand professionnel de la lutte contre le banditisme vont plus loin que son cas personnel et risquent de modifier en profondeur le fonctionnement même de la police judiciaire.

Bien sûr, on peut estimer que les méthodes anciennes ont vécu. Mais dans ce cas, par quoi les remplace-t-on ? Les techniques et la science ? La police technique et scientifique prend effectivement de plus en plus d’importance dans les enquêtes, au point parfois de juguler les enquêteurs. La découverte de cette petite fille prostrée sous deux cadavres, dans la BMW découverte criblée de balles, près du lac d’Annecy, en est la démonstration par l’absurde. On gèle une scène de crime – donc l’enquête – en attendant l’arrivée des techniciens. Durant huit heures ! Et si l’enfant avait été blessée ? Cela fait penser à cette mauvaise blague d’école (de police) : Que devez-vous faire en premier en présence d’un pendu ?… Couper la corde, au cas où il ne serait pas mort. On peut d’ailleurs s’étonner que les gendarmes aient fait venir leurs propres techniciens de l’Institut de recherche criminelle, basé dans la banlieue parisienne, alors que le siège de la Sous-direction des services techniques et scientifiques de la police nationale se trouve en périphérie de Lyon. Alors, police-gendarmerie, même rivalité que par le passé… On murmure d’ailleurs Place Beauvau que les deux services pourraient être regroupés au sein d’une nouvelle direction autonome. Cette « autonomie » fait bondir la PJ. La police technique et scientifique doit rester un outil à la disposition des enquêteurs, a rappelé non sans raison l’un de ses patrons.

Personne ne nie l’avancée considérable que représentent la science et les techniques modernes dans la recherche de preuves et d’indices, mais c’est toujours après le crime ou le délit. Or en matière de lutte contre le banditisme, pour être efficace, il faut intervenir en amont.

La police ADN ne marche pas à Marseille.

Bien sûr, on peut planter des écoutes sur les téléphones portables, glisser des balises sous les voitures des suspects, pressurer les dizaines de fichiers, ou pianoter frénétiquement sur les claviers d’ordinateurs, mais… où est le contact humain ?

Autrefois, il y avait autant de règlements de comptes que maintenant et la plupart des enquêtes, comme aujourd’hui, n’aboutissaient pas – mais on savait. On savait pourquoi et par qui. On maîtrisait la structure des bandes et il était même possible de prévoir le nom des prochaines victimes. À défaut de pouvoir empêcher ou réprimer un flingage, on en comprenait les raisons. Cette connaissance du milieu n’existe plus. Or, si l’on veut mettre un frein aux agissements de ces bandes qui gangrènent la région marseillaise, la police a besoin de tuyaux – donc d’indics. Depuis toujours, le système fonctionne ainsi. Même si les flics savent qu’ils jouent avec le feu.

Mais comment « noyauter » ces bandes qui vivent plus ou moins en autarcie ? Eh bien, comme il est impossible d’entrer par la porte, il faut passer par la fenêtre. Car ces jeunots du banditisme ont vieilli. Et peu à peu, ils sont en train de devenir des grands – avec tout ce que cela comporte. Et notamment le désir d’élargir leur environnement, voire de s’en éloigner, afin de mieux profiter de leur bien si mal acquis. Et pour cela, ils ont besoin de complices, des individus tout aussi douteux, mais moins dangereux et surtout beaucoup moins méfiants. Des escrocs, des faiseurs, des enjoliveurs, comme on les appelle (comme ceux que fréquentait Michel Neyret) qui vivent en périphérie du banditisme et qui, pour les enquêteurs, présentent l’avantage d’être visibles. C’est par eux que l’on peut avancer et cerner une équipe de truands. Ensuite, c’est du travail de PJ, presque la routine : surveillances et procédure. Il n’est même pas nécessaire de les prendre la main dans le sac. L’époque du flag est révolue et le code pénal est suffisamment riche pour bâtir un dossier béton pour association de malfaiteurs en emboîtant entre eux des faits qui, à l’unité, ne pèseraient pas lourd devant un juge.

Donc, si l’on veut lutter contre ce néo-banditisme, pas besoin de nouvelles lois, pas besoin de CRS ni de militaires, il faut des moyens de surveillance, de bons procéduriers et… des indics. Pas de ceux que l’on enregistre à la direction centrale et que l’on rétribue avec une poignée de figues (contre reçu, s’il vous plaît). Non, des gens qui sont presque des amis, ou qui peuvent le devenir, et auxquels il n’est pas interdit de rendre de petits services.

Cela nécessite de faire confiance aux policiers. La confiance ! Encore un mot « à l’ancienne ».

 

 

Marseille : vous avez dit guerre des gangs ?

Marseille est-elle à feu et à sang ? Non, a répondu le préfet délégué Alain Gardère sur l’antenne de RTL, c’est plutôt « une ville paisible ». Les habitants de l’agglomération ne seront sans doute pas tous d’accord, mais il est vrai que ce focus permanent sur la cité phocéenne donne une vision tronquée de la réalité.

Coupure de presse du 1er septembre 1989

En fait, on pourrait dire « rien de nouveau » : cela fait plus de 30 ans que Marseille est au hit-parade des règlements de comptes. Ainsi, en 1982, 67 affaires de ce type ont été recensées sur l’ensemble du territoire, dont plus du tiers sur le seul ressort du service de police judiciaire de Marseille (15 homicides et 15 tentatives d’homicide). En décembre 1985, Le Figaro, qui a fait deux pages sur le sujet hier, me citait : « L’explosion de la violence dans les rangs du grand banditisme est un phénomène indéniable ». Une remarque sans aucun intérêt, que je reprends uniquement pour montrer que l’histoire du banditisme bégaie. Et moi aussi. Mais je ne suis pas le seul : on retrouve à peu près les mêmes mots dans la presse de ces derniers jours.

Alors, pour Marseille, l’année 2012 sera-t-elle pire que 1982 ? On s’en approche. Mais on n’est pas dans un match de foot, et il est un peu ridicule de compter les morts. Il est plus positif de tenter de comprendre.

Il y a trente ans, les truands étaient plus âgés, plus structurés qu’aujourd’hui. La plupart étaient issus des milieux pauvres, mais dès qu’ils le pouvaient, ils s’en échappaient pour les beaux quartiers. Ils avaient alors pignon sur rue : bars, salles de jeux, sociétés en tous genres… Il était donc plus facile de les surveiller. C’était un milieu que la police pouvait pénétrer, même si quelques poulets s’y sont brûlé les ailes. Comme aujourd’hui, les clans éliminaient la concurrence ou ceux qui leur « avaient manqué », ou les jeunots qui venaient marcher sur leurs plates-bandes. Une bonne partie de ces meurtres ne rentraient d’ailleurs pas dans les statistiques pour la bonne raison que l’on ne retrouvait pas toujours les corps.

À l’époque, les voyous ne se servaient pas de la mythique Kalachnikov. Non, les truands préféraient le pistolet 11,43 ou encore le fusil à pompe, sans doute impressionnés par la puissance de feu (exagérée) de Steve Mac Queen dans le film Guet-apens. À la question d’un sénateur qui interpellait le ministre de l’Intérieur sur l’augmentation du nombre de saisies de kalaches (+113% en un an), Manuel Valls a répondu (JO du 30 août 2012) que le nombre d’armes de guerre récupérées par les services de police et de gendarmerie, toutes catégories confondues, était passé de 90 en 2010 à 165 en 2011. Il ne donnait pas de chiffres pour l’AK 47, mais estimait que « cet armement reste difficile à acquérir et peu répandu ». A-t-il raison ? Oui, car si l’on s’en tient au département des Bouches-du-Rhône, sur 265 armes d’épaule saisies en 2011, il n’y avait que 22 Kalachnikov (8 en 2010). Sur un total de 534 armes récupérées durant l’année (près de 4000 au plan national). Pour la petite histoire, on estime à environ cent millions le nombre de kalaches qui circulent sur la planète. Comme quoi, il faut se méfier des pourcentages – et surtout de l’effet loupe des médias.

Lors de sa réponse au sénateur, le ministre de l’Intérieur a également rappelé que « les travaux réglementaires de mise en application de la loi [du 6 mars 2012] sur le contrôle des armes font l’objet de la plus grande attention ». C’est le moins que l’on puisse dire, car, de mémoire, la proposition de loi remonte au mois d’avril 2010. En réalité, cela n’a guère d’importance : les voyous se soucient peu de la loi. Et même la justice réagit parfois bizarrement dans son application. Ainsi, il n’y a pas longtemps, un homme a été trouvé en possession d’un AK 47, d’un fusil à pompe et d’un pistolet 9 mm : les enquêteurs ont dû insister lourdement pour que le délinquant soit présenté à un juge. Il n’a d’ailleurs pas été incarcéré, mais placé sous contrôle judiciaire. Cette mansuétude, même si elle s’appuie sur de bonnes raisons juridiques, n’est certainement pas un bon message. C’est même peut-être un mauvais service rendu à l’intéressé.

Une quinzaine de règlements de comptes depuis le début de l’année, cela vaut-il la peine d’envoyer l’armée ? La sénatrice socialiste Samia Ghali a sans doute cédé à son exaspération, car la réponse se trouve dans notre constitution. Pour que l’armée dispose de pouvoirs de police, il faut que le Conseil des ministres et le Président de la République décrètent l’état de siège. Ce qui n’a jamais été fait sous la Ve République. La réponse de Manuel Valls a été d’une grande limpidité : « Il n’y a pas d’ennemi intérieur ». Autrement dit, les policiers ne font pas la guerre aux délinquants. Un langage que l’on n’avait pas entendu depuis longtemps.

Steve Mac Queen dans le film Guet-apens (capture d'écran)

Alors, si on n’envoie pas l’armée, on fait quoi ? Il faut d’abord s’interroger sur l’enjeu de ces règlements de comptes entre voyous : la concurrence pour le trafic de stups, l’exemplarité et l’argent. Tout cet argent liquide qu’il faut sortir de sa planque pour le blanchir. Ce qui entraîne, on s’en doute, pas mal de tentations. Et dans ce drôle de monde, les arnaques se paient cash. Le petit blanchissage, via des restos, des cafés, des pizzas…, c’est sans doute là le talon d’Achille de ces truands qui savent faire parler la poudre mais qui ne l’ont pas inventée. Il semble de bon augure que Pierre Moscovici participe au comité interministériel « sur Marseille » qui doit se réunir le 6 septembre autour du Premier ministre. Le ministre des Finances a sans doute un rôle important à jouer. Mais il ne sera pas facile d’inciter les agents du fisc à repérer ceux qui paient trop d’impôts. C’est contre-nature.

Et puisque l’on sait que les produits stupéfiants sont en grande partie responsables de ces règlements de comptes, quitte à passer aux yeux de Mme Ghali pour un « pseudo-gaucho-intello-bobo », je reste persuadé qu’il faut sécher le problème à la base. Et je ne vois pas le mal que l’on se fait à y réfléchir. D’autant que nous sommes nombreux, sans doute, à nous demander comment on peut installer des « salles de consommation à moindre risque » pour les drogues injectables (d’une certaine manière, on dépénalise) et refuser systématiquement toute avancée pour la drogue la plus consommée en France : le cannabis.

L’histoire sans fin de la sécurité

La gauche peut-elle innover en matière de sécurité ? En tout cas, elle reste divisée. Mais la droite serait mal venue de critiquer, car le bilan de cette dernière décennie n’est pas des plus brillants. Si on aligne les différentes décisions les unes derrière les autres, c’est comme une litanie. Les mêmes mots, les mêmes ficelles que l’on nous ressort à chaque changement de gouvernement, voire de ministre de l’Intérieur.

Et pour quel résultat…

 « La France a peur ! » C’est par cette phrase que le 18 février 1976 Roger Gicquel ouvre le journal de la première chaîne de télévision. Il parle de l’assassinat de Philippe Bertrand, un garçon de huit ans, enlevé à la sortie de l’école et tué par son ravisseur, Patrick Henry. Une affaire sordide comme il s’en produit hélas de temps à autre. Mais cette phrase va bien au-delà. Elle joue comme un déclencheur. C’est peut-être ce qui amène le premier ministre, Raymond Barre, à désigner un Comité d’études pour trouver des solutions à la criminalité violente.

L’ilotage ! C’est l’une des mesures phares du rapport pondu par ce comité (présidé par Alain Peyrefitte) intitulé pompeusement « Réponses à la violence ». Et, parmi les autres mesures préconisées, on trouve le redéploiement des forces de sécurité dans « les zones nouvelles d’urbanisation » et l’amélioration des relations entre la police et les citoyens.

Comme le début d’une rengaine.

Les maires montent au créneau – En 1983, la gauche est au pouvoir depuis deux ans et la police n’a pas encore retrouvé son régime de croisière. Les maires remettent à Pierre Mauroy, alors Premier ministre, un rapport intitulé « Face à la délinquance : prévention, répression, solidarité ». Ils réclament des mesures pour lutter contre l’insécurité. C’est ainsi que prend forme le Conseil national de prévention de la délinquance. Mulhouse est choisie comme ville test pour mettre en place un plan de prévention. Dix ans plus tard, le président de ce Conseil, Gilbert Bonnemaison, déplorera que la France se soit engagée « dans des démarches complètement sécuritaires ». La prévention n’a jamais eu sa chance. C’est pourtant l’une des trois branches de la police de proximité. Les deux autres étant la répression et l’information.

La régionalisation des services de police – C’est l’une des premières annonces du nouveau tandem de la place Beauvau, Charles Pasqua et Robert Pandraud. On est en 1986, c’est la première cohabitation.

L’ilotage : le retour – La mesure est dans le panier de Pierre Joxe, lorsqu’il rejoint l’Intérieur pour la seconde fois, après la réélection de François Mitterrand, en 1988. Il crée également l’Institut des hautes études de la sécurité. Dans les années qui suivent, les ministres se succèdent, le dernier avant la deuxième cohabitation est Paul Quilès. Il propose un plan d’action immédiate pour la sécurité. Mais, pas le temps. C’est la deuxième cohabitation. Charles Pasqua reprend les rênes avec dans sa besace un plan pluriannuel de modernisation de la police et une volonté de remobiliser les forces de l’ordre.

Les brigades anticriminalitées – La première a vu le jour à Paris, en 1993. Environ deux cents policiers qui tournaient la nuit dans la capitale et qui pouvaient à tout moment être regroupés pour faire face à un événement imprévu. En 1996, les BAC de jour sont mises en place sur l’ensemble du territoire. C’est un peu le fer de lance de la Sécurité publique.

Un juge place Beauvau – En 1995, après 14 ans de règne, Mitterrand s’efface et laisse la place à Jacques Chirac. Jean-Louis Debré, ancien juge d’instruction, devient ministre de l’Intérieur. Il installe le Haut Conseil de la déontologie de la police nationale et met en place les premières sûretés départementales.

L’époque des « petits sauvageons » – Acte manqué pour Chirac qui, deux ans après son élection, dissout l’Assemblée nationale. Jean-Pierre Chevènement devient ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de Lionel Jospin. Il prêche pour « des villes sûres pour des citoyens libres ». Avec la mise en place, en 1997, des premiers contrats locaux de sécurité. Parallèlement, un Conseil de sécurité intérieure est créé, placé sous la houlette du Premier ministre, pour mieux assurer l’impulsion de la politique de sécurité intérieure. À compter de 2002, il sera présidé par le Chef de l’État.

L’année suivante, Jean-Pierre Chevènement veut mettre un terme aux violences urbaines. Il fustige ces « petits sauvageons qui vivent dans le virtuel » et annonce le redéploiement de 3000 policiers et gendarmes dans 26 départements sensibles en vue de supprimer les « zones de non-droit ». Il se prononce pour la suspension des prestations familiales afin de responsabiliser les parents de mineurs délinquants. Aussitôt contredit par le Premier ministre. Cette année-là, on discutaille pour l’installation d’une police de proximité afin d’assurer une présence effective et rassurante dans les quartiers sensibles. Et, d’une seule voix, le gouvernement parle d’une politique de prévention « rénovée ».

La police de proximité – Le 26 avril 1999, le ministère de l’Intérieur publie la liste de 59 sites expérimentaux de police de proximité. En décembre, Lionel Jospin qualifie l’insécurité « d’inégalité sociale » et annonce un recrutement exceptionnel de 1000 policiers supplémentaires.

Pas de sheriffs dans la police – Au mois d’août 2000, Jean-Pierre Chevènement rend son tablier et laisse la place à Daniel Vaillant. Alors que le Premier ministre s’est déclaré hostile à la « municipalisation » de la police, des personnalités de droite proposent de placer le maire au centre du dispositif de sécurité de proximité. Daniel Vaillant refuse de voir se développer les polices municipales. L’année suivante, le Premier ministre enfonce le clou : « Sheriffiser la police, ce n’est pas la tradition républicaine de l’État en France ».

Chirac savonne la planche – Dans son allocution télévisée du 14 juillet 2001, Jacques Chirac insiste sur les problèmes de sécurité. On sent bien que c’est sur ce terrain qu’il va croiser le fer en vue de sa réélection. Plus tard, assumant sa défaite, Lionel Jospin dira : « Sur la question de l’insécurité, j’ai péché par naïveté… ».

Les policiers manifestent – Le 16 octobre 2001, deux policiers sont tués par un multirécidiviste, dans le Val-de-Marne. Quelques jours plus tard, plusieurs milliers d’entre eux manifestent dans toute la France. Le Premier ministre évoque la dramatique erreur d’appréciation des juges… Les policiers mettent en cause la loi sur la présomption d’innocence. Le député Julien Dray est chargé d’évaluer le texte.

 « L’impunité zéro » – Tandis que Lionel Jospin déplore une « récupération politique » de l’insécurité, Jacques Chirac prône l’impunité zéro. En vieux routier de la politique, il a enfourché le bon cheval : un sondage montre que l’insécurité est la préoccupation majeure des Français. Il est réélu le 5 mai 2002. Nicolas Sarkozy devient ministre de l’Intérieur. À l’ordre du jour, renforcement des moyens pour la justice et les forces de l’ordre, renforcement de la sécurité dans les transports d’Île-de-France et création du Conseil de sécurité qui a pour tâche d’assurer l’impulsion de la sécurité intérieure, de la coordonner et de l’évaluer.

Les Groupes d’intervention régionaux – Dans les jours qui suivent, une circulaire interministérielle donne naissance aux GIR. Il s’agit en fait d’entités, pourvues d’une cellule de permanents, rattachées à la PJ ou à la gendarmerie. Les GIR regroupent l’action de policiers, de gendarmes, de douaniers, d’agents des impôts et même d’agents de l’URSSAF. Leur objectif premier vise à lutter contre l’économie souterraine générée par le trafic de drogue au niveau d’une cité ou d’un quartier. Ces bandes de petits trafiquants étant souvent les premiers à mettre le feu aux poudres.

Le Flash-Ball – Alors que Daniel Vaillant, lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, avait répondu au mécontentement des policiers en les dotant de gilets pare-balles, Nicolas Sarkozy arme les policiers de « proximité » de Flash-Ball. Un peu comme Don Quichotte, il est parti en guerre contre la délinquance. Pour « la France des oubliés », comme il dit.

La sécurité, première des libertés – En juin, le premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, promet les moyens nécessaires pour lutter contre l’insécurité et, place Beauvau, on parle de la culture du résultat et de la nécessité d’alléger la loi sur la présomption d’innocence. Le programme sécuritaire du nouveau gouvernement est contenu dans la LOPSI du 29 août 2002. (En 2011, il y aura un deuxième P, pour « performance ». On sent tout de suite la différence.) Celle de 2002 porte un beau titre : « La sécurité, première des libertés » : création de 13 500 emplois dans la police et la gendarmerie, renforcement des pouvoirs des forces de l’ordre, création de nouveaux délits, comme le racolage passif, l’occupation de terrain par des gens du voyage, les attroupements dans les halls d’immeuble, la mendicité, etc.

La notation des préfets – Nicolas Sarkozy annonce qu’il publiera chaque mois la liste des 5 meilleurs et 5 plus mauvais départements sur le plan de la sécurité. Et, pour donner du baume au cœur aux préfets, il promet que 3500 CRS et gendarmes seront affectés à la sécurité publique.

On barricade les écoles – Xavier Darcos, ministre délégué à l’enseignement, souhaite équiper les établissements scolaires placés dans des zones sensibles de clôtures, portails, vidéo, etc. Il veut également permettre l’intervention des forces de l’ordre.

Vers la fin de la police de proximité – En février 2003, à Toulouse, Nicolas Sarkozy estime que la police de proximité est inutile si elle privilégie la prévention. Toutefois, quelques jours plus tard, rétropédalage. Pas question de la supprimer. Il est vrai qu’il faut d’abord trouver une solution de remplacement.

Le plan Vigipirate – En mai 2003, la tension monte d’un cran. Jean-Pierre Raffarin décide de porter le plan Vigipirate au niveau d’alerte orange.  Sauf erreur, il est aujourd’hui au niveau rouge. Il a même été écarlate en région Midi-Pyrénées, en Aude et en Lot-et-Garonne, le temps de l’affaire Merah.

Les chantiers prioritaires – Ils sont au nombre de six. C’est le plan de bataille du nouveau ministre de l’Intérieur, Dominique de Villepin. Mais Jacques Chirac le pousse aux fesses. En novembre, il appelle le gouvernement à aller plus loin. Il souhaite par exemple la création d’établissements pour « accueillir » les auteurs de crimes les plus graves, après leur sortie de prison. Et il veut également renforcer la lutte contre l’immigration irrégulière. Dominique de Villepin fixe la barre à 20 000 expulsions pour 2005. Mais cette année-là, il rejoint l’Hôtel Matignon et Nicolas Sarkozy retrouve ses pantoufles place Beauvau.

Les émeutes de 2005 – Alors qu’au mois de mars, d’après un sondage, la sécurité ne venait plus qu’au 9° rang de la préoccupation des Français, patatras ! en novembre les banlieues explosent. Signe évident d’un affolement des autorités, le président Chirac décrète l’état d’urgence. Une mesure jusqu’alors appliquée uniquement lors de la guerre d’Algérie. Ces désordres favoriseront sans doute Nicolas Sarkozy dans sa course à la présidence.

Les UTEQ – En 2008, Michèle Alliot-Marie annonce l’expérimentation de nouvelles unités destinées aux quartiers sensibles, les UTEQ. Avec pour objectif la lutte contre le trafic de stups et le rétablissement d’un lien de confiance entre la police et la population.

Les compagnies de sécurisation – Une vieille idée parisienne qui revient à la surface : en septembre 2008 la première sécu est installée à Bobigny. Elle a pour mission de lutter contre la petite et la moyenne délinquance et contre les violences urbaines.

Une pause pour réfléchir…  En octobre, la ministre annonce la création d’un Conseil économique et scientifique de sécurité, chargé de réfléchir aux « enjeux globaux » de la sécurité et de définir « quel niveau de sécurité mettre en place et dans quelles conditions économiques et techniques ».

La Place Vendôme en effervescence – Rachida Dati est sur tous les fronts. Les lois répressives pleuvent. Concernant les jeunes délinquants, elle annonce son intention de diminuer l’âge de la responsabilité pénale avec la possibilité d’une condamnation à la prison dès l’âge de 12 ans. François Fillon s’y oppose.

Protéger les Français – C’est le discours répété du président de la République. À Orléans, il annonce qu’en 2009, toute l’action du gouvernement « sera tendue vers cet objectif ». Il débloque cent millions d’euros pour la police et la gendarmerie.

Les référents – MAM veut consolider les liens entre la police et la population pour mieux lutter contre les vols à main armée dont le nombre ne cesse de croître. Outre la vidéosurveillance, elle préconise des contrôles fixes et itinérants dans les quartiers les plus touchés et une « coopération de terrain » via la mise en place de policiers et de gendarmes référents.

Les violences en bandes – C’est le nouveau cheval de bataille du président Sarkozy. En mars 2009, il annonce 16 mesures nouvelles pour combattre ce phénomène. Et quelques mois plus tard, en réaction à des faits divers, il tance ses ministres en leur rappelant les objectifs essentiels de la politique de sécurité : « La lutte contre les bandes et les violences urbaines, la lutte contre les violences à l’école, la répression des trafics criminels, en particulier le trafic de drogue ». Dans le même temps, Martine Aubry sort un « livre noir » qui dresse un bilan des « atteintes aux libertés publiques ».

Les brigades spéciales de terrain – C’est Brice Hortefeux qui lance le projet, en 2010. Il s’agit de créer des unités dont la mission est de mettre fin à la délinquance tout en rétablissant un lien avec la population. La première BST est installée en Seine-Saint-Denis.

Les patrouilleurs – En 2011, Claude Guéant préfère les patrouilleurs. Pour faire simple, il s’agit de policiers dont la mission est de déambuler dans une rue, dans un quartier.  Il s’agit par leur présence de rassurer les gens et de nouer le contact (avec la population). En 1976, on appelait ça l’ilotage.

La LOPPSI de 2011 – La loi d’orientation et de programmation pour la performance sur la sécurité prévoit de nouvelles mesures pour permettre aux forces de l’ordre de « s’adapter avec le maximum de réactivité possible aux évolutions de la délinquance ». Malgré la promesse d’une enveloppe financière cinq fois plus élevée qu’en 2009, l’ouverture sur la sécurité privée et sur les polices municipales est presque un aveu d’échec.

Le sentiment d’insécurité – Après des années de pression, les Français sont redescendus sur terre. Dans un sondage du mois de mars, 8% seulement déclaraient que la question pèserait dans leur vote à l’élection présidentielle. Contre 14% pour les impôts et les taxes. Et 36% pour le pouvoir d’achat et le chômage.

Et maintenant ? Les têtes ont changé mais les problèmes demeurent. Après les événements d’Amiens, François Hollande a promis de mettre en œuvre tous les moyens de l’État pour lutter contre les violences. Quant à Manuel Valls, il planche sur la mise en place de nouvelles « zones de sécurité prioritaire ». Mais il a dit aussi, lors d’une interview, qu’il fallait avant tout s’attaquer aux causes. Or les violences urbaines sont souvent liées au trafic de drogue. Et, partout de par le monde, la lutte contre ce fléau a échoué. « C’est un peu comme si on était sur un vélo d’appartement ; on pédale, on pédale, mais le problème demeure », a dit Juan Manuel Santos, le chef d’État colombien. Il y a peut-être là un véritable sujet de réflexion…

Il est également intéressant de savoir que François Lamy, le ministre délégué à la Ville, a porte ouverte place Beauvau, car la police ne peut pas tout. Elle agit un peu comme un antalgique, elle calme le mal mais elle ne le supprime pas.

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