LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Actualité (Page 12 of 71)

La loi sur le renseignement est-elle constitutionnelle ?

Le gouvernement n’a pas souhaité solliciter le Conseil Constitutionnel sur le projet de loi sur le renseignement. À gauche comme à droite, certains députés – très peu – ont renâclé, estimant que cela jetait la suspicion sur un texte qui concerne nos libertés fondamentales. Puis une voix inattendue s’est élevée, celle de l’ancien Premier ministre François Fillon : il s’est fait fort de réunir 60 parlementaires pour sauter le pas.

FillonDu coup, je me suis abonné à son compte twitter, histoire de ne pas l’oublier, quand le moment sera venu.

La politique est quand même un drôle de truc… En 2006, le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy soutient une loi pour lutter contre le terrorisme. Celle-ci prévoit entre autres de recueillir les données conservées par les opérateurs de téléphonie mobile sans l’aval d’un magistrat. Tollé parmi les sénateurs socialistes, qui dénoncent le passage d’un contrôle judiciaire à un contrôle administratif. Ils saisissent le Conseil constitutionnel. Continue reading

Loi sur le renseignement : les petits, les gros, les bons et les méchants…

Lundi 13 avril, les députés vont débattre de la nouvelle loi sur le renseignement. La discussion risque de tourner court puisque, fait rare dans l’hémicycle, droite et gauche sont quasi d’accord. Dans le même temps, devant les portes de l’Assemblée, des opposants vont manifester. « Les citoyens doivent montrer qu’ils refusent de céder à la logique de surveillance généralisée et sans garantie présentée comme indispensable par le gouvernement », disent les organisateurs.

Téléphone  2À défaut d’y trouver les syndicats de police, seront représentés dans cette manifestation: les magistrats, les journalistes, les avocats ainsi que les défenseurs des droits de l’homme. Et pourtant, je ne suis pas sûr que cette loi, mitonnée par des cerveaux de la politique, de l’armée et de la police, fasse l’unanimité chez les agents de terrain.

En tout cas, elle met un terme à la légende de la France « pays des droits de l’homme ». Et pour paraphraser la déclaration de 1789, une société où la séparation des pouvoirs n’est pas affirmée, « n’a point de Constitution ».

Bizarrement, la presse n’est guère convaincante lorsqu’elle dénonce ce projet de loi. Probablement en raison de la difficulté à visionner, à comprendre et à décrire les procédés techniques. Les journalistes ne sont pas les seuls à ramer. Certains députés eux-mêmes reconnaissent ne pas y piper grand-chose, se contentant de faire confiance au grand… ordinateur, Jean-Jacques Urvoas.

Je me demande si cette loi portera son nom ! Continue reading

Un avenir privé de vie privée

Du long séjour à l’Élysée de François Mitterrand, il restera la fin de la peine de mort, et de celui de François Hollande, la fin de la vie privée. Politiquement, cela n’a guère d’importance, puisque plus de la moitié des Français s’en ficheraient, selon un sondage tout récent d’Amnesty International. Ce désintérêt part d’un argument souvent entendu : on n’a rien à cacher ! Alors, qui a raison, celui qui se bat pour protéger sa bulle ou celui qui se dit que la sécurité passe avant tout ?

Sondage Amnesty International

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La vie privée ne se résume pas à deux mots. Mais comment la définir ? S’agit-il simplement des petits secrets de nos conversations ou de nos sms ; ou de la protection de notre ordi ; ou de nos données personnelles… Il serait réducteur de croire cela : notre vie privée, c’est notre personnalité. Au point que la cour de cassation a envisagé, il y a une cinquantaine d’années, et pour la première fois, l’existence de droits attachés à la personnalité. Ensuite, la jurisprudence a tracé la route, et, en 1994, lors de l’apparition du nouveau Code pénal, un chapitre a été consacré aux « atteintes à la personnalité ». La section 1 de ce chapitre vise les atteintes à la vie privée d’une personne, lorsque celles-ci sont effectuées sans son consentement.

Les droits de la personnalité concernent, outre le droit au respect de la vie privée, le droit sur les données à caractère personnel, le droit à la présomption d’innocence, le droit à l’image, le droit moral de l’auteur, le droit de réponse, les droits sur son propre corps… Continue reading

La Cour règle son compte à la PJ

La Cour des comptes a récemment rendu public la synthèse de son contrôle sur « la fonction de police judiciaire dans la police et la gendarmerie nationales » ainsi que ses recommandations.

Impression générale : un bon point pour la préfecture de police de Paris et carton jaune pour les autres services. Si le coût de l’ensemble de l’activité de la police judiciaire est impressionnant (plus de 4 milliards d’euros en 2013), les dix pages du rapport avancent peu de chiffres, mais tentent plutôt une analyse technocratique de sa gestion.

Organigramme police gendamerie au MID’ailleurs, comment traduire en arithmétique binaire une activité tellement diversifiée ! En fait, en mettant l’accent sur la rivalité entre les services, derrière les mots, j’ai eu l’impression d’un lâcher de ballon-sonde sur un sujet brûlant : la fusion de la police et de la gendarmerie.

La police judiciaire est, avec le procureur, le juge et l’avocat, au centre de l’enquête pénale. Mais lorsque l’on parle de police judiciaire, on a tendance à focaliser sur la PJ, voire sur le Quai des Orfèvres. Il s’agit là d’une image de fiction parfois captivante mais bien loin de la réalité. En fait de nombreux fonctionnaires ou militaires effectuent des actes de police judiciaire. Le nombre d’OPJ ou d’APJ spécialisés ne cessant d’ailleurs d’augmenter. On cite le plus souvent les agents des douanes et ceux des services fiscaux, mais ce sont des dizaines d’agents publics ou privés et de militaires qui assurent des fonctions de police judiciaire. Dans des domaines que parfois on ne soupçonne même pas, comme l’environnement, la pollution de l’air, la santé publique ou les infractions commises en Antarctique. Continue reading

L’attentat de la rue des Rosiers vu avec nos yeux d’aujourd’hui

Il y a quelques jours, l’attentat de la rue des Rosiers est revenu dans l’actualité après que le juge Trévidic ait lancé des mandats d’arrêt internationaux contre trois suspects. Une annonce qui tombe à pic dans le contexte actuel, au point que cela fait un peu coup de com’. Mais ne boudons pas : la justice et les enquêteurs se sont montrés à la hauteur.

Pourtant, devant ce rappel d’un événement vieux de 33 ans, il m’a paru intéressant d’opérer un petit retour en arrière. Voici ce que j’écrivais, en 2007 dans La petite histoire de la PJ, sur l’année 1982 :

rue marbeuf

Cliquer sur l’image pour voir la vidéo de l’Ina

« La France est un champ de bataille. Action directe se scinde en trois. Une partie renonce à la lutte armée, un autre fait alliance avec la Fraction armée rouge et la dernière, dite branche lyonnaise, se lance dans des actions antisémites. En mars, une bombe explose dans le train Le Capitole : cinq morts, vingt-sept blessés. En avril, une voiture piégée explose, rue Marbeuf, à Paris [devant les bureaux d’un hebdomadaire libyen] : un mort et soixante-trois blessés. Continue reading

Lutte antiterroriste : où va-t-on ?

Après les événements tragiques du mois de janvier, Manuel Valls a annoncé un nouveau plan de lutte contre le terrorisme. Il s’agit, a-t-il dit, de prendre des mesures « exceptionnelles, et non pas d’exception ». Comme j’ai parfois du mal à comprendre le langage politique, j’ai sorti mon dico, lequel, pour le mot exceptionnel, donne cette définition : qui n’est pas habituel, qui n’est pas ordinaire, qui constitue une exception.

J’ai refermé.

Capture6Parmi ces mesures exceptionnelles, il y a celles qui existent déjà, comme le plan Vigipirate, qui mobilise plus de 120 000 policiers et gendarmes et 10 000 militaires, ou le remplacement de la DCRI par la DGSI, ou la création du SCRT (service central du renseignement territorial), qui se rapproche de plus en plus de ce qu’étaient les RG, supprimés en 2008.

Dans celles qui sont à venir, il y a la création sur 3 ans de 2680 postes dont 1400 pour le ministère de l’Intérieur, dont 1100 pour les services chargés de lutter contre le terrorisme, dont 500 pour la DGSI. Continue reading

Qui veut la peau de la PP ?

Bernard Petit, le directeur du 36 quai des Orfèvres, la PJ de la préfecture de police, vient d’être mis en examen. On lui reproche d’avoir violé le secret de l’instruction dans l’affaire Rocancourt et d’avoir fourni des informations au préfet Christian Prouteau.

Plaque Quai des OrfèvresOr, si la violation du secret de l’instruction est un délit banal et rarement poursuivi, le deuxième chef d’inculpation est plus grave. C’est une infraction créée par la loi du 9 mars 2004, dite Perben II. Elle vise toute personne qui, du fait de ses fonctions, a connaissance d’informations issues d’une enquête ou d’une instruction en cours concernant un crime ou un délit, et qui en informerait « sciemment » un suspect dans le dessein d’entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité (art. 434-7-2 du CP).

Je ne crois pas me tromper en disant qu’à l’origine, ce texte visait essentiellement les avocats. Continue reading

Cocaïne, fric et flics

L’arrestation ces derniers jours de policiers de la PAF, mis en cause dans un trafic qu’ils sont censés surveiller ; la disparition d’une cinquantaine de kilos de cocaïne dans la salle des scellés de la brigade des stups du quai des Orfèvres, autant d’affaires récentes qui plombent la police. Une seule raison : le fric. En octobre dernier, c’était un ancien chef d’Interpol qui était mis sous les verrous en Équateur, et l’on se souvient des nombreuses arrestations parmi les autorités de l’aéroport de la station balnéaire de Punta Cana, en République Dominicaine, après la découverte de 682 kg de cette drogue dans un Falcon 50 français, en mars 2014.

NarcopsLe trafic de stupéfiants, et notamment celui de la cocaïne, génère de tels bénéfices que tous les intermédiaires s’enrichissent… en une traînée de poudre – du moins s’ils ne vont pas en prison. Quant aux « cocotrafiquants », le fric les rend omnipuissants. Devant ces kilos de drogue qui défilent sous leur nez et qui disparaissent en fumée dans les incinérateurs, certains flics craquent. Ils passent du côté obscur. Même s’ils ne sont que quelques-uns, ils font mal à la corporation. Mais, comme dit le directeur général Jean-Marc Falcone, « la police nationale fait le ménage dans sa propre institution ». Continue reading

Des policiers, larme à l’œil, sous le feu des applaudissements… la révolution n’est pas loin

La presse se répète un peu dans l’après 11-Janvier, les politiques mouillent le doigt pour prendre le vent, les analystes nous abreuvent d’idées réductrices et la vie reprend – mais pas comme avant.

Agent CharlieNormal, lorsque près de 4 millions de personnes relèvent la tête pour dire ça suffit, il y a nécessairement un avant et un après.

Pour envisager l’après, il n’est peut-être pas inutile de se souvenir de l’avant…

C’est au début des années 90 qu’apparaît pour la première fois l’expression « sécurité intérieure » dans un texte officiel, un décret qui installe un service destiné à la réflexion et à la recherche créé deux ans plus tôt par Pierre Joxe : l’Institut des hautes études de sécurité intérieure.

Mais rapidement la sécurité intérieure va devenir un enjeu politique. Ce qui, dans les années suivantes, conduit à autant de dispositions m’as-tu-vu qu’à des mesures sérieuses. Parmi ces dernières, certaines entraînent de sérieux bouleversements dans les services de l’État Continue reading

Débriefing grognon

Hier, j’ai essayé de regarder un concert de Nolwenn Leroy à la télé, mais je n’ai pas accroché. Alors, j’ai zappé sur BFM et je suis resté planté devant ces images où, pendant des heures, rien ne se passait. Putain, je m’en veux !

En fait, comme tout le monde, je me suis senti concerné par cette chasse à l’homme – concerné et inutile. Avec l’envie infantile de prendre les armes et de participer. Alors aujourd’hui, le calme presque revenu, je ressasse les événements. Et en récupérant mes années de trop et mon sens critique, je reste devant cette interrogation : La France est-elle en guerre ?

On a entendu beaucoup de fadaises durant ces 48 heures, les spécialistes-sic y sont allés de leur refrain, mais il y a eu quand même quelques voix intelligentes. Les propos de Serge July me sont revenus en mémoire. Interviewé sur une radio, il disait que l’attaque contre Charlie Hebdo n’était pas un attentat, mais une exécution. Autrement dit (ce n’est plus lui qui parle) une sorte de mission commando. Eh oui ! aujourd’hui, on utilise un vocabulaire qui rappelle 39-45. Nous sommes donc en guerre, non pas contre un État, mais contre une idéologie obscure. Il faut bien en être conscient puisque des militaires français sont engagés sur plusieurs fronts.

Et si l’on raisonne froidement, nous sommes bien obligés d’en accepter les risques… Continue reading

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