Par un curieux effet de distorsion, dans ce procès de Villiers-le-Bel, on parle surtout des témoins sous X. Vont-ils venir, ne pas venir, confirmer leurs déclarations, se rétracter… Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce jeu du chat et de la souris ne sied pas à la sérénité d’une cour d’assises.
Ce recours à l’anonymat résulte du souci de rassurer les témoins. S’il s’agit le plus souvent d’une initiative des enquêteurs, ce ne sont pas eux qui décident, mais les magistrats. En l’occurrence, le juge des libertés et de la détention, à la requête du procureur de la République ou du juge d’instruction. Et dans une affaire qui touche à la paix publique, on imagine qu’il a dû sérieusement potasser le dossier avant de prendre sa décision…
La marge de manœuvre est étroite, car la justice ne peut être rendue en catimini : une justice qui se cache serait l’aveu de l’échec de notre société. Elle doit donc être publique. Alors comment concilier la protection des témoins et la nécessité de rendre justice ?
En fait, le processus est basé sur un mot qui aujourd’hui semble avoir une connotation obsolète : la confiance.
Dans la pratique, le policier recueille le témoignage par procès-verbal, comme il est fait habituellement, mais à la place de l’état-civil, il se contente de mentionner le numéro d’ordre attribué au témoin. Dans le corps du P-V, il ne doit pas être fait mention d’éléments qui, par rapprochements, permettraient son identification.
C’est le procureur de la République qui est chargé du secret de son état-civil. La révélation de l’identité du témoin sous X tombe sous le coup de la loi (5 ans de prison et 75 000 € d’amende).
Mais il ne faut pas être naïf. Le plus souvent, on sait bien que ce sont les enquêteurs qui tirent les ficelles. Ce sont eux, sur le terrain, qui peuvent trouver le témoin et le convaincre de parler en lui assurant la plus complète discrétion. Le problème devient épineux lorsque ce sont des policiers qui se trouvent parmi les victimes. Comment éviter la suspicion ?
Ainsi, dans cette affaire, on entend dire que certains témoins pourraient être des indics de la police. C’est évidemment un habile moyen pour la défense, laquelle a beau jeu de dire aux jurés que l’accusation porte sur les déclarations des victimes – qui sont des policiers – et sur les témoignages d’inconnus – qui sont sous l’emprise de policiers. Une façon de semer le trouble parmi les esprits : témoin anonyme ou informateur ? Car s’il s’agit d’indics, la jurisprudence considère qu’ils ne peuvent témoigner.
Alors, comment faudrait-il faire ? Je ne sais pas. On se trouve devant la difficulté classique, habituelle dans le délit de rébellion : le policier peut-il être à la fois la victime et celui « qui punit » la victime ?
« Il ne suffit pas d’avoir juridiquement raison pour être médiatiquement compris », disait le procureur Burgelin. Cette réflexion colle assez bien à ce procès, me semble-t-il.
Merci pour vos textes, en plus de leur intérêt, ils me donnent le sentiment réconfortant que je n’ai pas gaspillé mon temps, même quand j’en lis un au lieu de bosser – je travaille à mon compte – un vrai plaisir de vous lire, et j’ai appris plein de choses dont je n’avais aucune idée, c’est merveilleux. Merci
L’émission sur Dominici est un échec, sous la barre des 10% pour France 2. Et c’est tant mieux.
Par une lettre anonyme, signée de ma main…..
@hermine
Moi aussi, j’ai la mienne. Ni la PJ et ni la Justice ne se sont trompées. Il est évident que dans des affaires pareilles, il peut y avoir des failles. Mais c’est tout aussi remarquable que des gens prennent le parti opposé pour rentrer dans le dossier, se faire connaître pour devenir de petites vedettes.
@15H 58
Mêlez-vous de vos affaires. J’apprécie le blog Moréas. Jamais d’imbécillités. C’est appréciable.
J’attends des explications claires et nettes sur le train fantôme de 16h 58.
@ Georges Moréas
Pourquoi le blog concernant l’Affaire Grégory ne fonctionne-t-il plus, ou mal ?
Réponse :
C’est le blog qui a des problèmes techniques. Personnellement, je ne peux rien faire. Désolé.
GM
Rédigé par : max | le 30 juin 2010 à 11:17
@Max
Ouvrez votre propre blog, Max! Si celui de Moréas vous manque tant. Un nouveau Blog Blogue mieux!
Es-ce que l’on pourrait avoir accès au blog de l’affaire Grégory?
Rien ne fonctionne depuis le 12 avril.
Merci
L’affaire Dominici ? Pourquoi revenir dessus ? Pour ma part j’ai mon intime conviction. Enfin !
Ce soir , l’affaire Dominici revisitée. La PJ n’a pas fait du bon travail ? Mais si, bien sûr. Toutes les affaires judiciaires médiatisées sont l’objet de contre-enquêtes pour tenter de dénoncer une erreur judiciaire. C’est un grand classique facilité par le manque d’aveux, ou s’il y a, la rétractation. En plus, le cas échéant, pas de cadavre, pas de crime.
Les criminels font de grands progrès, plus vite que la police, sans doute. A force de voir les séries télé, les coupables savent où ne pas mettre les pieds.
@ Georges Moréas
Pourquoi le blog concernant l’Affaire Grégory ne fonctionne-t-il plus, ou mal ?
Réponse :
C’est le blog qui a des problèmes techniques. Personnellement, je ne peux rien faire. Désolé.
GM
Au delà de cette affaire dont je ne connais ni les tenants, ni les aboutissants, je conserverai toujours un doute des plus sérieux concernant la reconnaissance légale des « témoins anonymes ».
En effet, ce procédé largement et depuis longtemps usité outre Quiévrain donna lieu à de nombreuses interpellations de la part de la défense et – enquêtes sérieusement dilligentées- un constat indubitable s’imposa ; le nombre de témoins « bien connus de nous mêmes mais désirant conserver l’anonymat » invoqués par les rédacteurs de P.V (Pro-Jusdticia, en Belgique) présentant un lien de parenté ou accusants de contacts fréquents avec les signataires des-dits P.V dépassait très largement les limites admissibles de la « coïncidence »…
Nombre d’affaires « sérieuses » se retrouvèrent ainsi frappées d’un « doute légitime »… et bénéficièrent d’un « doute légitime » ou d’une « exécution sommaire de boucs émissaires »… dans les deux cas hors de toute limites acceptables en respect du mot « justice ».
La célèbre phrase attribuée (à tort !) à Simon de Montfort possédait quand même un peu plus de « gueule » ! « Tuez les tous; Dieu reconnaitra les siens ! »
Même pas besoin de témoins assumant ou pas, dis-donc !
Alors, témoins « anonyme » ; oui -pourquoi pas ?-… mais dument averti des « ses droits » ; invocation de « l’erreur » interdite sous peine d’encourir une peine identique à celle du coupable effectif !
Ce genre d’histoire me rapelle aussi un sinistre bilan effectué après saisie des archives de la Gestapo, après guerre… Certaine grandes villes comptèrent plus de lettres de dénonciations qu’elle n’avaient d’habitant durant l’occupation !
Ahhhh ! L’anonymat…
Bonjour,
Ce problème de témoins serait moins problématique si le procès concernant les evènements à l’origine des émeutes avait déjà eu lieu . La Justice ne procédant pas dans l’ordre des choses, elle devient l’objet de plus de suspicions .
Si on était aussi capable en France de protéger réellement les témoins en leur donnant les moyens de changer de domicile, de nom ou autres moyens de protection, il n’y aurait pas besoin de témoins anonymes .
L’Italie a fait de gros progrès contre la mafia car ils se sont dotés des moyens de protéger l’ensemble des acteurs de la lutte, donc les témoins et les indicateurs ; faisons de même en France …