LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Le juge d'instruction : une star déchue

Le statut du juge d’instruction est-il anachronique ? Pour le président de la République, cela ne fait guère de doute, et la commission qu’il a désignée pour « réfléchir » à la réforme de la procédure pénale lui a emboîté le pas. Dans un questionnaire adressé aux différents acteurs judiciaires, son président, Philippe Léger (ancien avocat général de la Cour de justice des communautés européennes), pose la question sans fioritures : êtes-vous pour ou contre le maintien du juge d’instruction ?

juge_intimeconviction.1231143053.jpgPour Jean-Claude Magendie, le premier président de la Cour d’appel de Paris (interview publiée dans Le Figaro du 11 décembre 2008), c’est clair : « Certains juges d’instruction ont conçu leur fonction de manière trop solitaire, coupés de l’institution, refusant d’échanger sur leurs pratiques. Je le dis depuis longtemps, la seule façon d’éviter la suppression du magistrat instructeur serait qu’il s’intègre dans un travail collectif (…) En tout cas, la starisation du juge d’instruction a vécu ».

Si les insuffisances du juge Burgaud, dans l’affaire d’Outreau, ont cristallisé les griefs contre le juge d’instruction, on peut dire que la goutte d’eau, c’est la convocation manu militari de l’ancien directeur de Libération. Même si l’on sait à présent que l’intéressé s’est donné le beau rôle en fustigeant exagérément le comportement des policiers, les méthodes de la juge Muriel Josié ont été désapprouvées par la plupart de ses confrères. Le moyen était légal a estimé sa hiérarchie, mais disproportionné par rapport à la nature de l’infraction, et du coup attentatoire à la dignité humaine. Elle a piqué un coup de sang, a-t-on murmuré, comme pour l’excuser.

Donc, puisque le juge ne parvient pas à instruire à charge et à décharge, on va chambouler le système judiciaire de façon, nous promet-on, à donner davantage de droits à la défense. On s’acheminerait alors vers un système de type anglo-saxon où les avocats disposent d’un véritable pouvoir de contre-enquête. Mais du coup, on se demande si l’on ne va pas vers une justice à deux vitesses…

Pourquoi, ce n’est pas déjà le cas ?

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Dans la note précédente sur la réforme de la procédure pénale, les commentaires ont été particulièrement constructifs (ici), je me permets d’en recommander la lecture.

32 Comments

  1. Nicolas

    Deux points de vue totalement contradictoires mais intéressants sur le sort des juges d’instruction, publiés dans le Monde daté de ce jour : ceux d’Eva JOLY (ancienne juge d’instruction célèbre notamment pour avoir instruit l’affaire Elf) et Hervé LEHMAN (avocat et ancien juge d’instruction).
    La première fustige la décision du Président de la République en mettant en avant la nécessité de préserver l’indépendance de la justice par rapport au pouvoir politique. Le second considère que le magistrat instructeur « exerce un pouvoir trop solitaire, inefficace et peu démocratique », en rappelant que d’autres systèmes peuvent être imaginés.

  2. J2L

    A Nicolas; bj; je posais (mal) la question de savoir qui évalue, qui note le JI et non pas qui contrôle son travail.. J’ai vécu des affaires ou le JI ne faisait pas que délivrer un non lieu mais démontrait la non existence du délit pour lequel le mis en cause avait été mis en examen, à la suite de convictions hatives d’un service de Police. Le JI peut mettre en examen (ce n’est pas une condamnation il délivre au prévenu de nouveaux droits..) et ne pas confirmer. Ces situations ne causeraient quasiment pas de préjudice si elles n’étaient pas étalées dans la presse..C’est là qu’il faudrait légiférer (en respectant la sacro sainte liberté de la presse, elle est absolument necessaire)
    Deux têtes valent mieux qu’une, comme dit le jockey sur son cheval,treve de plaisanterie, le juge d’instruction n’est pas qu’un autre Policier, il est avant tout un magistrat comme tu le dis insensible et indépendant et travaille de concert avec des Policiers insensibles également . Enfin plutôt que de supprimer le Juge d’Instruction, nos Politiques devraient supprimer simplement les artciles du Code qui les em..comme les abus de biens sociaux petit à petit.

  3. michel-j

    Bien entendu ! Suivra ensuite l’actualisation du rêve mercantile de l’inventeur des « chalandonnettes » (ces house-board terrestres surfant sur la vague à la moindre ondée); la privatisation des prisons… de nouveaux colossaux fromages républicains pour les copains et les coquins, voire les anis qui aiment exploser (dans plusieurs acceptations du terme) le Cercle de leurs coreligionnaires.

    Les gouvernements se succèdent; le scandaleux déséquilibre des balances ( tant celle de la justice que celle des « paiements ») reste toujours aussi manifeste.

  4. hugues Vessemont

    que le affaires soient étouffées dans l’œuf ne m’étonne pas de Sarkozy, mais le pire que je crains c’est le processus de privatisation du système judiciaire français, c’est l’autre volet des changement annoncés

  5. michel-j

    Merci Eric. De même pour vous et ceux qui vous sont chers.

    La déclinaison du mot permet ouvre pas mal d’horizons… je me suis laissé dire que le showbiz et les politiques n’étaient pas les seuls à apprécier les charmes de la Mamounia et des ses environs… et les amandes sont tellement appréciées sous toutes leurs formes… y compris celle des yeux !

  6. Eric Lefèvre

    Michel-J

    Un petit macaron marocain aux amandes … Même le diable ne résiste pas ! ))

    Meilleurs voeux à vous.

  7. michel-j

    2 vitesses la « justice » ?… Comme c’est severe !… alors que Renault, avec l’avenement de sa « boite 6 » fait carrement office de ringard et que les poids lours les mieux lotis en nombre de vitesses sont encore loin du compte !

    Pour ma part, en tant que client assidu, c’est beaucoup moins au juge d’instruction que je me serais attaque dans l’espoir de voir eclore un jour un « vrai semblant d’essai de justice » qu’en tous ces pontes cireurs de pompes politiques des hautes instances judiciaires qui vendraient le systeme entier pour un petit marocain.

    Mais bon ! Si le talc suffit a rendre aveugle en guise de « poussiere jetée aux yeux », pourquoi diable se fatiguerait-on en haut lieu de soulever des galets. 😉

  8. Nicolas

    @ J2L : très schématiquement le ministère public et surtout la chambre de l’instruction ont des pouvoirs importants de « contrôle » de l’activité du juge d’instruction. Contrairement à ce que l’on entend ce dernier n’est pas seul dans le suivi d’une information judiciaire. Il ne pourra faire ce qu’il veut que si les deux institutions suscitées décident de ne pas s’impliquer dans le dossier.

  9. J2L

    Je suis d’accord avec Nicolas ce qu’il dit est du bon sens. La disparition du juge d’instruction va évidemment faire disparaitre les affaires politico-financière. Le parquet aux ordres evitera de saisir la Police sur ces dossiers ou ne voudra pas la suivre en cas d’initiative de sa part. D’un autre coté jusqu’à présent le système marchait plutôt bien ( d’une part parceque les gens qui le servent sont globalement trés compétents (..)et que le système est finalement bon en soi. )Pour finir rendre indépendant des Procureurs ce sera créer des électrons libres , trés dangereux également. Il est necessaire qu’il y ait une hiérarchie. Ce qui aurait pu être créé c’est un système interne pour contrôler hiérarchiquement le juge d’instruction.

  10. Nicolas

    Désolé Olivier, je vous ai confondu avec Sylvain (et du coup ce n’est pas très gentil de ma part). Vous êtes donc certainement d’accord avec moi sur le fait que tirer à boulets rouges sur les juges d’instruction (comme on l’a vu maintes fois depuis quelques années, et notamment de la part de bon nombre d’hommes politiques irresponsables ne voyant pas plus loin que le bout de leurs nez) a permis de fertiliser la terre sur laquelle pousse aujourd’hui cette réforme judiciaire.

  11. Nicolas

    Eh oui, Olivier (êtes vous le même Olivier qui m’accusiez, moi et mes collègues, de tous les maux dans le cadre du papier sur les chiffres 2008 ?), je crois que nous sommes d’accords, à savoir que les hommes politiques ont une fâcheuse tendance à surfer sur (ou à profiter de) la vague de l’opinion publique (parfois irraisonnée) pour prendre des décisions éventuellement regrettables. Depuis quelques temps, citoyens et hommes politiques (irresponsables) ont jeté le discrédit sur cette institution qui, on s’en rend compte aujourd’hui, n’avait pas que des mauvais côtés.
    L’affaire Fillipis est selon moi un bon exemple : réaction démesurée et démagogique de la plupart des personnes interrogées, remise en cause des prérogatives de la magistrate. Cette dernière avait pourtant totalement raison et ne méritait vraiment pas un tel déchaînement. Quant à Burgaud (pas vraiment irréprochable) il a cristallisé toutes les rancœurs. Il était pourtant loin d’être seul dans cette galère, contrairement à ce que l’on a voulu nous faire croire.
    Bref, tout cela pour dire qu’il faut essayer d’avoir une attitude raisonnable et réfléchie face aux évènements qui nous sont parfois présentés par la presse sous le prisme du sensationnalisme et de la démagogie.
    J’en profite pour dire que mon point de vue concerne aussi les « affaires » concernant les forces de l’ordre… bien entendu.

  12. Olivier

    Hello Nicolas,

    Tout a fait d’accord avec vous.

    Les « petits juges » sont loin. Les « emmerdeurs gauchistes » qui instruisaient sur des affaires politiques pointent aux abonnés absents.

    Ne restent que Burgeau et CO et celle de l’affaire Fillipi, qui, c’est peu de le dire, se sont faits connaitre pour des agissements bien dans l’air du temps : instruction à charge, refus des demandes d’actes d’avocat, présomption de culpabilité, gestion brutale.

    C’est cette image qu’ont les Français du juge d’instruction. Sarkozy le sait bien, qui en profite pour sonner la fin de la partie pour ces magistrats.

    Mais pourquoi éliminer une profession qui était lentement devenu « sarko-compatible », demandera-ton ?
    Parce qu’elle a le gros défaut pour notre autocrate de président d’être un corps intermédiaire, capable parfois de désobéir à sa hiérarchie et – horreur – d’en avoir le droit.

  13. Nicolas

    Suite à la polémique sur la suppression programmée des juges d’instruction (http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/01/06/magistrats-et-politiques-s-insurgent-contre-la-suppression-du-juge-d-instruction_1138612_3224.html#ens_id=1138260) je me permets de vous soumettre deux ou trois remarques :
    (je précise que je ne me prononcerai pas sur le bien-fondé de cette réforme annoncée mais plutôt sur les arguments formulés au cours de cette polémique)
    Tout d’abord beaucoup d’hommes politiques s’insurgent haut et fort d’une remise en cause de ce magistrat dit indépendant. Or, de mémoire, je crois que ce sont quasiment les mêmes qui s’énervaient devant micros et caméras lors des « bavures » d’Outreau ou encore plus récemment de Fillipis, jetant ainsi le discrédit sur cette institution qui aurait mérité, au contraire, un véritable soutien. On ne peut cracher sur des personnes et indirectement sur la fonction qu’elles occupent, et s’étonner (et s’offusquer) par la suite de leur remise en cause.
    Ensuite on a tendance à nous faire croire que le juge d’instruction est un magistrat indépendant, à l’abri de toute pression ou mesure de rétorsion. Or, à ma connaissance, un juge d’instruction, s’il est inamovible au cours de son « mandat » et théoriquement indépendant, n’en reste pas moins un magistrat comme un autre, soucieux de sa carrière, au cours de laquelle il peut être amené à occuper des fonctions au sein du Ministère public ou devenir magistrat du siège. Il reste donc je pense sensible aux aspirations de ceux qui lui proposent des promotions, à savoir in fine le Ministère de la Justice. Leur indépendance est donc selon moi toute relative.
    Enfin, un des arguments ultimes est qu’une affaire dite politico-financière laissée à la seule discrétion du Ministère public sera facilement « étouffable », cette même affaire ayant plus de chance d’aboutir si l’enquête était confiée à un juge d’instruction, indépendant et insensible, en théorie, aux volontés de la classe politique. Or, à mon avis, si cette vision est relativement exacte, je reste persuadé qu’en France ces affaires politico-financières sont de toute façon, au final, « étouffées » en phase de jugement. Il suffit de regarder les peines prononcées à ces occasions, elles sont anecdotiques. Je laisse chacun d’entre vous observer notamment le cas « Huchon ». C’est flagrant.
    Oui, si une affaire politique n’est pas « étouffée » en cours d’enquête, elle le sera de toute façon très certainement en phase de jugement. Là réside le vrai scandale.
    Tout cela pour dire que si la suppression des juges d’instruction pose de vraies questions, les réponses enflammées actuellement relayées par la presse ne sont pas forcément les bonnes. Le sujet est très complexe et mérite plus de réflexion et de recul.

  14. Olivier

    Ah non, mon post est là, j’ai eu la berlue 😉

    Mes excuses au maître des lieux.

  15. Olivier

    Sinon, l’interview est très instructive en effet.

  16. Olivier

    Nicolas,

    Je parlais de Bénédicte Desforge sur un commentaire qui visiblement n’est pas passé. J’en ignore la raison. Si c’est pour le contenu, qui expliquait que beaucoup de policiers ne supportent pas que les citoyens dénoncent les violences policières alors qu’ils les décrivent eux-même dans leur blog, c’est un peu désespérant… C’est peut-être juste une erreur de modération.

    Quoi qu’il en soit, lorsque vous dites que « les policiers ne ressemblent pas tous à l’odieux personnage décrit par certains sur ce blog », ne pensez-vous pas que ces policiers là ne sont pas encouragés par l’ambiance générale, par la politique insufflée par Sarkozy (politique du chiffre, reconduites à la frontière, etc.)à bien se comporter ?

  17. Nicolas

    Olivier, on peut aussi lire son livre, assez intéressant, qui permet de constater que les policiers ne ressemblent pas tous à l’odieux personnage décrit par certains sur ce blog.
    Pour en revenir au juge d’instruction, on peut s’intéresser aux propos de Madame Delmas-Marty, professeure au Collège de France, qui aurait inspiré le Chef de l’Etat dans le cadre de cette réforme judiciaire :
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/01/06/mireille-delmas-marty-garantir-l-independance-du-parquet_1138389_3224.html#ens_id=1138260

  18. Olivier

    Ceci dit, je conseille a tout ceux qui ne le connaissent pas encore le blog de Bénédicte Desforge. C’est écrit au cordeau, ça ne souffre pas d’à peu près et c’est poignant !

    http://police.etc.over-blog.net

  19. Nicolas

    A lire sur Le Monde.fr :

    M. Sarkozy envisage de supprimer le juge d’instruction
    LE MONDE Mis à jour le 06.01.09 | 10h51

    Nicolas Sarkozy envisage de supprimer le juge d’instruction pour confier l’ensemble des enquêtes judiciaires au parquet, sous le contrôle d’un magistrat du siège, appelé juge de l’instruction. Le chef de l’Etat devrait en faire l’annonce lors de la rentrée solennelle de la Cour de cassation, mercredi 7 janvier.

    Ce changement sémantique marque un bouleversement de la procédure pénale française, dont le juge d’instruction reste le symbole. Si le nombre d’affaires dont il est saisi n’a cessé de diminuer, pour représenter moins de 5 % des affaires pénales aujourd’hui, le juge d’instruction est chargé des crimes et des très sensibles affaires politico-financières.

    La question du juge d’instruction est posée depuis plus de vingt ans. Elle a ressurgi après l’affaire Outreau et plus récemment après l’interpellation de l’ancien directeur de Libération, Vittorio de Filippis.

    La commission dirigée par le magistrat Philippe Léger, chargée d’une réforme de la procédure pénale, devrait rendre en février un pré-rapport sur cette question du juge d’instruction. Une majorité des membres de la commission est favorable à la suppression du juge d’instruction. Ce pré-rapport sera publié pratiquement au moment où le juge Burgaud comparaîtra devant le Conseil supérieur de la magistrature en instance disciplinaire.

    PLUS GRANDE PLACE AUX DROITS DE LA DÉFENSE

    En contrepartie de la suppression du juge d’instruction, la procédure pénale devrait donner une plus grande place aux droits de la défense, permettant à l’avocat d’avoir accès au dossier au début de l’enquête. Ce n’est pas actuellement le cas dans le cadre des enquêtes préliminaires du parquet.

    L’Elysée ne semble toutefois pas faire de l’indépendance du parquet un préalable à la suppression du juge d’instruction, à la différence de ce que préconisait le rapport de Mireille Delmas-Marty en 1990, ou, plus récemment, des réflexions de la commission Outreau.

    C’est ce qui fait craindre un renforcement de la mainmise du pouvoir sur les enquêtes les plus sensibles, qui ne seraient plus confiées à un juge du siège indépendant, mais à un magistrat du parquet dépendant du ministère de la justice.

    Alain Salles

  20. Olivier

    Nicolas,
    Je vous ai bien lu, je ne suis juste pas d’accord avec vous, notamment lorsque vous expliquez ne pas nier « l’existence de certains dysfonctionnements ».
    C’est pire que cela.

    Quand au sujet du jour, le juge d’instruction, c’est le climat sécuritaire qu’il faut changer, pas les procédures. On a bien vu que le juge qui procède ou non à la détention décidait plutôt « non ». Dans l’affaire Coupat, la Chancellerie a trouvé 3 juges pas au fait du dossier pour ordonner le maintient en détention et ainsi ne pas trop humilier MAM et Dati.

    C’est comme chez les policiers ou les gardiens de prison : le jour où en haut lieu, on ne considèrera plus que le prévenu est la pour en baver, la Republique aura fait un grand pas.

  21. Olivier

    Nicolas,

    Il y a même une sorte de schizophrénie chez les policiers sur le sujet des violences policières.

    Ils traitent sur leur blog du quotidien parfois insoutenable du flic, des ravages de la politique du rendement qui fait de chaque contact avec le citoyen un moyen de faire du chiffre. Mais surtout, il ne veulent entendre parler du mot bavure de la part du citoyen.
    Marc Louboutin par exemple, a donné une intéressante interview* au Post, décortiquant les rouages du Sarokzysme appliqué aux forces de police nationale (« Nous sommes arrivés à une gestion de type « hypermarché », pour caricaturer à peine. ») qui contribue à détériorer les rapports avec les Français. Mais il jugeait caricatural les critiques de ces derniers sur Internet. Il y a pourtant une relation de cause à effet non ? Pourquoi ne pas l’accepter ?

    Mais le plus incroyable, c’est Benedicte Desforge, qui n’a pas son pareil pour raconter les bavures vu de l’intérieur (http://police.etc.over-blog.net) et qui pourtant à pourri littéralement sur un post entier de son blog une internaute qui avouait en des termes un peu telephonés son peu de confiance en la police. Sauf que cette dernière ne se laisse pas faire et le dialogue est parti en freestyle.

    Les flics, même les bons, n’aiment pas la contestation du citoyen à leur encontre, qui est prié de la fermer tandis que l’on assure sa sécurité. Nous les citoyens, on ne sait pas de quoi on parle, en quelques sortes. On ne connait pas l’arrière cuisine de la société francaise à laquelle les fonctionnaires sont confrontés.

    La véhémence de Bénédicte Desforges m’a fait penser à ce dialogue dans Blade Runners : « J’ai vu tant de choses que vous humains ne pourriez croire », sorti de la bouche d’un Repliquant, sorte d’androïde invicible et sans defaut créé par les hommes pour s’acquitter des taches indignes d’eux.

    Sauf que vous n’êtes pas des robots. Et surtout pas sans défaut.

    *http://www.lepost.fr/article/2008/12/05/1347494_garde-a-vue-marc-louboutin-se-met-a-poil.html

  22. Nicolas

    Je vous entends bien, Olivier. Tout ce que vous dîtes n’est pas faux. Vous, par contre, ne semblez pas lire ce que j’écris. Les mots ont pourtant leur importance. Vous devez le savoir mieux que quiconque, en votre qualité d’ex-journaliste.
    Mais peut-être pourrait-on en revenir (on a déjà entendu mille fois le discours « les policiers, y’sont pas gentils ») au sujet du papier de Monsieur MOREAS : quid du juge d’instruction ?

  23. Olivier

    Nicolas, comme tout fonctionnaire qui fait son boulot honnêtement, vous refusez d’accepter de reconnaître que d’autres s’en dispensent. Ce dont je parle est acté. Il suffit de lire tous les témoignages livrés à la LDH et autres.

    Vous refusez d’accepter le fait que la hiérarchie et la politique du chiffre ne poussent pas flics et gendarmes dans le bon sens. Mais c’est dans tous les métiers pareil. Ex-journaliste, j’ai vécu ça dans ma corporation : on se reconnait rien, on se s’excuse pas, on n’a pas de mémoire, circulez, ya rien à voir.

    Ceci dit, ça n’a rien de rassurant. Au moment ou les vigiles vont se voir attribuer des fonctions officielles, qu’avez vous a faire valoir de mieux qu’eux ?

  24. Nicolas

    Olivier, je comprends vos propos mais je maintiens mon point de vue. On ne peut honnêtement rejeter l’idée d’un mandat ou (puisque vous élargissez le débat) d’une garde à vue ou d’une incarcération sous prétexte que la personne qui subit ces mesures risquent de faire l’objet d’une fouille de sécurité allant éventuellement jusqu’à l’exhibition de ses parties les plus intimes.
    Que vous combattiez la pratique (il est vrai répandue) de cette fouille, je vous comprends, mais que vous tiriez comme conséquence qu’il faut interdire les mesures susvisées, je pense sincèrement que vous êtes à côté de la plaque.
    Quant au reste de votre message, il fait la part belle aux généralités et à des affirmations que vous tenez pour vérité absolue.
    Personnellement je n’ai jamais insulté ou humilié personne. Si j’ai placé un certain nombre de personnes en garde à vue, c’est parce que j’avais besoin d’un délai important pour les interroger, les affaires que je traite étant relativement complexes. Et je ne suis pas un cas unique dans ma corporation. Et je ne nie pas l’existence de certains dysfonctionnements. Mais les généralités, j’ai beaucoup de mal. Désolé. Je suis responsable de mes actes, pas de ceux des autres. Et comme je l’ai déjà dit sur ce blog, je ne cautionne absolument pas les dérives de certains de mes collègues, heureusement minoritaires.

  25. Olivier

    « Brisés, mais PAS fous », voulais-je terminer.

  26. Olivier

    « On ne peut honnêtement rejeter l’idée de ce mandat sur le seul argument d’un slip baissé. »

    L’ennui Nicolas, c’est que le mandat s’est accompagné de deux fouilles et que c’est pas là un cas isolé.

    L’ennui, c’est qu’en France, les policiers sont poussés par un climat ambiant, des directives non écrites, appelons ça comme on veut, à transformer une arrestation, un mandat, une garde à vue en peine immédiate au cas où le tribunal, s’il y a procès, serait trop clément. Et s’il n’y a pas procès, au moins la personne a tout de même morflé.

    Humiliation, insultes, refus de laisser téléphoner, refus de se rendre aux toilettes, fouilles au corps, l’arsenal est volumineux. Il existe en France cette idée que le prévenu doit en baver, qu’il lui faut une bonne leçon afin qu’il ne recommence pas – c’est pareil pour la prison.

    Sauf que bien sûr, les intéressés sont surtout marqués, traumatisés par cette expérience. « J’y pense tout le temps », est en général le propos qui revient le plus souvent lorsqu’ils en parlent. Et ils ne peuvent pas compter sur une plainte pour violence ou un enquête de l’IGS qui terminera à la poubelle.
    La chance qu’ont les fonctionnaires dans cette histoire, c’est de ne pas subir de vengeance de la part des gens qu’ils ont humiliés. Brisés, mais fous.

  27. Nicolas

    Cher Olivier, vous admettrez, je présume, que la délivrance d’un mandat d’amener peut être dissocier de la fouille minutieuse pratiquée éventuellement à cette occasion. Monsieur Filippis aurait pu très bien être présenté directement au magistrat mandant sans passer par la case « dépôt du Palais ». On ne peut honnêtement rejeter l’idée de ce mandat sur le seul argument d’un slip baissé.
    Le débat est, selon moi, autre : Un juge d’instruction, informant dans une affaire il est vrai sans réelle gravité, peut-il délivrer à l’encontre du mis en cause un mandat d’amener si ce dernier refuse de déférer à ses convocations ? Et je continue de répondre par l’affirmative.
    Beaucoup ont dit qu’en l’espèce une telle décision était disproportionnée, l’instruction portant sur un simple délit de presse en voie de « contraventionnalisation ». Cet argument ne me parait pas pertinent. Ce n’est pas l’infraction objet de l’enquête qui est en cause, c’est le comportement du mis en cause. Ce dernier fait ouvertement obstacle à la justice en ne se présentant pas devant le magistrat instructeur.
    Voilà, cher Olivier, mon sentiment. Slip baissé ou pas, pour moi cela ne change rien au fond de l’affaire (si vous me permettez l’expression).

  28. Olivier

    « Je continue de penser que la mesure prise par ce magistrat instructeur était la bonne. »

    Et les visites du fondement qui vont avec, Nicolas ?

  29. Olivier

    « L’intéressé s’est donné le beau rôle en fustigeant exagérément le comportement des policiers. »

    Décidément ça n’est JAMAIS la faute des policiers, ces héros incompris des temps modernes. Au moment où les milices, vigiles, privés, appelons-ça comme on veut, sont en passe officiellement de suppléer aux forces de l’ordre, les vraies, ils seraient temps que les flics dénoncent la violence structurelle de la police et de la gendarmerie contre le citoyen, que des conditions de travail parfois indécentes n’excusent en aucun cas.

  30. Jean

    si ce n etait qu a 2 vitesses cela irait encore mais c est a au moins 15 vitesses..la 1ere vitesse est la grace presidentielle..la 15 etre juge dans une langue etrangere sans avoir ni d interprete ni d avocat et cela arrive malheuresement…

  31. Pierre Guillery

    L’idée même qu’un homme (ou une femme) soit capable d’envisager, de creuser, de tester, de réfléchir sereinement tout à la fois à « la thèse » et à « son antithèse », cette idée là est contraire à la nature humaine parce que contraire à la manière dont nos esprits fonctionnent. Ceux/celles qui réussiraient ce miracle sont des surhommes/femmes. Alors le concept d’un juge d’instruction impartial et efficace est il condamné? J’espère. Le remplacer par quoi, ça c’est une autre question…

    Quant à la justice à deux vitesses, haa. C’est comme la santé à deux vitesses: nous l’avons déjà depuis longtemps, mais tous se refusent à le dire.

  32. Nicolas

    Si les méthodes de la juge Muriel JOSIE ont été réprouvées par la plupart de ses confrères, c’est surtout, selon moi, en raison de la crise de démagogie aiguë à laquelle nous assistons depuis un moment. Je continue de penser que la mesure prise par ce magistrat instructeur était la bonne. Ignorer sciemment plusieurs convocations d’un juge d’instruction, quelle que soit l’infraction à la base de cette instruction, ne peut rester sans réaction. Question de principe. Mais on en a déjà débattu sur ce blog.
    Quant au juge d’instruction (en général), il est incontestable qu’il vit ses derniers jours de gloire. Il est en effet insidieusement poussé vers la sortie. C’est d’ailleurs flagrant lorsqu’on constate la diminution significative de ses saisines. Le parquet rechigne aujourd’hui à ouvrir une instruction et préfère souvent que le dossier soit traité sous la forme préliminaire.
    Mais cette nouvelle pratique est insuffisante (si l’on veut vraiment s’en débarrasser) en raison des nombreux cas où l’instruction est obligatoire, d’où une réforme inévitable des textes.
    Du coup on retombe dans le problème de l’indépendance du parquet (qui deviendrait seul maître des procédures) vis à vis de son autorité de tutelle (le ministre de la justice). Ce qui nous ramène à la discussion amorcée par Monsieur Pichon à l’occasion du dernier article de Monsieur Moréas.

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