Il n’a, paraît-il, rien dit. Il nous prend pour des crétins, aurait déclaré un policier. On imagine la scène… Je me nomme Tony Musulin. C’est bien moi qui ai dérobé les onze millions et je m’expliquerai plus tard – peut-être. Vous savez le genre de truc qu’on voit dans les films de guerre. Interrogé, le prisonnier se contente de répéter : sergent Untel, matricule 53 221…
Le droit au silence est reconnu dans notre Code de procédure pénale, mais les policiers n’aiment pas trop. Ainsi, en l’an 2000, la loi sur la présomption d’innocence prévoit que la personne en garde à vue doit être informée de sa possibilité « de ne pas répondre aux questions des enquêteurs ». Mais cela créé un tel tohu-bohu dans la maison poulaga, que bien vite, le législateur corrige le tir. En 2002, la formule devient « le droit de faire des déclarations ou de se taire ». Et l’année suivante, on n’en parle plus. Le gardé à vue a toujours la faculté de se taire, mais il n’est pas obligé de le savoir.
Pourtant, ça a de la gueule, ce petit morceau choisi des séries américaines : Vous avez le droit de garder le silence, tout ce que vous pourrez dire, etc.
Son aventure, à Tony Musulin, c’était un peu la nôtre – mais on attendait une autre fin. Avec plus de panache. Qu’il distribue une partie de son butin aux pauvres et aux démunis, par exemple. Ou qu’il envoie une petite prime à ses deux collègues mis à pied par sa faute. Mais rien ! Pourtant, lorsqu’en si peu de temps on devient une star, on se crée des obligations, non ! Il aurait dû y réfléchir. Enfin, à présent, il va avoir le temps, car la justice ne lui fera probablement aucun cadeau : le mutisme passe le plus souvent pour de la provocation. À moins qu’il n’ait eu un motif que l’on ignore… Je ne sais pas, moi, une mère au pays qui doit se faire opérer, un enfant handicapé…
En tout cas, il en aura fait fantasmer plus d’un, le convoyeur de fonds !
Certains s’interrogent sur cet engouement pour des individus qui s’autorisent un pied-de-nez au système, comme lui, ou l’insaisissable Treiber. Après tout, le premier est un voleur et le second est suspecté d’un double meurtre…
Croquis réalisé pour le court-métrage Foule conditionnée.
Ouais, mais voilà, dans notre vie de tous les jours, pas de rêves à l’horizon. Et pour beaucoup, pas d’horizon du tout. On subit les contraintes d’une société trop raisonnable ou des chefs trop raisonnables nous brossent un avenir trop arithmétique. Et jamais on ne voit le bout du tunnel. Sans faire de politique, on aura toujours un petit coup de cœur de plus pour Ségolène que pour Martine… L’utopie contre la raison.
En fait, notre vie, elle est trop petite pour nous.
Il est peut-etre allé faire un dépot à la CFM ?
Au fait, demain un autre maire de notre beau pays sera-t’il lui aussi en GAV ?
Et si tout était lié ?
Sait-on jamais ?
Puisqu’on est dans le délire autant en profiter.
je remercie moi aussi Monsieur Moreas pour ses billets d’une lecture limpides et à la fois et souvent très justes.
Je pense que Tony Muselin fait fantasmer pour plusieurs raisons.
-il fait fantasmer les intellectuels creatifs qui ont admiré la prouesse « technique » de quelqun qui a niqué le systeme.
-les anarchistes qui n’aime pas le système ( c’est con à dire mais faut le dire)
-ceux qui réfléchissent et rêvent pognon, belles voitures, bling-bling du matin jusqu’au soir, leur héros en a piqué 11 millions.
-les admirateurs de truands.
pognons ou pas , Tony Muselin a volé la gloire et la célébrité et ça ça n’a pas de prix.
Merci encore pour ce beulog d’une lecture toujours aussi sympathique.
Mais, que diable, pourquoi donc Ségolène et Martine viennent conclure l’admirable billet ? Un manque d’idée passager ?
Une pépite qui à l’heur de dispenser bonne humeur pour toute la journée.
Bravo, janssen j-j ! + 10
« Les mouches nous ennuient… »
@cher michel-j,… ça dépend desquelles vous parlez, car dans la péhène, reconnaissez qu’elles nous sont souvent bien utiles, nous épargnant d’aller nous-mêmes gratter sur et sous les fumiers. Pourquoi donc vouloir les détruire ?
Conseil d’ami : relisez l’apologie qu’a fait Christian Oster de la mouche Odile. Sûr que vous reviendrez de votre préjugé à l’égard des drosophiles du coche…
« Treiber est dans une logique délirante de déni des faits et d’une réinteprétation de ceux-ci dans le sens d’un complot kafkaïen visant à le définir comme un coupable » nous dit Antoine Pinel (je rêve)…
Bigre !… Eh bien… Maintenant qu’il est enfin tombé, demandons à nos charmants psychiatres-criminologistes qui vont avoir à le réexaminer de relayer cette simple question que chacun se pose en sa chaumière :
« Treiber : comment vos concepts oniriques à tendance kafkaïenne coexistent-ils avec la vision sublogique que vous vous faites du monde extrinsèque ? ».
Il jaillira certainement de ses réponses sans équivoque une nouvelle lumière troublante au sujet de l’éclatante obscurité de sa cabale !
Les mouches nous ennuient… enfin, dans l’immense majorité des cas; les contradicteurs sévissent en tout… pourtant le femmes de ménage détruisent les toile d’araignée jugées inesthétiques (second désagrément)… mais qu’une mouche échappe à la toile suffit à déclencher un sentiment d’émerveillement, voire de soulagement devant une mort… juste un peu retardée. L’homme est un animal bourré de contradictions. Antoine Pinel nous en dresse un portrait convaincant, mais quelques lignes suffisent-elles pour expliquer l’ensemble des réaction suscitée par un fait ?
Et si tout simplement, dans l’acte pour l’instant « inqualifiable » (faute d’éléments d’appréciation sur les causes) de Musulin nous n’admirions surtout que la révolte, l’audace du geste. Parce qu’Ydel présente lui aussi des éléments intéressants ; « Nous savons tous » mais « Nous courbons l’échine faute de savoir comment exprimer notre raz-le-bol de la gabegie institutionnalisée ».
Musulin n’a pas outrepassé les principales bornes morales. N’ayant pas utilisé la violence, n’ayant mis personne en danger, son personnage ne soulève pas de répulsion instinctive.
Le geste ? Bien entendu qu’il est répréhensible !… Mais où aller chercher des références morales pour l’éducation des enfants ?… Chez l’agent immobilier de notre président ? A la mairie de Neuilly ? Chez le comptable-batteleur que son challenger en jupons avait pris la précaution élémentaire de dresser en pare-feu tout en profitant de sa connaissance parfaite des échappatoires fiscales ? Ces « précautions » font-ils d’eux des délinquants ? Apparemment pas !… Au regard du paupérisme croissant de la population, chez qui ces acrobaties fnancières trouveront-elles grâce ?… Chez ceux qui défendent le systême des « affaires avant-tout ».
De Muselin restera probablement l’image d’un bouffon qui a tout raté, sauf le démarrage d’un camion-tirelire, mais ça n’est pas maintenant que commence pour lui la véritable « expiation »; c’est lorsque, libre, il se retrouvera avec de vrais fauves lancées sur ses brisées, ceux qui ne reconnaissent que la loi de la violence.
je pense que ce « fait divers » a été tellement commenté que Toni Muselin s’est vu proposer une porte de sortie qu’il n’avait, au début, pas imaginée. Se rendre, tout en gardant l’argent; purger la peine maximum, ne plus avoir à fuir ensuite, pour, plus tard, profiter de l’argent qu’il a probablement caché. Il ne poura alors plus faire l’objet de recherches, et sera donc susceptible de voyager… loin, sans rien risquer.
On verra bien s’il aura le loisir de profiter de cet argent.
Oui, ces personnages ont quelque chose, delà de ce que dénoncent ici janssen j-j et Michael Mann, de sympathique.
Il me semble que cela tient non pas tant à ce qu’ils défient une autorité honnie qu’à ce que leur histoire, que nous voyons comme des crimes, est vécue par eux comme un scénario d’une logique personnelle qui échappent totalement à cette réalité juridique. Ils sont comme le Max la chanson, libres parce que planant au dessus de la réalité.
Treiber est dans une logique délirante de déni des faits et d’une réinteprétation de ceux ci dans le sens d’un complot kafkaïen visant à le définir comme un coupable. Qui n’est pas sensible à cette fatalité? Il croit tellement à son innocence, qu’il se rendra au tribunal pour la démontrer, car il croit à la Justice, la Vérité. On peut dire en ce sens que c’est un innocent.
Musulin a préparé un plan, un scénario de cinéma pour accomplir un rêve, l’argent, la vengeance de l’humble, Monaco… Mais il a été incapable de prévoir et gérer son succès. Le contraste entre la minutie de la préparation et l’amateurisme des suites du vol est frappante. Son but était le passage à l’acte, pas le banditisme. C’est un vol pathologique. Son mutisme est probablement la conséquence de l’effondrement de son délire. Il est possible qu’il n’en sorte jamais.
Alors, oui, ces caractères qui ont tenté d’échapper un moment à la réalité, parce qu’ils n’y appartiennent pas, nous touchent.
Tous ces commentaires sont bien écoeurants !
Comme par hasard, aucun n’évoque la souffrance des victimes bancaires, à qui l’on a ravi leur bien le plus précieux. Personne n’évoque non plus la peine que constitue pour elles le déficit de confiance que leur devraient leurs fidèles clients. Personne n’évoque encore les difficultés que vont devoir gérer les assureurs et les réassureurs.
Bref, personne n’entend le silence effrayant des victimes qui se taisent d’accablement !
Tout le monde prend fait et cause pour ce malfrat solitaire, hébété par la stupidité de son geste, et se demande comment il va bien pouvoir récupérer le produit de son larcin. Mais il ne le récupèrera jamais, vu que 9O% du magot s’est envolé en fumée par le biais de la maculation des billets, un dispositif Brink’s qui a parfaitement fonctionné à l’insu du prétendu Robins’wood.
C’est quand même bizarre d’entretenir ainsi le f(ant)ac(m)e(book) collectif d’un magot bien enterré dans les bois de chez Treiber, alors qu’il n’existe déjà plus rien !…
Pas si con, le taiseux Musulin, et pour cause. Il sait qu’au bout du tunnel, on pourra toujours le surveiller, il n’ira rien rechercher, car les biftons rescapés du massacre sont par ailleurs inrecyclables !…
Arrêtons ce fromage !… Et souhaitons que la planche à billets puisse être rapidement actionnée pour dédommager le manque à gagner de nos banques, déjà assez éprouvées par la crise !
Jean-Pierre Treiber vient d’être été arrêté : Brice Hortefeux offre une tournée générale.
Le nombre de verres est proportionnel aux jours de « liberté » de l’échappé, malgré les caméras de « vidéoprotection » qui l’ont filmé dans ses activités apparemment paisibles.
Perso je crois que les gens ont de la sympathie pour le « petit voleur » Tony Musulin parce qu’on en arrive à une pensée generale : les Grands voleurs sont ceux qui nous ponctionnent notre porte monnaie à longueur de temps… c’est à dire ceux qui nous dirigent !
( surtout quand on constate que ca ne fait qu’empirer…)
Musulin la débrouille ( même si c’est critiquable) – L’Etat les magouilles ( n’est ce pas critiquable ? )
Question : quand il aura purgé sa peine (de 3 ans max a priori), les 2 millions lui appartiendront-ils régulièrement ?
@ jmdesp,
Bien vu, effectivement. Voilà un garçon qui risque bien de regretter le temps de la garde à vue, dont on nous dit pourtant qu’il s’y passe les pires horreurs…
> Combien de détenus au “placard” peuvent se targuer
> d’avoir deux à trois millions d’euros bien planqués
C’est un point délicat de ce qui semble manifestement être son plan.
Il ne sera pas seul dans la cellule. Les matons ne passeront probablement pas leur temps à regarder ce qu’il s’y passe.
Musulin n’est sûrement pas un héros. En tout cas, pas pour ses collègues. Excusez moi pour cet élan verbal mais vous pouvez pas imaginer le « bordel » qu’il a dû déclencher dans sa boîte. Ses collègues lui ont fait confiance et ils se sentent trahis (image de convoyeur ternie, mis a pied des deux autres convoyeurs -suivi de sanction-, mesures de contrôle draconiennes, etc…).
Monsieur Moréas, lorsque vous trouviez une « brebis galeuse » au sein de votre service, ça fait des énormes dégats au niveau du moral, mais aussi par rapport au boulot. De toute manière, quelque soit le côté ou l’on se met: C’est pas beau un « traître »…
Au delà de cet aspect « moral », Musulin a fait fantasmer, c’est vrai. Il a blesser personne, sans violence. Un peu Arsène lupin (pas Robin des Bois – car vous avez raison,il n’a rien redistribuer-).Une personne va gagner des milliards au loto, on va parler de lui quelques jours et basta. Musulin, ça fait trois semaines qu’il anime les conversations et le quotidien du « peuple ».Pourquoi? Pour la simple raison que le mec a voler son « boss ». Tous les employés qui « taffent » tous les jours, sans jamais voir le bout du tunnel… Une autre raison, c’est la destination de cet argent: Les banques. Là, c’est sans commentaires…
A coup sûr, il avait prévu d’épuiser son stock au fur et à mesure. Il a commencer avec deux millions d’euros. Mais le box a été remonté beaucoup plus tôt que prévu. Il a agi seul. Il a bien fait car à ce niveau de somme d’argent, il ne peut faire confiance en personne. Il paie ce « choix ».
Il s’est rendu. Je pense qu’avant de faire le coup, il avait déjà prévu qu’une fois son magot enterré, il se rendra. Il se tiens et s’accroche à son plan. Malgré le « Hic » du box, c’est quand même un malin. Combien de détenus au « placard » peuvent se targuer d’avoir deux à trois millions d’euros bien planqués, le tout pour un à deux ans de prison à faire?
« Musulin est sans doute muselé »
Lol… Y en a quui peuvent pas s’empêcher d’en placer une !
Bien vu Dominique..
« en fait, notre vie est trop petite pour nous! »… sniff… pas très joyeux comme chute…
Monsieur Moréas (et tous ceux qui seraient d’accord avec vous) je vous propose, à votre décès, d’en parler à votre ange-routeur, dont l’existence vous est révélée dans ce petit conte qui parle de la façon dont « on » s’occupe de notre vie:
http://palimpseste.blog.lemonde.fr/2009/05/31/fleurkipouss/
Bonne lecture à tous et n’oubliez pas de chausser vos lunettes joyeuses pour que la vie vous apparaisse à sa bonne taille…
Muselin, quel héros, lorsqu’il disparait avec l’argent du fourgon.
Muselin, quel loser, lorsqu’il se rend à la police.
Muselin, quel mec, lorsqu’il garde le silence
Muselin, un homme comme vous et moi. Simplement.
http://wp.me/pERCo-eG
Concernant Musulin, si l’on procède par éliminination aux questions « logiques », un scénario vraiment détestable pointe le bout de son nez.
Il vient des pays de l’Est… comme des centaines de jeunes prostituées et des enfants exploités qui eux non plus ne parlent jamais… Pourquoi ? Parce qu’ils ont du monde au pays… des « otages » en quelque sorte.
Bien sûr, l’histoire du banditisme n’exclut aucun cas atypique… un individu échappant aux « normes » et aux « codes » admis… mais pour le moment, tout élément bien considéré, ou c’est un parfait abruti qui « en avait », mais dans le cerveau plus que dans le pantalon ( venir effectuer une peine qui aurait été la même avec la totalité du pactole, alors qu’il n’en a embarqué qu’un peu plus du quart ) ou la somme qu’il a fait disparaitre correspondait à « quelque chose »… une nécessité personnelle impérieuse, comme le dit Georges… ou un autre genre de « nécessité »; celle qui s’effectue pour éviter qu’une main assassine ne vous prive d’un être cher.
Qui sait si, lors de son retour au « pays », Musulin n’a pas eu la très facheuse idée de faire état de son travail… voire de s’en vanter ?
Je suis persuadé que cette affaire réserve encore des surprises !
Tony Musulin est sans doute muselé à la fois par son orgueil et son remords : il sait bien que, même au bout de trois ans de prison (sans compter les remises de peine), il aura du mal à récupérer son magot – s’il l’a planqué et non dépensé tout de suite en achat ou placement extravagant – puisqu’il sera filé en permanence par la police.
Le fait qu’il soit devenu un héros sur Facebook devrait l’encourager à bâtir sa légende et à écrire dans sa cellule (lieu propice à la méditation) un livre relatant son expérience incroyable.
Ce futur prix Goncourt – qui permettra au député Eric Raoult de se manifester à nouveau – sera ensuite porté à l’écran, dans un film en deux épisodes dirigé par Jean-François Richet.
D’accord sur un point : Ségolène devrait aller rejoindre Treiber au fond des bois ou Musulin au trou, ça nous ferait des vacances !
Il ne faut tout de même pas confondre utopie et démagogie…
Je pense que ces engouements viennent aussi du fait que ça raconte une histoire d’une façon aussi efficace qu’un scénario de série américaine : « un individu seul contre la machine policière, va-t’il s’en sortir ? » …On a envie de connaître la suite.
Et puis, quelqu’un qui vole quelques millions à des banques est perçu comme un vengeur qui fait ce que nous n’avons ni a possibilité ni le courage de faire.
Il ne saurait donc être entièrement mauvais ; après tout ce qui est vraiment étonnant, dans le fond de nous-même, c’est qu’en général les convoyeurs ne volent pas les sous ; qui n’a jamais observé rêveusement ces sacs au trésor qu’ils chargent avec indifférence dans leur camion ?
Quant à Treiber, on peut vouloir le voir jugé (sans qu’on soit sûr qu’il est coupable, ce qui contribue à l’efficacité du scénario) et néanmoins admirer sa résistance, comme on peut admirer la lutte pour la vie d’une souris qu’on veut éliminer de sa cuisine. On peut vouloir la justice (ou la protection de ses victuailles) et conserver des sentiments…