LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : La petite histoire de la PJ (Page 2 of 6)

Enquêtes criminelles depuis le début du XX° siècle, replacées dans leur contexte social, politique et… policier.

Marseille : vous avez dit guerre des gangs ?

Marseille est-elle à feu et à sang ? Non, a répondu le préfet délégué Alain Gardère sur l’antenne de RTL, c’est plutôt « une ville paisible ». Les habitants de l’agglomération ne seront sans doute pas tous d’accord, mais il est vrai que ce focus permanent sur la cité phocéenne donne une vision tronquée de la réalité.

Coupure de presse du 1er septembre 1989

En fait, on pourrait dire « rien de nouveau » : cela fait plus de 30 ans que Marseille est au hit-parade des règlements de comptes. Ainsi, en 1982, 67 affaires de ce type ont été recensées sur l’ensemble du territoire, dont plus du tiers sur le seul ressort du service de police judiciaire de Marseille (15 homicides et 15 tentatives d’homicide). En décembre 1985, Le Figaro, qui a fait deux pages sur le sujet hier, me citait : « L’explosion de la violence dans les rangs du grand banditisme est un phénomène indéniable ». Une remarque sans aucun intérêt, que je reprends uniquement pour montrer que l’histoire du banditisme bégaie. Et moi aussi. Mais je ne suis pas le seul : on retrouve à peu près les mêmes mots dans la presse de ces derniers jours.

Alors, pour Marseille, l’année 2012 sera-t-elle pire que 1982 ? On s’en approche. Mais on n’est pas dans un match de foot, et il est un peu ridicule de compter les morts. Il est plus positif de tenter de comprendre.

Il y a trente ans, les truands étaient plus âgés, plus structurés qu’aujourd’hui. La plupart étaient issus des milieux pauvres, mais dès qu’ils le pouvaient, ils s’en échappaient pour les beaux quartiers. Ils avaient alors pignon sur rue : bars, salles de jeux, sociétés en tous genres… Il était donc plus facile de les surveiller. C’était un milieu que la police pouvait pénétrer, même si quelques poulets s’y sont brûlé les ailes. Comme aujourd’hui, les clans éliminaient la concurrence ou ceux qui leur « avaient manqué », ou les jeunots qui venaient marcher sur leurs plates-bandes. Une bonne partie de ces meurtres ne rentraient d’ailleurs pas dans les statistiques pour la bonne raison que l’on ne retrouvait pas toujours les corps.

À l’époque, les voyous ne se servaient pas de la mythique Kalachnikov. Non, les truands préféraient le pistolet 11,43 ou encore le fusil à pompe, sans doute impressionnés par la puissance de feu (exagérée) de Steve Mac Queen dans le film Guet-apens. À la question d’un sénateur qui interpellait le ministre de l’Intérieur sur l’augmentation du nombre de saisies de kalaches (+113% en un an), Manuel Valls a répondu (JO du 30 août 2012) que le nombre d’armes de guerre récupérées par les services de police et de gendarmerie, toutes catégories confondues, était passé de 90 en 2010 à 165 en 2011. Il ne donnait pas de chiffres pour l’AK 47, mais estimait que « cet armement reste difficile à acquérir et peu répandu ». A-t-il raison ? Oui, car si l’on s’en tient au département des Bouches-du-Rhône, sur 265 armes d’épaule saisies en 2011, il n’y avait que 22 Kalachnikov (8 en 2010). Sur un total de 534 armes récupérées durant l’année (près de 4000 au plan national). Pour la petite histoire, on estime à environ cent millions le nombre de kalaches qui circulent sur la planète. Comme quoi, il faut se méfier des pourcentages – et surtout de l’effet loupe des médias.

Lors de sa réponse au sénateur, le ministre de l’Intérieur a également rappelé que « les travaux réglementaires de mise en application de la loi [du 6 mars 2012] sur le contrôle des armes font l’objet de la plus grande attention ». C’est le moins que l’on puisse dire, car, de mémoire, la proposition de loi remonte au mois d’avril 2010. En réalité, cela n’a guère d’importance : les voyous se soucient peu de la loi. Et même la justice réagit parfois bizarrement dans son application. Ainsi, il n’y a pas longtemps, un homme a été trouvé en possession d’un AK 47, d’un fusil à pompe et d’un pistolet 9 mm : les enquêteurs ont dû insister lourdement pour que le délinquant soit présenté à un juge. Il n’a d’ailleurs pas été incarcéré, mais placé sous contrôle judiciaire. Cette mansuétude, même si elle s’appuie sur de bonnes raisons juridiques, n’est certainement pas un bon message. C’est même peut-être un mauvais service rendu à l’intéressé.

Une quinzaine de règlements de comptes depuis le début de l’année, cela vaut-il la peine d’envoyer l’armée ? La sénatrice socialiste Samia Ghali a sans doute cédé à son exaspération, car la réponse se trouve dans notre constitution. Pour que l’armée dispose de pouvoirs de police, il faut que le Conseil des ministres et le Président de la République décrètent l’état de siège. Ce qui n’a jamais été fait sous la Ve République. La réponse de Manuel Valls a été d’une grande limpidité : « Il n’y a pas d’ennemi intérieur ». Autrement dit, les policiers ne font pas la guerre aux délinquants. Un langage que l’on n’avait pas entendu depuis longtemps.

Steve Mac Queen dans le film Guet-apens (capture d'écran)

Alors, si on n’envoie pas l’armée, on fait quoi ? Il faut d’abord s’interroger sur l’enjeu de ces règlements de comptes entre voyous : la concurrence pour le trafic de stups, l’exemplarité et l’argent. Tout cet argent liquide qu’il faut sortir de sa planque pour le blanchir. Ce qui entraîne, on s’en doute, pas mal de tentations. Et dans ce drôle de monde, les arnaques se paient cash. Le petit blanchissage, via des restos, des cafés, des pizzas…, c’est sans doute là le talon d’Achille de ces truands qui savent faire parler la poudre mais qui ne l’ont pas inventée. Il semble de bon augure que Pierre Moscovici participe au comité interministériel « sur Marseille » qui doit se réunir le 6 septembre autour du Premier ministre. Le ministre des Finances a sans doute un rôle important à jouer. Mais il ne sera pas facile d’inciter les agents du fisc à repérer ceux qui paient trop d’impôts. C’est contre-nature.

Et puisque l’on sait que les produits stupéfiants sont en grande partie responsables de ces règlements de comptes, quitte à passer aux yeux de Mme Ghali pour un « pseudo-gaucho-intello-bobo », je reste persuadé qu’il faut sécher le problème à la base. Et je ne vois pas le mal que l’on se fait à y réfléchir. D’autant que nous sommes nombreux, sans doute, à nous demander comment on peut installer des « salles de consommation à moindre risque » pour les drogues injectables (d’une certaine manière, on dépénalise) et refuser systématiquement toute avancée pour la drogue la plus consommée en France : le cannabis.

L’histoire sans fin de la sécurité

La gauche peut-elle innover en matière de sécurité ? En tout cas, elle reste divisée. Mais la droite serait mal venue de critiquer, car le bilan de cette dernière décennie n’est pas des plus brillants. Si on aligne les différentes décisions les unes derrière les autres, c’est comme une litanie. Les mêmes mots, les mêmes ficelles que l’on nous ressort à chaque changement de gouvernement, voire de ministre de l’Intérieur.

Et pour quel résultat…

 « La France a peur ! » C’est par cette phrase que le 18 février 1976 Roger Gicquel ouvre le journal de la première chaîne de télévision. Il parle de l’assassinat de Philippe Bertrand, un garçon de huit ans, enlevé à la sortie de l’école et tué par son ravisseur, Patrick Henry. Une affaire sordide comme il s’en produit hélas de temps à autre. Mais cette phrase va bien au-delà. Elle joue comme un déclencheur. C’est peut-être ce qui amène le premier ministre, Raymond Barre, à désigner un Comité d’études pour trouver des solutions à la criminalité violente.

L’ilotage ! C’est l’une des mesures phares du rapport pondu par ce comité (présidé par Alain Peyrefitte) intitulé pompeusement « Réponses à la violence ». Et, parmi les autres mesures préconisées, on trouve le redéploiement des forces de sécurité dans « les zones nouvelles d’urbanisation » et l’amélioration des relations entre la police et les citoyens.

Comme le début d’une rengaine.

Les maires montent au créneau – En 1983, la gauche est au pouvoir depuis deux ans et la police n’a pas encore retrouvé son régime de croisière. Les maires remettent à Pierre Mauroy, alors Premier ministre, un rapport intitulé « Face à la délinquance : prévention, répression, solidarité ». Ils réclament des mesures pour lutter contre l’insécurité. C’est ainsi que prend forme le Conseil national de prévention de la délinquance. Mulhouse est choisie comme ville test pour mettre en place un plan de prévention. Dix ans plus tard, le président de ce Conseil, Gilbert Bonnemaison, déplorera que la France se soit engagée « dans des démarches complètement sécuritaires ». La prévention n’a jamais eu sa chance. C’est pourtant l’une des trois branches de la police de proximité. Les deux autres étant la répression et l’information.

La régionalisation des services de police – C’est l’une des premières annonces du nouveau tandem de la place Beauvau, Charles Pasqua et Robert Pandraud. On est en 1986, c’est la première cohabitation.

L’ilotage : le retour – La mesure est dans le panier de Pierre Joxe, lorsqu’il rejoint l’Intérieur pour la seconde fois, après la réélection de François Mitterrand, en 1988. Il crée également l’Institut des hautes études de la sécurité. Dans les années qui suivent, les ministres se succèdent, le dernier avant la deuxième cohabitation est Paul Quilès. Il propose un plan d’action immédiate pour la sécurité. Mais, pas le temps. C’est la deuxième cohabitation. Charles Pasqua reprend les rênes avec dans sa besace un plan pluriannuel de modernisation de la police et une volonté de remobiliser les forces de l’ordre.

Les brigades anticriminalitées – La première a vu le jour à Paris, en 1993. Environ deux cents policiers qui tournaient la nuit dans la capitale et qui pouvaient à tout moment être regroupés pour faire face à un événement imprévu. En 1996, les BAC de jour sont mises en place sur l’ensemble du territoire. C’est un peu le fer de lance de la Sécurité publique.

Un juge place Beauvau – En 1995, après 14 ans de règne, Mitterrand s’efface et laisse la place à Jacques Chirac. Jean-Louis Debré, ancien juge d’instruction, devient ministre de l’Intérieur. Il installe le Haut Conseil de la déontologie de la police nationale et met en place les premières sûretés départementales.

L’époque des « petits sauvageons » – Acte manqué pour Chirac qui, deux ans après son élection, dissout l’Assemblée nationale. Jean-Pierre Chevènement devient ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de Lionel Jospin. Il prêche pour « des villes sûres pour des citoyens libres ». Avec la mise en place, en 1997, des premiers contrats locaux de sécurité. Parallèlement, un Conseil de sécurité intérieure est créé, placé sous la houlette du Premier ministre, pour mieux assurer l’impulsion de la politique de sécurité intérieure. À compter de 2002, il sera présidé par le Chef de l’État.

L’année suivante, Jean-Pierre Chevènement veut mettre un terme aux violences urbaines. Il fustige ces « petits sauvageons qui vivent dans le virtuel » et annonce le redéploiement de 3000 policiers et gendarmes dans 26 départements sensibles en vue de supprimer les « zones de non-droit ». Il se prononce pour la suspension des prestations familiales afin de responsabiliser les parents de mineurs délinquants. Aussitôt contredit par le Premier ministre. Cette année-là, on discutaille pour l’installation d’une police de proximité afin d’assurer une présence effective et rassurante dans les quartiers sensibles. Et, d’une seule voix, le gouvernement parle d’une politique de prévention « rénovée ».

La police de proximité – Le 26 avril 1999, le ministère de l’Intérieur publie la liste de 59 sites expérimentaux de police de proximité. En décembre, Lionel Jospin qualifie l’insécurité « d’inégalité sociale » et annonce un recrutement exceptionnel de 1000 policiers supplémentaires.

Pas de sheriffs dans la police – Au mois d’août 2000, Jean-Pierre Chevènement rend son tablier et laisse la place à Daniel Vaillant. Alors que le Premier ministre s’est déclaré hostile à la « municipalisation » de la police, des personnalités de droite proposent de placer le maire au centre du dispositif de sécurité de proximité. Daniel Vaillant refuse de voir se développer les polices municipales. L’année suivante, le Premier ministre enfonce le clou : « Sheriffiser la police, ce n’est pas la tradition républicaine de l’État en France ».

Chirac savonne la planche – Dans son allocution télévisée du 14 juillet 2001, Jacques Chirac insiste sur les problèmes de sécurité. On sent bien que c’est sur ce terrain qu’il va croiser le fer en vue de sa réélection. Plus tard, assumant sa défaite, Lionel Jospin dira : « Sur la question de l’insécurité, j’ai péché par naïveté… ».

Les policiers manifestent – Le 16 octobre 2001, deux policiers sont tués par un multirécidiviste, dans le Val-de-Marne. Quelques jours plus tard, plusieurs milliers d’entre eux manifestent dans toute la France. Le Premier ministre évoque la dramatique erreur d’appréciation des juges… Les policiers mettent en cause la loi sur la présomption d’innocence. Le député Julien Dray est chargé d’évaluer le texte.

 « L’impunité zéro » – Tandis que Lionel Jospin déplore une « récupération politique » de l’insécurité, Jacques Chirac prône l’impunité zéro. En vieux routier de la politique, il a enfourché le bon cheval : un sondage montre que l’insécurité est la préoccupation majeure des Français. Il est réélu le 5 mai 2002. Nicolas Sarkozy devient ministre de l’Intérieur. À l’ordre du jour, renforcement des moyens pour la justice et les forces de l’ordre, renforcement de la sécurité dans les transports d’Île-de-France et création du Conseil de sécurité qui a pour tâche d’assurer l’impulsion de la sécurité intérieure, de la coordonner et de l’évaluer.

Les Groupes d’intervention régionaux – Dans les jours qui suivent, une circulaire interministérielle donne naissance aux GIR. Il s’agit en fait d’entités, pourvues d’une cellule de permanents, rattachées à la PJ ou à la gendarmerie. Les GIR regroupent l’action de policiers, de gendarmes, de douaniers, d’agents des impôts et même d’agents de l’URSSAF. Leur objectif premier vise à lutter contre l’économie souterraine générée par le trafic de drogue au niveau d’une cité ou d’un quartier. Ces bandes de petits trafiquants étant souvent les premiers à mettre le feu aux poudres.

Le Flash-Ball – Alors que Daniel Vaillant, lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, avait répondu au mécontentement des policiers en les dotant de gilets pare-balles, Nicolas Sarkozy arme les policiers de « proximité » de Flash-Ball. Un peu comme Don Quichotte, il est parti en guerre contre la délinquance. Pour « la France des oubliés », comme il dit.

La sécurité, première des libertés – En juin, le premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, promet les moyens nécessaires pour lutter contre l’insécurité et, place Beauvau, on parle de la culture du résultat et de la nécessité d’alléger la loi sur la présomption d’innocence. Le programme sécuritaire du nouveau gouvernement est contenu dans la LOPSI du 29 août 2002. (En 2011, il y aura un deuxième P, pour « performance ». On sent tout de suite la différence.) Celle de 2002 porte un beau titre : « La sécurité, première des libertés » : création de 13 500 emplois dans la police et la gendarmerie, renforcement des pouvoirs des forces de l’ordre, création de nouveaux délits, comme le racolage passif, l’occupation de terrain par des gens du voyage, les attroupements dans les halls d’immeuble, la mendicité, etc.

La notation des préfets – Nicolas Sarkozy annonce qu’il publiera chaque mois la liste des 5 meilleurs et 5 plus mauvais départements sur le plan de la sécurité. Et, pour donner du baume au cœur aux préfets, il promet que 3500 CRS et gendarmes seront affectés à la sécurité publique.

On barricade les écoles – Xavier Darcos, ministre délégué à l’enseignement, souhaite équiper les établissements scolaires placés dans des zones sensibles de clôtures, portails, vidéo, etc. Il veut également permettre l’intervention des forces de l’ordre.

Vers la fin de la police de proximité – En février 2003, à Toulouse, Nicolas Sarkozy estime que la police de proximité est inutile si elle privilégie la prévention. Toutefois, quelques jours plus tard, rétropédalage. Pas question de la supprimer. Il est vrai qu’il faut d’abord trouver une solution de remplacement.

Le plan Vigipirate – En mai 2003, la tension monte d’un cran. Jean-Pierre Raffarin décide de porter le plan Vigipirate au niveau d’alerte orange.  Sauf erreur, il est aujourd’hui au niveau rouge. Il a même été écarlate en région Midi-Pyrénées, en Aude et en Lot-et-Garonne, le temps de l’affaire Merah.

Les chantiers prioritaires – Ils sont au nombre de six. C’est le plan de bataille du nouveau ministre de l’Intérieur, Dominique de Villepin. Mais Jacques Chirac le pousse aux fesses. En novembre, il appelle le gouvernement à aller plus loin. Il souhaite par exemple la création d’établissements pour « accueillir » les auteurs de crimes les plus graves, après leur sortie de prison. Et il veut également renforcer la lutte contre l’immigration irrégulière. Dominique de Villepin fixe la barre à 20 000 expulsions pour 2005. Mais cette année-là, il rejoint l’Hôtel Matignon et Nicolas Sarkozy retrouve ses pantoufles place Beauvau.

Les émeutes de 2005 – Alors qu’au mois de mars, d’après un sondage, la sécurité ne venait plus qu’au 9° rang de la préoccupation des Français, patatras ! en novembre les banlieues explosent. Signe évident d’un affolement des autorités, le président Chirac décrète l’état d’urgence. Une mesure jusqu’alors appliquée uniquement lors de la guerre d’Algérie. Ces désordres favoriseront sans doute Nicolas Sarkozy dans sa course à la présidence.

Les UTEQ – En 2008, Michèle Alliot-Marie annonce l’expérimentation de nouvelles unités destinées aux quartiers sensibles, les UTEQ. Avec pour objectif la lutte contre le trafic de stups et le rétablissement d’un lien de confiance entre la police et la population.

Les compagnies de sécurisation – Une vieille idée parisienne qui revient à la surface : en septembre 2008 la première sécu est installée à Bobigny. Elle a pour mission de lutter contre la petite et la moyenne délinquance et contre les violences urbaines.

Une pause pour réfléchir…  En octobre, la ministre annonce la création d’un Conseil économique et scientifique de sécurité, chargé de réfléchir aux « enjeux globaux » de la sécurité et de définir « quel niveau de sécurité mettre en place et dans quelles conditions économiques et techniques ».

La Place Vendôme en effervescence – Rachida Dati est sur tous les fronts. Les lois répressives pleuvent. Concernant les jeunes délinquants, elle annonce son intention de diminuer l’âge de la responsabilité pénale avec la possibilité d’une condamnation à la prison dès l’âge de 12 ans. François Fillon s’y oppose.

Protéger les Français – C’est le discours répété du président de la République. À Orléans, il annonce qu’en 2009, toute l’action du gouvernement « sera tendue vers cet objectif ». Il débloque cent millions d’euros pour la police et la gendarmerie.

Les référents – MAM veut consolider les liens entre la police et la population pour mieux lutter contre les vols à main armée dont le nombre ne cesse de croître. Outre la vidéosurveillance, elle préconise des contrôles fixes et itinérants dans les quartiers les plus touchés et une « coopération de terrain » via la mise en place de policiers et de gendarmes référents.

Les violences en bandes – C’est le nouveau cheval de bataille du président Sarkozy. En mars 2009, il annonce 16 mesures nouvelles pour combattre ce phénomène. Et quelques mois plus tard, en réaction à des faits divers, il tance ses ministres en leur rappelant les objectifs essentiels de la politique de sécurité : « La lutte contre les bandes et les violences urbaines, la lutte contre les violences à l’école, la répression des trafics criminels, en particulier le trafic de drogue ». Dans le même temps, Martine Aubry sort un « livre noir » qui dresse un bilan des « atteintes aux libertés publiques ».

Les brigades spéciales de terrain – C’est Brice Hortefeux qui lance le projet, en 2010. Il s’agit de créer des unités dont la mission est de mettre fin à la délinquance tout en rétablissant un lien avec la population. La première BST est installée en Seine-Saint-Denis.

Les patrouilleurs – En 2011, Claude Guéant préfère les patrouilleurs. Pour faire simple, il s’agit de policiers dont la mission est de déambuler dans une rue, dans un quartier.  Il s’agit par leur présence de rassurer les gens et de nouer le contact (avec la population). En 1976, on appelait ça l’ilotage.

La LOPPSI de 2011 – La loi d’orientation et de programmation pour la performance sur la sécurité prévoit de nouvelles mesures pour permettre aux forces de l’ordre de « s’adapter avec le maximum de réactivité possible aux évolutions de la délinquance ». Malgré la promesse d’une enveloppe financière cinq fois plus élevée qu’en 2009, l’ouverture sur la sécurité privée et sur les polices municipales est presque un aveu d’échec.

Le sentiment d’insécurité – Après des années de pression, les Français sont redescendus sur terre. Dans un sondage du mois de mars, 8% seulement déclaraient que la question pèserait dans leur vote à l’élection présidentielle. Contre 14% pour les impôts et les taxes. Et 36% pour le pouvoir d’achat et le chômage.

Et maintenant ? Les têtes ont changé mais les problèmes demeurent. Après les événements d’Amiens, François Hollande a promis de mettre en œuvre tous les moyens de l’État pour lutter contre les violences. Quant à Manuel Valls, il planche sur la mise en place de nouvelles « zones de sécurité prioritaire ». Mais il a dit aussi, lors d’une interview, qu’il fallait avant tout s’attaquer aux causes. Or les violences urbaines sont souvent liées au trafic de drogue. Et, partout de par le monde, la lutte contre ce fléau a échoué. « C’est un peu comme si on était sur un vélo d’appartement ; on pédale, on pédale, mais le problème demeure », a dit Juan Manuel Santos, le chef d’État colombien. Il y a peut-être là un véritable sujet de réflexion…

Il est également intéressant de savoir que François Lamy, le ministre délégué à la Ville, a porte ouverte place Beauvau, car la police ne peut pas tout. Elle agit un peu comme un antalgique, elle calme le mal mais elle ne le supprime pas.

Le Quai des Orfèvres sous l’Occupation

Ce 16 juillet 1942, au petit matin, des milliers d’hommes, de femmes, d’enfants, de vieillards furent arrêtés à leur domicile et regroupés dans les commissariats avant d’être parqués au Vel’ d’Hiv’. Aujourd’hui, alors que le Président Hollande commémore le 70° anniversaire de cette rafle funeste, il est légitime de s’interroger sur le comportement des policiers et des gendarmes qui ont – sagement – obéi aux ordres. Et notamment à la préfecture de police de Paris qui vient d’ouvrir ses archives sur ce sujet sensible. Il faudra attendre fin 1943, alors que la politique du maréchal Pétain se fait de plus en plus répressive, pour qu’un véritable mouvement de résistance apparaisse enfin dans la police parisienne.

Pour certains policiers, c’était leur deuxième intervention au Vel’ d’Hiv’. En effet, en mai 1940, donc avant le régime de Vichy, cinq mille femmes réfugiées en France pour fuir le nazisme des années 30 avaient été enfermées dans ledit vélodrome. La plupart seront transférées au camp de concentration français de Gurs et beaucoup y mourront. Il semble que parmi les survivantes, certaines ont même joué un rôle actif dans la résistance, mais leur souvenir s’est perdu. Lilo Petersen, qui a été victime de cet internement alors qu’elle était enfant, a écrit un livre Les oubliées, chez Jacob-Duvernet, dont on peut trouver une courte analyse ici.

Si les policiers d’aujourd’hui n’ont rien à voir avec ce fragment de notre histoire (ils n’étaient même pas nés), il est étonnant que les nombreux ouvrages consacrés au Quai des orfèvres n’y fassent pratiquement pas allusion ; alors qu’il est souvent question de la résistance, d’abord passive, puis plus active, menée par certains fonctionnaires de la préfecture de police, comme dans la remarquable trilogie De la Résistance à la Libération que l’on peut télécharger gratuitement sur le site de la PP.

Mais j’ai déniché l’exception : le livre de Clovis Bienvenu qui, sous un titre rebattu « Le 36, quai des Orfèvres » (Éditions PUF), met carrément les pieds dans le plat. « Force est de constater, dit-il, qu’au titre de la collaboration d’État la police judiciaire du quai des Orfèvres a activement participé à la lutte contre le communiste et à la chasse aux Juifs. »

Pourtant, nulle part, poursuit-il, il n’y a trace « des compromissions, des trahisons, des enquêtes diligentées à la demande des autorités allemandes ». Comme de cette enquête menée par les policiers de la brigade spéciale de la PJ pour interpeller Pierre Georges. Ce jeune homme de 22 ans, auteur du meurtre d’un militaire allemand, le 21 août 1941, au métro Barbès, a sans doute, avec deux balles de calibre 6.35, modifié le cours de l’histoire, marquant le début de la révolte armée contre l’Occupant. Arrêté l’année suivante, il fut sérieusement passé à tabac avant d’être livré aux Allemands. Bizarrerie de l’histoire, lors de la libération de Paris, alors que les policiers tirent sur les Allemands, lui se trouve à la tête d’un commando FFI. Il établit la jonction avec la 2° DB et l’aide à reprendre à l’ennemi les quartiers proches de la préfecture de police. Une station de métro porte son nom de guerre : Colonel Fabien.

À cette époque-là, la brigade spéciale dépend du 36 et la « brigade des attentats » lui est rattachée. Pour la direction de la PJ, il est question d’une brigade antiterroriste. Les terroristes des uns étant les résistants des autres. En tout cas, la chasse est ouverte. D’autant que les Allemands récompensent toute arrestation de « terroriste » par des espèces sonnantes et trébuchantes. Mais la PJ et les RG se livrent une rude concurrence. On flagorne les Fridolins. Finalement, ce sont les renseignements généraux qui emportent les faveurs de l’Occupant. En janvier 1942, une deuxième brigade spéciale est alors créée, mais cette fois au sein de ce service. (C’est la seule dont on parle aujourd’hui.) Le patron de la PJ, Guillaume Tanguy, a perdu et les affaires « patriotiques » deviennent le monopole des RG. Trois ans plus tard, les gens du 36 vont tirer profit de cette déconvenue en forgeant la légende d’une police judiciaire exempte de tout acte de collaboration.

C’est l’époque des promotions extravagantes et nombreux sont ceux qui sont sensibles à la carotte. Quelques-uns résistent et œuvrent en douce, comme ce jeune policier, Jacques Beuguin, affecté au « service des répressions raciales », qui utilise mille stratagèmes pour réduire le nombre de Juifs déférés aux Allemands, sans éveiller les soupçons de sa hiérarchie.

Et tandis que la police parisienne sert la soupe aux occupants et que le Tout-Paris flirte au One-Two-Two avec les officiers allemands, les truands s’en donnent à cœur joie. Souvent en cheville avec des barbouzes collabos, ils dépouillent les familles fortunées en se faisant passer pour des policiers allemands.

Pourtant, on est encore loin de la fronde au sein de la PJ. Ainsi, en juin 1943, lors de la création de la sous-direction des affaires juives (ex-service Tulard), le commissaire divisionnaire Charles Permilleux motive ses troupes par des instructions précises : « Il appartient désormais à la préfecture de police d’assurer l’exécution des mesures de police ordonnées par les autorités d’occupation. La police française n’a pas à se faire juge, elle exécute les ordres donnés ».

À la Libération, on parle d’épuration dans la police. Une brigade anti-Gestapo est créée. Installée quai de Gesvres, elle est chargée d’enquêter sur la Gestapo française, la Carlingue, pour les intimes. Voici ce qu’écrit son fondateur, le commissaire Georges Clot : « La Gestapo française fut, à cette pénible époque, un dangereux poison qui atteignit tous les organes du corps français. C’est triste à dire, mais c’est la vérité… Quelquefois, nous étions saturés de dégoût, nous ne savions plus où se trouvaient les limites du mal. : un cancer généralisé. » Et puis, un jour de septembre 1945, on leur a dit d’arrêter. La brigade anti-Gestapo a été dissoute. Pour les autorités, il était temps d’oublier.

Je ne connais pas Clovis Bienvenu. Il est présenté comme officier de police judiciaire. J’ai tenté de le joindre, via son attachée de presse, mais sans succès. Son livre comprend d’autres volets : les années grises, le conflit algérien, etc. On peut lire la table des matières sur le site des Presses Universitaires de France. C’est un livre rare, et même si l’on a parfois du mal à suivre le fil, c’est passionnant.

Le chef de la Crim’ raconte l’affaire Boulin dans un livre

Le 30 octobre 1979, au petit matin, dans un brouillard à couper au couteau, plusieurs véhicules de la PJ de Versailles brinqueballent sur un chemin de la forêt de Rambouillet. Une quinzaine d’enquêteurs de la Criminelle et de l’Identité judiciaire, dirigés par les commissaires Alain Tourre et Gilles Leclair, sont à la recherche d’une Peugeot 305 de couleur bleue : la voiture d’une haute personnalité qui aurait manifesté l’intention de mettre fin à ses jours. Ils ne savent pas encore qu’il s’agit de Robert Boulin. Ils ne savent pas encore qu’il est mort.

Le siège de la PJ de Versailles (Google Maps)

Ils ne sont pas seuls. De nombreux gendarmes quadrillent déjà la forêt. C’est le préfet qui a donné l’alerte. À 8 h 35, des motards de la gendarmerie repèrent le véhicule stationné à proximité d’un petit lac. Tout le monde fait route vers l’endroit indiqué : la Peugeot se trouve près de l’étang Rompu, dans lequel, à 7 mètres de la berge, un corps dont seul le dos est apparent flotte entre deux eaux.

C’est ainsi, pour la PJ, que commence l’affaire Boulin.

Danielle Thiéry et Alain Tourre, deux anciens commissaires de police ont rassemblé leurs souvenirs pour écrire un livre, Police judiciaire, 100 ans avec la Crim’ de Versailles, aux éditions Jacob-Duvernet. Apportent-t-ils des éléments nouveaux ? Pas vraiment, mais en tout cas, ils donnent le fil précis de l’enquête de police.

Robert Boulin a 59 ans. Il est maire de Libourne, en Gironde, et ministre du Travail dans le gouvernement de Raymond Barre. Il est marié, deux enfants, et mène une vie sans histoire – si ce n’est cette affaire « des terrains de Ramatuelle » qui le mine, une escroquerie dans laquelle il s’est laissé embarquer et qui fait l’objet d’une information judiciaire.

Alain Tourre, lui, est bien loin de ce monde. Il est le chef du groupe criminel (on ne disait pas brigade, pour ne pas fâcher la PP) du Service régional de police judiciaire de Versailles.

« Je sais ce que j’ai à faire ! » –  C’est ce que répond le colonel de gendarmerie Jean Pépin au commissaire qui lui demande de ne toucher à rien avant l’arrivée des magistrats. Et l’officier supérieur ordonne de sortir le corps de l’eau. Ce que font deux pompiers. Non sans difficultés, ils le prennent chacun par un bras et le tirent jusqu’à la terre ferme, face contre terre. Les gendarmes retournent le cadavre, et, après un bref examen, ils lui font les poches. Il est 9 h 09. Ils en retirent notamment une petite boîte en plastique, genre boîte à pilules et deux stylos. « Du côté de la voiture, l’agitation est tout aussi intense. » Un officier de gendarmerie grimpe sur le toit et passe la main par le toit ouvrant pour récupérer un bristol posé sur le tableau de bord. Puis, toujours par le toit, l’une des portières est débloquée. Les clés du véhicule seront retrouvées par terre, près du coffre, un peu plus tard. La Peugeot est fouillée de fond en comble. C’est alors que tombe le message radio : le parquet saisit la PJ.

« Gendarmes, trois pas en arrière, la police judiciaire est saisie ! » – Non sans ressentiment, les gendarmes plient bagage, laissant tout en plan. Une scène de crime en piteux état. On comprend bien à la lecture de ce livre-document la guéguerre que se livrent policiers et gendarmes. Il faut dire qu’à l’époque, notamment dans les Yvelines, ces derniers étaient sérieusement marqués à la culotte par la PJ qui voyait d’un sale œil leur influence grandissante en Ile-de-France. Et, pour avoir traîné mes guêtres dans ce service dans ces années-là, je peux témoigner qu’il s’agissait d’une politique maison : pas un os à ronger aux gendarmes. D’où l’ambiance. Aujourd’hui, même si la rivalité demeure, les choses ont changé. Et, en tout cas, chacun sait que dans une enquête, la priorité, c’est de préserver la scène de crime aussi pure que possible.

La carte de visite grand format récupérée sur le tableau de bord est à l’en-tête du Ministère du travail avec la mention « Le Ministre ». Elle est écrite des deux côtés. Au recto, d’une écriture soignée, à l’encre bleue, « Les clefs de la voiture sont dans la poche de mon pantalon ». Sous ces mots, à l’encre noire, est indiqué « TSVP ». Au verso, également à l’encre noire, mais cette fois d’une écriture irrégulière, « Embrassez éperdument ma femme, le seul grand amour de ma vie. Courage pour les enfants », suivi d’une signature illisible.

Au premier examen du corps, des traces d’érosion sont relevées sur le visage ; et quatre petites coupures, deux sur le nez, une en dessous et une autre sur la lèvre supérieure. Un médecin local constate le décès et la dépouille est transportée par hélicoptère à l’hôpital de la Pitié. Plus tard, vers l’Institut médico-légal de Paris. Beaucoup de monde pour l’autopsie : les deux légistes, le substitut de procureur, cinq péjistes, dont le commissaire Tourre, et le chef de cabinet de feu le ministre, Marcel Cats. Celui-ci intervient à plusieurs reprises, au nom de la famille, dit-il, pour tenter d’éviter au mieux la mutilation du corps. Il insiste tant que les médecins finissent par se fâcher et le mettent à la porte. Ils concluent sans ambiguïté à la mort par noyade (asphyxie par submersion). Des prélèvements sont effectués. Le suicide ne faisant aucun doute, le magistrat présent sur place, le substitut Leimbacher, prend l’initiative de ne pas faire pratiquer l’examen de la boîte crânienne. Une opération qui consiste à « décalotter » le haut du crâne et qui laisse des marques sur le visage du défunt.

C’était sans doute une première erreur. La seconde est plus grave. L’eau dans les poumons et dans l’estomac était une preuve suffisante pour conclure à la noyade et, du coup, aucune analyse ultérieure n’a été effectuée. Pourtant, elles auraient permis de confirmer la mort par noyade, mais surtout de démontrer que l’immersion avait bien eu lieu dans l’étang Rompu. Donc, que le corps n’avait pas été transporté après coup dans la forêt de Rambouillet.

En 1983, lorsque la famille a réclamé cet examen, il était trop tard : les prélèvements avaient été détruits. Ce qui était l’usage à l’époque. Lors de la deuxième autopsie, les experts ont opté pour un traumatisme facial « appuyé » avant la mort. Pour ceux qui pensent que Boulin a été assassiné, c’est la preuve qu’il a reçu des coups. Pour les enquêteurs, cela signifie seulement qu’il a chuté. Ils pensent que Boulin est descendu de sa voiture. Il l’a fermée, puis, la clé toujours à la main, bourré de Valium, il tombe et perd son trousseau. Il n’a donc pu le mettre dans sa poche comme il l’avait écrit. Il se dirige vers l’étang. Il marche dans l’eau. Il tombe de nouveau et il se noie.

Quant aux lividités cadavériques, situées dans le dos, alors qu’elles auraient dû se trouver côté ventre, elles s’expliqueraient par un séjour de plusieurs heures du corps dans une eau à environ 10°. Il est probable que dans ces conditions particulières, les lividités, non encore fixées, ont pu migrer lors de la manipulation du cadavre. Personnellement, je pensais que le mort avait été déshabillé sur place… Il semble que non. Sans doute en raison de la personnalité du défunt. Il est donc probable que le premier examen clinique complet ait été effectué à l’hôpital de la Pitié. Donc, trop tard : le sang étant alors figé dans les parties basses, c’est-à-dire dans le dos.

Ensuite, les deux commissaires retracent avec minutie l’emploi du temps des derniers jours de vie de Robert Boulin. Parmi les documents retrouvés, il y a un brouillon d’une lettre adressée au directeur du Monde, Jacques Fauvet, suite à un article de James Sarrazin sur l’affaire de Ramatuelle, ainsi qu’une autre pour le juge Renaud Van Ruymbeke, en charge de ce dossier. Dans un courrier reçu plus tard par l’AFP, le ministre fustige ce magistrat « aveuglé par sa passion de faire un carton sur un ministre » et il termine en disant : « Un ministre en exercice ne peut être soupçonné, encore moins un ancien ministre du général de Gaulle. Je préfère la mort à la suspicion… » – Une autre époque.

Dans le livre, j’ai choisi cette affaire car elle a fait couler de l’encre, et, lorsque j’en ai parlé sur ce blog, j’ai pu constater que beaucoup de gens considèrent la mort de Robert Boulin comme un assassinat politique. L’éditeur a d’ailleurs fait la couverture sur son cadavre. Mais le livre contient bien d’autres choses. Ainsi, il est longuement question de l’affaire Stevan Markovic, l’homme à tout faire d’Alain Delon, exécuté d’une balle dans la tête. Mais il aura fallu deux autopsies pour le révéler. Le dossier de police a longtemps été tenu secret. C’est je crois la première fois qu’il est ouvert (entrouvert ?) au public. En fait, ce livre est une mine d’informations sur de nombreuses affaires criminelles : l’assassinat du général Audran, la disparition d’Estelle Mouzin, etc. Ou la première arrestation de Jacques Mesrine, avant qu’il ne devienne l’ennemi public n°1 ; ou encore celle de son émule, Jacques Hyver, que tout le monde recherche et que les policiers de l’Office du banditisme voient passer devant eux alors qu’ils sont en train de décompresser à la terrasse d’un café.

Pour être sincère, je trouve le texte un peu fouillis, comme souvent chez cet éditeur, et, sans doute parce qu’il est écrit à quatre mains, on est un peu gêné pour Alain Tourre lorsqu’il parle de lui à la troisième personne. Cependant, ceux qui s’intéressent aux affaires criminelles ne seront pas déçus. Il y a matière. Et puis, ça nous change du 36.

Police et faits divers : 2011, une année chaude

En France, 2011 aura été l’année la plus chaude depuis le début du XX° siècle. Avant, on ne comptait pas. Sans parler d’un record, je crois qu’elle se situe également en bonne place en matière de faits divers.

L’année démarre mal. Le 7 janvier, alors qu’ils dînent dans un restaurant, deux Français sont enlevés à Niamey, la capitale du Niger. Les ravisseurs sont pris en chasse par les forces de sécurité nigériennes et les militaires français. Lorsqu’ils franchissent la frontière malienne, les commandos français reçoivent l’ordre d’intervenir. Les deux otages sont tués. Nicolas Sarkozy fait part de sa profonde tristesse après « l’assassinat de nos deux compatriotes ». Une information judiciaire est ouverte et confiée à un juge antiterroriste. Quatre policiers sont envoyés sur place. Il semble bien que l’un des otages ait été exécuté par ses ravisseurs lors de l’assaut aérien et que le second ait été brûlé vif lors de l’explosion du véhicule dans lequel il se trouvait. On ne négocie pas avec Aqmi (Al-Qaida au Maghreb islamique) aurait dit un représentant du Quai d’Orsay à Annabelle Delory, la sœur de l’une des victimes, comme pour s’excuser. Plus tard, même si comme tout le monde elle s’est réjouie de la libération de Stéphane Taponier et de Hervé Ghesquière, otages en Afghanistan, elle s’est quand même dit que « la vie de deux journalistes valait plus chère que celle de deux péquenots que personne ne connaît ».

Pendant ce temps, en Tunisie, la révolution non-violente se poursuit. En France, on n’a rien vu venir. À tel point que le 12 janvier, le ministre des Affaires étrangères, Mme Alliot-Marie, propose devant l’Assemblée nationale de transmettre à la police tunisienne le savoir-faire français « pour régler les situations sécuritaires ». Deux jours plus tard, après 23 ans au pouvoir, le président Ben Ali quitte son pays, une main devant une main derrière. Quant à Mme Alliot-Marie, elle sera remerciée un mois plus tard.

Ce mardi 18 janvier, vers 22 heures, Laëtitia Perrais, une jeune fille de 18 ans, sort de l’hôtel-restaurant où elle travaille, à La Bernerie-en-Retz, en Loire-Atlantique : on ne l’a jamais revue. Le lendemain matin, son scooter accidenté est retrouvé à proximité de son domicile. Très vite, la thèse de l’enlèvement est privilégiée, d’autant que son petit ami aurait reçu plusieurs SMS inquiétants durant la nuit. Dont un, indiquant qu’elle a été violée (ce que l’autopsie n’a pas confirmé). Sa tête et ses membres seront retrouvés le 1er février, et le reste de son corps plusieurs semaines plus tard. Entre temps, un suspect est arrêté. Il s’agit de Thierry Meilhon, un homme d’une trentaine d’années déjà condamné pour viol et dont les antécédents sont enregistrés au fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles (FIJAIS). En visite sur le futur porte-hélicoptères de la Marine nationale, Nicolas Sarkozy déclare : « Un tel drame ne peut rester sans suite… ». Il lance l’idée d’une énième nouvelle loi sur la récidive avant de se raviser et de demander la création d’une mission parlementaire. Puis, il dénonce des « dysfonctionnements graves » dans la chaîne judiciaire, ce qui soulève un vent de fronde parmi les magistrats. Du jamais vu. Quant au père d’accueil de la victime, Gilles Patron, il affiche sa tristesse et son indignation devant les médias – ce qui lui vaut d’être reçu à l’Élysée le 31 janvier. Six mois plus tard il est mis en examen pour agressions sexuelles et viols sur Jessica, la sœur jumelle de Laëtitia. Tony Meilhon, lui, reconnaît avoir percuté le scooter de la jeune fille, mais dit ne se souvenir de rien d’autre. Il était sous l’emprise de l’alcool et de la drogue. En prison, il a tenté par deux fois de mettre fin à ses jours. Il est aujourd’hui détenu en hôpital psychiatrique.

En février, Brice Hortefeux quitte Beauvau et laisse sa place au conseiller de l’Élysée, Claude Guéant. Pour la presse, c’est un virage à droite toute. En tout cas, avec lui, on ne rigole pas tous les jours rue des Saussaies. On comprend que sa feuille de route concerne l’immigration. La tasse de thé de Marine Le Pen. Mais comme les priorités évoluent vite, aujourd’hui, ce qui préoccupe le plus les Français, ce ne sont ni les étrangers ni l’insécurité, mais le chômage. Et la star du jour serait plutôt Xavier Bertrand avec son appel à mieux répartir le travail pour éviter les licenciements… Le prochain slogan des Présidentielles sera-t-il « travailler moins et gagner moins » ?

Et, pendant que Renault s’embourbe dans une rocambolesque histoire d’espionnage, nos députés se penchent sur le sort des malades mentaux. Tout a démarré par le meurtre d’un étudiant, à Grenoble, commis par un schizophrène en cavale. Comme à son habitude, notre Président a mis les pieds dans le plat, estimant que « tous les malades mentaux sont potentiellement dangereux, potentiellement criminels ».  Et de fil en aiguille, on en arrive à s’intéresser au sort des 70 000 personnes qui font l’objet d’un internement sans leur consentement, en instituant une procédure simplifiée. Une nouvelle loi que de nombreux professionnels de la santé appellent « la garde à vue psychiatrique ». Mais le Conseil constitutionnel renâcle : au-delà de 15 jours, une personne ne peut être privée de sa liberté sans l’aval du JLD (juge des libertés et de la détention). D’où, aujourd’hui, un sacré casse-tête dans les hôpitaux psychiatriques car les choses sont encore plus compliquées qu’avant.

Bernard Madeleine, lui, n’a jamais simulé la folie. C’était un truand, un voyou, mais il assumait. « Monsieur Madeleine », comme on l’appelait, est mort en ce mois de mars. Il a fait frétiller les menottes de pas mal de flics de ma génération. Je crois au fond qu’il s’est bien amusé. Autant que nous. José Giovanni s’est d’ailleurs inspiré du personnage pour écrire Le deuxième souffle. Le mois suivant, c’est un autre truand qui fait parler de lui : Henry Botey, le premier proxénète de France. Mais il n’est pas mort, le bougre ! À 77 ans, il repasse par la case prison. Il risque de prendre dix ans pour avoir fait travailler « au bouchon » les hôtesses de deux bars de Pigalle.

Le 17 mars, le Conseil de sécurité des Nations unies adopte la résolution 1973 qui autorise les frappes aériennes pour protéger le peuple des forces de Kadhafi. La France est fer de lance dans cette équipée. En souvenir du bon temps où le président lybien plantait sa tente dans les jardins de l’Hôtel de Marigny…

Dessin de Grémi

En avril, la Cour de cassation prend tout le monde de court en décidant que les nouvelles dispositions sur la garde à vue s’appliquent immédiatement, alors que la loi n’envisageait la chose que pour le 1er juin. La garde à vue new age débarque donc dans les commissariats et les gendarmeries. Plus de liberté pour les uns, plus de paperasses pour les autres. Pourtant, malgré les craintes affichées par plusieurs syndicats de police, les choses se passent plutôt bien. Même les avocats le reconnaissent.

Le 13 avril, des voisins inquiets de ne plus voir la famille Ligonnès avisent la gendarmerie. Huit jours plus tard, les enquêteurs découvrent un charnier sous la terrasse de la maison : les corps d’Agnès Dupont de Ligonnès et de ses quatre enfants recouverts de chaux vive. Ils ont fait l’objet d’une exécution méthodique, chacun ayant reçu au moins deux balles dans la tête. C’est le début de l’affaire de « la tuerie de Nantes ». Un mandat de recherche est lancé contre Xavier Dupont de Ligonnès. À ce jour, il est toujours introuvable. L’éventualité d’un suicide n’est pas à écarter, mais il n’est pas facile de se donner la mort et de faire disparaître son propre corps… D’après Le Parisien, les policiers rechercheraient l’un de ses amours de jeunesse. Une certaine Claudia qui vivrait à Hanovre, en Allemagne. Pour l’instant, cette affaire criminelle reste incompréhensible.

Le 24 avril, au petit matin, le corps de la comédienne Marie-France Pisier est retrouvé dans la piscine de sa propriété, dans le Var. Quoique le procureur ait exclu l’hypothèse d’un crime, les résultats de l’autopsie ne permettent pas de  déterminer avec certitude les causes de la mort. On n’en sait donc pas plus.

L’actu va vite. Le 28, un peu avant midi, une explosion détruit en partie le café Argana, sur la grande place de Marrakech. Le bilan est lourd : 17 morts, dont 8 Français et 3 Suisses, et 20 blessés. Les policiers marocains interpellent rapidement (trop rapidement disent certains) des suspects qui seraient proches du Jihad et affiliés à l’organisation Al-Qaida. Jugés en octobre, ils sont reconnus coupables d’atteinte grave à l’ordre public, d’assassinats – des actes liés à leur appartenance à un groupe religieux interdit. Tous ont nié les faits. Et, d’après ce que l’on en sait, les preuves ne sont pas légion. L’un des hommes, considéré comme le chef, est condamné à mort ; son second à une peine à perpétuité. Les sept autres comparses écopent de peines d’emprisonnement de 2 à 4 ans – des peines jugées trop douces pour les proches des victimes. Pour ces sept-là, le parquet fait appel.

Le 14 mai, c’est le début de l’affaire DSK. Les psys et les spécialistes de tout crin sautent d’un écran télé à l’autre. On va tout connaître d’une maladie habituellement tue, l’addiction sexuelle. Dans la foulée, Tristane Banon décide de porter plainte contre DSK pour une tentative de viol perpétrée il y a près de dix ans. Plainte qui sera classée le 13 octobre 2011. Et Luc Ferry, le philosophe cathodique, se distingue en refaisant surgir une rumeur qui avait couru lors de la précédente campagne présidentielle sur les agapes plus ou moins pédophiles d’un personnage en vue. C’est ainsi, tous les cinq ans, la classe politique pète les plombs.

Le 20 juin, Yvan Colonna est condamné une troisième fois pour l’assassinat du préfet Érignac. Il prend perpette simple. C’est la première fois qu’un jury (en l’occurrence de magistrats) d’une cour d’assises motive son verdict. Anticipant l’application d’une loi qui doit prendre effet au 1er janvier 2012.

Pendant ce temps, tel le personnage de Cervantes, le commandant de police Philippe Pichon se bat contre la justice et l’administration. Il a eu le tort de dénoncer les dysfonctionnements du fichier de police le plus important, le STIC, qui comprendrait actuellement des informations sur environ 6.5 millions de « mis en cause » et 38 millions de victimes. D’après un récent rapport parlementaire, 45 % des fichiers pourraient même être considérés comme hors la loi. Mais la sécurité des consultations devrait s’accroître avec l’arrivée de la nouvelle carte de police qui sera équipée de deux puces RFID et d’une piste magnétique. Quant à Philippe Pichon, il a perdu son combat devant le tribunal administratif.

Au mois d’août, le député socialiste Jean-Jacques Urvoas sort un livre qui ressemble à un programme : 11 propositions chocs pour rétablir la sécurité. Mais il ne doit pas être dans les petits papiers de François Hollande, car celui-ci préfère s’attacher les conseils de François Rebsamen, le maire de Dijon, qui a été le chef du cabinet de Pierre Joxe au ministère de l’Intérieur. Sans doute une personnalité plus classique. Dommage, j’aimais bien certaines de ses idées…

Le 7 août, Charles Bauer, qui fut un temps le complice de Jacques Mesrine, décède d’une crise cardiaque à son domicile, à Montargis, dans le Loiret. Âgé de 68 ans, il aura passé près du tiers de sa vie derrière les barreaux.

En septembre, de mauvaises langues parlent d’un cabinet noir à l’Élysée. Et Nicolas Hulot doit se dire qu’il aurait mieux fait de ne pas en rêver. Eva Joly fait un carton, du moins parmi les écolos, car dans les sondages, pour l’instant, le compte n’y est pas. Elle se maintient en ballotage autour des 5 % d’intentions de vote, le chiffre magique qui fait bondir à 8 millions d’euros la participation de l’État aux frais de campagne. Quant à Nicolas Hulot, il vient de perdre son job à TF1. Mais cela n’a sans doute rien à voir.

À la fin septembre, coup de tonnerre dans la police avec l’arrestation du commissaire Michel Neyret, le sous-directeur de la PJ de Lyon. Des fuites savamment distillées font monter la pression. Sa femme tiendrait une maison close, il aurait plusieurs comptes en Suisse, il aurait été infiltré dans la police par un réseau de narcotrafiquants, à moins qu’il ne soit le chef du gang des escrocs à la taxe carbone… Une fraude à la TVA estimée à cinq milliards d’euros. Certains journaux comme Libération, et même Le Monde, balancent des informations parfois hypothétiques. On a l’impression qu’ils se font manœuvrer, mais par qui… Et pourquoi ? On connaîtra bien un jour le fond de l’histoire. En attendant, il est difficile de lui souhaiter une bonne année, ni surtout une bonne « Santé », puisqu’il passera les fêtes en prison. Lors de sa première audition par le juge d’instruction, il y a quelques jours, le magistrat a sorti du placard des écoutes téléphoniques qui n’étaient pas dans le dossier. Du coup, les avocats, qui voulaient requérir sa libération, ont dû demander un report.

En octobre, à Lille, c’est une affaire de proxénétisme qui secoue la ville. Et de nouveau, des policiers et d’anciens policiers seraient impliqués. Cette fois, on ne fricote pas avec le Milieu, mais plutôt avec le gratin du monde des affaires et de la politique. Et l’image des francs-maçons en prend un coup. Puis le nom de Dominique Strauss-Kahn jaillit du chapeau. Comme un pare-feu pour les autres. Il apparaîtrait depuis des mois sur les écoutes téléphoniques. Ce qui fait dire à certains, que, de toute manière, sa candidature aux Présidentielles avait du plomb dans l’aile.

En novembre, c’est un lycéen de 17 ans qui reconnaît avoir violé et tué Agnès, une jeune fille de 14 ans. Ensuite, il aurait brûlé son corps. Un acte prémédité, semble-t-il. Mais, comme il était déjà mis en examen pour un viol commis antérieurement, et malgré la réserve des parents de la victime, un début de polémique pointe son nez. Bouche cousue du côté de l’Élysée. Mais quelques jours plus tard, Michel Mercier, le silencieux garde des Sceaux, déclare avoir reçu des instructions du Premier ministre. Désormais, tout mineur suspecté d’un crime sexuel particulièrement grave devra être placé en centre éducatif fermé jusqu’à la date de son jugement.

Le 6 décembre, la Cour de cassation renvoie le procureur Philippe Courroye dans ses buts : Il a bien enfreint la loi en violant le secret des sources des journalistes. C’est l’épilogue (tout provisoire) de la guerre des fadettes entre lui et le journal Le Monde.

Pendant ce temps, à Marseille, la violence semble quotidienne. Les règlements de comptes entre dealers deviennent monnaie courante et les flics ont du mal à gérer la situation. En fait, depuis le début de l’année, la seule chose qui a vraiment changé, c’est le préfet de police. Gilles Leclair a été remercié pour avoir dit tout haut ce qui se dit tout bas. En deux mots, avec les moyens dont dispose la police, impossible de faire des miracles. « Je ne suis pas le Sauveur », a-t-il déclaré devant la presse. Évidemment, la place est déjà prise.

Allez, malgré tout… Une bonne année à tous.

Le gang des Lyonnais : un flash-back troublant

Alors que le film d’Olivier Marchal, Les Lyonnais, va sortir sur les écrans, Francis Renaud, le fils du juge assassiné en 1975, publie un livre qui laisse entendre que son père aurait pu être victime du gang de Momon Vidal. Cela nous ramène près de 40 ans en arrière : Nick-le-Grec supplante Jeannot la Cuillère et deux commissaires de police, dont Charles Javilliey, un as de la PJ, se retrouvent derrière les barreaux. Comme Michel Neyret aujourd’hui.

Tout cela mérite bien un petit flash-back…

En 1971, parmi la centaine de hold-up comptabilisés dans la région Rhône-Alpes, au moins cinq sont attribués à une même équipe : des individus lourdement armés, grimés ou masqués, chacun revêtu d’une blouse bleue. Et à chaque fois, ils prennent la fuite à bord d’une Renault Estafette. Au mois d’août, grâce à un coup de téléphone anonyme, les gendarmes de Bourg-en-Bresse retrouvent le véhicule. Ils découvrent à l’intérieur un véritable arsenal : des armes de tous calibres, des munitions, des cagoules, des postiches, etc. Tout laisse à penser que les malfaiteurs ont pris la sage décision d’arrêter les frais, de prendre leur retraite. Et, avant de tirer leur révérence, comme un dernier pied de nez, ils font don de leurs outils de travail à la maréchaussée. En fait, ils sont juste partis en vacances. En septembre, le ballet reprend, avec du matériel tout neuf. En février 1972, quatre hommes armés attaquent un transporteur de fonds sur le parking du Carrefour de Vénissieux. Les convoyeurs résistent. Fusillade. L’un des bandits est blessé, mais les malfaiteurs parviennent à s’enfuir avec un butin qui frôle le million de francs. Le lendemain, les gendarmes surprennent un étrange manège : ce qui semble bien être un transbordement entre une Estafette et une BMW. À la vue des képis, l’Estafette prend le large, tandis que le conducteur de la puissante BM s’embourbe dans la terre meuble du chemin. L’homme est interpellé. Il s’agit d’un gitan de 27 ans : Edmond Vidal. Il se dit ferrailleur. En 1967, il a été condamné à cinq ans de réclusion pour une agression à main armée contre un bar de Lyon en compagnie d’un truand bien connu : Jean-Pierre Gandeboeuf. Mais ce jour-là, les gendarmes n’ont rien à lui reprocher. Ils le laissent partir, sans doute à regret. Et ils avisent le service de police judiciaire.

C’est le début de la traque du gang des Lyonnais. Elle durera plusieurs années.

Aussitôt informé, avant même d’être officiellement saisi de l’enquête, le chef du groupe de répression du banditisme de Lyon, le commissaire Georges Nicolaï, entre en scène. Au bout de quelques semaines, le noyau de l’équipe est identifié. Outre Edmond Vidal, dit Momon, il y a Pierre Zakarian, dit Pipo, et Michel Zimetzoglou, alias Le Grec. Ces deux derniers sont associés dans la gérance d’un restaurant du quartier Saint-Jean de Lyon, « Le Tire-Bouchon », avec Joseph Vidal, dit Galane, le frère du précédent.

À cette époque, une affaire de proxénétisme éclabousse la police lyonnaise. Les commissaires Louis Tonnot, de la sûreté urbaine, et Charles Javilliey, de la PJ, sont soupçonnés de corruption. Javilliey, spécialisé dans la lutte contre le grand banditisme, possède pourtant un palmarès impressionnant. Il se défend comme un beau diable. Il affirme que ses relations avec le milieu, voire ses petits arrangements, sont le prix à payer pour obtenir des tuyaux. Rien n’y fait. Il est incarcéré. Condamné en première instance, il sera finalement relaxé devant la Cour d’appel en 1974. Ce charivari fait bien les affaires des truands et notamment d’un certain Jean Augé, dit Petit-Jeannot, le parrain du milieu lyonnais. Celui qui tire les ficelles. On peut se demander si quelqu’un bénéficie aujourd’hui de l’incarcération du commissaire Michel Neyret…

Jean Augé a été collabo durant la guerre, mais, lorsque le vent a tourné, il est entré dans un bar et il a tué deux Allemands – au hasard. Ce qui a fait de lui un héros. Reconverti au Gaullisme, il est rapidement devenu le responsable du SAC (Service d’action civique) pour toute la région. Durant la guerre d’Algérie, il a fait partie de cette police parallèle qui se livrait aux pires exactions : exécutions sommaires, torture… Ses amis lui avaient gentiment attribué le sobriquet de « Jeannot la Cuillère », car dans les interrogatoires, il utilisait cet ustensile pour énucléer ses victimes. On dit de lui qu’avec son complice, un ancien sous-officier, il préparait ses coups comme un chef d’état-major. Il a été le mentor d’Edmond Vidal et probablement le cerveau du hold-up de l’hôtel des postes de Strasbourg. Quasi une opération commando. Après son arrestation, comme beaucoup de truands, Edmond Vidal a d’ailleurs tenté de politiser ses méfaits en revendiquant des centaines d’opérations pour le compte du SAC. Ce qui n’a jamais été confirmé. Petit-Jeannot a été abattu en juin 1973 alors qu’il se rendait à son club de tennis.

Les malheurs du commissaire Javilliey n’empêchent pas Pierre Richard, le n°2 de la PJ, de se frotter aux informateurs. Et il obtient de l’un d’eux un tuyau sur le prochain coup que prépare le gang des Lyonnais. L’idée de faire un flag fait toujours bander les flics. Plus de cent policiers travaillent jour et nuit pendant plus d’un mois et demi sur Momon et sa bande. Des surveillances, des filatures, des écoutes sauvages, et même la sonorisation, avec l’aide de la DST, du domicile de certains suspects – à l’époque, en toute illégalité. Mais rien ne va comme prévu. Peut-être un problème de commandement… ou de sous. Finalement, Honoré Gévaudan, le directeur des affaires criminelles de la PJ, donne l’ordre d’arrêter les frais et de « casser » l’affaire. C’est l’opération « chacal ». Et c’est quitte ou double, car les preuves sont bien minces… Le véhicule d’Edmond Vidal est repéré devant le domicile de sa compagne, Jeanne Biskup, dite Janou, à Sainte-Foy-lès-Lyon. Lorsque le couple sort, tous deux sont interpellés. En douceur. Momon n’est pas armé. Dans la foulée, le reste de l’équipe est arrêté, à l’exception de l’un d’entre eux, qu’on ne retrouvera jamais. Peut-être l’indic qui a été invité à se mettre au vert avant les hostilités… À moins que ses amis aient découvert le pot aux roses… En tout cas, on n’en a plus jamais entendu parler. Des dizaines d’hommes et de femmes en garde à vue, des perquisitions dans toute la région, des centaines de P-V… Pour les nostalgiques de la fouille à corps, l’un des membres du gang, Pierre Pourrat, alias Le Docteur, tente de s’ouvrir les veines durant sa garde à vue à l’aide d’un canif qu’il avait dissimulé dans son slip. Mais les flics sont à cran. Trop longtemps que ça dure. L’ambiance est virile et certaines auditions sont musclées. On raconte que l’un des juges (il y en avait beaucoup), en voyant la tête légèrement carrée de Momon Vidal, lui aurait demandé s’il voulait déposer une plainte contre les policiers. Il aurait répondu : « Non, Monsieur le juge, c’est une histoire entre hommes ». Je ne sais pas si l’anecdote est vraie, mais c’est le fond du film d’Olivier Marchal : démontrer que les bandits de l’époque avaient un code d’honneur. Le romantisme d’un artiste. Personnellement, je trouve plutôt indécent de faire d’Edmond Vidal un homme d’honneur, comme on a fait de Jacques Mesrine un justicier, ou du terroriste Carlos un Che Guevara. Les années ne peuvent effacer les crimes des uns et des autres. Je n’aime pas les criminels qui se racontent sous prétexte qu’ils ont pris des rides.

Durant ces 48 heures de garde à vue, si les clients ne sont guère bavards, les perquisitions sont payantes : 274 scellés. Des armes, des munitions, de l’argent, des cartes routières annotées… Finalement, en rassemblant les pièces du puzzle, 14 vols à main armée sont mis au crédit de l’équipe. Celui de Strasbourg, le hold-up du siècle comme dit la presse, ne fera pas partie du lot. Et comme il se murmure que l’argent (près de 12 millions de francs) aurait renfloué les caisses d’un parti politique, certains laissent entendre que les policiers n’ont pas trop insisté. Ce qui est faux, en tout cas au niveau de l’instruction judiciaire, car le juge François Renaud s’accroche sérieusement à cette piste. Il place tout le monde en détention, notamment Jeanne Biskup, la compagne d’Edmond Vidal, et même son épouse dont il est séparé depuis plus d’un an. Une pratique inhabituelle, à l’époque. Le truand se rebelle et refuse dans ces conditions de répondre aux questions du magistrat. Il veut que sa compagne soit libérée. La presse s’en mêle et critique à mi-mots la dureté de François Renaud. Ainsi, le 27 juin 1975, Le Progrès de Lyon cite les avocats des malfaiteurs qui stigmatisent les  « bons plaisirs que le juge s’octroie » de laisser à l’isolement la dernière femme détenue. Huit jours plus tard, le juge Renaud est assassiné : trois balles de calibre .38 Spécial, dont deux à bout portant. Cela ressemble fort à de l’intimidation. Son successeur ne reprendra pas les recherches sur le SAC et Jeanne Biskup retrouvera la liberté dans les semaines qui suivent la mort du magistrat.

On peut se demander pourquoi Edmond Vidal voulait tant que sa compagne sorte de prison. Il existe une hypothèse : elle aurait su où était dissimulé le butin de la bande. Un magot estimé à 80 millions de francs. Mais un autre personnage devait, lui aussi, être dans la confidence : Nicolas Caclamanos, alias Nick-le-Grec, le conseiller financier de la bande. Et peut-être celui du SAC, avant qu’il ne se fâche avec Jean Augé. Une fâcherie qui a coûté la vie à Petit-Jeannot. Le journaliste d’investigation, Jacques Derogy, celui qui sans doute connaissait le mieux cette affaire, pense que Nick-le-Grec a commandité la mort du juge Renaud. Il en devait une à Momon pour lui avoir fait perdre pas mal d’argent dans une affaire de drogue qui avait mal tourné. L’occasion de se dédouaner. Un personnage ambigu, ce Caclamanos, mi-flic mi-voyou, il jouait sur les deux tableaux. On dit même qu’il roulait pour le Narcotic bureau. Il aurait donc versé 500 000 francs à des tueurs à gages pour liquider François Renaud. Mais dans quel but ? Pour se réhabiliter aux yeux de Momon Vidal ou pour empêcher le juge de mettre le nez dans les affaires du SAC ? Personne ne le sait. Peut-être un peu les deux, comme à son habitude.

Le procès s’ouvre en juin 1977. L’avocat général demande la réclusion criminelle à perpétuité pour Edmond Vidal. Après une longue délibération, vers 22 heures, le verdict tombe : dix ans. Cris de joie et applaudissements dans la salle d’audience. C’est la première fois sans doute que le président d’une Cour d’assises est ovationné par les proches de celui qu’il condamne… Quant à Jeanne Biskup, elle écope de cinq ans de prison dont la moitié avec sursis, ce qui lui permet de sortir libre du tribunal.

Edmond Vidal a été libéré en 1981. Plusieurs membres du gang des Lyonnais ont depuis connu une fin tragique, comme Michel Simetzoglou, ligoté sur un pneu et probablement brûlé vif. On se demande pourquoi. Un désaccord sur le partage du magot, peut-être… Quant à l’enquête sur la mort du juge Renaud, elle n’a jamais abouti.

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Je me suis référé aux livres de MM. Honoré Gévaudan (Ennemis publics, éd. JC Lattès) ; James Sarazin (M… comme milieu, éd. Alain Moreau) ; Jacques Derogy et Jean-Marie Pontaut (Investigation, passion, éd. Fayard).

Dans son émission Vivement dimanche, diffusée sur France 2 le dimanche 27 novembre, Michel Drucker reçoit Olivier Marchal et un panel de « flics à l’ancienne », au front ridé mais à l’œil pétillant.

Touche pas à ma PP !

À la veille des élections présidentielles, la préfecture de police de Paris tremblerait-elle sur ses bases ? Déjà qu’elle doit déménager… Pour l’heure, le préfet de police, Michel Gaudin, met les pieds dans le plat et se permet de juger les juges. À ses yeux, ils feraient preuve d’une trop grande mansuétude, notamment vis-à-vis des récidivistes. « Je communiquerai régulièrement sur le cas de ces délinquants, souvent mineurs, que la police arrête avec plus de cinquante délits à leur passif », dit-il. Je suppose qu’il voulait dire « à leur actif ». Et pour mieux faire passer l’idée que les magistrats ne font pas leur travail, il prend les médias à témoin en diffusant des flashes hebdomadaires d’information. « Ici sur un cambrioleur « qui pourra fêter sa 50e arrestation en prison », là sur un receleur « connu pour 72 rôles », ailleurs sur un « voleur de voitures interpellé pour la 97e fois » », écrit Jean-Marc Leclerc dans Le Figaro du 8 septembre 2011.

Pour cela, le préfet a mis en place un système de triage pour identifier ces délinquants d’habitudes, suspectés, pour faire simple… de ne pas avoir modifié leurs habitudes. Et il a donné des instructions au directeur de la PJ afin de les retrouver et de les suivre à la trace. Une mission paraît-il prioritaire. Cette volonté du préfet s’appuierait sur le rapport du député Éric Ciotti, le monsieur sécurité de l’UMP.

Dans le genre embrouillamini, on ne peut guère faire mieux. En exagérant à peine, on peut dire que le représentant du gouvernement (pouvoir exécutif) fustige les juges (pouvoir judiciaire) en tenant compte du rapport d’un député (pouvoir législatif) qui agit au nom d’un parti politique. Allô ! Montesquieu…

La préfecture de police est une institution unique en Europe qui prive le maire de Paris de ses pouvoirs de police et le préfet de Paris (et non de police) de ses pouvoirs de représentant de l’État dans le département. Elle fait de la PP un État dans l’État, et le préfet de police est certainement l’un des hommes les plus puissants de France. Il est à la fois responsable de la sécurité des personnes et des biens, de la sécurité civile et de la police administrative. Et il est en outre préfet de défense de l’Île-de-France.

On comprend mieux pourquoi Jean-Jacques Urvoas, le monsieur sécurité du PS, estime qu’il faut démembrer la PP. Une idée qui provoque bien des grincements de dents, comme un hourvari au sein du sérail. C’est l’ancien préfet de police Philippe Massoni (1993-2001) qui est monté au créneau. Il faut reconnaître qu’il le fait avec circonspection. « L’organisation de la police française est certainement perfectible mais il n’est pas certain que la suppression de l’institution qui en est la clef de voûte depuis plus de deux siècles apparaisse comme une piste à suivre », peut-on lire dans une dépêche AFP qui rapporte ses propos.

La pucelle change de bord – Résurgence du passé, la PP a officiellement vu le jour sous le premier consul Bonaparte, et depuis, elle a résisté à toutes les attaques. Ainsi, lors de la dernière guerre, même si de nombreux policiers ont œuvré dans l’ombre pour combattre l’ennemi, il n’en demeure pas moins vrai que la police parisienne a arrêté environ 40 % des 70 000 Juifs déportés de France. Ces policiers-là n’ont pas su « braver les interdits » ni « contrevenir aux ordres inacceptables », comme le dit si justement le préfet Gaudin dans la préface d’un document « Au cœur de la préfecture de police : de la Résistance à la Libération » (Luc Rudolph – Éd. LBM). Un choc qui aurait dû être fatal à la Grande Maison. Alors que sous Pétain, déjà, elle avait résisté aux velléités de réformes du ministre de l’Intérieur Pierre Pucheu, l’inventeur des « Brigades spéciales ». En 1966, à la suite de l’affaire Ben Barka, sous la pression du président De Gaulle, le ministre de l’Intérieur Roger Frey étatise l’ensemble des forces de police. C’est la création de la police nationale qui réunit à la fois la sûreté nationale et la préfecture de police. Enfin une vraie réforme ! À l’arrivée, une même tenue, la même carte tricolore, la même formation – et la pucelle, cette plaque avec le numéro de l’agent, qui change de côté. Dorénavant, tout le monde la portera à gauche, ou à droite, je ne sais plus. C’est peut-être la seule conséquence visible de cette réforme. Je plaisante, mais, police d’État ou pas, la toute puissance de la PP reste intacte. Et, ces dernières années, sous la pression du président Sarkozy, sa compétence s’est même étendue aux départements qui entourent la capitale.

La PP, indissociable d’un État centralisé – Pour le député socialiste J.J. Urvoas, elle a été instituée pour protéger l’État plus que pour protéger la population. Et dans un sens, on comprend bien que la ville où siègent les principales institutions du pays doive faire l’objet de toutes les attentions. Mais cela est moins vrai en matière de police judiciaire. Comment expliquer, par exemple, qu’un préfet soit averti, parfois avant les magistrats, d’une enquête politiquement sensible ? Qu’est-ce qui justifie que la brillante brigade criminelle du 36 soit sous la houlette du représentant du pouvoir exécutif ? Situation tellement gênante, que dans les années 70, de jeunes magistrats sont partis en guerre contre ce système qui les prive d’une partie de leurs prérogatives. Combat perdu.

Et l’on se souvient de l’affaire Tibéri, en 1996. Olivier Foll, alors patron de la PJ, refuse que ses fonctionnaires assistent le juge Halphen lors d’une perquisition au domicile des époux Tibéri. Même s’il assume, tout le monde sait bien qu’il n’a fait qu’obéir aux incitations pressantes de sa hiérarchie, en l’occurrence le ministre de l’Intérieur Jean-Louis Debré, et le secrétaire général de l’Élysée, Dominique de Villepin. Un véritable scandale pour les syndicats de la magistrature. Le symbole d’une police judiciaire à la botte du pouvoir, etc. Et ils réclament à grands cris le rattachement de la PJ à la Chancellerie. L’année suivante, le gouvernement change de bord, comme la pucelle, il passe de la droite à la gauche, et M. Jospin remplace M. Juppé. On va voir ce qu’on va voir ! Olivier Foll est débarqué et rejoint le cimetière aux éléphants. Fin de la séquence.

Le rattachement de la PJ à la justice est certainement une belle aventure intellectuelle, mais elle le restera. Je crois d’ailleurs que les policiers en n’ont pas envie. Certes, ils ont une double casquette, et dans leur travail quotidien beaucoup sont amenés à rendre compte aux magistrats, mais, dans les faits, ils n’ont qu’un chef, et il n’est pas place Vendôme. Et la PP restera monolithique. Nos prochains dirigeants auront d’ailleurs bien d’autres chats à fouetter que de s’occuper d’une institution à l’autarcie un peu agaçante, mais dont personne ne peut nier l’efficacité.

Finalement, je suis assez d’accord avec le préfet Massoni, la PP est une boutique qui tourne bien, mais elle est perfectible. On peut même dire qu’après tant d’années, la vieille dame n’aurait pas volé un bon lifting.

Charlie Bauer : vie et mort d’un truand

Charlie Bauer est mort dimanche dernier. Robin des Bois, pourfendeur des QHS, révolutionnaire, redresseur de torts…, la presse a été dithyrambique  sur ce bandit du siècle dernier. « Né en 1943 dans le quartier de l’Estaque à Marseille, dans une famille pauvre, juive, communiste et résistante, le petit Charlie déboulonne très vite les rails du tramway pour en vendre les boulons, puis attaque des trains de marchandises pour, assurait-il, faire des distributions dans les quartiers nord. Membre des Jeunesses communistes dès l’âge tendre, il s’engage aux côtés du FLN à Marseille et finit par être arrêté en 1962 », écrit Franck Johannès dans Le Monde du 7 août 2011. Bauer était-il un lieutenant de Jacques Mesrine ? Certainement pas, juste son complice, au coup par coup, si je puis dire. Mais dans cette « nécrologie fine, chaleureuse et, à la fois, critique », comme le dit sur son blog le haut magistrat Philippe Bilger, une phrase m’a fait sursauter : « Mesrine est tué en novembre 1979, et entraîne Charlie Bauer dans sa chute. »

Euh !… Ce n’est pas tout à fait ainsi que les choses se sont passées…

Nous sommes en 1979. Le 10 septembre, le journaliste Jacques Tillier est retrouvé nu et à moitié mort. C’est l’œuvre de Jacques Mesrine et d’un individu non identifié qui se fait appeler « Paul ». Dix jours plus tard, Pierre Goldman est assassiné en pleine rue. Meurtre revendiqué par un mystérieux groupe « Honneur de la police », mais qui n’a jamais été élucidé. Même si lui et Charlie Bauer se connaissaient, l’affaire n’a rien à voir avec la suite des événements, mais montre qu’à l’époque, les faits-divers font la Une des journaux.

Pendant ce temps, les policiers de l’office du banditisme progressent dans leur enquête. Ils ont une demi-douzaine de suspects qui pourraient coller avec le portrait-robot de M. Paul. Sur son lit d’hôpital, au milieu d’une cinquantaine de photos, Jacques Tillier en désigne une, celle de Charles Bauer. L’homme est en rupture de conditionnelle et, en plus, recherché par l’Office des stups. Autrement dit, il est en cavale. Parmi les rares personnes qui lui rendaient visite lorsqu’il était en détention, figure Renée Gindrat, la mère de son enfant. Enseignante, celle-ci est alors en arrêt de longue maladie. Elle est propriétaire de deux voitures, dont l’une de marque identique à celle qui a été utilisée pour l’enlèvement du journaliste. Elle a d’ailleurs été achetée quelques jours plut tôt. L’adresse sur la carte grise est fausse. C’est en épluchant les contraventions que le véhicule est finalement localisé sur le parking de l’église de la Trinité, dans le 9° arrondissement de Paris. Tandis que le président Giscard d’Estaing se démène dans l’affaire des diamants de Bokassa, les policiers se mettent en planque. Et ils ont tôt fait de loger Charlie Bauer,  rue Saint-Lazare, dans un immeuble où Renée Gindrat occupe un appartement sous un nom d’emprunt.

La planque sur Lulu – C’est le nom de code pour désigner Bauer. Elle va durer plusieurs jours. Tandis que la presse titre sur le mystère qui entoure la mort de Robert Boulin, dont le corps a été découvert dans un étang de la forêt de Rambouillet, ça chauffe dans le 9°. Et enfin, le 31 octobre, les policiers sont récompensés de leurs efforts : Lulu sort de chez lui avec sa compagne. La pression monte d’un cran lorsqu’il se gare dans le 18° arrondissement, le quartier de prédilection de Jacques Mesrine. Le couple pénètre dans un immeuble de la rue Belliard. Il en ressort une heure plus tard, suivi d’un individu de forte stature qui, malgré sa perruque et sa fausse barbe, est rapidement identifié comme étant l’ennemi public numéro 1. Le trio se rend dans un magasin de meubles, au coin de la rue Labat, comme chantait Édith Piaf. Sylvia Jeanjacquot, la compagne de Mesrine, les rejoint peu après. Les deux criminels sont là, à quelques mètres des policiers. Il manque juste le feu vert pour intervenir. Mais il ne vient pas. À la sortie du magasin, la filoche reprend. Dans leur voiture, les flics rongent leur frein.

Deux jours plus tard, lorsque Jacques Mesrine est tué dans la fusillade de la porte de Clignancourt, Charlie Bauer n’est pas là. Par la suite, il sera blanchi dans l’affaire Tillier et condamné pour recel d’une partie de la rançon provenant de l’enlèvement du promoteur immobilier sarthois Henri Lelièvre.

Voilà, je voulais juste dire que ce n’est pas Mesrine qui a entraîné Bauer dans sa chute, mais le contraire. D’ailleurs, lorsque Bauer parlait du « Grand », c’était avec une certaine condescendance, se vantant même de l’avoir plus ou moins « instrumentalisé ».

35 ans après : Qui était le cerveau du casse de Nice ?

Le week-end du 17 juillet 1976, une bande de malfaiteurs met à sac la salle des coffres de la Société Générale, en plein centre de Nice. Emportant un butin estimé, à la louche, à 30 millions d’euros. Mercredi dernier, un vieux truand marseillais, Jacques Cassandri, alias « Le Tondu », a quitté la prison des Baumettes, où il était détenu depuis le 21 janvier 2011. Il a été libéré contre le versement d’une caution de 200.000 €. Une broutille pour celui qui revendique la paternité de ce casse.

C’est dans un livre autobiographique paru l’année dernière, qu’il a tenté de déboulonner le légendaire Albert Spaggiari, affirmant que ce dernier n’avait même pas participé au percement du tunnel qui partait de la bouche d’égout de la rue Gustave-Deloye pour arriver au mur en béton de la salle des coffres. Un tunnel d’environ 8 mètres de long et de 70 centimètres de diamètre.

Il pensait sans doute, Le Tondu, que 35 ans plus tard, il ne risquait rien à se « déboutonner ». Oubliant au passage que le Code pénal est devenu de nos jours si complexe qu’il est bien difficile de prendre ce genre de pari. Entre recel, blanchiment, non-justification de ressources, ou autres infractions financières ou fiscales, il y a toujours quelque chose à grappiller pour des enquêteurs opiniâtres. Ils n’ont guère eu de mal à savoir qui se cachait derrière le pseudonyme d’Amigo, l’auteur du livre La vérité sur le casse de Nice, et ils ont tout passé au peigne fin. Conclusion : ce monsieur connu pour d’anciennes activités dans le grand banditisme détiendrait directement ou non des participations importantes dans plusieurs restaurants ou clubs privés à Marseille et en Corse. Et il va falloir qu’il se justifie. On a même retrouvé son ADN sur les lieux d’une tentative de braquage dans une bijouterie de Toulon.

Mais est-il pour autant le cerveau du casse de Nice ? On peut se montrer dubitatif, même s’il est vraisemblable qu’il ait fait partie des 20 à 30 individus qui ont participé à cette affaire rocambolesque. Toutefois, pour rester dans du concret, il faut se souvenir que devant la Cour d’assises des Alpes-Maritimes, le 31 octobre 1979, seulement six personnes se trouvaient sur le banc des accusés. Deux ont écopé de cinq ans de prison pour avoir négocié des titres et des lingots d’or, et un seul, Daniel Michelucci, a été retenu comme l’un des « égoutiers ». Il a pris sept ans. Une jeune femme a été acquittée, ainsi que deux « beaux mecs », Dominique Poggi et Gérard Vigier. La justice n’a retenu aucune charge contre eux. Quelques années plus tard, tous deux succomberont à une overdose de plomb.
Gaëtan Zampa, soupçonné (à tort, semble-t-il) d’être l’organisateur de ce colossal fricfrac, a été arrêté par la suite pour des  infractions financières. Il est mort en prison, sans qu’on sache trop s’il a succombé à la pendaison ou à la trachéotomie que lui a gentiment prodiguée son voisin de couchette.

Quant à Spaggiari, Bert pour les intimes (et pour les flics), il a été condamné en novembre 1979 à la réclusion criminelle à perpétuité – par contumace. On se souvient en effet qu’à l’époque, il était en cavale.

T’as le bonjour d’Albert !
C’est un individu trouvé en possession de lingots d’or qui avance le premier le nom de Spaggiari, un photographe de Nice. Les surveillances ne donnent rien et, finalement, il est interpellé en octobre 1976. Sans biscuits. Les perquisitions, un fiasco, si ce n’est quelques armes découvertes dans son poulailler. Par la suite, il justifiera la présence de ces armes par sa participation à un mystérieux mouvement d’extrême droite, la « Catena ».
En fait, il se lâche à la fin de sa garde à vue. Mais, plus tard, devant le juge, il devient disert, au point que celui-ci décide de le revoir tous les jeudis à 14 heures 30. Ce qui est une erreur. Comme le raconte dans son livre le commissaire Honoré Gévaudan (Ennemis publics, chez JC Lattès), le magistrat instructeur est très content de « son » détenu : « Il collabore parfaitement. Nous faisons de grands progrès ». Mais, ce jeudi 10 mars 1977, le détenu modèle  ouvre la fenêtre, prend appui sur la corniche et se lance dans le vide. Un bond de huit mètres. Il rebondit sur le toit d’une voiture en stationnement et atterrit sur le tansad d’une moto. Qui démarre aussi sec. Pas si godiche que ça, le Bert…

Pour le situer, il faut se souvenir qu’à 18 ans, il s’engage dans les paras. Direction l’Indo. Et ceux qui se le représentent comme un petit photographe un rien mytho, mais pas dangereux, oublient que, sous l’uniforme, il a écopé de cinq ans de travaux forcés pour avoir braqué un bar à Hanoï. Et qu’à la fin des années 50, il a travaillé pour la société Fichet-Bauche, à Dakar. Société qui a installé la salle des coffres de la Société Générale de Nice.

Tout est folklore, chez cet homme. Ainsi, lorsqu’il a été arrêté, il revient d’un séminaire au Japon, avec le maire de Nice. Et s’il est mort d’un cancer, en juin 1989, et non d’une salve de gros calibres, il a pris soin de mettre en scène sa fin. Le 10 juin 1989, deux hommes déposent une civière dans le salon de sa mère : le corps d’Albert Spaggiari est revêtu d’un treillis, la tenue du baroudeur.

Lors de sa garde à vue, lorsqu’il finit par se confier aux trois policiers qui le questionnent, ce n’est pas qu’il craque, mais simplement parce que ceux-ci ont trouvé le point faible. Ils ont mis en doute ses capacités à fomenter un tel coup. Piqué au vif, Spaggiari a ouvert les vannes, s’attribuant du coup la place prépondérante, celle de chef. Inutile de dire qu’à l’époque, personne n’est venu le contredire.

Il n’était sans doute pas capable de mettre sur pied un telle affaire (manque de moyens, de connaissances…), mais on peut être certain que c’est bien lui « l’inventeur » du casse du siècle. Pourtant, à l’arrivée, il n’aurait encaissé que quelques miettes du gâteau. On peut donc dire qu’il s’est fait rouler par des complices… malhonnêtes.

Et aujourd’hui, alors que nombre des acteurs de ce feuilleton sont morts, un vieux truand vient revendiquer sa place ! Allez, on pourrait au moins lui laisser ça, à Spaggiari !

La PJ de 2004 (2)

PARTIE 33 – En revisitant l’année 2004, on s’aperçoit qu’elle est raccord avec l’actualité. Pour la police judiciaire, c’est une époque de mutation: nouveaux textes de loi et avancées technologiques renvoient définitivement Clemenceau et ses brigades du tigre au musée de la police.

Il s’agit pour les policiers de mettre en application la loi Perben II qui a nettement durci le ton contre « les nouvelles formes de délinquance et de criminalité » et la loi sur la sécurité intérieure, dite loi Sarko II.

shadok_castalie.1225217519.jpgD’une certaine façon, on a minimisé l’importance de ces textes en médiatisant la pénalisation du racolage passif ou les rassemblements dans le hall des immeubles, mais il s’agit de bien autre chose : pose de micros et de caméras dans les lieux privés, garde à vue de quatre jours, perquisitions de nuit, accès aux fichiers informatiques des administrations, interconnexions entre les différents fichiers de police et de gendarmerie, ouverture des bases de données des services d’Internet, banalisation du fichier Adn, etc.

De fait, ce chambardement juridique s’applique quasiment à toutes formes de délinquance sauf la criminalité et la corruption financières. Alors qu’aujourd’hui on découvre sans cesse de nouvelles malversations qui portent sur des milliards d’euros, on peut se dire que le législateur a manqué une marche. Ce ne sont ni les putes ni les jeunes qu’il fallait viser mais les traders et les banquiers.

Pour expliquer cette exception, le rapporteur (le sénateur de la Mayenne François Zocchetto) a estimé que les infractions financières étaient « rarement le fait de bandes organisées ».

Et pourtant, dans le même temps, la Cour d’appel confirme les condamnations infligées à une quarantaine de personnes impliquées dans une gigantesque escroquerie entre la France et Israël. Il s’agit de l’affaire dite du Sentier. Parallèlement, une seconde enquête bat son plein pour des faits sensiblement similaires (Sentier II). Huit grandes piles-de-dossiers_marysangelil.1225232710.jpgbanques françaises, leurs dirigeants et des centaines de personnes sont soupçonnés de blanchiment d’argent. S’il ne s’agit pas d’une bande organisée, ça y ressemble bigrement…

L’affaire du Sentier mobilise des centaines d’enquêteurs et de magistrats, pour aboutir à 40.000 pages de procédure, contenues dans 54 volumes, soit environ 200 kilos de papier. Pour aider les avocats à s’y retrouver, le barreau de Paris fait appel à un développeur de logiciels, la société ZyLAB, afin de numériser le dossier. C’est ainsi que les 200 kilos de papier qu’il aurait fallu dupliquer à l’infini ont été gravés sur 5 CD, d’un poids total d’une centaine de grammes.

124 Personnes devant les tribunaux, une multitude d’avocats et cent grammes de procédure, autant d’éléments qui font de ce procès une affaire unique dans les annales judiciaires.

Pendant ce temps, la sonde Cassini-Huygens, lancée en 1997, approche du terme de son voyage et se place en orbite autour de Saturne. Quant à Google, on peut dire qu’il se met aussi en orbite. Introduit en bourse le 19 août, au prix de 85 $, il prend illico 15 % de mieux. En 2007, l’action atteindra même 683 $, avant de redescendre de moitié l’année suivante. Zinedine Zidane, lui, s’éloigne du ballon rond en annonçant qu’il met fin à sa carrière internationale.

jean-pierre-treiber_france3.1225274919.jpgLe 23 novembre, un garde forestier est arrêté en possession des cartes de crédit de Géraldine Giraud et Katia Lherbier. Il se nomme Jean-Pierre Treiber. Il a 41 ans. Les deux femmes ont disparu depuis trois semaines. Le 9 décembre, lors de fouilles effectuées dans son jardin, à Villeneuve-sur-Yonne, les enquêteurs trouvent un trousseau de clés appartenant à Géraldine Giraud et un téléphone portable à demi carbonisé. Ce n’est qu’en fin de soirée qu’ils découvrent deux corps calcinés au fond d’un puits, à proximité du domicile de Treiber. Il s’agit des deux jeunes femmes. Elles seraient mortes après avoir inhalé un puissant insecticide. Mais les policiers sont persuadés que l’homme n’a pu agir seul. Il avait forcément un ou plusieurs complices. Sa compagne, Patricia Darbeau, sera soupçonnée un temps, avant d’obtenir un non-lieu. Faute de preuves formelles, le juge d’instruction ne suivra pas plus les conclusions  des enquêteurs (ils pointent la jalousie comme mobile) qui désignent la tante de Géraldine Giraud, Marie-Christine Van Kempen, comme probable commanditaire du meurtre ou pour le moins de l’enlèvement des deux jeunes femmes. Jean-Pierre Treiber sera donc seul devant le jury de la Cour d’assises.

Le 2 novembre s’ouvre le procès des « disparues de l’Yonne ». L’accusé, Émile Louis, nie tout en bloc. La déposition de sa fille est accablante. Elle dit que son père l’a violée alors qu’elle n’avait que cinq ans. Elle raconte également qu’un jour, il a éventré une femme devant elle. Il est condamné à perpétuité pour l’assassinat de sept jeunes femmes, de jeunes handicapées de la DDASS dont il avait ponctuellement la charge lorsqu’il était chauffeur de car.

Aux États-Unis, le 3 novembre 2004, George W. Bush bat nettement le démocrate John Kerry. Et le 11 novembre Yasser Arafat, prix Nobel de la paix en 1993 et président de l’autorité palestinienne en 1996, meurt à l’hôpital militaire de Clamart, en région parisienne. Quinze jours plus tard, Nicolas Sarkozy est élu président de l’UMP. Le 25 novembre, il présente sa démission du gouvernement Raffarin.

Ce même mois de novembre, le juge qui mène l’instruction sur usine-azf.1225275022.jpgl’explosion, le 21 septembre 2001, de l’usine AZF de Toulouse, signe un non-lieu général concernant les cadres et les employés du site. On se souvient que cette explosion, survenue dix jours après l’attentat du World Trade Center de New-York, avait fait trente morts, des milliers de blessés et des dégâts considérables. Selon l’hypothèse retenue par le magistrat, l’explosion aurait été provoquée par un mélange de nitrate d’ammonium avec un produit chloré. Cependant, de nombreuses personnes sont encore dubitatives… Ainsi, une partie du dossier d’instruction a circulé un moment sur Internet et la teneur de certains documents était paraît-il assez éloignée de la thèse officielle. Un ingénieur des Mines de Montpellier a même émis l’hypothèse qu’il existait sur le site AZF un laboratoire classé secret-défense dans lequel « on » se serait livré à des expérimentations nucléaires… Le juge d’instruction Thierry Perriquet (celui de l’affaire Alègre) a refermé le dossier en juillet 2007, avant de rejoindre son nouveau poste de conseiller à la Cour d’appel de Monaco. À la grande déception des parties civiles, la qualification retenue est celle d’homicides et blessures involontaires. Le procès, plusieurs fois reporté, devrait se tenir en février 2009.

Le 1er décembre, le PS dit oui à l’Europe, et le 16, c’est l’ouverture du viaduc de Millau, au-dessus de la vallée du Tarn. C’est alors le plus haut pont du monde.

Cette année, fait exceptionnel, on change de méthode pour déterminer le taux d’intérêt des livrets A. Trop simpliste, d’après certains. Je ne résiste pas au plaisir de retranscrire, la dernière formulation, qui elle date de février 2008 : « Le taux d’intérêt du livret A est le chiffre le plus élevé, arrondi au quart de point le plus proche, entre l’inflation des douze derniers mois augmentée d’un quart de point ; et la moyenne arithmétique entre l’inflation des douze derniers mois et la moitié de la somme de la moyenne mensuelle de l’EONIA pour le dernier mois connu. »

Et puisqu’on parle d’argent, on peut noter que les dépenses « d’interception » du ministère de la justice ont été de 70 millions d’euros. Les magistrats ont effectué 20.000 écoutes téléphoniques dont le coût a représenté le tiers de cette somme. (je ne sais pas à quoi ont servi les 2/3 restants). Des chiffres qui font réfléchir les hauts fonctionnaires, non pas à une diminution des écoutes, mais à une meilleure… optimisation. Du coup, Place Vendôme, on commence à parler de la mise en place d’une plate-forme d’interceptions automatisée. Prévue pour 2008, on dit que celle-ci aurait pris un certain retard.

tsunami_expression-lucidebloglemonde.1225275128.jpgLe 26 décembre 2004, un tsunami géant ravage les côtes de l’Océan Indien, faisant plus de 220.000 morts et un million de réfugiés. Preuve que tout n’est pas noir sur la planète bleue, cette catastrophe a suscité un élan de générosité sans précédent dans tous les pays du monde. On parle de 3,5 milliards de dollars. Les ONG ont reçu tellement d’argent que Médecins sans Frontières a dû freiner la générosité de ses donateurs, s’estimant dans l’incapacité d’utiliser de telles sommes (plus de cent millions d’euros) pour cette seule cause. Quelques mois plus tard, des experts internationaux se sont réunis à Djakarta pour examiner les risques de corruption. Y a-t-il eu corruption ou détournements de fonds ? Je n’ai pas trouvé de réponse à cette interrogation.

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Et voilà !… c’est la fin (provisoire) de La petite histoire de la PJ, dont la partie I a été diffusée sur ce blog le 9 janvier 2007. La suite, c’est notre actualité… Pour la raconter, il faut attendre d’avoir un peu de recul.

Toutefois, il me semble qu’il manque quelque chose, une sorte de postface à ces 270 pages : la PJ des temps modernes.


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