En cavale depuis 1996, Seddik Benbahlouli a été arrêté aux États-Unis en août 2023 pour infraction à la législation sur les étrangers. Extradé vers la France vendredi dernier, il a été appréhendé à son arrivée à Roissy pour répondre d’une condamnation à 20 ans de réclusion criminelle prononcée lors d’un jugement rendu en son absence et sans avocat, en octobre 2001. Il a aujourd’hui 53 ans. C’est le dernier membre – identifié – du trop célèbre gang de Roubaix à ne pas avoir connu la prison alors que ses complices en sont sortis après avoir purgé leur peine. Celui qui est considéré comme le leader, Lionel Dumont, a été libéré fin 2021 et placé sous la surveillance d’un bracelet électronique.
Il est quasi certain que l’arrestation de Benbahlouli est le fruit d’une collaboration étroite avec la police française. Gérald Darmanin avait d’ailleurs fait allusion à cette affaire devant les parlementaires, l’année dernière, lors de la présentation de son projet de loi d’orientation et de programmation. « Condamné en 2001 par contumace à 20 ans de réclusion criminelle pour vols à main armée en bande organisée (attaque de fourgon blindé), cet individu est resté introuvable à ce jour. » Il a rappelé que pour le rechercher, son entourage avait fait l’objet « de nombreuses interceptions de communication et géolocalisations », mais que ses interlocuteurs restaient particulièrement prudents lors des conversations. Tout cela pour démontrer que « la mise en place de keylogger [enregistreur de touches du clavier informatique] ou de sonorisations aurait permis de contourner l’organisation et la prudence de son entourage ou de ses anciens complices, et de permettre la mise en exécution de la lourde sentence prononcée contre lui. »
La loi a été adoptée et l’interpellation du fugitif montre, qu’utilisés à cette fin, c’est à dire à bon escient, les moyens techniques les plus intrusifs sont payants.
Dès son arrivée en France, le procureur général de Douai a d’ailleurs enfoncé le clou en affirmant que le condamné en cavale serait rejugé, sauf s’il accepte la sentence prononcée en 2001, conformément aux règles aujourd’hui applicables de la procédure de « défaut criminel ».
Euh…, ce n’est pas si simple, mais revenons un instant dans les années 1990… Continue reading
23 réponses à “Coup de balai antiterroriste : une enquête qui nous ramène à 2001”
Je pense ce que Moréas écrit est un raccourci un peu trop séduisant de la réalité nettement moins flatteuse sur la coopération des états membre de l’union Européenne et des résultats des polices respectives.
1) les radicalisés n’ont pas peur de la police ou de la DCRI. Tout ce petit monde se pratique entre compromissions, délations, infiltrations. Certains radicalisés ont l’organigramme de l’état major de la DRCI , le nom des agents parlant l’arabe, et la dissémination d’un nombre d’agents à l’étranger( donc fuites à l’intérieur)
2) les radicalisés devenus terroristes ont plus la trouille d’être dénoncés par un repenti par exemple. Cela dit, la presse et encore moins Cazeneuve sont en mesure de dire la vérité: Abdelslam et deux de ses comparses sont des anciens infiltrés chez Daesch qui une fois leur mission terminée ont été retournés par la cellule de Molenbeek. Donc il y a probablement beaucoup de pseudo radicalisés qui peuvent changer de camp d’u moment à l’autre d’où l’impression de flottement pour ne pas dire de bordel pour déchiffrer les réseaux dangereux pour la France.
Comme on dit dans les cités » t’en a déjà vu toi des jeunes qui clament haut et fort qu’ils vont en Syrie pour se battre avec Daesch? » , « t’en a déjà vu des terroristes qui laissent leur carte d’identité dans leurs bagnoles après leur méfait? »
Question encore plus troublante : » t’en a déjà vu des flics arabes qui se radicalisent contre leur employeur »? Ouais!! j’en connais plein……..
Et alors que Cazeneuve et Valls, nos Robespierre de l’anti-terrorisme pensent contrer la menace en espionnant toute la population, nos crétins des Alpes en perdition dans les montagnes se faisaient secourir par la police. Incroyable mais vrai.
http://tempsreel.nouvelobs.com/attentats-terroristes-a-paris/20160326.OBS7217/qui-est-abderahmane-ameuroud-l-homme-interpelle-a-schaerbeek.html
« J’y explique pourquoi cet attentat manqué est sans doute la première action de grande envergure envisagée par Ben Laden pour faire plier le géant américain. »
Il vous a sans doute échappé qu’en 1993, les islamistes ont tenté de faire tomber les tours du WTC avec un fourgon chargé de 700 kg d’explosifs. Les tours ne sont pas tombées, mais il y a quand même eu 6 morts et quelque 1000 blessés.
Ben Laden a été considéré comme un danger pour les Etats-Unis que 5 ou 6 ans plus tard.
Ben Laden n’a jamais été relié personnellement à l’attentat du WTC de 1993.
Dépêche AFP, » le juge Casson aurait repris du service » .
Poisson d’avril .
Beau billet bien écrit, qu’on complète par la lecture du bouquin. Il se lit comme un polar, très difficile de le lâcher avant la fin. Il faut digérer l’effarement devant la naïveté, l’inconscience, la fourberie de nos politiques. Et saluer le travail des grands flics, des petits mains courageuses, des sans grade avec du flair. Les questions que pose l’auteur sont très intéressantes, et on voit qu’entre la lutte antiterroriste et la protection de la vie privée, l’Etat français choisit toujours la première. Sauf que les résultats ne suivent pas. Ou trop tard. C’est quand même bien agréable de lire un article de journal et de se précipiter chez le libraire en se disant « je veux le bouquin tout de suite ». Ça faisait longtemps …
En tout cas le bouquin de G. Moréas est bien dans le ton de son blog. Moi, je l’ai acheté plein pot et je ne le regrette pas. C’est intéressant de voir, au regard des derniers événements, comment on en est arrivé là. Entre autres, l’histoire de Ressam y est racontée en détails et, franchement, c’est un copier-coller de ce qui se passe aujourd’hui. Moréas pose aussi la question de l’équilibre entre la lutte antiterroriste et la protection de notre vie privée. C’est un vrai problème qu’on est loin de résoudre.
Si G. Moreas a l’air de se faire « berlurer » (d’avoir la berlue ?) depuis sa retraite, ses hypothèses restent néanmoins intéressantes. Il doit savoir à quoi s’en tenir par ses potes de l’UCLAT sur les liens possibles entre Massoud, 2001 et 2015-16. Alors que le vrai berlué, qui ne s’attarde heureusement jamais à donner le moindre crédit aux insanités abyssales des « spécialistes télévisuels », aurait spontanément pensé qu’il n’y avait sans doute aucun lien entre les deux dates, plutôt qu’un micmac, en dépit du hasard de la soit-disant présence d’Ahmed Ressam. Il faut redire que « dans les coulisses… » vaut le détour depuis le 24 mars (on perd pas le nord ici, ni chez Gibert jeune où l’ouvrage déjà dévoré, se revend à moitié prix).
A moitié prix ! J’arriverai jamais à gagner ma vie 🙂
Avez raison, on est jamais mieux vendu que par soi-même.
Le « réseau terroriste d’une ampleur insoupçonnée », c’est deux douzaines de gugusses qui gagnent contre des milliers d’agents secrets français et leurs millions d’informateurs.
Y a-t-il la moindre chance de succès contre un service secret étranger d’une toute autre ampleur ?
Ben on se demande ce qu´ils ont foutu nos supers flics pendant 15 ans ?
Apparemment c´est plus facile de lyncher des gamins qui manifestent pour leur avenir que de démanteler les filières terroristes ou de prendre d´assaut le Bataclan
Pendant 16 ans, ils ont déjoué tous les attentats islamistes. Et c’est, nous explique Gilles Kepel, sans doute une des raisons pour lesquelles, s’endormant sur leur lauriers, ils n’ont pas vu venir la troisième génération de djihadiste.
Je n’ai pas encore lu le livre trop récent de Georges Moréas, mais j’aimerais bien savoir ce qu’il pense de l’hypothèse de Kepel.
« En fait, aujourd’hui, il n’est pas impossible que sous nos yeux se déroule une partie de poker menteur avec la presse »
Encore bien vu…
Sauf que la « presse » n’est plus indépendante depuis longtemps…
Et on ne s’en fiche pas. Mais la propagande a aussi ses limites.
Ameuroud participe aux actions de 2001 et de 2016. Cela n’implique pas qu’un même réseau perdure, et d’ailleurs Al Qaeda n’est pas Daech – ils sont concurrents.
Tout comme Bin Laden a fait du chemin avec la Cia et Carlos paraît-il avec la Dgse. Cela n’implique pas qu’Al Qaeda eût agi plus tard pour la Cia, ni que les réseaux fussent les mêmes.
Je serai aussi péremptoire, sans rien citer, juste en étalant mon ingéniosité.
Daech est une suite légitime (au sens islamique du terme) d’Al Qaeda : Bin Laden ne pouvait prétendre au califat de par sa naissance. Il a par contre préparé méticuleusement son avènement, ce qui permet aux fous de dieu de suivre les écritures au plus près.
Donc oui, c’est le même réseau.
En fait, le Carlos qui était un agent dormant du SDECE était le fils de Françoise Dolto. Méfiez-vous des homonymies.
bonjour,
merci de vos billets, toujours passionnants, sur des sujets peu connus et fort importants;
un point de vocabulaire : « balancent » et non « balottent »
cordialement
Dans un tel contexte et avec un tel sujet, j’hésiterais à utiliser le verbe « balancer ».
Très intéressant…et n’oublions pas que la caméra piégée pour tuer MASSOUD a été volée à Grenoble…
Cher commissaire,
C’est toujours un plaisir de vous lire et de trouver dans vos analyses des points de vue sérieux, documentés, équilibrés et originaux.
Je serais davantage rassuré si les Services faisaient appel à vous pour augmenter leur efficacité.
Nous perdrions une belle plume et la qualité de ses analyses mais nous gagnerions un oeil précieux dans cette lutte difficile contre le terrorisme.
Trop intelligent. Aucune chance d’être embauché.