Yves Rénier est décédé il y a quelques jours, à 78 ans. Il ne verra donc pas la fin annoncée de la police judiciaire au profit de la police administrative, une spécialité qu’il a si bien représentée dans le rôle d’un « patron » de terrain, plutôt borderline, mais toujours attachant. Je suis sûr que ses fictions ont fait naître des vocations.

Capture d’écran du générique de « Paris 18 »

Même s’il restera à jamais le commissaire Moulin, c’était un homme-orchestre du spectacle : scénariste, réalisateur, producteur, doubleur de voix…, mais avant tout comédien, évidemment. D’un caractère entier et indépendant, volontiers provocateur, il vous neutralisait d’un sourire ravageur avant de vous balancer ses quatre vérités. C’est ce qui m’avait plu chez lui.

Et pourtant, la première fois que nous nous sommes rencontrés, ça avait plutôt frité !

Sur ce blog, j’évite de trop parler de moi, mais, allez ! je vais me lancer.

Après vingt ans d’une vie à cent à l’heure, je venais de démissionner de la police et j’avais publié quelques bouquins qui avaient plus ou moins trouvé leurs lecteurs. À la suite de la sortie de l’un d’eux (Un solo meurtrier, 1986), le producteur Christian Fechner me contacte : après le succès du film de Patrice Leconte Les spécialistes, il envisage un film avec Gérard Lanvin en flic solitaire et marginal. Lors d’un déjeuner, la conversation avec ce dernier n’est pas débridée, nous sommes tous deux des taiseux, mais perso, je le trouve sympa, surtout lorsqu’il raconte que tout jeune il faisait les marchés au quartier Saint-Paul, un endroit où j’ai traîné mes culottes courtes.

Quelques semaines plus tard, je remets mon projet de scénar à Fechner qui le passe à José Giovanni, lequel le réécrit et le prend à son compte : fin de l’histoire entre un ancien taulard et un ancien flic.

Pour les Moulins, ça s’est passé à peu près pareil. Claude de Givray, l’un des responsables de la fiction sur TF1, me demande d’écrire un scénario pour la reprise de la série Commissaire Moulin. Et cette fois, c’est Yves Rénier qui me renvoie à mes gammes. Qu’est-ce qu’on peut prendre comme coups dans la gueule dans la vie ! Je me souviens de notre premier resto, un chinois, près de Champs. C’était classe, mais j’ai eu du mal à terminer le repas. De toutes manières, ils ne savent pas faire les desserts.

En rentrant chez moi, la tête dans les épaules, je me suis dit qu’il était plus facile d’être un vrai flic qu’un flic de cinéma.

Yves m’a rappelé le lendemain. Continue reading