Lorsque Manuel Valls fait des déclarations qui vont à l’encontre d’une récente décision de la CEDH sur les enfants nés d’une mère porteuse, on s’interroge ; lorsque Jean-Yves Le Drian récuse l’idée que les militaires et les gendarmes puissent se syndiquer ou lorsque Bernard Cazeneuve soutient le bien-fondé d’une loi antiterroriste qui tripatouille la Convention européenne, on s’inquiète ; mais lorsque David Cameron affirme qu’il veut sortir le Royaume-Uni de la justice européenne, on comprend tout : l’Europe dérange.
La communication anti-européenne a pris son envol. L’Europe, bouc émissaire idéal ! Et, au vu des récentes déclarations de Nicolas Sarkozy et de Marine Le Pen sur l’espace Schengen, il n’est pas exclu qu’elle ne devienne un argument électoral fort lors des Présidentielles de 2017.
Or, si l’on peut s’interroger sur le poids de l’Euro ou celui d’une fiscalité disparate dans nos misères de tous les jours, les attaques contre la cour de Strasbourg sont beaucoup moins lisibles. Elle n’est que l’outil qui permet de faire respecter les droits fondamentaux reconnus par la Convention européenne des droits de l’homme. Elle donne aux Européens la possibilité de faire condamner leur pays si ces droits ont été violés. C’est la seule arme légale pour freiner la tendance actuelle à piétiner les droits de l’homme. C’est un symbole, celui des valeurs partagées par 800 millions de personnes au sein de la grande Europe. Juste l’idée d’une zone de paix et de liberté. Continue reading
16 réponses à “Procureur, une fonction ambiguë”
La mission première du Procureur est d’apprécier l’opportunité des poursuites. Quand il décide d’un classement sans suite, il le motive: insuffisance de preuve, faits prescrits, auteur non identifié, faits non constitutifs d’une infraction pénale… Sa décision est avant tout juridique et peut faire l’objet d’un recours.
Si les faits sont criminels, ou s’il l’estime utile, il peut confier les investigations à un juge d’instruction. Ce que peut faire toute victime en portant plainte avec constitution de partie civile.
Il peut aussi décider de poursuivre, afin que les personnes mises en cause soient jugées. Toute victime peut faire de même, en citant directement la personne qu’elle souhaite voir déclarée coupable. Dans un cas comme dans l’autre, le juge écoutera les arguments de la partie civile, du procureur et de la défense.
Pour éviter les excès, dont on comprend bien le risque, dans les cas ou un citoyen saisit un juge d’instruction ou un tribunal correctionnel, il s’expose lui même à une sanction financière en cas d’abus.
Autrement dit, si le procureur est un point de passage obligé, ses décisions peuvent toujours être contestées ou contournées.
Force est de constater qu’elles ne le sont que peu souvent. La raison principale : sa position est neutre et il décide conformément à la loi pénale, dont il est un spécialiste, et qui est la même pour tous, et qu’un autre examen de la situation aboutit le plus généralement aux mêmes conclusions.
C’est très joli, ce que vous avez écrit. Malheureusement je vis tout autre chose avec le refus d’un Procureur (Paris) d’instruire une affaire mettant en cause un expert connu qui délègue ses expertises à un tiers inconnu, à l’insu de l’expertisé. Ce n’est pas neutre du tout de la part du Procureur: on ne va quand même pas ennuyer ce brave homme d’expert pour une telle peccadille! En l’occurrence, le Procureur a utilisé tous les arguments possibles pour classer ma plainte. Vous êtes juriste? Vous voulez voir? Je vous la montrerai bien volontiers.
Si votre plainte est refusée, vous pouvez toujours utiliser la citation directe ou la plainte avec constitution de partie civile.
Donc vous pouvez parfaitement contourner le refus du parquet.
Il s’agit déjà d’une plainte avec constitution de partie civile, qui a fait l’objet d’un refus d’informer, d’un appel, et d’un pourvoi en cassation. Et ça continue de manipuler. Je suis tombée sur l’un des intouchables de la République (je parle d’une des personnes mises en cause), alors le Procureur freine des 4 fers. Il n’est manifestement pas le seul!
Vous pouvez essayer de porter plainte devant la CEDH pour violation du droit à un procès équitable, qui inclut l’accès à un tribunal (art. 6 §1).
Mais si tout le monde vous dit que vous avez tort, c’est peut être eux qui ont raison et vous qui avez tort, plutôt que d’imaginer un complot.
Un truc que je comprends pas : si les procureurs ne plus responsables devant le gouvernement, quelle est leur légitimité démocratique ? Leur légitimité tout court ? Ne faudrait-il pas qu’ils soient élus ?
On peut très bien faire l’économie d’une élection en se raccrochant aux élections d’importance nationale (aux EU, où les procureurs sont élus, on sait que
a) ça coute cher
b) les réquisitions dépendent du lieu (pour un délit identique, un procureur demandera plus en Georgie qu’en Oregon)
c) leur pouvoir est moindre (ils ne contribuent que partiellement à l’établissement de la vérité -qui est une revendication des OPJ sous l’autorité partielle des procureurs en France-.).
Le problème, avec les élections, c’est que l’opinion publique est fluctuante et qu’il faudrait élire les procureurs français tous les trimestres -le CDD serait donc en perpétuelle campagne électorale-
Une autre solution serait de parier que les procureurs ont une âme et une conscience, et de contrôler cette particularité par un conseil supérieur.
La légitimité des magistrats ne vient pas de l’élection ou de leur responsabilité devant les élus, mais du fait qu’ils appliquent le Droit qui lui est issu de processus democratiques.
Ils sont responsables devant le CSM si ils n’appliquent pas le Droit correctement.
Merci de cet avis, certainement éclairé.
Vous avez dit ce qui me semble le plus important :
« le procureur (…) l’avocat de la société ». Alors que tant de personnes veulent voir en lui le représentant du gouvernement…
Personnellement, en qualité de justiciable et de partie civile, je vois bien dans le Procureur le représentant du gouvernement, mais je ne sais pas si c’est ce gouvernement ou le gouvernement précédent… en tout cas que celui auquel j’ai affaire ait des ordres de l’un ou de l’autre pour ne pas instruire les affaires gênantes, pour moi c’est clair.
L’indépendance n’est pas une garantie.
La nomination par le Csm non plus .
Le Csm valide depuis 15 ans la nomination de magistrats en bande organisée dont celle des juges qui ont produit , rendu définitif , enterré un non lieu d’anthologie – 8 lignes 3 erreurs grossières –
qui a assuré 15 ans d’impunité à ce milliardaire (retrouvez le dans l’actualité !! ) directeur de campagne de F. Mitterrand passé avec 30 Mf à travers le parquet de Paris, la direction des affaires criminelles et des grâces et la cour de justice, afin de préserver le rapprochement de deux journaux qu’on lit tous les jours, le juge d’instruction défendant les intérêts de l’un d’eux, et se présentant aux législatives pour le PS.
Récupérer ce non-lieu d’anthologie rendu définitif par un magistrat qui a validé les comptes de campagne des dernières élections auprès de Sm Usm et Commissions des lois de l’assemblée et du sénat, tous bien informés depuis Outreau.
Ainsi que les Gardes des Sceaux de ces 15 dernières années.
L’un deux vient de se voir attribuer la légion d’honneur.
Par l’un de ceux qu’il aurait dû renvoyer devant le Csm.
La boucle est bouclée.
Ne faudrait-il pas s’interroger d’abord sur l’unicité du corps des magistrats ? Certes un juge du siège est-il inamovible mais si la sociologie commande de progresser en passant du siège au parquet et inversement, le discours sur la séparation est assez fallacieux…Par ailleurs, y a-t-il réellement une hiérarchie dans le Parquet? Qui commande à qui? Si le travail d’un parquet est mauvais, comment s’opèrent les régulations ? Le discours « on ne donne pas d’instructions » veut dire quoi ? S’il s’agit de nous expliquer qu’il est bien que chacun n’en fasse qu’à sa tête, on peut redouter le pire, genre Outreau. Le ministre de la place Vendôme craint-il d’être illégitime au motif que dans les affaires politiques ses instructions seraient forcément mises en cause ? Si c’est cela , on peut se demander si dansl’affaire B. le procureur C.avait besoin d’instructions écrites…
Je n’ai jamais su si un procureur français représentait l’Etat (et à ce titre, un chef d’Etat ou un de ses ministres peut avoir son mot à dire dans leur affectation -ou dans un changement d’affectation, une fois changé de chef d’etat- ) ou la socièté civile (« les besoins des justiciables de notre temps » : il n’y a alors pas d’évaluation possible de leur travail), et je suis étonné qu’il ait tant de pouvoirs…
J’ai été étonné encore plus par les procureurs roumains, qui ont semble-t-il le pouvoir de décider (hors tribunal) des indemités à accorder et qui doit les payer (au civil, avant un jugement au pénal pour établir les faits….).
L’idée de faire un parquet européen avec tant de prérogatives différentes me semble exotique…
Pour faire simple, le procureur de la République connaît les infractions rapportées par les forces de police. Il récolte les preuves, et recherche les auteurs. Il dirige l’enquête en somme.
Il faut comprendre qu’en matière pénale depuis le droit romain, le délinquant qui commet une infraction pénale trouble l’ordre public, et c’est la société qui se retrouve être en danger.
Le procureur est donc le représentant de la société. Il la représente au cours du procès pénale, présente les preuves et les témoignages et, tout comme pour la défense, propose une peine, que le juge peut librement suivre ou non.
Le fait qu’il dispose de compétences relativement large s’explique par le fait qu’il représente la société, dans toute sa puissance.
Donc, la recolte des preuves est plutôt le travail … du juge d’instruction (qui, devant agir en toute objectivité, mettra de côté la défense de la société ou de l’ett, et s’attachera en priorité à la recherche de la vérité).
En plus, si le procureur représente la Société Civile -en admettant qu’il n’y a pas d’opposition entre classes d’âge, origines ethniques, convictions religieuses/ »philosophiques » ou -incl.- CSP: sinon cette notion est une fiction- , pourquoi n’est il pas élu? -tiens, comme aux Etats Unis: mais là, c’est à un tribunal de trancher sur la vérité-?
Ou pourquoi n’accepte-t-on pas qu’ils doivent reflèter les opinions du moment des actuels élus du peuple -donc, être exposés à l’équivalent d’un « spoil-system »- ce qui fait l’économie d’une élection (et ça ferait désordre si les procureurs étant élus localement, faisaient des réquisitoires différents entre Lons le Saunier et Bayonne?)
Il tente de le représenter !
Le problème c’est quand il rentre chez soi.. Et se demande si oui, il a bien fait de condamné monsieur x ou madame y..