En principe, l’ordre national du Mérite, récompense des services rendus à la Nation. On peut donc se demander ce qui légitime la nomination dans cet Ordre de deux responsables syndicaux de la police réputés proches de l’ancienne majorité présidentielle. Juste avant le départ de Nicolas Sarkozy. Comme le soulignent d’autres syndicalistes, cela ne peut être que pour services rendus – mais pas à la Nation.

Alors même que durant la campagne électorale le président-candidat accusait les syndicats de s’être « fourvoyés en politique », Patrice Ribeiro, responsable de Synergie Officiers et Frédéric Lagache, secrétaire général adjoint d’Alliance, étaient décorés par le pouvoir sortant.

Pas de faux semblants, on sait bien que l’attribution de ces distinctions honorifiques répond le plus souvent à des motivations politiques, ou vient parfois récompenser des gens qui ont exercé des responsabilités au service de la société. Oui mais, lorsque le récipiendaire est un syndicaliste, on touche là à un symbole. Et ça ne passe pas. Cette droite qui attribue son échec électoral en partie à la presse, dont Le Monde, devrait se repasser en boucle les déclarations de deux journalistes politiques, Françoise Fressoz et Marie-Êve Malouines qui, en 2009 ont refusé la Légion d’honneur. Sans doute une question… d’honneur, justement. Même si d’autres journalistes (la liste est longue) voient les choses différemment.

Mais, en dehors de ces syndicalistes, les médailles qui viennent d’être distribuées à Toulouse posent encore plus d’interrogations. Notamment en ce qui concerne deux fonctionnaires de la DCRI, pour le ruban rouge, et un commandant de police de l’antenne locale, pour le ruban bleu. Ces policiers étaient-ils, comme cela se murmure, les officiers traitants de Mohamed Merah, ceux qui n’ont rien vu venir ? Je ne sais pas. Et si je le savais, la loi m’interdirait d’en parler. En tout cas, ces récompenses attribuées à quelques-uns, pour une affaire qui est loin d’être une réussite, ne font que renforcer le mystère. Et les questions s’accumulent. Elles ont sans doute des réponses, toutes simples, mais on aimerait les connaître. Lorsque sept personnes sont assassinées, dont trois enfants, le secret-défense ne peut pas exister.

Aux quatre coins de France, ces dernières semaines, des dizaines de policiers ont reçu une décoration. Pour Cédric Pappatico, tué lors d’une intervention sur un cambriolage, près de Chambéry, c’était hélas à titre posthume. Pour d’autres, ils sont nombreux, on leur a épinglé au revers de la tenue la Médaille d’honneur pour acte de courage et de dévouement. Certains pour des faits déjà anciens, comme ce brigadier de Roubaix, distingué pour avoir sorti du feu une mère et sa fille en… 2009. Pour la plupart d’entre eux, ce n’est que du bronze, mais de cette médaille-là, ils peuvent être fiers – eux !