Dans son discours de fin d’année, le président Macron s’est montré menaçant, stigmatisant les Gilets jaunes et affirmant que l’ordre républicain serait assuré « sans complaisance ». Une réflexion qui a fait réagir pas mal de policiers, dont ceux du syndicat contestataire (et contesté) « France Police – Policiers en colère » qui rappelle que depuis le 17 novembre, « plusieurs manifestants pacifiques ont été probablement mutilés par nos LBD [lanceurs de balles de défense] et nos grenades de désencerclement ». Et les syndicalistes de s’interroger pour savoir ce que les policiers doivent faire de plus pour être moins complaisants avec les Gilets jaunes !
Il faut reconnaître que dans notre pays, un tel usage de la force et des armes pour disperser des manifestants nous ramène loin en arrière.
Si au temps d’une vie notre mètre étalon est Mai-68, le préfet de police, le ministre de l’Intérieur et autres, devraient relire (ou lire) la lettre individuelle que le préfet de police Maurice Grimaud, adressa à chacun des policiers parisiens, quel que soit son grade, près d’un mois après le début des manifestations : « … Je veux parler d’un sujet que nous n’avons pas le droit de passer sous silence : c’est celui des excès dans l’emploi de la force. » Dans ce courrier, tout en se montrant solidaire de « ses » hommes, il a le courage de leur dire que la réputation de la police – notre réputation, écrit-il – est en jeu : « Frapper un manifestant tombé à terre, c’est se frapper soi-même en apparaissant sous un jour qui atteint toute la fonction policière. » Mais Grimaud ne s’est pas contenté d’écrire, bien calé dans son fauteuil de cuir, en regardant depuis sa fenêtre Paris s’enfiévrer. Non, chaque jour, il était sur le terrain, sillonnant les rues de la capitale, seul, sans garde du corps, au volant de sa 4 L banalisée, parlant avec les uns, avec les autres. Et ses commissaires l’ont imité : ils sont allés dialoguer. « Une manifestation dans laquelle on a pu établir des contacts se passe infiniment mieux que celle où l’on va comme sur un champ de bataille », dira-t-il, quarante ans plus tard.
La stratégie utilisée lors des manifestations de Mai-68 dans la capitale a assis la réputation de la police française dans le monde entier.
Qu’en reste-t-il aujourd’hui ?
Un autre préfet avant lui, Louis Lépine, avait tenté de faire entrer dans les mœurs un maintien de l’ordre apaisé en tentant de répondre à cette gageure : tenir la rue contre les « trublions » tout en respectant le droit de chacun à manifester sans risque pour sa vie. Continue reading
12 réponses à “À la recherche d’un maintien de l‘ordre républicain”
C’est un article très intéressant, mais j’irai plus loin : « on » conteste à l’Etat le monopole de la violence légitime.
Pourquoi ?
Car cette violence n’est plus jugée « légitime ».
Dans cet aspect « légitime », apparaît aussi le notion de proportionnalité et de justesse. Hors les nombreux dérapages de ces dernières semaines viennent mettre à mal ces notions : des gens, beaucoup, estiment avoir subi la violence de l’Etat alors qu’ils ne le méritaient pas, et d’une manière disproportionnée. Les trop nombreuses blessures de manifestants en témoignent, et il y a beaucoup de reportages qui l’illustrent.
Cela ne serait pas « de trop », si derrière il y avait des sanctions, comme la Loi et les règlements le prévoient. Hors nul n’en voit : les blessés n’ont plus qu’un oeil pour pleurer, et aucun responsable en face d’eux. Et c’est profondément injuste : comment croire en la Loi quand ses gardiens ne la respectent pas ?
J’ai plusieurs fois entendu que le pouvoir politique craignait qu’il y ait usage d’une arme à feu dans les manifestations. Surement pour 2 raisons : non seulement il faudra bien « trouver » le responsable, mais en plus cela « légitimera », particulièrement en cas de « non responsable », l’usage d’arme à feu par les manifestants les plus hostiles.
Comment en est on arrivé là ?
Pour ma part, je pense que ça vient des années Zarkozy, quand les forces de l’ordre ont commencé à être très équipés, et notamment avec le changement de tenue : on est passé d’une figure de l’ordre en uniforme, certes pas forcément bien adapté à la bastion, mais avec une prestance et un symbole fort, à une figure de l’ordre en treilli, certes prête à taper, mais ressemblant plus à un soldat qu’il ne faut pas déranger.
On est passé de gardien de la paix à soldat de jesaispastropquoi, mais pas forcément de la paix…
« laissé manipuler par Éric Drouet, lequel a probablement monté un super turbin aux policiers qui exploitaient ses écoutes téléphoniques »….et il aurait fait ça TOUT SEUL? Autant croire au père Noël: pour manipuler des super-professionnels comme on en trouve dans la DGSI, par exemple,, il faut avoir un PROFIL que ce Mr Drouet n’a absolument pas, selon moi. Donc je pose la question: QUI peut avoir eu intérêt à manipuler l' »excellent » coup médiatique de ce gilet jaune? L’avenir nous le dira (intime conviction)…..Par contre, force est de constater que c’est un CAMOUFLET de PLUS pour notre « excellent » FBI à la française.
T’as pris ma bécanne, ma bécanne !!!
La moto se retrouve abandonnée et les policiers en danger parce qu’il y en a un qui s’est trompé de bécanne il me semble.
Le règlement j’imagine, responsable de son matériel ?
Il faut du sang froid je trouve, mais c’est un peu comique, saugrenu dans ce contexte 🙂
Heureux d’apprendre que « La Bibliothèque nationale de France a attribué à ce blog un numéro international normalisé des publications en série : ISSN 2648-2975 ». Voilà qui va figer votre blog de stuc dans un bloc de marbre…. J’imagine. Qu’est-ce que cela veut dire exactement que cette normalisation par la BNF ?
Merci de reconnaître que nous avons vraiment des amateurs au pouvoir en ce moment… Mais qui d’entre nos charmantes élites a jamais entendu parler du préfet Grimaud et de l’art démocratique de pratique le MO à l’ENA ? Certainement pas Eric Morvan ni même le ministre Castaner, je peux vous le dire… Alors, imaginez un peu : Marcron ou Philippe. Pffff…
Une nouvelle bonne année inspirante à votre blog toujours aussi fraternel, cher commissaire !
Jupiter, au cours de ses dixhuit mois d’exercice narcissique et méprisant du pouvoir, a démontré Sa totale incompétence, réduisant la politique étrangère de la France au pompage d’avant bras et à la prise de photos sur papier glacé, la défense des libertés à l’octroi de primes à des policiers experts en gazage de nourriture et en fractures sur des migrants à Calais (quel bel exemple de traduction en nov’langue du terme « humanisme », dont Il se réclame). Il ne Lui reste, pour assurer quelques postes à Sa bande aux europénnes et aux municipales, que la provocation (l’humour auto proclamé marche mal) et, si ça tourne mal, à faire peur aux français pacifiques: les violences policières actuelles -qui sont aussi un héritage de l’ére sinistre de Manuel Iznogoud, squattant successivement la place Beauveau et Matignon- peuvent resserrer des gens paisibles autour d’un chef (fût il ultra -et auto- caricatural.) et les protestations d’Amnesty, ainsi que les mutilations dont a été vitime un gendarme en manipulant des grenades sans proportion avec le maintien de l’ordre, ne changeront rien à Son désir de survivre politiquement et de représenter les très riches.
Les policiers peuvent trouver un intérêt à être exagérement violents: les réactions d’en face peuvent amener à … mobiliser davantage de policiers, et …. à les payer en conséquence. L’augmentation quasi immédiate des salaires et des primes de policiers est manifestement un encouragement à davantage de violences policières (et ils vont finir, après un cycle tabassages/destructions de biens, par redemander encore des euros….).
Par ailleurs, il serait assez amusant de voir des gilets jaunes (qui n’ont montré, à ma connaissance aucune empathie losque, sous Iznogoud, des lycéens servaient de pushing balls ou que des camps de Rromen étaient démantelés) chouiner devant le démantélement de leurs cases à bière et à mequez (qui leur servaient à ennuyer les passants). Les souffrances liées au démantélement n’ont rien à voir avec les ennuis dans la scolarisation des enfants rromen (et les démantèlements de Rromen s’accompagnaient de destruction de papiers d’identité: « nos » braves xénophobes antisémites , soutenus par Fifille et Vauquiez et Civitas, auraient poussé les hauts cris si un tel traitement leur avait été infligé).
Le maintien de l’ordre va se corser quand les gens vont commencer à se taper dessus directement.
Cher commissaire,
Je crois malheureusement que le commandant de Toulon n’a pas lu votre blog. Visiblement, il n’a pas non plus connu le préfet Grimaud. Et c’est bien dommage. Je vous souhaite une bonne année. Elle commence très fort…
Bonne analyse, même si beaucoup de critères ont changé depuis 1968, dont il faut tenir compte.
Mes meilleurs voeux pour 2019.
Un ancien « versaillais », entre autres….
Merci Commissaire pour cette analyse, passionnante et pertinente comme à l’accoutumée.
« Au point qu’ils se sont laissés manipuler par Éric Drouet, lequel a probablement monté un super turbin aux policiers qui exploitaient ses écoutes téléphoniques. »
La manipulation, c’est tout un art! 😉
Je vous souhaite une bonne année , Commissaire.
Tout d’abord, je dois féliciter votre souris, qui arrive à corriger une faute de grammaire dans le texte original (est ce l’évocation de Drouet, qui massacre allègrement la grammaire de notre langue maternelle, ce qui justifie amplement des gav?). « ils se sont laissés manipul__és__ par Éric Drouet, ». Il est évident que cette unique faute de grammaire depuis des dizaines de billets est liée à l’évocation de ce triste sire, soutenu par Erdogan, Fifille, Mélenchon le Fasciné, Putin, Salvini et Trumpoff (alph.order).
Ensuite, je doute que les policiers se soient livrés à des écoutes téléphoniques sur Drouet: Farce Bouc permet d’avoir de façon conviviale une liste de ceux qui aiment (c’est plus high teck que des facturations détaillées) et le contenu des sottises que l’auteur a pu commettre (au point que des demandeurs d’emploi lucides a posteriori détruisent leur compte Farce Bouc, pour que d’éventuels employeurs n’aient pas accès à leurs élucubrations). Et on lit beaucoup plus vite, sans passer par des procédures chronophages, qu’on ne parle -et donc qu’on écoute- .
Enfin, je suis sidéré par l’indulgence de l’auteur, qui impute à l' »inexpérience » de nos dirigeants (qui pourrait être corrigée avec le temps, laissant un peu de place à l’espoir): il s’agit vraisemblablement d’un problème bien plus structurel et durable.
Merci pour votre réponse 🙂
Et merci à tous deux de m’avoir corrigé 🙂