Plusieurs centaines d’affaires, crimes ou délits, auraient été résolues grâce au fichier génétique. On nous assène ce résultat comme un justificatif à son décuplement. Pourtant, personne ne chicane sur son efficacité. Ce que bon nombre contestent, c’est son utilisation. Ou plutôt l’utilisation qui pourrait en être faite dans un avenir relativement proche.
Car, qu’on ne s’y trompe pas, le clonage des hommes est en marche. Demain, nos descendants seront peut-être programmés génétiquement pour s’intégrer dans l’une des cinq catégories de la population (de l’élite intellectuelle à la classe des travailleurs), comme dans le livre d’Aldous Huxley, Le meilleur des mondes. Il faut espérer que non. Mais…
Tout commence avec la découverte de l’ADN. On attribue celle-ci aux recherches sur des pneumocoques effectués en 1928, par l’anglais Fred Griffith. Toutefois, malgré les preuves qui s’accumulent, la communauté scientifique traîne les pieds. Elle n’accepte pas le principe d’un support matériel de l’hérédité. Sans doute un rien de religiosité chez nos érudits, ou le désir inavoué d’entretenir le côté magique de la vie. La structure en double hélice, tel qu’on représente l’ADN aujourd’hui, est finalement démontrée par Jim Watson et Francis Crick, en 1953.
Rapidement, la médecine s’empare de cette découverte. Les chercheurs les plus sérieux tentent d’identifier les malformations génétiques susceptibles d’expliquer certaines maladies, tandis que d’autres fouillent les gènes des criminels et des pervers à la recherche de « la petite bête » qui justifierait leur comportement asocial. On assiste à l’accroissement des tests génétiques. Puis on se dit, qu’il serait plus simple d’éviter les maladies plutôt que de les soigner. On s’attaque alors aux embryons. Avec une fâcheuse tendance à inciter à l’avortement les futures mamans, lorsque leur bébé présente un ADN douteux. Il faut dire que les parents admettent difficilement un rejeton qui ne correspondrait pas aux critères de notre époque. Pourquoi s’en priver, puisqu’on peut choisir… Les premiers pas d’une sélection prénatale sont donc franchis. Comme disait, il y a un demi-siècle, un responsable malfaisant d’un pays voisin : On veut une jeunesse saine. De nos jours, si la société se penche sur ce problème, ce n’est pas pour sélectionner une « race pure », mais pour de banales raisons économiques.
Revenons au fichier génétique français, le FNAEG, qui fait l’orgueil de certains hauts fonctionnaires de la police nationale. Il serait, dit-on, déjà gros de plus de quatre cent mille noms. Mais ce n’est pas suffisant. Pour qu’un fichier soit efficace, tout le monde vous le dira, il faut qu’il contienne un maximum de données. L’idéal serait donc d’archiver l’ensemble de la population. C’est quasiment fait. La Grande-Bretagne a rejeté – mais de peu – le projet de Tony Blair qui consistait à prélever l’ADN de tous les nouveau-nés. Et, dans l’aréopage européen, personne ne semble opposé à cette éventualité. Question d’efficacité. Pour nous rassurer, on nous dit que seules les parties non codantes du gène sont archivées. Oui, mais elles sont conservées 40 ans pour les condamnés et 25 ans pour les autres (100 ans en Grande-Bretagne). Aucune amnistie, aucun retrait possible. Il s’agit bien d’un stockage de données « à toutes fins utiles ». De son côté, le comité d’éthique (comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé) met de l’huile sur le feu en affirmant : « […] les régions non codantes sont vraisemblablement les plus riches en informations diverses. » Or, dans quelques années, affirment les chercheurs, l’ADN aura été entièrement décortiqué. Et qui peut prédire ce qui nous attend dans quarante ans ! Aujourd’hui, en 2007, le plus grand pays du monde, par son étendue et sa population, procède à la sélection des enfants à naître. Les Chinois ont en effet une démographie qui ne correspond pas à l’ambition économique de leurs dirigeants. Ils n’en sont pas encore à tripatouiller les gènes, mais cela pourrait bien venir. Qu’on ne s’y trompe pas, cette colossale base de données que constitue le FNAEG attire les fouineurs de tout crin. Certains se penchent sur le profil génétique du criminel, comme d’autres, en d’autres temps, ont palpé le crâne des enfants, à la recherche de la bosse des maths, ou pire encore. Le profiler de demain, n’aura rien à voir avec celui des séries télé. Il portera blouse blanche et ne s’intéressera guère au comportement psychologique des individus. Il se contentera d’éplucher des morceaux d’ADN.
Huxley, dans son livre, qui date de 1932, nous décrit une société où tous les enfants sont des bébés-éprouvette. Ils sont génétiquement programmés en fonction des besoins de la collectivité. Une sorte d’immigration contrôlée (à quand le ministère du contrôle prénatal ?). Et pour empêcher les gens de prendre conscience de leur servitude, on distribue le soma, la pilule du bonheur.
Au XIX° siècle, un Américain a refusé de payer un impôt qu’il trouvait injuste. Il a du même coup inventé la désobéissance civile. En d’autres circonstances, Mohandas Gandhi et Martin Luther King, ont repris le flambeau. Chez nous, ceux qui refusaient la guerre d’Algérie, les objecteurs de conscience, n’ont pas agi différemment. Et, d’une certaine manière, n’a-t-on pas reproché à Maurice Papon d’avoir été incapable de faire front à un gouvernement fantoche, et de ne pas avoir fait preuve de désobéissance civile ? Alors, faut-il comme certains refuser le prélèvement ADN et se mettre ainsi hors la loi ? Faut-il encourager à la désobéissance civile ? Ce n’est pas à moi de répondre. Mais il ne me semble pas raisonnable de prendre le moindre risque pour notre avenir, même au nom de la sécurité, de l’efficacité, ou du progrès. Après tout, on nous rebat les oreilles sur les conséquences de la pollution à quelques dizaines d’années, sans posséder plus de certitudes sur l’évolution de la planète.
Le comité d’éthique demande la mise en place d’un contre-pouvoir et nombre de personnalités réclament un débat public. Mais rien n’y fait. Devant l’indifférence des gens, le rouleau compresseur poursuit son avancée. Je suis étonné de l’absence de réaction de certains cadres de la police, dont je connais la droiture, ou des syndicats de policiers ou de magistrats, d’habitude pourtant si prompts à réagir. Tous paraissent hypnotisés par la course aux résultats. Il y a quelques dizaines d’années, certains services de police obtenaient des bilans époustouflants – grâce à des méthodes beaucoup plus artisanales. Et pourtant, personne ne parle de réintroduire la « gégène » dans les commissariats. Dans l’immédiat, notre seule garantie est représentée par la commission nationale informatique et liberté (CNIL), un « machin » aux statuts flous et aux moyens dérisoires.
Je crois qu’il faut soutenir les personnalités qui appellent à un débat public sur l’archivage de notre ADN. Je pense qu’il faut instituer un pendant au pouvoir exorbitant de ceux qui ont accès à ce fichier. Durant la campagne présidentielle que l’on vient de… subir, on a entendu bien des âneries, mais la pire, celle qui fait froid dans le dos, a sans doute été : « Je veux protéger les Français. »
Je pense qu’il faut recracher la pilule du bonheur.
Je recherche les différentes expériences qui ont permi de confirmer l’ADN comme matériel génétique chez les différents espèces
ogm ?
oaristys de gm ?
Bref, en effet, il vaut mieux garder les avancées de la science à des fins beaucoup plus nobles… dépistage du cancer colorectal par exemple grâce à l’ADN…
tc à g…
thymine-cytosine-adénine-guanine
Dans certains fichiers , 1 donnée sur 2 est erronée ! des victimes deviennent coupables.
On se souvient des laboratoires d ‘analyses qui percevaient des gratifications lorsqu’ ils trouvaient des indices ( poudre sur une manche etc) et il y a eu de nombreux faux résultats , il y en a sans doute encore si ce système n’ a pas été supprimé.
Faucheurs Volontaires d ‘OGM , nous nous opposons aux prélèvements d ‘ ADN sur des citoyens comme nous . Pour diverses raisons trop longues à développer ici .
Eh oui ! Vous avez raison. Un esprit machiavélique pourrait plus facilement abuser les enquêteurs en parsemant des traces ADN de son meilleur ennemi sur les lieux de « son » crime. Bien plus facile qu’avec les bonnes vieilles empreintes digitales. Personnellement, je n’ai pas d’exemples. Auteurs de polars, à vos claviers !
GM
Autre question sur le sujet un peu plus proche de l’orientation habituelle de ce blog. N’y-t-il aucune affaire criminelle connue dans laquelle des criminels plus malins que les autres auraient tenté d’utiliser l’ADN pour détourner l’attention de la police des vrais coupables, ou pour réaliser un coup monté quasiment imparable contre quelqu’un ? On prouve scientifiquement de qui provient un échantillon d’ADN, mais pas forcément que la personne a réellement été présente sur la scène du crime, si l’échantillon a été récupéré et déposé exprès pour la mettre en cause.