La Cour européenne des droits de l’homme vient de nous faire un vaccin de rappel sur les limites entre la liberté d’expression et la propagation d’idées fondées sur l’intolérance qui incitent à la haine. Et, pour que l’on comprenne bien, elle énumère les différents cas : haine raciale, haine sur l’orientation sexuelle, haine religieuse, discours négationniste, etc. Enfonçant le clou avec des exemples.

Lorsqu’elle s’arrête sur le discours politique, la Cour cite deux cas. L’un en Turquie, où le président d’un parti avait dénoncé l’intervention des États-Unis en Irak et l’emprisonnement du dirigeant d’une organisation terroriste. Et l’autre en Espagne, où des parlementaires avaient protesté contre des mauvais traitements infligés à des membres de l’ETA lors d’une opération policière, mettant en cause la responsabilité du roi d’Espagne. Il s’agit en fait de contre-exemples, puisque dans ces deux cas, elle a donné tort aux juridictions nationales qui avaient prononcé une sanction (en violation de l’article 10 de la Convention européenne sur la liberté d’expression).

La Cour européenne se montre donc très circonspecte dès qu’il s’agit de l’intervention d’un homme politique. Au point de s’entortiller un peu les pinceaux. Ainsi, dès les premières lignes de sa fiche thématique, elle attire l’attention du lecteur sur la conclusion – ce qui est quand même assez original. Si elle rappelle que les sociétés démocratiques doivent sanctionner ou prévenir toutes les formes d’expression fondées sur l’intolérance qui propagent, promeuvent, justifient ou incitent à la haine, elles doivent aussi préserver le droit pour les personnes de s’exprimer librement – notamment les journalistes et les hommes politiques. Si j’ai bien lu entre les lignes ces derniers peuvent, par leur discours ou leurs écrits, chercher « à heurter, choquer ou inquiéter », sans pour cela avoir de sombres arrière-pensées.

Extrait de la fiche thématique de la CEDH (février 2012)

On comprend bien que ce petit rappel à l’ordre n’a rien à voir avec les Présidentielles françaises. Il ne faut pas être nombriliste…

Pourtant, ces derniers jours, dans l’arène politique, l’animosité est palpable. Au point que parfois, on a l’impression qu’il y a de la haine. Et nous sommes sans doute beaucoup à avoir noté la violence du meeting de Marseille, tant dans les propos et l’attitude du président de la République que dans la mise en scène. Aussi, tout comme François Chérèque, le number one de la CFDT, on peut se poser la question : « Pourquoi autant de violence ? » Une élection présidentielle, ce n’est pas un match de foot. Et, au moment de glisser notre bulletin dans l’urne, on ne doit pas se demander ce à quoi l’on échappe en ne votant pas pour tel autre candidat, mais plutôt ce qui nous attend dans les cinq ans à venir.