LE BLOG DE GEORGES MORÉAS

Catégorie : Police (Page 21 of 34)

Garde à vue : un pétard place Beauvau

« J’avais indiqué qu’il y avait trop de gardes à vue, que les conditions de déroulement de la garde à vue n’étaient pas satisfaisantes, et qu’il n’y avait pas assez de droits pour la défense », déclare Mme Alliot-Marie dans un communiqué de presse, en préambule de son avant-projet de réforme.

En quelques mots, sur le site du ministère , elle donne une vision de la garde à vue de demain. Une véritable révolution dans le travail des policiers et des gendarmes.

Deux mesures phares visent les droits de la défense : le droit de garder le silence et la présence de l’avocat.

Toute personne retenue devra être informée de son droit de garder le silence. On retrouve là une résurgence de la loi de juin 2000 sur la présomption d’innocence, mesure qui, à l’époque, n’avait pas résisté à la pression des syndicats de police. Mais on en était encore à la culture de l’aveu, ce qui est de moins en moins le cas. Et puis, à force de voir des séries américaines, on y est presque habitués.

Quant à l’avocat, sa présence ne se limiterait pas aux auditions mais à toute la période de la GAV, sauf certaines circonstances exceptionnelles (conservation des preuves, protection des personnes…). Dans ce cas, le procureur pourrait différer cette mesure de douze heures.

Je pense qu’à la lecture de ce texte, les policiers et les gendarmes ont dû rester bouche béante. Avant, pour certains, d’exploser de colère. Cela va bien plus loin que leurs pires craintes. À ce jour, la plupart des syndicats se battaient pour ne pas avoir à subir l’avocat durant les auditions, et là, on leur annonce qu’il serait présent tout le temps.

Et les plus mesurés de tenter d’imaginer comment ils pourront effectuer leurs enquêtes en tirant un avocat derrière eux. Et même s’ils sont prêts à s’adapter, à se remettre en cause, là, forcément, ils manquent de repères. En fait, cela ne serait réalisable qu’en remodelant sérieusement le Code de procédure pénale. Alors, avant de réagir brutalement, il faut attendre de savoir ce qui est prévu dans la première partie de la réforme qui vient d’être transmise au Conseil d’Etat. Car, sans un accompagnement juridique bien pensé, cette mesure est inapplicable. Pour mémoire, le Conseil constitutionnel s’était contenté de demander la protection des droits de la défense. Pour ma part, je crois à l’avocat acteur. Il ne faudrait pas qu’il soit un poids mort, pas plus qu’un adversaire pour l’enquêteur.

Il y a d’autres choses dans ce projet. Ainsi, la GAV ne sera envisageable que pour les crimes ou les délits punis de prison (voir l’article du Monde).

Enfin, les enquêteurs pourront entendre un suspect sous le régime de l’audition libre, à partir du moment où celui-ci accepte de rester « volontairement » dans un local de police ou de gendarmerie. Ce qui, a contrario, rend la GAV obligatoire pour les personnes qui ont fait l’objet d’une interpellation.

Là, rien de nouveau, ce dispositif existe déjà, même s’il n’est guère utilisé, tant la GAV est devenue la routine.

Sur les conditions de la GAV, la fouille à corps intégrale ne serait plus autorisée, alors qu’elle est encore aujourd’hui quasi systématique, malgré les notes de service qui rappellent les limites de cette pratique.

Par ailleurs, pas un mot sur les locaux, souvent mal adaptés, ni sur les cellules de GAV, ce qu’on peut regretter. Mais il est vrai qu’avec de telles mesures, le nombre de personnes qui vont fréquenter ces lieux va sérieusement chuter – et du coup, les conditions matérielles seront moins mauvaises.

On imagine le charivari que va provoquer ce projet au moment même où le président de la République a rendossé son costume de premier flic de France…

Ces temps-ci, par ses silences, MAM semble avoir pris ses distances avec ce gouvernement. Comme un autre, peut-être elle aussi y a pensé… En tout cas, l’air de rien, c’est un sacré pétard qu’elle vient de glisser sous le bureau de son collègue de la place Beauvau.

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Uriage, la justice à la peine a été lu  15 160 fois et a suscité  71 commentaires. Pour répondre à certains, je n’ai pas donné d’avis sur la décision du JLD, et de quel droit l’aurais-je fait ? Mais je maintiens que ce n’est pas à ceux dont la mission est de faire respecter l’ordre et la loi, de critiquer publiquement l’ordonnance d’un magistrat, au risque de troubler l’ordre et, d’une certaine manière, de contrevenir à la loi.

Uriage : la justice à la peine

À la suite de la décision du juge des libertés et de la détention (JLD) de placer le suspect du braquage du casino d’Uriage sous contrôle judiciaire, et de le laisser libre, le ministre de l’Intérieur a fait part de son indignation. tableau-de-rene-magritte.jpgQuant au procureur général de Grenoble, il a estimé que cette libération était « absolument inacceptable ». Alors que dans le même temps, son vice-procureur (et aussi secrétaire général de l’Union syndicale des magistrats) s’indignait, lui,  «  des déclarations outrancières » du ministre et de certains syndicats de police qui remettent en cause le travail des magistrats.

Alors évidemment, on s’interroge ! Et l’on se dit qu’il y a quelque chose qui ne fonctionne pas : comment un ministre et le plus haut magistrat de la région peuvent-ils critiquer de la sorte la décision d’un juge ?

Et comment un juge peut-il prendre une telle décision, en apparence incompréhensible ?

Pour tenter d’y voir clair, il faut d’abord garder ses distances avec la manipulation sécuritaire actuelle et oublier les propos extrémistes de certains policiers, dont le seul but est, à l’évidence, de faire monter la mayonnaise.

La détention provisoire, qui s’appelait « préventive » avant 1970, est la décision la plus grave que peut prendre un magistrat : priver un homme ou une femme de sa liberté avant de savoir s’il est coupable ou innocent. Raison pour laquelle le juge des libertés et de la détention est choisi parmi les magistrats du siège les plus expérimentés. Mais c’est une tâche qu’il accomplit en général en sus de son travail quotidien. Sauf dans les tribunaux « riches », comme à Nanterre, où le nouveau président, Jean-Michel Hayat, a décidé (Le Monde du 4 septembre 2010) que les JLD « seraient déchargés de toutes autres tâches » Et dieu sait s’il connaît l’importance de la détention provisoire, lui qui, en 1988, alors qu’il était juge d’instruction dans ce même tribunal, a envoyé le commissaire Yves Jobic en prison sur l’intime conviction qu’il alimentait « avec l’argent de la prostitution, les finances d’un parti d’opposition (c’est-à-dire de droite) ». Sauf que tout était bidon et que Jobic a été jugé et déclaré innocent. La cour de cassation a même estimé qu’il avait été victime d’une incarcération abusive.

Comme quoi la détention provisoire peut aussi s’appliquer à un flic !

D’après l’article 137 du Code de procédure pénale, la détention provisoire doit revêtir un caractère « exceptionnel ». Et dans le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur l’affaire d’Outreau, il est écrit : « Le drame d’Outreau, chacun le reconnaît, c’est le scandale de la détention provisoire ».

C’est le juge d’instruction qui saisit le JLD. Toutefois, dans certains cas, et pour des raisons de sûreté, le procureur peut le faire si le juge ne suit pas ses réquisitions.

Lorsqu’il prend une décision, le JLD doit avoir en tête deux préceptes :
•    L’article 66 de notre Constitution, qui énonce que l’autorité judiciaire est gardienne de la liberté individuelle ;
•    L’article 9 de la Déclaration de 1789 qui garantit la présomption d’innocence.

Il se reporte ensuite à l’article 144 du Code de procédure pénale qui égrène les différents cas où la détention est possible.

Sa marge de manœuvre est donc strictement limitée. Et comme il peut se tromper, il est possible de faire appel de sa décision. A noter qu’il existe une procédure, dite de référé-détention, mais qui, bizarrement, ne s’applique que pour contester la remise en liberté d’une personne déjà placée en détention provisoire.

Aussi, lorsque le syndicat de police Synergie accuse le JLD de Grenoble de « forfaiture », c’est-à-dire dans ce cas du refus d’appliquer la loi, ses représentants montrent leur méconnaissance du Code de procédure pénale (qu’ils devraient pourtant connaître sur le bout des doigts) et des textes fondateurs de notre société.

A moins qu’ils ne fassent semblant…

Car il est facile de faire croire au plus grand nombre que la justice est laxiste et laisse en liberté des individus dangereux, alors que les policiers prennent tous les risques pour les arrêter… Mais ne peut-on pas aller un peu plus loin et dépasser cette approche qui frise le populisme?

Si les enquêteurs de la police judiciaire n’avaient pas sur le dos une hiérarchie affolée par un préfet-flic et un ministre en ébullition, n’auraient-ils pas agi différemment? Peut-être, à la place d’opérations poudre-aux-yeux auraient-ils pris le temps de « saucissonner » leur suspect dans une procédure béton?

Mais comment tout bien faire quand il faut tout faire vite-vite-vite…

Et naturellement, en se basant alors lapin-pays-des-merveilles.gifsur un dossier solide, la justice aurait pris le relais. Un travail d’équipe, intelligent, construit, dans le but unique de servir au mieux la justice de son pays.

Aujourd’hui, à l’évidence, on cherche à casser l’outil. À tous les échelons de la société on cache ses propres insuffisances en détournant l’attention sur d’autres. Séparer pour mieux régner, semble être la nouvelle devise de notre République. À tel point qu’il y a quelques jours, un syndicat de commissaires de police a appelé à boycotter la rentrée judiciaire de crainte que certains magistrats n’en profitent pour « stigmatiser notre action »

Je deviens parano ou l’on est en pleine paranoïa ?

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Policiers et gendarmes fusionnent hors des frontières a été lu 1 600 fois et a suscité 9 commentaires.

Policiers et gendarmes fusionnent hors des frontières

 « En juin dernier, opérant depuis notre plate-forme de Dakar en liaison avec nos partenaires britanniques, nous avons saisi sur une petite île au large de la Gambie plus de deux tonnes de cocaïne entreposées dans une société de pêche appartenant à un Néerlandais et employant des Vénézuéliens. », a déclaré le ministre, Brice Hortefeux*. C’était le 31 août dernier, lors de la 20e rencontre des ASI (attachés de sécurité intérieur).

logo-sctip.JPGJ’en vois qui froncent les sourcils : c’est qui ceux-là ?

Eh bien, les ASI sont les agents qui représentent la police et la gendarmerie auprès de l’ambassadeur du pays où ils sont en poste. Ils ont un statut diplomatique et font partie d’un réseau (unique au monde) de 250 policiers et gendarmes déployés dans 156 pays.

En évoquant cette saisie de drogue, le ministre a mis leur activité en exergue, rappelant que la sécurité commence très au-delà de nos frontières.

À ce jour, les policiers français expatriés étaient gérés par le SCTIP (service de coopération technique international de la police). Depuis trois jours, c’est fini. Et ce n’est pas sans un rien de nostalgie que certains voient disparaître ce service de police un peu particulier, créé, il y a près d’un demi-siècle, alors que la France avait entamé son processus de décolonisation. Il s’agissait à l’époque (du moins officiellement) d’aider les jeunes pays à mettre en place une force de police…
Même s’il y a des zones d’ombre dans son activité passée, comme son rôle près de la Sofremi, son bilan est nettement positif. Ainsi l’année dernière, l’U-E lui a accordé un crédit de plus de onze millions d’euros pour financer des programmes de coopération policière.

Donc policiers et gendarmes en mission à l’étranger dépendent dorénavant d’une seule entité, la DCI (Direction de la coopération internationale). Concrètement, il s’agit de la fusion du SCTIP et de la sous-direction de la coopération internationale de la gendarmerie. Ce nouveau service est dirigé par un policier, Emile Pérez** (un proche d’Alain Bauer), jusqu’ici responsable du emile-perez_revue-planete.JPGSCTIP, avec comme adjoint le général Jean-Pierre Moulinié, qui à ce jour dirigeait la Garde Républicaine. Entre nous, et sans remettre en cause les qualités professionnelles de M. Pérez, je ne suis pas sûr que les gendarmes se réjouissent de cette articulation hiérarchique…

D’autant qu’il n’y a pas si longtemps, le SCPN (syndicat des commissaires de la police nationale) s’étonnait de la disparité dans la classification des fonctionnaires en poste à l’étranger  (décret de 1967). Ainsi, un commissaire de police se retrouvait dans une catégorie inférieure à celle d’un lieutenant de gendarmerie. Avec une incidence très forte sur le montant de l’indemnité de résidence. Ce qui avait d’ailleurs entraîné le désintérêt des commissaires pour les postes d’ASI.

Aujourd’hui, on peut se demander si les gendarmes n’ont pas l’impression de rétropédaler…

Quoique placée sous l’autorité conjointe des directeurs généraux de la police et de la gendarmerie, cette direction opérationnelle va plus loin que la simple mutualisation des moyens. S’agit-il d’un premier pas vers une véritable fusion ? La question doit bouillonner sous les képis, même si les bouches restent cousues.

« La gendarmerie a du plomb dans l’aile », peut-on lire dans la revue de septembre de l’Association gendarmes et citoyens. « Les chefs se taisent par peur des sanctions. Les exécutants s’arc-boutent, attendant des jours meilleurs… »

Pour les jours meilleurs, ils ne sont pas les seuls.

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* On peut lire le discours de M. Hortefeux sur le site du ministère de l’Intérieur.
** La photo d’Emile Pérez vient de la revue du SCTIP, Planète.

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Un flic de l’Intérieur, histoire d’un livre a été lu 1 670 fois et a suscité 5 commentaires. Merci à tous.
A la suite du billet Quelque part une petite école, Zoé Varier est allée visiter l’école de Bobo-Dioulasso. Ce vendredi 3 septembre, à vingt heures, sur France Inter, elle nous donne des nouvelles de l’instituteur, Eric, et de ses élèves.

Le grand banditisme en campagne pré-électorale

Il est important « de donner des moyens à la police et à la justice pour agir contre le grand banditisme », a déclaré Ségolène Royal dans son discours d’ouverture de l’Université d’été du PS. De même, lors des événements de Grenoble, certains policiers ont parlé du grand banditisme les-incorruptibles_serie.jpgdes cités (on a même entendu une comparaison avec le Chicago des années 30) et certains journaux n’ont pas hésité à faire un rapprochement avec le gang des Grenoblois qui, lui, date des années 60.

Époque où dans cette région, le milieu était sous la coupe de Mathieu Mattéi, cousin d’un ministre et responsable régional du SAC. En 1967, pour situer le bonhomme, c’est lui qui avait assuré le service d’ordre de Georges Pompidou, en campagne électorale pour les législatives, lors de son déplacement à Grenoble. Il lui avait même servi de chauffeur. Les « vieux » flics doivent encore se souvenir de l’humiliation de devoir présenter leur carte professionnelle à des gorilles qui assuraient le filtrage, et dont certains étaient fichés au grand banditisme…

On imagine assez mal la voiture de François Fillon conduite par un caïd du quartier de la Villeneuve…

Mattéi a donné dans le trafic d’or, le trafic d’armes, la fausse monnaie…, parfois d’ailleurs avec la bénédiction des services secrets français. Il a organisé au niveau régional la « prostitution en studio » comme un véritable bizness, et il s’est d’ailleurs heurté à Jean Augé, chef du gang des Lyonnais, lorsqu’il a voulu s’imposer dans la prostitution le long de la route nationale 7. Petit litige commercial qui lui a valu deux balles dans le dos, alors qu’il sortait du bar qui lui servait de QG.

Sa succession et celle d’Augé, abattu quelques années plus tard alors qu’il se rendait à son club de tennis, a donné lieu à une guerre des gangs qui a laissé des dizaines de  cadavres sur les trottoirs de Grenoble, Lyon, Marseille, Paris, Antibes, Juan-les-Pins…

Quel rapport entre ces truands de haut vol et le braquage minable du casino d’Uriage-les-Bains pour un butin de quelques dizaines de milliers d’euros ? Avec en fin de scénario une course-poursuite qui finit mal et se termine par la mort de l’un des voyous,  Karim Boudouda.

Un dangereux récidiviste a-t-on dit. Si l’on additionne « bêtement » ses condamnations, on casino d’Uriage-les-Bains_site_joacasino-uriage.JPGarrive même à un total de onze années de prison. Pour un homme de 27 ans, ce n’est pas mal. Et cela met en exergue l’inefficacité de notre système judiciaire pour amender un jeune délinquant, puisqu’il était mineur lors de sa première condamnation.

Mais si Mme Royal faisait allusion à cette affaire en parlant de grand banditisme, elle est victime, comme beaucoup, d’une tendance à la dramatisation qui est de mise aujourd’hui. Que l’on parle du  climat, de la grippe, de la crise financière ou de l’insécurité.

En fait, si l’on veut classifier la délinquance, on peut la partager en trois :

–    La petite délinquance, celle dont on souffre le plus, le vol à la roulotte, l’arrachage, etc. C’est pour lutter contre cette délinquance au quotidien qu’avait été créée la police de proximité, sur l’idée de base de Charles Pasqua : une police au service du public et non réservée exclusivement à la protection de l’Etat. Il s’agissait d’un concept, mais à mon avis, on n’a pas encore réussi à passer de l’idée à la réalisation.

–    La grande criminalité, souvent itinérante, contre laquelle la France est plutôt bien armée. Avec des services spécialisés, du personnel compétent, et surtout des moyens techniques et juridiques hors du commun.

–    La moyenne délinquance, notamment celle des cités. Ce qu’on pourrait appeler le « petit banditisme », car s’il possède des structures et une hiérarchie, comme le « grand », cela se situe au niveau d’une bande ou d’un quartier.

Une réponse avait été apportée en 2002, avec la création des groupes d’intervention régionaux, les GIR. L’idée étant de regrouper sous une même casquette les compétences et les moyens d’action de plusieurs disciplines, pour mieux faire face, tant sur le plan pénal, que fiscal, douanier, et même administratif. Il ne semble pas que le résultat ait été à la hauteur des espérances. Manque de moyens et d’effectifs, sans doute, mais surtout manque d’autonomie des chefs de service. L’un des véritables problèmes de la police d’aujourd’hui.

Et puis, en mélangeant police administrative et police judiciaire, ces unités se sont retrouvées dans une situation ambigüe. Il y a même eu, en 2004, un recours devant le Conseil d’Etat pour atteinte à la séparation des pouvoirs. Sans effet.

Aujourd’hui, les GIR n’ont pas encore trouvé leur voie. Ils n’ont pas vocation à agir seuls, mais en mutualisant les moyens de plusieurs services. Du coup, ils sont parfois à la remorque. Mais il semble bien que la page soit en train de se tourner. «  Le rattachement des GIR à un service de police ou à une unité de gendarmerie est devenu hiérarchique, et non plus simplement administratif »,  a annoncé Brice Hortefeux lors de la réunion des chefs de groupes d’intervention, en avril 2010.

Un premier pas avant d’en faire de gir-93_site_chez-alice.JPGvéritables unités opérationnelles ?

Car pour s’attaquer à ce petit banditisme qui fait les gros titres des journaux, il faut donner aux policiers et aux gendarmes la possibilité d’exercer leur métier sereinement, et non sous la pression des événements. Et en tout cas loin de la politique, et plus près du pouvoir judiciaire.

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Les nouveaux pouvoirs des huissiers a été lu 1 866 fois et a suscité 10 commentaires.

Les Verts et la police (2)

Ce débat des Verts sur la sécurité méritait mieux qu’un billet écrit sur la tablette d’un TGV, entre  Nantes et Paris. J’ai donc tenté de déchiffrer mes notes, non pas pour faire une synthèse, ce qui serait présomptueux, mais juste pour donner un petit coup de projecteur sur ce qui m’a semblé le plus important. Il ne s’agit donc pas d’un compte-rendu fidèle, mais d’un choix, forcément subjectif.bonhomme-vert-berlin-ampelmann_pause-blogstopcom.1282550589.jpg

Un peu de mansuétude, s’il vous plaît, ce n’est pas mon métier. Je ne suis pas journaliste.

On souhaite, m’avait expliqué grosso modo Pierre Januel, le responsable de la Commission justice des Verts, réfléchir à la mise en œuvre d’une politique de sécurité en phase avec nos valeurs.

Je crois qu’à travers ce débat, il y a déjà matière à réflexion…

jacques-de-maillard_photo-perso.1282550194.jpgJacques de Maillard* note l’épuisement du système français, ce qui entraîne une sorte de course en avant. D’un côté les violences et les outrages contre les policiers sont en augmentation constante, de l’autre, pour faire face, on renforce l’armement et les moyens de protection. Un cercle vicieux.  Sur ce point, je le rejoins : la police se coupe de plus en plus de la population.

Pour lui, il faudrait reconsidérer le métier de policier dans sa culture, son organisation… Et réformer le système de recrutement national, qui aboutit à voir des fonctionnaires parfois parachutés dans une région ou une ville qu’ils ne connaissent pas, et qui n’ont qu’une envie : retourner chez eux.

Sur la police de proximité, il note que l’échec antérieur – relatif – est le résultat d’un manque de préparation et de réflexion. Les résultats de la polprox sont encourageants dans plusieurs pays proches de nous, et il ne voit pas pourquoi cela ne fonctionnerait pas en France.

Il s’insurge également contre les indicateurs actuellement utilisés pour évaluer la police : ils sont limités, d’une fiabilité douteuse, et surtout, internes. Il leur manque un élément essentiel : la perception du public.

Enfin, dit-il, le discours guerrier du Président et du Gouvernement se situe dans « une logique de non-dit : la crainte du renouvellement des événements de 2005 ».

Et il conclut en regrettant que l’action de la police ne soit pas incluse dans une véritable réflexion globale.
Je suis là aussi d’accord avec lui : cette politique du coup pour coup, que j’appelle un politique de récré, n’est pas à la hauteur des enjeux d’une société.

michel-marcus_photo-ffsu.jpgMais qui dit sécurité, ne dit pas seulement police ou gendarmerie, mais également justice, reprend Michel Marcus*. La justice a peu à peu été transformée en « appareil policier ». Il est vrai que le parquet n’a jamais été aussi proche de la police. Et il opte pour la création d’un « procureur général » qui aurait autorité sur toutes les personnes qui sont habilitées de par la loi à relever une infraction pénale. Autrement dit à coller le moindre P-V. Et ce haut magistrat ne serait pas sous la coupe du garde des Sceaux, mais n’aurait de comptes à rendre qu’au Parlement. Pour moi, c’est une idée révolutionnaire : la justice proche des élus, donc proche du peuple.

Pour Michel Marcus, il faut commencer par définir la criminalité et la délinquance, et ne pas tout mettre dans le même panier. Sécurité humaine (citant Corinne Lepage), sécurité de l’environnement…, jusqu’à la délinquance financière (applaudissements dans la salle). Comme il a été rapporté dans le billet précédent, il place la médiation au cœur des conflits (se parler plutôt que de se battre) et il souhaiterait que la prévention soit inscrite dans la Constitution, au même titre que le principe de précaution. Rappelant au passage qu’en Allemagne, le rôle premier de la police est de faire de la prévention, et non de la répression.

Il note la montée en puissance des polices municipales et attire l’attention des maires sur les nouvelles compétences qu’ils pourraient récupérer du jour au lendemain, par  la simple volonté du législateur (en donnant de nouveaux pouvoirs à la police municipale, on donne de nouvelles responsabilités aux maires dans un domaine qui n’est pas le leur : le pénal). Il pense également qu’il faut se pencher sur la sécurité privée, dont le champ s’élargit chaque jour.

En conclusion il rappelle qu’en matière de lutte contre l’insécurité, la France a des résultats plutôt moyens au niveau européen. Il souhaite, comme Jacques de Maillard, que la population soit associée à l’évaluation de la police, via par exemple des associations, comme en Grande-Bretagne, et que les enquêtes sur les bavures policières soient publiques.

emilie-therouin_photo-perso.jpgQuant à Emilie Thérouin*, femme de terrain à Amiens, elle est passionnée et intarissable sur le sujet. Et elle sait mettre en harmonie théorie et pratique. A son avis, la police municipale ne doit pas empiéter sur le domaine de la police nationale, mais avoir une action complémentaire, plus proche des gens. « Police nationale et police municipale sont liées par un contrat aux compétences strictement définies, où la police municipale se tourne clairement vers la relation avec le citoyen. »

C’est la médiation au quotidien. Sur son blog, j’ai noté cette phrase qui m’a bien plu : « Il est urgent de redéfinir le rôle et la place de la police dans une politique de sécurité, dans la société, dans la cité.  Dépourvue de doctrine d’emploi, la police a plus que jamais besoin d’une vision… »

Pas mieux !

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* La présentation des personnes citées a été faite dans le billet précédent : Et si le ministre de l’Intérieur était Vert, qui a été lu 17 724 fois et a reçu 41 commentaires.

Et si le ministre de l'Intérieur était Vert…

Ç’aurait pu être un débat surréaliste, cette idée des écolos de plancher sur le thème de la sécurité. Un rien deuxième degré. Et pourtant, non, c’était sérieux, et les gens étaient nombreux dans ce petit amphi de la fac de droit de Nantes. 

bonhomme-vert-berlin-ampelmann_pause-blogstopcom.jpgOn sentait bien qu’il s’agissait d’une approche. Un peu de curiosité sans doute. Déjà que les Verts sont un peu entortillés pour savoir jusqu’où ils peuvent ne pas être de gauche, on pouvait se demander comment ils allaient aborder ce sujet de société.

Je figurais parmi les invités, mais comme je ne peux pas me citer, on va oublier. Disons que j’ai parlé avec mon cœur du désamour de la police.

Jacques de Maillard, enseignant-chercheur en science politique à l’IEP de Grenoble, a dressé un tableau de la police française, pointant certains dysfonctionnements. Son exposé mettait en exergue le conservatisme d’une maison qui n’arrive pas à se remettre en cause. C’est du moins l’impression que j’ai ressentie en l’écoutant. Si l’on compare avec l’évolution récente de la police britannique (l’un de ses thèmes de réflexion) on se dit, pour utiliser un vocabulaire à la mode, qu’on est en retard d’une guerre.

Michel Marcus, qui est magistrat, et délégué général du Forum français pour la sécurité urbaine (FFSU), estime qu’un ministre de l’Intérieur « vert » (mais je pense que ce n’est pas une question de couleur) doit d’abord définir la criminalité et la délinquance. Et se poser la question qui dérange : pourquoi la politique de la ville est un échec depuis trente ans ? Parmi ses propositions (nombreuses) j’en ai noté une, facile à mettre en œuvre : placer la médiation au cœur de notre système, comme le fait la commune de Pierrefitte-sur-Seine. C’est vraiment une idée maîtresse. Car, c’est un paradoxe de notre société, on dépense un fric fou pour communiquer et ce qui manque le plus à notre vie sociale, c’est justement la communication. Ce qu’on pourrait appeler le syndrome de dièse. Vous savez, appuyez sur étoile, sur dièse…

Avec Emilie Thérouin, on passe de la théorie à la pratique. Adjointe au maire d’Amiens, cette écolo est chargée de la « sécurité et de la prévention des risques urbains ». Une ville d’environ 150 000 habitants qui dispose d’une police municipale conséquente. Et pour elle, il y a complémentarité avec la police nationale. Elle souhaite, si j’ai bien compris, que les élus locaux renforcent leurs relations avec les policiers et les gendarmes et qu’ils ne se réfugient plus derrière l’aspect faussement régalien de la sécurité publique. Elle argumente également pour l’élaboration d’une « doctrine écolo de la sécurité ».

Il paraît qu’à Amiens, le vélo est de mise pour les policiers municipaux, je me demande si en 2012, l’antigang fera ses filoches en voitures électriques… 180px-smileysvg.1282493190.png

police-municipale-a-velo_blog_emilie-therouin.1282473277.JPGIl semble que de leur côté, les socialistes travaillent également à un projet sur les problèmes de sécurité. Le sujet n’est donc plus l’apanage du président de la République. Mais entre nous, si la campagne pour les prochaines Présidentielles tourne autour de ce thème, on va s’emmerder.

Ne faudrait-il pas élever un petit peu le débat : jusqu’où veut-on aller dans l’effritement des libertés individuelles pour se sentir en sécurité ?

Pour plus de détails, on peut lire sur ce blog Les Verts et la police. (Le vélo a été volé sur le blog d’Emilie Thérouin.)

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Votre webcam vous surveille a été lu 65 087 fois et a suscité 132 commentaires. Moi, je ne ferai pas de commentaire. Depuis que ce blog existe, j’ai noté deux sujet qui déclenchent des réactions frénétiques : la période de l’Occupation et l’informatique. Donc, deux sujets de réflexion…

L’autopsie, « dans le respect dû au mort »

Formule traditionnelle utilisée dans les réquisitions judiciaires, le respect dû au mort n’est pourtant pas un impératif du Code de procédure pénale. Rien n’est prévu. Aucun article n’encadre l’autopsie. Une loi pourrait prochainement modifier les choses.

chirurgien_blog-ecole-normale-de-filles-doran-volet.pgL’autopsie est systématique en cas de mort criminelle ou suspecte. Mais elle est souvent demandée par le procureur pour rechercher si les causes du décès peuvent avoir un lien avec une maladie, une opération chirurgicale, un accident, etc.

Il s’agit, pour les députés, de réglementer l’acte, la procédure…, mais aussi de renforcer les droits de la famille. Notamment « l’obligation de la restitution du corps dans des conditions préservant le respect dû au cadavre et la dignité des proches du défunt ». Comme c’est le cas pour les autopsies d’ordre médical.

Cela ne veut pas dire qu’aujourd’hui, on fait n’importe quoi. L’homme de l’art ne se livre pas sur un mort à des pratiques de potaches, de celles qu’on imagine dans les facultés de médecine… Et même si parfois quelques plaisanteries fusent, c’est pour mieux faire retomber la pression, tant l’atmosphère d’une autopsie est accablante. Je n’ai jamais sondé l’âme d’un légiste, mais peu de policiers restent insensibles devant ce corps nu, qu’on ausculte de l’intérieur. Et la Brasserie de l’Aubrac, située en face du quai de la Rapée, a vu plus d’une fois, au petit matin, deux ou trois individus pâlichons pousser la porte du bistroquet et, sans un mot, s’enfiler un verre de rhum.

Pourtant, par le passé, il y a eu de sérieux dysfonctionnements. Des boulettes, comme dans l’affaire Markovic, où la première autopsie n’avait pas révélé la balle, dans la tête de la victime. Mais aussi des erreurs psychologiques, lorsque les traces de l’intervention sont trop visibles, au point qu’il est bien difficile de présenter le corps à la famille. Je me souviens d’un homme que les parents ont refusé d’identifier, tant il était méconnaissable. Des années plus tard, ils étaient venus me trouver pour savoir s’ils pouvaient faire procéder à une exhumation en vue d’un test ADN. « Vous comprenez, on veut être sûrs », m’avaient-ils dit.

C’est un cas extrême. Mais il faut reconnaître que les enquêteurs, les légistes et les magistrats, obnubilés par la recherche de la vérité, se montrent parfois d’une insensibilité choquante.

On peut toutefois se demander si cette modification du Code de procédure pénale n’arrive pas un peu tard… N’est-on pas à la veille d’une nouvelle technique : l’autopsie virtuelle, ou « virtopsie ».

« C’est à mes yeux la révolution médico-légale du début du XXI° siècle », nous dit le docteur Bernard Marc, dans son livre Profession : médecin légiste, aux éditions Demos (que j’ai eu le plaisir de préfacer). Il s’agit profession-medecin-legiste.jpgd’un procédé qui permet de découper le cadavre en rondelles – sans le toucher. Avec l’énorme avantage de pouvoir se repasser l’enregistrement autant de fois que nécessaire, sans limitation dans le temps. Il est probable que dans les années à venir, cette technique remplacera un bon nombre d’autopsies traditionnelles.

Cette loi, visant à l’encadrement des autopsies judiciaires, donnera également aux proches la possibilité de réclamer le corps au bout d’un mois. Ce qui évitera des situations invraisemblables, comme la triste histoire de cette petite fille de quatre ans, citée dans Le Monde, dont les parents ont dû attendre plus de six mois avant de pouvoir l’enterrer.

Si nos parlementaires veulent ajouter un zeste d’humanité dans l’exercice de la justice, on ne peut que les encourager. C’est une démarche suffisamment inhabituelle pour mériter un petit coup de chapeau.

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Réforme de la GAV : une chance pour les policiers a été lu 22 012 fois et a suscité 79 commentaires. Certains lecteurs ont soulevé le problème de la retenue douanière, qui est de 24 heures comme la GAV, et 48 heures avec l’accord du procureur. On doit forcément aller vers une procédure à l’identique (ce qui n’est pas le cas aujourd’hui), sinon, cela voudrait dire que les histoires de gros sous sont plus importantes que tout le reste. Ce qu’on ne peut croire…

Réforme de la GAV : une chance pour les policiers

« Le lobby flicophobe vient de trouver un nouvel allié ! » annonce dans un tract récent Synergie-Officiers. De qui s’agit-il ? De son concurrent (majoritaire), l’UNSA/SNOP, dont le représentant a osé affirmer dans Le Monde que homme-menotte_photo-pero.jpgl’explosion des GAV était une conséquence de la « politique du chiffre ». Et, dans ce brûlot, Synergie fustige « ces pleureuses insincères, qui discréditent (par intérêt ?) toute une profession pour mieux hurler à l’unisson avec les éternels contempteurs de la Maison Police. »

Texto !

Il y a eu la guerre des gangs, la guerre des polices, et aujourd’hui c’est la guerre des syndicats de police.

Bien sûr, chacun a le droit de s’exprimer. Oui, mais lorsqu’on relève dans cette tirade des termes comme « lâcheté atavique » ou « hiérarchie génétiquement couarde », on est en droit d’être inquiet. Car ce sont des officiers de police qui parlent à d’autres officiers de police.

Pourquoi une telle violence verbale ? Uniquement pour défendre la garde à vue ?

extrait-tract-synergie-officiers.JPG

Si c’est le cas, on s’interroge : Pourquoi les policiers défendent-ils avec autant d’acharnement la garde à vue ?

Je crois que la réponse se trouve dans une succession d’erreurs, tant de la part de la hiérarchie que de la magistrature. On leur a fait croire que la GAV était un pouvoir qui leur appartenait. Qu’ils avaient le droit de priver quelqu’un de sa liberté sans avoir à se justifier.

Pourtant, on comprend bien qu’il s’agit là d’une décision grave, qui devrait être mûrement réfléchie et réservée aux cas extrêmes – surtout dans les conditions matérielles que l’on connaît. Alors qu’aujourd’hui, c’est la routine : on met en garde à vue et l’on réfléchit après.

Donc, en censurant la GAV, ces policiers ont l’impression d’un désaveu, on jette le doute sur leur probité. C’est un peu comme si on les désarmait de crainte qu’ils ne se montrent dangereux.

Pourtant, cette mesure ne se justifie que pour la raison simple qu’on n’a trouvé à ce jour aucune autre pratique pour assurer une enquête de police judiciaire. C’est donc un pis aller.

C’est le gouvernement de Vichy qui a réglementé la GAV. Sous couvert d’empêcher les évasions, il a organisé la privation de liberté, avec fouilles à corps, cellules aménagés, etc. À la Libération, malgré les réserves formulées par les commissaires de police et même par le ministre de l’Intérieur, cette mesure a perduré.

La GAV, telle qu’on la pratique aujourd’hui, a été officialisée par le Code de procédure pénale, en 1958. Et depuis, contrairement à ce que l’on pense, son évolution a toujours été dans le sens d’une augmentation des droits de la personne (formalisme procédural, information d’un proche, médecin, avocat…). Droits qui n’ont aucun rapport avec l’enquête et qui découlent uniquement de la privation de liberté.

Alors, pourquoi, en quelques années, est-elle devenue… insupportable ?

Ce n’est pas la mesure qui est en cause, mais la manière dont elle est appliquée.

Les policiers qui rouscaillent après le Conseil constitutionnel ne voient pas plus loin que le bout de leurs menottes. Ils vivent dans le passé. Cette réforme qui doit intervenir est au contraire l’événement que peut permettre de dépoussiérer la procédure et de faire évoluer leur métier. Le principe de base du judo : si tu me pousses, je te tire. Au lieu de balancer des injures, ils devraient faire jaillir des idées, des propositions. Si l’avocat participe à la GAV, par exemple, plutôt que d’en faire un ennemi, pourquoi ne pas en faire une sorte de collaborateur ? Ne pourrait-il pas rédiger lui-même les actes qui visent à la protection des droits de la personne et des droits de la défense ? flics_blog-jipad.jpgPrévenir un proche, chercher un médecin, trouver les médicaments, autant de démarches qu’il pourrait prendre à sa charge. Après tout, le gardé à vue est son client, non ! Et le secret de l’enquête ? diront certains. Tout comme le policier, l’avocat est tenu au secret professionnel. De plus, de par sa présence, il va « cautionner » les actes, les auditions, les aveux qui, du coup, prendront un caractère quasi irréfragable (en droit privé, le contreseing de l’avocat fait l’objet d’un projet de loi).
Il deviendrait alors possible de simplifier le formalisme procédural, et se contenter d’enregistrements sonores ou vidéos. Moins de papiers à rédiger, donc, plus de temps pour les investigations. Donc, des enquêteurs moins statiques, plus efficaces.

Autrement dit, si demain l’avocat est présent lors de la GAV, il faut le responsabiliser – et le faire travailler.

Mais toucher uniquement à la GAV serait une erreur. Il est nécessaire d’aller plus loin, d’en profiter pour revoir les procédures de l’enquête préliminaire et de flagrant délit. Et alors, les officiers de police judiciaire ne pouvant plus être soupçonnés d’en abuser, sans doute pourront-ils  se voir octroyer plus de prérogatives, plus de responsabilités, plus de pouvoirs, comme cela se passe dans d’autres pays.

(Le dessin provient du blog de Jipad.)
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Le crime de sang, ce truc d’un autre âge a été lu 22 865 fois et a suscité 113 commentaires. D’autres, outranciers, ont été supprimés. Et pour répondre à je ne sais plus qui, je n’ai jamais eu le plaisir de travailler aux archives, ni de conduire la voiture du directeur.

Le crime de sang, ce truc d’un autre âge

Au moment où le président Sarkozy déclare la guerre aux criminels, on apprend que le nombre d’homicides volontaires est en nette diminution : 682, l’année dernière, en France métropolitaine. Soit à peu près un crime de sang pour cent mille habitants… en âge de tuer. Ce qui nous place parmi les pays les plus vertueux (les États-unis font cinq fois moins bien).

film-scream3_site_allocine.jpgLes deux tiers de ces meurtres sont dits passionnels, et, dans les  trois quarts des cas, l’assassin est un proche de sa victime.

Quant aux crimes crapuleux, nous dit cette note confidentielle (?) de la direction centrale de la police judiciaire, ceux qui sont directement corrélés à un vol ou une tentative de vol, ceux dont on a le plus peur, ils sont en diminution de près de 45% en sept ans. Il y en aurait eu 27, l’année dernière.

On peut donc en déduire, c’est le miracle des statistiques, que le risque de se faire occire par un voyou est quasi nul.

Vous me direz, il suffit de ne pas avoir de chance…

Le taux d’élucidation est de 87%. « Les sections de recherches de gendarmerie et les brigades criminelles de la PJ n’ont plus à rougir face aux exploits de leurs distingués homologues de Scotland Yard », nous dit Christophe Cornevin, dans Le Figaro. Et il donne l’avis d’un policier : « Le risque de se faire confondre dans les jours ou les semaines suivantes est tellement fort que nombre de criminels en puissance ne suivent pas leur dessein jusqu’au bout. »

S’il est vrai que les résultats des enquêteurs sont époustouflants, la dissuasion n’a pourtant pas grand-chose à voir dans cette baisse des crimes de sang.

Il s’agit plutôt d’une évolution de la société. La « pacification des moeurs », comme le dit Laurent Mucchielli, dans Rue89. Pour ce directeur de recherche au CNRS, spécialisé dans les violences et la délinquance, cette baisse est une constante depuis le Moyen-âge : « La période contemporaine est assurément l’une des moins meurtrières depuis le début du XIXe siècle, comme le suggère la statistique juridique disponible depuis 1825. »

Alors, pourquoi ce sentiment d’insécurité ? Certes on ne craint pas que la mort, on redoute les vols, les violences, etc. Mais la peur, la vraie, la peur viscérale, dans quoi trouve-t-elle sa source ?

Il existe vraisemblablement deux raisons.

D’abord, la criminalité se concentre toujours sur des zones géographiques ou sociologiques à un moment donné. Il y a donc un effet de focalisation.

Ensuite, la dramatisation qui est faite de chaque événement déforme notre perception et altère notre jugement. L’année dernière, dans un autre domaine, celui de la santé, cette fausse pandémie de grippe est un exemple concret de ce catastrophisme d’État. 4eme-cie_13eme-bataillon-chasseurs-alpins_dailymotion.JPGCe qu’on pourrait appeler la politique de l’affolement.

Mais n’en déplaise aux adeptes du droit négatif, la France n’est pas malade, la France n’est pas en guerre, sauf en Afghanistan, et il y fait encore bon vivre.

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La balade des gens du voyage a été lu 2 043 fois et a suscité 16 commentaires.

Un flic qui se mouille

Il y a quelques jours, une équipe de la BAC remarque un Trafic Renault qui circule à vive allure. Les policiers tentent de l’arrêter, mais le véhicule accélère, au risque de les percuter, et s’engage sur le boulevard périphérique de l’est parisien. Après un gymkhana plongeon.jpg de quelques minutes, le fourgon s’encastre dans le rail central. Le conducteur s’en extrait, traverse le périph et s’enfuit en courant.

Situation pas facile à gérer. Il faut à la fois éviter que cet accident ne provoque un carambolage et rattraper le fautif. Lequel, au bout de quelques centaines de mètres, stoppe un cycliste d’un coup de poing au visage et s’empare de son vélo. La poursuite pourrait se terminer là. Mais l’un des policiers, Jérôme, arrête un autre cycliste et (sans coup de poing) réquisitionne son engin. Et le voilà dans la roue du fugitif… Lequel peu à peu perd du terrain.

On imagine… L’homme se retourne, la chaleur est écrasante, il sue à grosses gouttes, il n’en peut plus, et ce flic qui se rapproche encore et encore… Alors, il abandonne sa bicyclette et plonge dans le lac Daumesnil. Ni une ni deux, Jérôme se débarrasse de son gilet pare-balles et de son arme et il plonge à son tour. Quelques instants plus tard, ses collègues récupèrent son équipement et se précipitent vers une barque.

C’est la fin de l’après-midi. Je ne sais pas s’il y a beaucoup de touristes autour du lac du bois de Vincennes, mais en tout cas, ils auront quelque chose à raconter en rentrant chez eux : un policier qui crawle derrière un fuyard, tandis que  d’autres rament vivement dans leur direction…

Uns scène qui rend complètement ringards les rodéos à l’américaine, généralement filmés depuis l’hélicoptère d’une chaîne télé.

Finalement, les deux hommes prennent pied sur l’îlot central. Ils se retrouvent face-à-face, trempés, extenués. L’homme glisse la main vers sa poche, mais il n’a même plus la force de sortir le long tournevis qu’il porte sur lui. À moins, comme un sportif fair-play, qu’il ne reconnaisse sa défaite…

Le bilan est sans appel. L’homme, âgé de 24 ans, a un STIC long comme un dimanche de permanence, il était au volant d’un véhicule volé muni de fausses plaques d’immatriculation à l’intérieur duquel il y avait une cagoule, une sorte de masse pouvant servir de bélier, du ruban adhésif, et différentes petites bricoles.  Il est l’auteur avéré de sept ou huit infractions, et notamment d’avoir mis en danger la vie d’autrui. Des faits qu’il ne nie d’ailleurs pas.

Ce qu’il refuse de dire, c’est ce qu’il comptait faire. Probablement un braquage, ou un saucissonnage, va savoir !

À l’issue de sa garde à vue, le procureur l’a laissé en liberté en demandant aux policiers de poursuivre les investigations en enquête préliminaire. Ce qui, je le suppose, a dû entraîner quelques réflexions dans les vestiaires de la BAC, du genre : La pêche  a été bonne, mais le poisson n’était pas assez gros… On se demande pour qui et pour quoi on se mouille ! Une préli, comme pour Bettencourt… Etc.

Non, non, Jérôme n’a pas été inquiété non plus. L’administration ne lui a pas cherché des noises pour avoir pris le risque de faire rouiller ses menottes ou pour avoir plongé dans un endroit interdit à la baignade. Au contraire, il a été chaudement félicité par ses amis et par sa patronne.

Et comme après dix ans de voie publique en région parisienne, il aspire à une vie un peu plus… familiale, je suis sûr que celle-ci va appuyer sa demande de mutation dans un commissariat d’une ville de province.

coup-de-chapeau_site_e-memoirecom.1280049552.jpgLa course-poursuite, sirène hurlante, gyrophare rageur, c’est le petit coup d’adrénaline que chacun rêve de s’offrir. Même si cela pose question. Mais pour courir derrière un fuyard à la force du mollet, il y a déjà moins de volontaires. Quant à se transformer en triathlonien… Je ne l’avais jamais vu.

Chapeau, M’sieur Jérôme !

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Bettencourt : Les écoutes peuvent-elles servir de preuve ? a été lu  1.902 fois et a suscité 24 commentaires.
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